Ajouté le : 14.09.2014 04:29
Samba Thiam, Pdt des FLAM, Forces de Libération Africaines de Mauritanie
ALAKHBAR (Nouakchott)-Samba Thiam, président des FLAM, Forces de Libération Africaines de Mauritanie, a été l’invité d’Alakhbar cette semaine. Il est revenu largement sur le projet d’autonomie des FLAM qui a suscité une polémique au sein de la classe politique.
« Nous avons pensé à l’autonomie parce que nous sommes intimement convaincus que l’Etat unitaire, tel qu’il est actuellement ne fonctionne pas. Il est même porteur de danger..., a estimé Samba Thiam dans cette interview accordée à Alakhbar, à l’occasion.
Il a affirmé cependant que cette idée d’autonomie a été « chargée négativement à tort (…) Quand on parle d’autonomie, certains pensent à une séparation Nord-Sud (…)» Mais elle veut dire, pour simplifier, une décentralisation très poussée».
ALAKHBAR: Après 23 ans d’exil les FLAM reviennent avec un projet d’autonomie. Qu’est ce que cela entend?
« La Mauritanie demeure telle quelle »
Samba Thiam: L’Etat unitaire n’a pas fonctionné dans sa forme actuelle. Il nous éloigne les uns des autres. Nous avons alors imaginé une autre réorganisation territoriale et administrative d’où l’idée d’autonomie. Permettez-moi de préciser cependant qu’il ne s’agit pas d’une séparation du Nord et du Sud. Notre intention n’est pas de diviser le pays ni de porter atteinte à l’intégrité territoriale. La Mauritanie demeure telle quelle. Et pour revenir sur le dysfonctionnement de l’Etat, je vais citer Mokhtar Ould Daddah (1er président de la Mauritanie) qui avait pris le pouvoir en 1960. Tout le monde lui avait fait confiance. Mais, il procéda a réorganiser ce territoire sur des bases injustes. Il a accepté que le découpage régional tienne compte des entités politiques arabo-berbères à l’image des émirats du Trarza, du Brakna, du Tagant de l’Assaba et de l’Adrar. En revanche, nos régions historiques qui reflétaient notre identité ont été absorbées. Le Waalo a été dissous dans le Trarza. Pourtant le Waalo était une entité politique, même s’il développait des relations intimes, matrimoniales avec l’Emirat du Trarza. Le Fouta a été amputé de certaines parties rattachées au Brakna. Et le Guidimakha a été dissous dans l’Assaba. Nous allons donc restituer ces entités politiques historiques tant du côté Arabo-berbère que Négro-africains.
Il y a autre chose: les Mauritaniens, inter-tribus, rivalisent durement pour accéder au pouvoir. Les tribus sont en conflit permanant pour conquérir le pouvoir. Dans la réorganisation que nous proposons il sera crée quatre grandes régions autonomes. Cela limitera ou réduira ces conflits pour le pouvoir ainsi que les tensions entre Négro-africains et Arabo-berbères. Il y aura ainsi moins de sollicitations pour le gouvernement central.
ALAKHBAR: Certains ne vous entendent pas de cette oreille. Par exemple, le nouveau président de l’UPR, Ould Maham, vous qualifie de "promoteurs de la séparation" du pays. Il y a aussi des partis politiques qui ont ce même sentiment. Que répondez-vous ?
Samba Thiam: J’aimerais d’abord entendre la réaction des partis d’opposition. Je suis curieux de savoir ce qu’ils en pensent. Ils ne l’ont pas exprimé publiquement. Pour Ould Maham, je l’ai lu. Mais, je dirais simplement que c’est une position ridicule, parce que le projet d’autonomie est publié sur notre site d’information et envoyé en Arabe et Français sur d’autres sites. Allez-y. Lisez-le. Si cela vous parait une séparation du Nord et du Sud vous me direz comment. Il y a des gens qui veulent nous mettre dans un corset et nous faire dire ce que nous n’avons pas dit. Certains souhaiteraient qu’on dise: « Les FLAM veulent diviser les Noirs et les Maures». Ce n’est pas ce que nous disons. Si quelqu’un refuse de voir le soleil vous avez beau le lui montrer il ne le verra pas. C’est ce qui est arrivé à Ould Maham. Il vient d’arriver. Il fait du zèle pour plaire à l’opinion au sein de l’UPR ainsi qu’à une certaine catégorie de l’opinion maure. C’est de bonne guerre.
