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De quoi le gouvernement Sellal est-il le nom?

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  • De quoi le gouvernement Sellal est-il le nom?

    Publié par Saoudi Abdelaziz
    UGTA et les organisations patronales, Ramdane Mohand Achour souligne dans Libre-Algérie la déception des "tenants de l'ultralibéralisme" : ceux de l'opposition "fulminent "; tandis que les ultralibéraux du pouvoir, éprouveraient une " frustration immense". Ce constat établi, l'auteur de l'article analyse les fondements de "l'incohérence" du gouvernement et son incapacité à proposer une "alternative". Derrière le rideau de la tripartite
    Une analyse de Ramdane Mohand Achour, 7 juin 2016. Libre-Algérie
    A l’issue des travaux de la 19ème tripartite gouvernement-UGTA-patronat, les ultralibéraux de l’opposition fulminent. Ils n’ont pas de mots assez durs pour fustiger le « gradualisme », « l’attentisme », le « minimalisme » du gouvernement qui se refuse encore à saborder brutalement le « contrat social » algérien alors que « le feu est dans la maison ». On imagine la déception aussi profonde chez les ultralibéraux du pouvoir, tenus, eux, à une obligation de réserve. Ils comptaient tant apporter la preuve que la tactique de soutien au régime s’avérait plus payante qu’une opposition jugée par eux « stérile ». Leur frustration doit être immense.
    Tout ce beau monde est déçu.
    Les plus optimistes espéraient que le nouveau « modèle économique » annoncé il y a quelques mois par Abdelmalek Sellal déboucherait sur le démantèlement du système de subventions des prix (gaz et électricité, pain, sucre...), le retour à une politique de privatisation brutale des entreprises publiques, l’ouverture généralisée à la concurrence, une surenchère en matière de levée des entraves aux investissements directs étrangers (IDE), une politique de remise en cause des acquis sociaux plus agressive, un retour à l’endettement extérieur...
    Les plus sceptiques ou lucides annonçaient même, en lot de consolation, que les salariés algériens travailleraient plus longtemps grâce au passage, annoncé prématurément par le patron du Forum des chefs d’entreprises (FCE), de l’âge de la retraite de 60 à 65 ans. Or, la tripartite a débouché sur la suppression prochaine du seul système de retraite anticipée. Instaurée au cours des années 1990, plan d’ajustement structurel (PAS) oblige, l’ordonnance 97-13 n’était pas un cadeau fait aux travailleurs. Elle visait à faciliter les compressions d’effectifs, les « dégraissages » dans le langage libéral, accompagnant les dissolutions, restructurations et autres privatisations d’entreprises publiques.
    Abdelmalek Sellal n’a pas répondu aux attentes des ultralibéraux : «Depuis son indépendance, a-t-il déclaré, l’Algérie a bâti un modèle politique et social auquel elle tient et ne veut sous aucun prétexte y renoncer. Les Algériens veulent que leur Etat demeure souverain dans ses décisions et solidaire des plus faibles d’entre eux... »
    La raison ultralibérale
    Pourquoi l’Exécutif poursuit-il dans cette voie alors que les réserves financières du pays fondent comme neige au soleil et que les déficits budgétaires s’accumulent ? Pourquoi ignore-t-il superbement les conseils « avisés et désintéressés » des ultralibéraux ? Est-ce par autisme politique ? En partie, mais pas seulement. Est-ce par volonté de maintenir une certaine forme de « cohésion sociale » ou, à tout le moins, de « paix sociale » ? Sans aucun doute. Tout cela est vrai mais insuffisant.
    Derrière la controverse conjoncturelle sur les résultats de la tripartite se cachent des intérêts différents.
    La démarche ultralibérale qui pousse l’Algérie à s’intégrer toujours davantage à une économie mondiale capitaliste pourtant en crise constitue un triple danger. Un danger pour le peuple algérien menacé d’être totalement dépossédé de tout ce qui lui appartient formellement par le biais de la propriété publique : terres, richesses minières, eaux, réserves financières, entreprises et infrastructures publiques, système de protection sociale...
    Possession collective arrachée de haute lutte durant la guerre de libération nationale et étendue, durant les deux premières décennies de l’indépendance, par une politique d’affrontement non armé mais violent et parfois mortel au néocolonialisme (crise des hydrocarbures de 1971, crise de l’émigration de 1973...). Se laisser déposséder reviendrait, pour le peuple algérien, à subir une paupérisation généralisée qui le ramènerait au statut social de la périodecoloniale.
