Par Pr Chems Eddine CHITOUR
«Il faut que tout change pour que tout redevienne comme avant» Tancrède dans Le Guépard, de Giuseppe Tomasi di Lampedusa
J'avais affirmé dans une précédente contribution que tout sera fait pour que le Royaume-Uni reste dans l'Union européenne. Mea culpa j'avais sous-estimé l'avis des peuples. J'aurai dû cependant ne pas oublier que l'Angleterre est dépositaire de la magna carta la Grande Charte des libertés d'Angleterre qui garantit le droit à la liberté individuelle et limite l'arbitraire royal et établit en droit l'habeas corpus qui empêche, entre autres, l'emprisonnement arbitraire. En effet, comme lu sur l'Encyclopédie Wikipédia chaque pays de common law qui possède une Constitution a subi l'influence de la Grande Charte, ce qui en fait peut-être le document juridique le plus important dans l'histoire de la démocratie moderne, mais il marque surtout le passage d'un État simple absolu, à celui d'un État de droit.
Autrement dit la démocratie a un sens car ce coup d'éclair a étonné beaucoup de monde qui avait misé sur un remain, même les bookmakers. Je suis d'autant plus satisfait de cela du fait, que s'agissant de l'Europe, plus rien ne sera jamais comme avant. S'il était facile de terrasser des peuples faibles comme la Grèce pourtant elle aussi berceau de la démocratie, il n'en est pas de même avec le Royaume-Uni. Trop c'est trop. Désormais, les peuples ont leur mot à dire. Nous allons analyser dans ce qui suit le long délitement des droits des peuples au fur et à mesure qu'ils sont dépossédés de leur souveraineté et de leurs prérogatives par la Commission de Bruxelles. Tout en espérant que par une manipulation ils ne soient pas en définitive dépossédés de leurs espérances suite à des ingérences extérieures.
Pourquoi l'Union européenne risque de disparaître?
Dans une contribution pertinente, mais déjà ancienne, plusieurs intellectuels, notamment de gauche avaient attiré l'attention contre cette politique suicidaire qui lamine les solidarités et précarise les travailleurs au nom de la productivité, de la flexibilité.
Corrine Corbin chercheuse en sciences politiques résume cela à l'occasion de la parution d'un numéro de Manière de Voir du Monde diplomatique qui fait le procès en règle de tous les travers de l'Union Européenne. C'était en 2013! et le texte n'a pas pris une ride! Nous lisons: «Si les peuples savaient... Le nouveau numéro de Manière de voir arrive à point nommé pour saisir les enjeux, les fractures et les espoirs que la crise porte à ébullition dans le grand chaudron de l'Union européenne. Impossible, pour qui se soucie de l'avenir de la démocratie ainsi que des droits politiques et sociaux fondamentaux, de ne pas s'informer encore et encore sur cette étonnante organisation, et sur les politiques défaillantes mises en oeuvre par ses dirigeants, afin de réfléchir à la parade.» (...) le numéro revient d'abord sur le processus, d'inspiration libérale, qu'a connu le projet européen de ses débuts à aujourd'hui: même si «en 1958, le ver ´´libéral´´ était déjà dans le fruit», d'autres histoires étaient possibles que celle marquée, en ce début du XXIe siècle, par l'obsession maniaco-destructrice acharnée contre les solidarités sociales.»(1)
«Dans la deuxième partie, intitulée ' Navigation à vue'', les flous, les contradictions et la pléthore de montages juridiques, la déception des nouveaux entrants et les atermoiements des futurs membres, la tentation des «grands» - comme aujourd'hui l'Allemagne - d'incarner le primus inter pares («premier parmi les pairs»), nous rappellent l'imprécision originelle du rêve communautaire: l'Europe correspond-elle à une géographie? La dernière partie met en miroir deux forces antagonistes: celle, méprisante pour l'intérêt des populations, représentée par une oligarchie nichée au coeur des réseaux financiers; celle, dispersée et mal organisée, des peuples en colère. Mais comment passer de la colère à l'action? Comment transformer un ordre politique dont les élites usent pour consolider ce qu'il faudrait changer et «réformer» ce qu'il faudrait renforcer? Quelques pistes stimulantes sont ébauchées».(1)
Dans une contribution remarquable l'intellectuel Serge Halimi du Monde diplomatique, avait fait le procès des travers d'une Europe de plus en plus éloignée des aspirations des peuples qui la composent au profit d'une oligarchie sans pitié pour les faibles. Nous lisons: «Un mouvement jeune et plein d'énergie entendait transformer une nation et réveiller le Vieux Continent. L'Eurogroupe et le Fonds monétaire international (FMI) ont écrasé cette espérance. Au-delà du choc que les événements grecs représentent pour certains des partisans du projet européen, trois enseignements s'en dégagent. D'abord, la nature de plus en plus autoritaire de l'Union à mesure que l'Allemagne y impose sans contrepoids ses volontés et ses obsessions. Ensuite, l'incapacité d'une communauté fondée sur une promesse de paix à tirer la moindre leçon de l'histoire, même récente, même violente.»(2)
