‘‘M. BOUTEFLIKA A ORGANISÉ, DURANT 17 ANS, UN POUVOIR ORGIAQUE. IL A BRÛLÉ, DILAPIDÉ, SACCAGÉ TOUT SUR SON PASSAGE’’
Quel bilan faites – vous du règne de Bouteflika ?
Soufiane Djilali : Un drame pour le pays. Je sais que beaucoup pensent que j’exagère, que je ne vois que les aspects négatifs et que je ne veux pas reconnaitre ses « réalisations ». Immédiatement, on nous fait ressortir l’autoroute Est-Ouest, le transfert des eaux d’In Salah vers Tamanrasset, les programmes de logements ou le nombre d’universités construites. Mais faisons un vrai bilan de 17 ans de règne. D’abord concernant la consolidation de la nation et de l’Etat. L’Algérie est un jeune pays et ces questions ne sont pas anodines. Or, tout le monde voit avec effarement le démontage de l’Etat et les discordes pernicieuses introduites dans le corps de la nation. Le régionalisme outrancier, le clientélisme, le népotisme et surtout la corruption ont été les leviers de commande du pouvoir. Toutes les vertus possibles du peuple ont été soigneusement répertoriées pour ensuite être démantelées une à une. C’est un travail diabolique qui a été mené. Aujourd’hui, vous êtes un voyou, vous réussissez à grimper dans les hautes sphères, vous êtes un homme de bien, alors vous étouffez sous une chape de plomb. Bouteflika a organisé, durant 17 ans, un pouvoir orgiaque. Il a brûlé, dilapidé, saccagé tout sur son passage. Son fabuleux narcissisme a privé le pays d’oxygène. A sa décharge, il a fait tout cela en connivence avec une bonne partie des Algériens. Après la cruelle épreuve du terrorisme des années 90, les Algériens voulaient oublier leurs malheurs. Ils se sont alors enivrés par la surconsommation, le « je-m’en-foutisme » et une forme de débauche généralisée. Chakib Khellil and co ont été les maîtres de céans de ces séances d’orgie. Ils avaient sous la main le pétrole et Sonatrach. Ils ont alors frappé le cœur de la nation : la morale publique. Quant au reste, c’était de la poudre aux yeux. L’autoroute est probablement la plus chère au monde au kilomètre et celle qui recèle le plus de malfaçons. Elle est sans cesse remise en chantier. Tout le monde sait qu’elle a été un gouffre financier. Des noms ont été cités dans ce scandale mais bien sûr, à part quelques boucs émissaires, les responsables de ce désastre se la coulent douce. Dans le secteur de l’énergie les dérapages ne sont pas moindres. Les centrales électriques ont été largement surfacturées. Et à chaque fois, ce sont des surcoûts en milliards de dollars ! Aujourd’hui, Sonelgaz est à genoux et c’est au citoyen maintenant de combler les déficits. Des constructions inutiles à l’image du centre des expositions d’Oran ou celui en cours de finition du club des pins sont des pertes sèches qui s’élèvent là aussi en milliard de dollars. Pour finir, la grande mosquée d’Alger est une insulte à l’intelligence et à la foi. L’Algérie est gérée par des « affamés génétiques ». Ils nagent dans la soupe. Ils ont oublié qu’il y avait un peuple qui avait consenti 1,5 million de martyres, et qui aurait dû construire un pays puissant, fier et moderne. Leur égo débordant et leur cupidité sans limite ont été les plus forts.
‘‘JE N’AIME PAS L’ALGÉRIE TELLE QU’ELLE EST. JE VEUX, AVEC BEAUCOUP D’AUTRES DE MES CONCITOYENS, AGIR POUR LA CHANGER ET LA METTRE AU DIAPASON DE LA MODERNITÉ BIEN COMPRISE’’