    Danger pour la souveraineté nationale acquise par les armes, mais dont la reproduction implique le renforcement permanent d’une base matérielle solide et autocentrée qui refuse la logique économique de la globalisation dont ne profitent exclusivement que les pays du G7. Danger enfin pour l’Etat algérien dans une conjoncture internationale et régionale particulièrement explosive et pleine d’incertitudes.
    L’ultralibéralisme exprime ainsi les intérêts d’une bourgeoisie compradore qui s’est considérablement développée depuis les vingt dernières années grâce, notamment, au commerce, à l’importation, à la spéculation immobilière, aux pots-de-vin et, plus généralement, à son rôle d’intermédiaire au profit des multinationales et de la finance internationale. Une bourgeoisie ou, plus exactement, une fraction de la bourgeoisie dont les intérêts sont antinationaux.
    Contradictions et limites de la logique gouvernementale
    Le gouvernement refuse jusqu’à aujourd’hui d’opter définitivement pour la potion ultralibérale. N’étant pas le simple conseil d’administration d’une entreprise, il doit nécessairement veiller à gérer l’affrontement des intérêts contradictoires qui composent la société pour éviter qu’il ne dégénère. Telle est sa fonction politique.
    Mais le sens de la responsabilité politique n’explique pas à lui seul la démarche gouvernementale. Pour comprendre cette dernière, il convient de cerner les intérêts qu’elle représente objectivement, c’est-à-dire indépendamment de ce que pensent ou disent nos gouvernants. Il s’avère intéressant, de ce point de vue, d’écouter l’opinion des ultralibéraux de l’opposition qui ne font pas, eux, dans l’autocensure. Que disent-ils ? Ils développent le syllogisme suivant : l’économie de marché (capitaliste) donne à la bourgeoisie (les possédants) le pouvoir économique. Or, la classe qui détient le pouvoir économique doit détenir le pouvoir politique. La bourgeoisie algérienne qui détient le pouvoir économique doit en conséquence détenir le pouvoir politique.
    Chacun est libre de partager, ou pas, cet axiome relevant de la logique formelle. Mais le plus intéressant est qu’il révèle qu’en Algérie, aujourd’hui, ce n’est pas la bourgeoisie qui gouverne. Pour des considérations historiques sur lesquelles il n’est pas possible de revenir dans le cadre de cet article, c’est la petite bourgeoisie qui tient les appareils d’Etat. Voilà pourquoi, partie à la conquête du pouvoir, notre bourgeoisie mène une guerre de position pour s’approprier des espaces au sein des partis de gouvernement (FLN, RND...), des institutions de l’Etat (APN, Sénat, gouvernement...) et des médias privés mais aussi publics où elle déverse quotidiennement et à fort débit son crédo ultralibéral.
    La hargne vindicative des ultralibéraux de l’opposition à l’égard du gouvernement exprime ainsi leur volonté de déloger la petite bourgeoisie des appareils d’Etat afin que la bourgeoisie accède enfin au pouvoir politique. La corruption sert aussi à cela.
    Le gouvernement résiste donc aux tenants de l’ultralibéralisme. Mais le problème réside dans le fait qu’il est lui-même libéral. Il n’a donc pas de véritable alternative à opposer aux ultralibéraux dont nombre d’entre eux siègent ou ont siégé en son sein (Temmar, Khelil, Benkhalfa, Bouchouareb...). Aussi ne fait-il que retarder les échéances, appliquant à reculons, à petites doses et en fonction des circonstances et des pressions internes et externes des mesures préconisées par les ultralibéraux. D’où l’impression permanente d’incohérence, d’avancées suivies de reculs, que le régime donne depuis 35 années maintenant.
    Le second problème du gouvernement réside dans le fait qu’il est orphelin d’une bourgeoisie nationale. Si la fraction compradore existe et s’est renforcée à la faveur des vingt dernières années, l’embryon de fraction nationale de la bourgeoisie en voie de constitution durant la période 1962-1980 a été, elle, éradiquée. Refusant de s’appuyer sur les couches populaires dont il a systématiquement cassé, marginalisé ou récupéré les organisations sociales et politiques, le gouvernement ne peut fonder sa politique sur une force sociale solide. De ce fait et à terme, il ne peut être que perdant
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