ALAKHBAR: Le président Mohamed Ould Abdel Aziz a promis, lors de sa deuxième investiture, de faire face à ceux qui cherchent à diviser le peuple mauritanien. Les FLAM se sentent-elles visées?
« La Mauritanie est à la fois négro-africain, harratin et arabo-berbère »
Samba Thiam: Si Ould Abdel Aziz l’a dit peut-être qu’il vise les FLAM. Je ne l’exclus pas, vu qu’il a voulu empêcher la tenue de notre congrès. Ould Abdel Aziz a peut-être dû adhérer à la thèse des lobbies qui nous qualifient de « diviseurs et d’extrémistes qui constituent le pendant des Baasistes». Mais nous ne nous sentons nullement concernés par ses propos. Nous ne sommes pas des diviseurs. Il y a malheureusement des préjugés têtus. Certains ne cherchent pas à comprendre, parce que simplement les politiques menées depuis Maouya Ould Sidi Ahmed Taya jusqu’à nos jours ont déformé les esprits. Cela fait que certains ignorent qui sont les FLAM. C’est pourquoi quand nous sommes revenus au pays, je suis allé voir les sommités intellectuelles et d’affaire arabo-berbères pour leur expliquer qui sommes-nous et quel est le discours que nous véhiculons. Un discours qui ne divise pas, mais redresse. Il faut redresser ce pays sur des bases d’égalité et de justice. Il faut aussi comprendre que ce pays n’est pas exclusivement arabo-berbère. Il est à la fois négro-africain, harratin et arabo-berbère.
ALAKHBAR: Jusqu’où Monsieur Thiam comptez-vous défendre ce projet d’autonomie ?
Samba Thiam: Nous le défendrons jusqu’au bout.
ALAKHBAR: Imaginez-vous déjà des obstacles ?
Samba Thiam: Il y en aura forcement. Quand vous avez des idées nouvelles, vous ferez forcement face à des résistances, surtout que l’idée a été chargée négativement à tort. Quand on parle d’autonomie, certains pensent à une séparation Nord-Sud. Et puis, l’autonomie n’arrange pas ces lobbies qui veulent la perpétuation de la suprématie des uns sur les autres.
ALAKHBAR: Vous avez beaucoup parlé d’autonomie sans précision de zone géographique. Au Mali, par exemple les Touaregs réclament l’autonomie d’un espace bien défini qu’ils appellent « Azawad ». Et vous ?
Samba Thiam: L’autonomie a deux niveaux. Il y a d’abord sa justification, que j’ai évoquée, et sa matérialisation sur un espace donné. A ce propos, nous allons créer quatre grandes régions à vocation. Le Tiris et l’Adrar, regorgeant de ressources minières, vont, par exemple, constituer une région à vocation minière. Les deux Hods et l’Assaba seront une région à vocation pastorale, le Guidimakha, le Fouta et le Waalo la région agricole et le Tagant, le Brakna et le Trarza agro-pastorale. Le nouveau découpage du pays en grands espaces offrira plus d’opportunités de travail aux fils de ces terroirs. En permettant à ces collectivités de gérer leur propre terroir, on réduira les tensions pour l’accès au pouvoir central. Cela diminuerait également les détournements des biens de l’Etat, car, chaque région va travailler à se développer, tout en établissant de bonnes relations avec les autres, dans une sorte de saine émulation
ALAKHBAR: Quelles seront les compétences de ces nouvelles régions ?
Samba Thiam: Il faut ôter certaines compétences au pouvoir central et les octroyer aux nouvelles régions. Les populations locales vont gérer leur terroir, dans certains secteurs comme l’économie régionale, l’administration, la culture, la police locale etc. Elles vont également élire quelqu’un à qui elles ont confiance. On ne leur parachutera plus un gouverneur inconnu qu’elles ne connaissent pas. Prenons l’exemple des deux Hods et de l’Assaba, ça sera une région. Mais le Hod el-Chargi, le Hod el-Gharbi et l’Assaba vont envoyer des représentants que j'appelle« commissaires de gouvernement» un exécutif avec le gouverneur de la région. Un parlement qui légiférera au niveau régional sera également élu.
Le pouvoir central gardera, lui, les attribues de souveraineté: défense du territoire, relations internationales, télécommunications, transports aériens et politique monétaire.
ALAKHBAR: Vous laissez l’idée d’autonomie pour parler d’une réorganisation territoriale et administrative, qui touche tout le pays, avec la création de 4 nouvelles régions et de 8 provinces. N’Y a-t-il pas une confusion dans votre approche ?
"Imaginez cette autonomie comme une décentralisation très poussée."