2. Qu’est-ce qui vous a fait décider à créer votre propre parti ?
Soufiane Djilali : Jil Jadid, qui signifie « nouvelle génération », est l’expression de mon refus de cette Algérie aliénée. Dès la tentative d’ouverture politique après Octobre 1988, je m’étais engagé dans la vie politique. J’étais à cette époque chercheur en immunologie à l’étranger. J’ai préféré retourner au pays lorsque beaucoup commençaient à le fuir. Au bout d’une dizaine d’années de responsabilité au sein d’un parti politique, j’en ai démissionné en 1999. J’ai toujours été dans l’opposition. Le régime m’empêcha de fonder, avec d’autres hommes politiques, un nouveau parti (El Badil) en 2000 et refusa d’autoriser l’association que je voulais lancer (MLD, Mouvement pour les Libertés et le Développement) en 1999. J’ai dû me contenter d’écrire dans les journaux lorsque ceux-ci me le permettaient. C’est en décembre 2010 que j’ai vu venir le mouvement du « printemps arabe ». En Janvier 2011, j’ai pris la décision de lancer le parti. Le temps de contacter les futurs membres fondateurs et le 11 mars 2011 nous avions organisé notre réunion constitutive. Le 13 avril 2011, nous avions rendu public l’initiative. Enfin, le 03 mars 2012 nous avions tenu le Congrès fondateur. Durant tout ce temps, mon fil conducteur était le suivant : je n’aime pas l’Algérie telle qu’elle est. Je veux, avec beaucoup d’autres de mes concitoyens, agir pour la changer et la mettre au diapason de la modernité bien comprise.
‘‘HEUREUSEMENT QU’IL RESTE DES JEUNES, HOMMES ET FEMMES, DE LA NOUVELLE GÉNÉRATION, ILS SONT TRÈS CONSCIENTS DES ENJEUX ET VEULENT UN VRAI CHANGEMENT’’
3. Pourquoi à votre avis les jeunes ne s’engagent pas en politique en nombre suffisant, et quand ils osent, ils sont vite récupérés par le régime ?
Soufiane Djilali : Il y a plusieurs explications à cela. Vous avez une société paternaliste qui n’aime pas le changement sauf en situation extrême et qui conditionne le peuple à la soumission. Le pouvoir en a profité en complicité avec toute une frange conservatrice qui a utilisé la tradition pour favoriser l’immobilisme. Un pouvoir centralisateur, manipulateur et anti-démocratique ne pouvait que faire éloigner toutes les bonnes volontés pour militer. Enfin, une rupture profonde de mentalité est en cours entre la génération de « novembre » et les suivantes. La première s’accrochant pathologiquement au pouvoir a obstrué toutes les voies d’accès aux commandes et démoralisé les compétences. Alors, les jeunes les plus sains s’éloignent de la politique. D’autres sont happés par le magnétisme du clientélisme. Il m’arrive de croiser ce genre de jeunes, déjà formatés par le système, et dont le modèle est : docile, redevable et servile ! Heureusement qu’il reste des jeunes, hommes et femmes, de la nouvelle génération, ils sont très conscients des enjeux et veulent un vrai changement. Ils sont encore trop peu, mais au fur et à mesure, ils s’imposeront.
Quelle est la position de votre parti vis-à-vis des grandes questions du pays ? La question des langues, la politique sociale et de l’emploi, la politique de l’enseignement et de la recherche scientifique, la justice, le statut de la femme, la politique économique et de santé, la politique étrangère et de sécurité, Le conflit sahraoui ?
Soufiane Djilali : Vaste question. En fait, nous avons déjà publié nos textes fondateurs : la déclaration de principe, un long préambule à notre projet de société pour clarifier l’assise intellectuelle de notre action ainsi qu’un programme gouvernemental à l’occasion de ma pré-candidature aux élections présidentielles de 2014. Par ailleurs, je projette de rendre public, probablement sous forme d’un essai et dès la prochaine rentrée, notre projet de société. Il devrait provoquer un débat sur notre société, sur ses atouts et ses points faibles ainsi que sur les perspectives de son évolution. Mais je veux bien répondre, bien que très succinctement, à votre question pour présenter à vos lecteurs les grands traits de notre programme. Concernant les langues, il faut très rapidement dépasser les crispations concernant Tamazight. Globalement c’est en voie de l’être. Par ailleurs il faut ouvrir rapidement le pays aux autres langues. Bien entendu, l’Anglais doit devenir accessible, surtout à l’élite intellectuelle, universitaire, économique et politique. Le Français, qui a plusieurs longueurs d’avance doit être entretenu. C’est une erreur fatale que de vouloir l’éradiquer. L’Arabe gagnera en qualité et en niveau si les Algériens pratiquaient, à côté d’elle, les autres langues universelles. Pour construire un Etat de droit, il est nécessaire d’avoir, par ailleurs, une justice digne de ce nom. Elle doit être libérée des injonctions de l’exécutif. Il faut introduire de vrais mécanismes constitutionnels pour lui donner sa vraie raison d’être. Il faut donc séparer la magistrature du pouvoir gouvernemental. Concernant le statut de la femme, c’est une question de justice. La femme a toujours été la victime expiatoire d’un système social obsolète et archaïque. J’aborderai très longuement cette question