Un scoop! L’élection de Miss Algérie dans un grand hôtel algérois. A savoir que dans l’Algérie de 2014, plus que jamais le peuple est «accompagné» dans ce qu’il y a de plus stérile en termes d’intelligence de créativité. Ainsi, rituellement comme au temps de l’Empire romain décadent on distrait la plèbe, la canaille, les «sans-dents» dirait le président Hollande avec du pain et des jeux de cirque: «Panem et circenses»; on flatte toutes les pulsions débilisantes avec les émissions de type «star’ac» encore un autre mimétisme, avec des chanteurs payés à prix d’or sans compter naturellement l’opium du peuple qui nous coûte les yeux de la tête, le football et le marécage de sa gestion avec en prime un comportement de hooligan dans les stades.
Le scoop en question ne vient pas uniquement de notre impuissance à aller vers l’intelligence, la créativité, il vient de la cérémonie qui a permis à une dame du showbiz français de venir donner sa bénédiction à des indigènes qui n’ont pas encore déprogrammé le logiciel de la soumission intellectuelle et de la colonisation mentale. Bref, cette honorable dame invitée avec tous les honneurs s’est permis – nostalgérie aidant – de faire une allusion malheureuse à l’Algérie française. «… Ces jeunes filles qui représentent justement cette belle nation qui est… L’Algérie française. «En voulant se rattraper, elle aggrave encore plus son cas:
«… L’Algérie est française en même temps (…) il n’y a que la Méditerranée qui nous sépare». Les protestations sont immédiates dans la salle mais elle poursuit: «L’Algérie est comme la Guadeloupe et la Martinique»
Que n’a-t-elle dit, les foudres de l’enfer se sont abattues sur elles! chacun se défaussant sur l’autre. En fait la faute, n’est pas dans ce qu’elle a dit, mais ce que nous faisons de l’imaginaire de nos jeunes pour les amener à ce degré de décrépitude morale pour faire d’un voyeurisme au nom de la modernité que l’on nous assène, qui consiste non pas à montrer ce que nous savons faire dans des joutes scientifiques culturelles, mais à aller vers le culte du corps et non celui de l’esprit. La faute ne vient pas des organisateurs, mais de l’état d’esprit qui fait le manque de cap culturel, le désarmement moral, le laisser-aller sans stratégie d’ensemble fait que chacun se croit autorisé à faire ce que bon lui semble, à être dans l’air du temps, alors que le pays risque de s’effriter identitairement et est en passe de rater le train du progrès.
Maryam Mirzakhani, première femme à décrocher la médaille Fields
Avec une lucidité que je découvre, Aissa Hirèche fait avec humour, mais le fait avec une rage contenue, le procès de cette déchéance et ce désarmement culturel: «A force de regarder écrit-il, les concours des miss, ailleurs, les nôtres ont d’abord cru que c’est une obligation que d’en avoir chez nous. Ensuite, ils sont convaincus qu’ils s’agit là d’un des moyens les plus sûrs pour arriver rapidement au développement économique et social du pays. Alors ils ont foncé.(…) On fait appel à quelqu’un de célèbre et on lui donne l’image du pays entre les mains. On l’a déjà fait avec Maradona, vous souvenez-vous? C’était pour lancer la 3G.
Ah, la fameuse 3G! Or, qui pourrait rehausser le concours national de Miss Algérie 2014, ce concours sans lequel nos universités resteraient les dernières au monde et nos hôpitaux continueront à être des mouroirs? (…) (..) Nous sommes classés derniers partout, dans tous les domaines et, au lieu d’organiser des concours du meilleur innovateur, de la meilleure entreprise, et toutes ces choses qui font motiver les gens au travail, tout heureux, nous organisons des concours de miss que nous veillons bien, ensuite, à gâcher.(1)
L’heureuse «élue» étudiante en informatique compte représenter dignement le charme, la beauté, la culture et les «valeurs de la femme algérienne» Quelles sont les «valeurs» qui pourraient nous permettre de conquérir le monde? Ne sont-elles pas celles de la science, de l’effort, de la sueur, du travail bien fait? Nous allons en parler en citant un exemple à suivre.