«Au départ, ajoute l'auteur, l'intégration européenne a prodigué à ses citoyens les avantages matériels collatéraux de l'affrontement Est-Ouest. (...) Certains acteurs de la Guerre froide, comme l'Organisation du traité de l'Atlantique Nord (Otan), ont survécu à la chute du Mur en s'inventant d'autres monstres à détruire sur d'autres continents. (...) En janvier dernier[2015 ndr], quand Syriza remporte les élections, ce parti de gauche a raison sur (presque) toute la ligne. Raison de lier l'effondrement de l'économie grecque à la purge administrée depuis cinq ans au pays tantôt par les socialistes, tantôt par la droite. (.. Raison de rappeler qu'en démocratie la souveraineté appartient au peuple et que celui-ci s'en trouverait dépossédé si la même politique lui était imposée quoi qu'il décide. A quoi bon plaider son dossier devant un peloton d'exécution? (...) Hélas, on ne combat pas un char d'assaut avec des violettes et une sarbacane.» (2)
Prenant la défense d'une Grèce exsangue en face d'une troïka vautour et d'un ministre allemand de l'économie sans état d'âme, il poursuit: «Coupables de leur innocence, les dirigeants grecs ont pensé que les créanciers du pays seraient sensibles au choix démocratique du peuple grec, de sa jeunesse en particulier. Les élections législatives du 25 janvier dernier d'abord, le référendum du 5 juillet ensuite provoquèrent au contraire la stupéfaction outragée de Berlin et de ses alliés. Ils n'eurent plus qu'un but: châtier les rebelles et ceux que leur vaillance aurait pu inspirer.
La capitulation ne suffisant plus, elle devrait s'accompagner d'excuses (Athènes a admis que ses choix économiques avaient provoqué une rupture de confiance avec ses partenaires) doublées de réparations: des actifs publics privatisables d'une valeur égale au quart du produit national grec seront gagés pour le compte des créanciers. Grâce au soutien décidément inestimable de M.François Hollande, la Grèce a simplement obtenu que ces gages ne soient pas transférés au Luxembourg. Chacun se prétend soulagé: la Grèce paiera. (...) L'économiste britannique John Maynard Keynes avait compris d'emblée la vanité d'une telle politique d'humiliation et de prise de gages: si l'Allemagne, comme aujourd'hui la Grèce, ne payait pas, c'est qu'elle ne le pouvait pas». Toutefois, leur acharnement punitif a déjà obligé les pays de l'Eurogroupe à engager en juillet trois fois plus d'argent (86 milliards d'euros) qu'il n'aurait été nécessaire si la somme avait été débloquée cinq mois plus tôt, puisque, entre-temps, l'économie grecque s'est écroulée faute de liquidités.» (2)
«Poursuivant son plaidoyer, Serge Halimi nous explique la mécanique de la mise à mort de la Grèce: «Le 27 juin, lorsqu'il annonce son référendum, le Premier ministre Alexis Tsipras recourt d'ailleurs à des termes proches de ceux d'une déclaration de guerre. Il vilipende «une proposition [de l'Eurogroupe] en forme d'ultimatum adressé à la démocratie grecque». Et il accuse certains de ses «partenaires» d'avoir pour objectif d'«humilier tout un peuple». (...) Car l'inimitié ne concerne plus seulement Athènes et Berlin. «Nous ne voulons pas être une colonie allemande», insiste M.Pablo Iglesias, dirigeant de Podemos en Espagne. «Je dis à l'Allemagne: ça suffit! Humilier un partenaire européen est impensable», laisse échapper le président du Conseil italien Matteo Renzi, «Dans les pays méditerranéens, et dans une certaine mesure en France, observe le sociologue allemand Wolfgang
«Il faut que tout change pour que tout redevienne comme avant» Tancrède dans Le Guépard, de Giuseppe Tomasi di Lampedusa
J'avais affirmé dans une précédente contribution que tout sera fait pour que le Royaume-Uni reste dans l'Union européenne. Mea culpa j'avais sous-estimé l'avis des peuples. J'aurai dû cependant ne pas oublier que l'Angleterre est dépositaire de la magna carta la Grande Charte des libertés d'Angleterre qui garantit le droit à la liberté individuelle et limite l'arbitraire royal et établit en droit l'habeas corpus qui empêche, entre autres, l'emprisonnement arbitraire. En effet, comme lu sur l'Encyclopédie Wikipédia chaque pays de common law qui possède une Constitution a subi l'influence de la Grande Charte, ce qui en fait peut-être le document juridique le plus important dans l'histoire de la démocratie moderne, mais il marque surtout le passage d'un État simple absolu, à celui d'un État de droit.