dans notre projet de société. Le statut de la femme est la pierre angulaire des structures de la société traditionnelle. La modernité, entrée par effraction dans notre société, a fait voler en éclat d’anciennes valeurs anthropologiques qui n’ont plus cours dans le monde contemporain. La crise identitaire et même sécuritaire que vit notre pays est due à ce basculement de la société traditionnelle vers la société moderne. La société est à proprement parlé, déchirée dans sa conscience par les bouleversements vécus. Le statut de la femme dans la société est l’indicateur le plus important et le plus fiable pour mesurer le niveau de progrès atteint. L’école, l’université et la recherche scientifique doivent préparer la société à être ouverte, éduquée, cultivée, créative et responsable. C’est par ce chemin que l’Algérie construira sa modernité. Concernant la politique économique, il faut libérer et encourager la liberté d’initiative mais protéger en même temps les entreprises de statut algérien. Pour moi, peu importe le détenteur du capital, l’essentiel est que l’entreprise travaille dans le cadre de la loi et les bénéfices soient locaux. Par contre, il faudra éviter de brader nos marchés internes aux importateurs. Il faut recentrer notre activité économique sur la production. Plusieurs secteurs, généralement liés à l’agriculture et aux services offrent des marges de manœuvres très confortables. Une bonne économie permettra une bonne protection sociale et un bon système de santé. L’essentiel est d’introduire un facteur de rationalité dans la gestion de nos richesses et dans la répartition de la plus-value et du pouvoir d’achat. Enfin, le conflit Sahraoui, la sécurité nationale ou la politique étrangère entrent en fait dans la même logique : quelle stratégie de sécurité nationale pour nous ? Comment nous insérer dans le jeu diplomatique mondial pour mieux défendre nos intérêts nationaux. Rien ne peut se concevoir de façon isolée. Notre sécurité interne et externe et notre diplomatie doivent être obligatoirement liées.
Quel bilan faites – vous du règne de Bouteflika ?
Soufiane Djilali : Un drame pour le pays. Je sais que beaucoup pensent que j’exagère, que je ne vois que les aspects négatifs et que je ne veux pas reconnaitre ses « réalisations ». Immédiatement, on nous fait ressortir l’autoroute Est-Ouest, le transfert des eaux d’In Salah vers Tamanrasset, les programmes de logements ou le nombre d’universités construites. Mais faisons un vrai bilan de 17 ans de règne. D’abord concernant la consolidation de la nation et de l’Etat. L’Algérie est un jeune pays et ces questions ne sont pas anodines. Or, tout le monde voit avec effarement le démontage de l’Etat et les discordes pernicieuses introduites dans le corps de la nation. Le régionalisme outrancier, le clientélisme, le népotisme et surtout la corruption ont été les leviers de commande du pouvoir. Toutes les vertus possibles du peuple ont été soigneusement répertoriées pour ensuite être démantelées une à une. C’est un travail diabolique qui a été mené. Aujourd’hui, vous êtes un voyou, vous réussissez à grimper dans les hautes sphères, vous êtes un homme de bien, alors vous étouffez sous une chape de plomb. Bouteflika a organisé, durant 17 ans, un pouvoir orgiaque. Il a brûlé, dilapidé, saccagé tout sur son passage. Son fabuleux narcissisme a privé le pays d’oxygène. A sa décharge, il a fait tout cela en connivence avec une bonne partie des Algériens. Après la cruelle épreuve du terrorisme des années 90, les Algériens voulaient oublier leurs malheurs. Ils se sont alors enivrés par la surconsommation, le « je-m’en-foutisme » et une forme de débauche généralisée. Chakib Khellil and co ont été les maîtres de céans de ces séances d’orgie. Ils avaient sous la main le pétrole et Sonatrach. Ils ont alors frappé le cœur de la nation : la morale publique. Quant au reste, c’était de la poudre aux yeux. L’autoroute est probablement la plus chère au monde au kilomètre et celle qui recèle le plus de malfaçons. Elle est sans cesse remise en chantier. Tout le monde sait qu’elle a été un gouffre financier. Des noms ont été cités dans ce scandale mais bien sûr, à part quelques boucs émissaires, les responsables de ce désastre se la coulent douce. Dans le secteur de l’énergie les dérapages ne sont pas moindres. Les centrales électriques ont été largement surfacturées. Et à chaque fois, ce sont des surcoûts en milliards de dollars ! Aujourd’hui, Sonelgaz est à genoux et c’est au citoyen maintenant de combler les déficits. Des constructions inutiles à l’image du centre des expositions d’Oran ou celui en cours de finition du club des pins sont des pertes sèches qui s’élèvent là aussi en milliard de dollars. Pour finir, la grande mosquée d’Alger est une insulte à l’intelligence et à la foi. L’Algérie est gérée par des « affamés génétiques ». Ils nagent dans la soupe. Ils ont oublié qu’il y avait un peuple qui avait consenti 1,5 million de martyres, et qui aurait dû construire un pays puissant, fier et moderne. Leur égo débordant et leur cupidité sans limite ont été les plus forts.