Pendant que les Algériens s’occupent de se divertir, le monde avance et heureusement il existe encore des personnes qui sont des exemples à suivre. Justement pour parler d’informatique et plus généralement de mathématiques, une information passée inaperçue, celle de l’octroi de la médaille Fields équivalent du prix Nobel de mathématiques, en août 2014 pour la première fois à une femme, une musulmane de 37 ans! Maryam Mirzakhani.
Nous lisons son parcours: «Pur produit du système éducatif iranien, Maryam Mirzakhani, est la première femme à recevoir ce prix, créé en 1936. Déjà à 21 ans, la jeune prodige s’était distinguée comme une scientifique prometteuse. En 1994, elle est la première fille iranienne médaillée d’or aux Olympiades internationales de mathématiques (IMO) qui permettent aux lycéens du monde entier de se mesurer à travers une série de problèmes de haut niveau.
L’année suivante, elle obtient la note parfaite: 42 sur 42, et finit numéro un mondial. A l’époque, les responsables du ministère de l’Education constatent un manque d’intérêt croissant des élèves pour les maths et estiment que l’organisation de concours au niveau national pourrait remotiver les élèves. Cependant, l’aspect idéologique n’est pas à négliger, la République islamique souhaite montrer ses capacités scientifiques à l’échelle internationale. Le travail intense de sélection et de préparation ainsi que le talent indéniable des élèves iraniens finiront par payer. En 1998, l’Iran termine premier aux Olympiades devant les Etats-Unis.(2)
En Iran: un système éducatif élitiste
Maryam Mirzakhani fut élève au lycée Farzanegan de Téhéran, qui dépend de l’Organisation pour le développement des talents brillants, dont le but est de repérer les élèves surdoués ou en tout cas les meilleurs, à travers des concours nationaux, au collège et au lycée. Les lauréats font alors leurs études dans des établissements spécifiques avec un programme beaucoup plus poussé que dans la filière classique. (….) Contrairement aux idées reçues, en Iran, les femmes sont bien plus présentes que les hommes à l’université. (…) Par ailleurs, en Iran, l’enseignement secondaire a été libéralisé à outrance, les établissements publics ont aujourd’hui un niveau très médiocre comparé à ceux du secteur privé qui coûtent très cher. Et la concurrence est rude entre les écoles privées qui vantent leur nombre d’admis aux concours d’entrée aux universités, un concours ultra sélectif. Pour étudier à l’université Sharif de Téhéran, il faut ainsi finir parmi les cent premiers sur environ un million de participants.
Le système éducatif iranien est donc devenu au fil du temps ultra élitiste, basé sur une compétition incessante organisée depuis le collège et jusqu’à l’université. Selon le quotidien Shargh, 76% des Iraniens médaillés dans les olympiades internationales en mathématiques, entre 1993 et 2013, se trouvent actuellement dans les plus grandes universités américaines (…) Après avoir passé les premières années universitaires à Sharif, elle choisit de partir pour obtenir un doctorat à Harvard, avant de traverser les Etats-Unis pour enseigner à Stanford, en Californie.» (2)
Il a fallu attendre 78 ans avant que la médaille Fields ne soit décernée à une femme. L’annonce a été faite lors du Congrès international des mathématiques qui s’est tenu à Séoul, en Corée du Sud. «C’est un grand honneur. Je serais contente si cela encourage de jeunes scientifiques et mathématiciennes, a écrit la lauréate sur le site de Stanford. Je suis sûre qu’il y aura de nombreuses autres femmes qui remporteront ce genre de récompenses dans les années à venir.» «Je crois que beaucoup d’étudiants n’accordent pas assez de chance aux mathématiques. J’ai été mauvaise en maths pendant quelques années à l’école. Je peux comprendre que sans l’excitation, les mathématiques peuvent sembler inutiles et froids. Leur beauté ne se dévoile qu’à leurs disciples les plus patients.» (3)
Mercredi 13 août, le président iranien, Hassan Rohani, a posté un tweet félicitant Maryam Mirzakhani, lauréate de la médaille Fields de mathématiques: «Félicitations» à celle qui «devient la première femme à remporter la médaille Fields et rend les Iraniens très fiers», écrit le dirigeant de la République islamique sur son fil Twitter, Hassan Rohani prend le soin d’accompagner son témoignage de soutien de deux photos de la scientifique: l’une d’elle sans voile, l’autre avec un voile. Quelques minutes après le tweet du président félicitant Maryam Mirzakhani, Hamid Farajollahi, estimait que Hassan Rohani avait «brisé un tabou qui dure depuis des décennies» en Iran.