Autrement dit la démocratie a un sens car ce coup d'éclair a étonné beaucoup de monde qui avait misé sur un remain, même les bookmakers. Je suis d'autant plus satisfait de cela du fait, que s'agissant de l'Europe, plus rien ne sera jamais comme avant. S'il était facile de terrasser des peuples faibles comme la Grèce pourtant elle aussi berceau de la démocratie, il n'en est pas de même avec le Royaume-Uni. Trop c'est trop. Désormais, les peuples ont leur mot à dire. Nous allons analyser dans ce qui suit le long délitement des droits des peuples au fur et à mesure qu'ils sont dépossédés de leur souveraineté et de leurs prérogatives par la Commission de Bruxelles. Tout en espérant que par une manipulation ils ne soient pas en définitive dépossédés de leurs espérances suite à des ingérences extérieures.
Pourquoi l'Union européenne risque de disparaître?
Dans une contribution pertinente, mais déjà ancienne, plusieurs intellectuels, notamment de gauche avaient attiré l'attention contre cette politique suicidaire qui lamine les solidarités et précarise les travailleurs au nom de la productivité, de la flexibilité.
Corrine Corbin chercheuse en sciences politiques résume cela à l'occasion de la parution d'un numéro de Manière de Voir du Monde diplomatique qui fait le procès en règle de tous les travers de l'Union Européenne. C'était en 2013! et le texte n'a pas pris une ride! Nous lisons: «Si les peuples savaient... Le nouveau numéro de Manière de voir arrive à point nommé pour saisir les enjeux, les fractures et les espoirs que la crise porte à ébullition dans le grand chaudron de l'Union européenne. Impossible, pour qui se soucie de l'avenir de la démocratie ainsi que des droits politiques et sociaux fondamentaux, de ne pas s'informer encore et encore sur cette étonnante organisation, et sur les politiques défaillantes mises en oeuvre par ses dirigeants, afin de réfléchir à la parade.» (...) le numéro revient d'abord sur le processus, d'inspiration libérale, qu'a connu le projet européen de ses débuts à aujourd'hui: même si «en 1958, le ver ´´libéral´´ était déjà dans le fruit», d'autres histoires étaient possibles que celle marquée, en ce début du XXIe siècle, par l'obsession maniaco-destructrice acharnée contre les solidarités sociales.»(1)
«Dans la deuxième partie, intitulée ' Navigation à vue'', les flous, les contradictions et la pléthore de montages juridiques, la déception des nouveaux entrants et les atermoiements des futurs membres, la tentation des «grands» - comme aujourd'hui l'Allemagne - d'incarner le primus inter pares («premier parmi les pairs»), nous rappellent l'imprécision originelle du rêve communautaire: l'Europe correspond-elle à une géographie? La dernière partie met en miroir deux forces antagonistes: celle, méprisante pour l'intérêt des populations, représentée par une oligarchie nichée au coeur des réseaux financiers; celle, dispersée et mal organisée, des peuples en colère. Mais comment passer de la colère à l'action? Comment transformer un ordre politique dont les élites usent pour consolider ce qu'il faudrait changer et «réformer» ce qu'il faudrait renforcer? Quelques pistes stimulantes sont ébauchées».(1)
Dans une contribution remarquable l'intellectuel Serge Halimi du Monde diplomatique, avait fait le procès des travers d'une Europe de plus en plus éloignée des aspirations des peuples qui la composent au profit d'une oligarchie sans pitié pour les faibles. Nous lisons: «Un mouvement jeune et plein d'énergie entendait transformer une nation et réveiller le Vieux Continent. L'Eurogroupe et le Fonds monétaire international (FMI) ont écrasé cette espérance. Au-delà du choc que les événements grecs représentent pour certains des partisans du projet européen, trois enseignements s'en dégagent. D'abord, la nature de plus en plus autoritaire de l'Union à mesure que l'Allemagne y impose sans contrepoids ses volontés et ses obsessions. Ensuite, l'incapacité d'une communauté fondée sur une promesse de paix à tirer la moindre leçon de l'histoire, même récente, même violente.»(2)
