Michel Rocard, mort le samedi 2 juillet à l’âge de 85 ans, avait rêvé d’un destin présidentiel. Il n’y sera jamais parvenu. Mais il y a aujourd’hui, au sein du Parti socialiste, dans les ministères, dans les think tank de la gauche qui rêvent de la refonder, quantité de ses disciples, nourris par cette « deuxième gauche » sociale-démocrate, réaliste et redistributrice qu’il avait fini par incarner.
Derrière une apparente simplicité, Michel Rocard, né le 23 août 1930 à Courbevoie, fut un homme politique paradoxal et compliqué. Longtemps l’homme politique le plus populaire de France, il était spontané voire impulsif, sincère voire naïf, maladroit mais volontiers calculateur ; apôtre d’un « parler vrai » parfois dévastateur, mais capable de manier sans broncher la langue « de madrier », selon l’expression d’un de ses anciens conseillers ; orateur parfois obscur, mais, en dehors des tribunes, d’un abord simple et direct. Obsédé par l’idée d’être écouté, reconnu, respecté.
Ce dernier trait de sa personnalité ne peut pas être dissocié des relations difficiles, mélange d’admiration et de frustration, qu’il avait avec son père. Yves Rocard était un scientifique de haut niveau. Quand, à 17 ans, Michel décida de faire Sciences-Po, il cessa d’être pris au sérieux par son père, et tenta toute sa vie, parfois inconsciemment, de reconquérir son estime. Yves était conservateur. Le jeune Michel fut progressiste, mais intégra l’influence paternelle, en étant très vite proche d’un socialisme humaniste, plus que du marxisme.
« Georgs Servet », son pseudonyme de militant
Michel Rocard s’engage dans la mouvance de la SFIO (ancêtre du PS) dès 1949 et devient six ans plus tard secrétaire national de l’Association des étudiants socialistes. Déjà la SFIO bat de l’aile, empêtrée dans les compromissions de la IVe République et les mensonges de la guerre d’Algérie. Diplômé de l’Institut d’études politiques de Paris – où il milite à l’UNEF et combat un dénommé… Jean-Marie Le Pen –, Michel Rocard sort de l’Ecole nationale d’administration dans la promotion « Dix-huit juin », en 1958. Il intègre alors l’inspection des finances. La même année, il quitte la SFIO, découragé, comme tant d’autres, par la politique de Guy Mollet.
C’est là qu’il participe à l’organisation d’un parti de gauche, le Parti socialiste autonome (PSA), dont le titre de gloire principal est d’avoir refusé d’accueillir dans ses rangs… François Mitterrand. Le petit parti deviendra le PSU en 1960. L’histoire de Michel Rocard se confond alors avec celle de toute une génération qui, transitant au PSU, à l’UNEF ou ailleurs, lutte contre la guerre d’Algérie. Après la fin du conflit, Michel Rocard, qui a pris un pseudonyme, Georges Servet, pour que ses activités militantes soient compatibles avec son statut de haut fonctionnaire, commence, déjà, à se ranger dans une gauche « moderniste ».
Dès 1966 lors d’un meeting à Grenoble, « Georges Servet » affirme à la tribune, que « la visée à long terme du socialisme n’est pas nécessairement la nationalisation ». La déclaration rompt avec la culture dominante dans la gauche de l’époque. Pour la première fois, le « pseudo » de Michel Rocard apparaît dans un titre du Monde…
Le début d’une longue incompréhension avec Mitterrand
Michel Rocard et François Mitterrand, eux, ne se connaissent encore que de réputation. Ils se rencontrent lors des négociations pour les législatives de 1967 (Rocard est lui-même candidat sans succès, dans les Yvelines). C’est le début d’une longue incompréhension entre le terrien de province amoureux des arbres et l’urbain qui trouvera longtemps l’évasion sur un bateau à voile, au large de la Bretagne.
Michel Rocard prend la tête du PSU en juin 1967. Ce petit parti, débordant de militants brillants, devait réveiller et rénover la gauche. Il sera, selon son expression, un « laboratoire terrifiant » où l’on s’épuise dans des débats stériles et sans fin. Après avoir mis le général de Gaulle en ballottage en 1965, Mitterrand est l’homme qui monte à gauche. Mais Michel Rocard ne veut toujours pas travailler avec lui. Arrive Mai 68. Il est au premier rang des manifestations avec les dirigeants gauchistes, alors que Mitterrand et ses amis courent derrière le mouvement, sans le rattraper. Pour Michel Rocard, c’est une victoire fatale : après Mai, il s’enferre avec le PSU dans un gauchisme débridé. Pourtant, 1969 marque aussi la véritable découverte de son personnage par le grand public. Candidat du PSU à la présidentielle provoquée par le départ anticipé du général de Gaulle, Michel Rocard fait 3,66 % des voix. C’est peu, mais la SFIO dépasse à peine 5 %.