La suite...
Le scoop en question ne vient pas uniquement de notre impuissance à aller vers l’intelligence, la créativité, il vient de la cérémonie qui a permis à une dame du showbiz français de venir donner sa bénédiction à des indigènes qui n’ont pas encore déprogrammé le logiciel de la soumission intellectuelle et de la colonisation mentale. Bref, cette honorable dame invitée avec tous les honneurs s’est permis – nostalgérie aidant – de faire une allusion malheureuse à l’Algérie française. «… Ces jeunes filles qui représentent justement cette belle nation qui est… L’Algérie française. «En voulant se rattraper, elle aggrave encore plus son cas:
«… L’Algérie est française en même temps (…) il n’y a que la Méditerranée qui nous sépare». Les protestations sont immédiates dans la salle mais elle poursuit: «L’Algérie est comme la Guadeloupe et la Martinique»
Que n’a-t-elle dit, les foudres de l’enfer se sont abattues sur elles! chacun se défaussant sur l’autre. En fait la faute, n’est pas dans ce qu’elle a dit, mais ce que nous faisons de l’imaginaire de nos jeunes pour les amener à ce degré de décrépitude morale pour faire d’un voyeurisme au nom de la modernité que l’on nous assène, qui consiste non pas à montrer ce que nous savons faire dans des joutes scientifiques culturelles, mais à aller vers le culte du corps et non celui de l’esprit. La faute ne vient pas des organisateurs, mais de l’état d’esprit qui fait le manque de cap culturel, le désarmement moral, le laisser-aller sans stratégie d’ensemble fait que chacun se croit autorisé à faire ce que bon lui semble, à être dans l’air du temps, alors que le pays risque de s’effriter identitairement et est en passe de rater le train du progrès.
Maryam Mirzakhani, première femme à décrocher la médaille Fields
Avec une lucidité que je découvre, Aissa Hirèche fait avec humour, mais le fait avec une rage contenue, le procès de cette déchéance et ce désarmement culturel: «A force de regarder écrit-il, les concours des miss, ailleurs, les nôtres ont d’abord cru que c’est une obligation que d’en avoir chez nous. Ensuite, ils sont convaincus qu’ils s’agit là d’un des moyens les plus sûrs pour arriver rapidement au développement économique et social du pays. Alors ils ont foncé.(…) On fait appel à quelqu’un de célèbre et on lui donne l’image du pays entre les mains. On l’a déjà fait avec Maradona, vous souvenez-vous? C’était pour lancer la 3G.
Ah, la fameuse 3G! Or, qui pourrait rehausser le concours national de Miss Algérie 2014, ce concours sans lequel nos universités resteraient les dernières au monde et nos hôpitaux continueront à être des mouroirs? (…) (..) Nous sommes classés derniers partout, dans tous les domaines et, au lieu d’organiser des concours du meilleur innovateur, de la meilleure entreprise, et toutes ces choses qui font motiver les gens au travail, tout heureux, nous organisons des concours de miss que nous veillons bien, ensuite, à gâcher.(1)
L’heureuse «élue» étudiante en informatique compte représenter dignement le charme, la beauté, la culture et les «valeurs de la femme algérienne» Quelles sont les «valeurs» qui pourraient nous permettre de conquérir le monde? Ne sont-elles pas celles de la science, de l’effort, de la sueur, du travail bien fait? Nous allons en parler en citant un exemple à suivre.
Pendant que les Algériens s’occupent de se divertir, le monde avance et heureusement il existe encore des personnes qui sont des exemples à suivre. Justement pour parler d’informatique et plus généralement de mathématiques, une information passée inaperçue, celle de l’octroi de la médaille Fields équivalent du prix Nobel de mathématiques, en août 2014 pour la première fois à une femme, une musulmane de 37 ans! Maryam Mirzakhani.