‘‘JE N’AIME PAS L’ALGÉRIE TELLE QU’ELLE EST. JE VEUX, AVEC BEAUCOUP D’AUTRES DE MES CONCITOYENS, AGIR POUR LA CHANGER ET LA METTRE AU DIAPASON DE LA MODERNITÉ BIEN COMPRISE’’
2. Qu’est-ce qui vous a fait décider à créer votre propre parti ?
Soufiane Djilali : Jil Jadid, qui signifie « nouvelle génération », est l’expression de mon refus de cette Algérie aliénée. Dès la tentative d’ouverture politique après Octobre 1988, je m’étais engagé dans la vie politique. J’étais à cette époque chercheur en immunologie à l’étranger. J’ai préféré retourner au pays lorsque beaucoup commençaient à le fuir. Au bout d’une dizaine d’années de responsabilité au sein d’un parti politique, j’en ai démissionné en 1999. J’ai toujours été dans l’opposition. Le régime m’empêcha de fonder, avec d’autres hommes politiques, un nouveau parti (El Badil) en 2000 et refusa d’autoriser l’association que je voulais lancer (MLD, Mouvement pour les Libertés et le Développement) en 1999. J’ai dû me contenter d’écrire dans les journaux lorsque ceux-ci me le permettaient. C’est en décembre 2010 que j’ai vu venir le mouvement du « printemps arabe ». En Janvier 2011, j’ai pris la décision de lancer le parti. Le temps de contacter les futurs membres fondateurs et le 11 mars 2011 nous avions organisé notre réunion constitutive. Le 13 avril 2011, nous avions rendu public l’initiative. Enfin, le 03 mars 2012 nous avions tenu le Congrès fondateur. Durant tout ce temps, mon fil conducteur était le suivant : je n’aime pas l’Algérie telle qu’elle est. Je veux, avec beaucoup d’autres de mes concitoyens, agir pour la changer et la mettre au diapason de la modernité bien comprise.
‘‘HEUREUSEMENT QU’IL RESTE DES JEUNES, HOMMES ET FEMMES, DE LA NOUVELLE GÉNÉRATION, ILS SONT TRÈS CONSCIENTS DES ENJEUX ET VEULENT UN VRAI CHANGEMENT’’
3. Pourquoi à votre avis les jeunes ne s’engagent pas en politique en nombre suffisant, et quand ils osent, ils sont vite récupérés par le régime ?
Soufiane Djilali : Il y a plusieurs explications à cela. Vous avez une société paternaliste qui n’aime pas le changement sauf en situation extrême et qui conditionne le peuple à la soumission. Le pouvoir en a profité en complicité avec toute une frange conservatrice qui a utilisé la tradition pour favoriser l’immobilisme. Un pouvoir centralisateur, manipulateur et anti-démocratique ne pouvait que faire éloigner toutes les bonnes volontés pour militer. Enfin, une rupture profonde de mentalité est en cours entre la génération de « novembre » et les suivantes. La première s’accrochant pathologiquement au pouvoir a obstrué toutes les voies d’accès aux commandes et démoralisé les compétences. Alors, les jeunes les plus sains s’éloignent de la politique. D’autres sont happés par le magnétisme du clientélisme. Il m’arrive de croiser ce genre de jeunes, déjà formatés par le système, et dont le modèle est : docile, redevable et servile ! Heureusement qu’il reste des jeunes, hommes et femmes, de la nouvelle génération, ils sont très conscients des enjeux et veulent un vrai changement. Ils sont encore trop peu, mais au fur et à mesure, ils s’imposeront.