«Au départ, ajoute l'auteur, l'intégration européenne a prodigué à ses citoyens les avantages matériels collatéraux de l'affrontement Est-Ouest. (...) Certains acteurs de la Guerre froide, comme l'Organisation du traité de l'Atlantique Nord (Otan), ont survécu à la chute du Mur en s'inventant d'autres monstres à détruire sur d'autres continents. (...) En janvier dernier[2015 ndr], quand Syriza remporte les élections, ce parti de gauche a raison sur (presque) toute la ligne. Raison de lier l'effondrement de l'économie grecque à la purge administrée depuis cinq ans au pays tantôt par les socialistes, tantôt par la droite. (.. Raison de rappeler qu'en démocratie la souveraineté appartient au peuple et que celui-ci s'en trouverait dépossédé si la même politique lui était imposée quoi qu'il décide. A quoi bon plaider son dossier devant un peloton d'exécution? (...) Hélas, on ne combat pas un char d'assaut avec des violettes et une sarbacane.» (2)
Prenant la défense d'une Grèce exsangue en face d'une troïka vautour et d'un ministre allemand de l'économie sans état d'âme, il poursuit: «Coupables de leur innocence, les dirigeants grecs ont pensé que les créanciers du pays seraient sensibles au choix démocratique du peuple grec, de sa jeunesse en particulier. Les élections législatives du 25 janvier dernier d'abord, le référendum du 5 juillet ensuite provoquèrent au contraire la stupéfaction outragée de Berlin et de ses alliés. Ils n'eurent plus qu'un but: châtier les rebelles et ceux que leur vaillance aurait pu inspirer.
La capitulation ne suffisant plus, elle devrait s'accompagner d'excuses (Athènes a admis que ses choix économiques avaient provoqué une rupture de confiance avec ses partenaires) doublées de réparations: des actifs publics privatisables d'une valeur égale au quart du produit national grec seront gagés pour le compte des créanciers. Grâce au soutien décidément inestimable de M.François Hollande, la Grèce a simplement obtenu que ces gages ne soient pas transférés au Luxembourg. Chacun se prétend soulagé: la Grèce paiera. (...) L'économiste britannique John Maynard Keynes avait compris d'emblée la vanité d'une telle politique d'humiliation et de prise de gages: si l'Allemagne, comme aujourd'hui la Grèce, ne payait pas, c'est qu'elle ne le pouvait pas». Toutefois, leur acharnement punitif a déjà obligé les pays de l'Eurogroupe à engager en juillet trois fois plus d'argent (86 milliards d'euros) qu'il n'aurait été nécessaire si la somme avait été débloquée cinq mois plus tôt, puisque, entre-temps, l'économie grecque s'est écroulée faute de liquidités.» (2)
«Poursuivant son plaidoyer, Serge Halimi nous explique la mécanique de la mise à mort de la Grèce: «Le 27 juin, lorsqu'il annonce son référendum, le Premier ministre Alexis Tsipras recourt d'ailleurs à des termes proches de ceux d'une déclaration de guerre. Il vilipende «une proposition [de l'Eurogroupe] en forme d'ultimatum adressé à la démocratie grecque». Et il accuse certains de ses «partenaires» d'avoir pour objectif d'«humilier tout un peuple». (...) Car l'inimitié ne concerne plus seulement Athènes et Berlin. «Nous ne voulons pas être une colonie allemande», insiste M.Pablo Iglesias, dirigeant de Podemos en Espagne. «Je dis à l'Allemagne: ça suffit! Humilier un partenaire européen est impensable», laisse échapper le président du Conseil italien Matteo Renzi, «Dans les pays méditerranéens, et dans une certaine mesure en France, observe le sociologue allemand Wolfgang
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