Derrière une apparente simplicité, Michel Rocard, né le 23 août 1930 à Courbevoie, fut un homme politique paradoxal et compliqué. Longtemps l’homme politique le plus populaire de France, il était spontané voire impulsif, sincère voire naïf, maladroit mais volontiers calculateur ; apôtre d’un « parler vrai » parfois dévastateur, mais capable de manier sans broncher la langue « de madrier », selon l’expression d’un de ses anciens conseillers ; orateur parfois obscur, mais, en dehors des tribunes, d’un abord simple et direct. Obsédé par l’idée d’être écouté, reconnu, respecté.
Ce dernier trait de sa personnalité ne peut pas être dissocié des relations difficiles, mélange d’admiration et de frustration, qu’il avait avec son père. Yves Rocard était un scientifique de haut niveau. Quand, à 17 ans, Michel décida de faire Sciences-Po, il cessa d’être pris au sérieux par son père, et tenta toute sa vie, parfois inconsciemment, de reconquérir son estime. Yves était conservateur. Le jeune Michel fut progressiste, mais intégra l’influence paternelle, en étant très vite proche d’un socialisme humaniste, plus que du marxisme.
« Georgs Servet », son pseudonyme de militant
Michel Rocard s’engage dans la mouvance de la SFIO (ancêtre du PS) dès 1949 et devient six ans plus tard secrétaire national de l’Association des étudiants socialistes. Déjà la SFIO bat de l’aile, empêtrée dans les compromissions de la IVe République et les mensonges de la guerre d’Algérie. Diplômé de l’Institut d’études politiques de Paris – où il milite à l’UNEF et combat un dénommé… Jean-Marie Le Pen –, Michel Rocard sort de l’Ecole nationale d’administration dans la promotion « Dix-huit juin », en 1958. Il intègre alors l’inspection des finances. La même année, il quitte la SFIO, découragé, comme tant d’autres, par la politique de Guy Mollet.
C’est là qu’il participe à l’organisation d’un parti de gauche, le Parti socialiste autonome (PSA), dont le titre de gloire principal est d’avoir refusé d’accueillir dans ses rangs… François Mitterrand. Le petit parti deviendra le PSU en 1960. L’histoire de Michel Rocard se confond alors avec celle de toute une génération qui, transitant au PSU, à l’UNEF ou ailleurs, lutte contre la guerre d’Algérie. Après la fin du conflit, Michel Rocard, qui a pris un pseudonyme, Georges Servet, pour que ses activités militantes soient compatibles avec son statut de haut fonctionnaire, commence, déjà, à se ranger dans une gauche « moderniste ».
Dès 1966 lors d’un meeting à Grenoble, « Georges Servet » affirme à la tribune, que « la visée à long terme du socialisme n’est pas nécessairement la nationalisation ». La déclaration rompt avec la culture dominante dans la gauche de l’époque. Pour la première fois, le « pseudo » de Michel Rocard apparaît dans un titre du Monde…
Le début d’une longue incompréhension avec Mitterrand
Michel Rocard et François Mitterrand, eux, ne se connaissent encore que de réputation. Ils se rencontrent lors des négociations pour les législatives de 1967 (Rocard est lui-même candidat sans succès, dans les Yvelines). C’est le début d’une longue incompréhension entre le terrien de province amoureux des arbres et l’urbain qui trouvera longtemps l’évasion sur un bateau à voile, au large de la Bretagne.
Michel Rocard prend la tête du PSU en juin 1967. Ce petit parti, débordant de militants brillants, devait réveiller et rénover la gauche. Il sera, selon son expression, un « laboratoire terrifiant » où l’on s’épuise dans des débats stériles et sans fin. Après avoir mis le général de Gaulle en ballottage en 1965, Mitterrand est l’homme qui monte à gauche. Mais Michel Rocard ne veut toujours pas travailler avec lui. Arrive Mai 68. Il est au premier rang des manifestations avec les dirigeants gauchistes, alors que Mitterrand et ses amis courent derrière le mouvement, sans le rattraper. Pour Michel Rocard, c’est une victoire fatale : après Mai, il s’enferre avec le PSU dans un gauchisme débridé. Pourtant, 1969 marque aussi la véritable découverte de son personnage par le grand public. Candidat du PSU à la présidentielle provoquée par le départ anticipé du général de Gaulle, Michel Rocard fait 3,66 % des voix. C’est peu, mais la SFIO dépasse à peine 5 %.
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