Quelle est la position de votre parti vis-à-vis des grandes questions du pays ? La question des langues, la politique sociale et de l’emploi, la politique de l’enseignement et de la recherche scientifique, la justice, le statut de la femme, la politique économique et de santé, la politique étrangère et de sécurité, Le conflit sahraoui ?
Soufiane Djilali : Vaste question. En fait, nous avons déjà publié nos textes fondateurs : la déclaration de principe, un long préambule à notre projet de société pour clarifier l’assise intellectuelle de notre action ainsi qu’un programme gouvernemental à l’occasion de ma pré-candidature aux élections présidentielles de 2014. Par ailleurs, je projette de rendre public, probablement sous forme d’un essai et dès la prochaine rentrée, notre projet de société. Il devrait provoquer un débat sur notre société, sur ses atouts et ses points faibles ainsi que sur les perspectives de son évolution. Mais je veux bien répondre, bien que très succinctement, à votre question pour présenter à vos lecteurs les grands traits de notre programme. Concernant les langues, il faut très rapidement dépasser les crispations concernant Tamazight. Globalement c’est en voie de l’être. Par ailleurs il faut ouvrir rapidement le pays aux autres langues. Bien entendu, l’Anglais doit devenir accessible, surtout à l’élite intellectuelle, universitaire, économique et politique. Le Français, qui a plusieurs longueurs d’avance doit être entretenu. C’est une erreur fatale que de vouloir l’éradiquer. L’Arabe gagnera en qualité et en niveau si les Algériens pratiquaient, à côté d’elle, les autres langues universelles. Pour construire un Etat de droit, il est nécessaire d’avoir, par ailleurs, une justice digne de ce nom. Elle doit être libérée des injonctions de l’exécutif. Il faut introduire de vrais mécanismes constitutionnels pour lui donner sa vraie raison d’être. Il faut donc séparer la magistrature du pouvoir gouvernemental. Concernant le statut de la femme, c’est une question de justice. La femme a toujours été la victime expiatoire d’un système social obsolète et archaïque. J’aborderai très longuement cette question dans notre projet de société. Le statut de la femme est la pierre angulaire des structures de la société traditionnelle. La modernité, entrée par effraction dans notre société, a fait voler en éclat d’anciennes valeurs anthropologiques qui n’ont plus cours dans le monde contemporain. La crise identitaire et même sécuritaire que vit notre pays est due à ce basculement de la société traditionnelle vers la société moderne. La société est à proprement parlé, déchirée dans sa conscience par les bouleversements vécus. Le statut de la femme dans la société est l’indicateur le plus important et le plus fiable pour mesurer le niveau de progrès atteint. L’école, l’université et la recherche scientifique doivent préparer la société à être ouverte, éduquée, cultivée, créative et responsable. C’est par ce chemin que l’Algérie construira sa modernité. Concernant la politique économique, il faut libérer et encourager la liberté d’initiative mais protéger en même temps les entreprises de statut algérien. Pour moi, peu importe le détenteur du capital, l’essentiel est que l’entreprise travaille dans le cadre de la loi et les bénéfices soient locaux. Par contre, il faudra éviter de brader nos marchés internes aux importateurs. Il faut recentrer notre activité économique sur la production. Plusieurs secteurs, généralement liés à l’agriculture et aux services offrent des marges de manœuvres très confortables. Une bonne économie permettra une bonne protection sociale et un bon système de santé. L’essentiel est d’introduire un facteur de rationalité dans la gestion de nos richesses et dans la répartition de la plus-value et du pouvoir d’achat. Enfin, le conflit Sahraoui, la sécurité nationale ou la politique étrangère entrent en fait dans la même logique : quelle stratégie de sécurité nationale pour nous ? Comment nous insérer dans le jeu diplomatique mondial pour mieux défendre nos intérêts nationaux. Rien ne peut se concevoir de façon isolée. Notre sécurité interne et externe et notre diplomatie doivent être obligatoirement liées.
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