Nous lisons son parcours: «Pur produit du système éducatif iranien, Maryam Mirzakhani, est la première femme à recevoir ce prix, créé en 1936. Déjà à 21 ans, la jeune prodige s’était distinguée comme une scientifique prometteuse. En 1994, elle est la première fille iranienne médaillée d’or aux Olympiades internationales de mathématiques (IMO) qui permettent aux lycéens du monde entier de se mesurer à travers une série de problèmes de haut niveau.
L’année suivante, elle obtient la note parfaite: 42 sur 42, et finit numéro un mondial. A l’époque, les responsables du ministère de l’Education constatent un manque d’intérêt croissant des élèves pour les maths et estiment que l’organisation de concours au niveau national pourrait remotiver les élèves. Cependant, l’aspect idéologique n’est pas à négliger, la République islamique souhaite montrer ses capacités scientifiques à l’échelle internationale. Le travail intense de sélection et de préparation ainsi que le talent indéniable des élèves iraniens finiront par payer. En 1998, l’Iran termine premier aux Olympiades devant les Etats-Unis.(2)
En Iran: un système éducatif élitiste
Maryam Mirzakhani fut élève au lycée Farzanegan de Téhéran, qui dépend de l’Organisation pour le développement des talents brillants, dont le but est de repérer les élèves surdoués ou en tout cas les meilleurs, à travers des concours nationaux, au collège et au lycée. Les lauréats font alors leurs études dans des établissements spécifiques avec un programme beaucoup plus poussé que dans la filière classique. (….) Contrairement aux idées reçues, en Iran, les femmes sont bien plus présentes que les hommes à l’université. (…) Par ailleurs, en Iran, l’enseignement secondaire a été libéralisé à outrance, les établissements publics ont aujourd’hui un niveau très médiocre comparé à ceux du secteur privé qui coûtent très cher. Et la concurrence est rude entre les écoles privées qui vantent leur nombre d’admis aux concours d’entrée aux universités, un concours ultra sélectif. Pour étudier à l’université Sharif de Téhéran, il faut ainsi finir parmi les cent premiers sur environ un million de participants.
Le système éducatif iranien est donc devenu au fil du temps ultra élitiste, basé sur une compétition incessante organisée depuis le collège et jusqu’à l’université. Selon le quotidien Shargh, 76% des Iraniens médaillés dans les olympiades internationales en mathématiques, entre 1993 et 2013, se trouvent actuellement dans les plus grandes universités américaines (…) Après avoir passé les premières années universitaires à Sharif, elle choisit de partir pour obtenir un doctorat à Harvard, avant de traverser les Etats-Unis pour enseigner à Stanford, en Californie.» (2)
Il a fallu attendre 78 ans avant que la médaille Fields ne soit décernée à une femme. L’annonce a été faite lors du Congrès international des mathématiques qui s’est tenu à Séoul, en Corée du Sud. «C’est un grand honneur. Je serais contente si cela encourage de jeunes scientifiques et mathématiciennes, a écrit la lauréate sur le site de Stanford. Je suis sûre qu’il y aura de nombreuses autres femmes qui remporteront ce genre de récompenses dans les années à venir.» «Je crois que beaucoup d’étudiants n’accordent pas assez de chance aux mathématiques. J’ai été mauvaise en maths pendant quelques années à l’école. Je peux comprendre que sans l’excitation, les mathématiques peuvent sembler inutiles et froids. Leur beauté ne se dévoile qu’à leurs disciples les plus patients.» (3)
Mercredi 13 août, le président iranien, Hassan Rohani, a posté un tweet félicitant Maryam Mirzakhani, lauréate de la médaille Fields de mathématiques: «Félicitations» à celle qui «devient la première femme à remporter la médaille Fields et rend les Iraniens très fiers», écrit le dirigeant de la République islamique sur son fil Twitter, Hassan Rohani prend le soin d’accompagner son témoignage de soutien de deux photos de la scientifique: l’une d’elle sans voile, l’autre avec un voile. Quelques minutes après le tweet du président félicitant Maryam Mirzakhani, Hamid Farajollahi, estimait que Hassan Rohani avait «brisé un tabou qui dure depuis des décennies» en Iran.
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