Samba Thiam: La confusion est dans vos têtes dans lesquelles on a mis l’idée de séparation. Mais l’autonomie que nous proposons ne signifie pas indépendance. En Espagne, par exemple, les Castillans et les Basques, les Catalans vivent l’autonomie, bien que partageant le même territoire. Au Nigéria, les Etats sont autonomies, mais pas séparés. Pour ce qui est de l’Azawad, c’est un autre cas. Les mouvements du Nord-Mali ont clairement demandé l’indépendance et la réclament pour la partie nord. Ce n’est pas notre cas. Nous avons présenté un projet d’autonomie qui concerne toute la Mauritanie. Pour simplifier, comme cela crée une confusion chez-vous, imaginez cette autonomie comme une décentralisation très poussée. Il s’agit de donner aux régions une certaine capacité autonome pour qu’elles ne dépendent plus du gouvernement central sur certaines questions.
ALAKHBAR: Les FLAM ont-elles perdu leur force de mobilisation à cause d’une longue absence et qu’elles veulent aujourd’hui attirer les regards sur elles en lançant cette idée d’autonomie ?
Samba Thiam: Non. Il ne s’agit pas d’une tactique ou de calcules politiciens. Nous avons plutôt pensé à l’autonomie parce que nous sommes intimement convaincus que l’Etat unitaire, tel qu’il est actuellement ne fonctionne pas. Il est même porteur de danger et d’exclusion, et les risques de dérapage sont énormes. Nous voulons donc endiguer ces menaces. Certes, nous venons de rentrer et nous n’avons pas encore suffisamment de base, mais si l’on discute de nos idées, cela veut dire qu’elles ne sont pas aussi absurdes que ça et qu’elles ont de la substance. L’objectif est donc d’interpeler les Mauritaniens et leur dire : « Voilà la solution que nous proposons. Si vous pensez qu’elle n’est pas la meilleure, proposez ’autre chose ». Il est cependant hors de question qu’on reste sans rien faire face a ce problème, ni impulser le débat sur ces questions de fond.
ALAKHBAR: Ce projet d’autonomie ne risque-t-il pas d’exacerber les réclamations identitaires que connait actuellement le pays ?
Samba Thiam: Pourquoi ne cherchez-vous pas plutôt à comprendre d’abord les causes de ce réveil identitaire! Il est dû à une mauvaise gestion des communautés et du pays depuis l’indépendance. Il y a maintenant une prise de conscience, qu’il faut interpréter ou décrypter comme étant une alerte. On doit permettre aux gens de prendre en charge leur destin: la gestion de leur terroir si l’on veut vraiment apaiser ce réveil identitaire.
ALAKHBAR: Quand et comment comptez vous présenter votre projet au public ?
Samba Thiam: Le document a été publié et les journalistes et notabilités intellectuelles et politiques l’ont reçu et lu.
ALAKHBAR: Vous n'avez donc pas besoin d'aller vers les populations?
Samba Thiam: Si nous ne sommes pas d’accord avec le pouvoir ou avec la classe politique et les intellectuels, nous irons en ce moment vers les populations et leur demander : « ce projet d’autonomie des FLAM vous convient-il ? » Si on leur pose la question et on les laisse se déterminer, je suis convaincu qu’elles vont y adhérer. Faut-il encore qu’on lève la confusion qui recouvre ce projet pour que les populations le perçoivent clairement.
Samba Thiam, Pdt des FLAM, Forces de Libération Africaines de Mauritanie
ALAKHBAR (Nouakchott)-Samba Thiam, président des FLAM, Forces de Libération Africaines de Mauritanie, a été l’invité d’Alakhbar cette semaine. Il est revenu largement sur le projet d’autonomie des FLAM qui a suscité une polémique au sein de la classe politique.
« Nous avons pensé à l’autonomie parce que nous sommes intimement convaincus que l’Etat unitaire, tel qu’il est actuellement ne fonctionne pas. Il est même porteur de danger..., a estimé Samba Thiam dans cette interview accordée à Alakhbar, à l’occasion.
Il a affirmé cependant que cette idée d’autonomie a été « chargée négativement à tort (…) Quand on parle d’autonomie, certains pensent à une séparation Nord-Sud (…)» Mais elle veut dire, pour simplifier, une décentralisation très poussée».
ALAKHBAR: Après 23 ans d’exil les FLAM reviennent avec un projet d’autonomie. Qu’est ce que cela entend?
« La Mauritanie demeure telle quelle »
Samba Thiam: L’Etat unitaire n’a pas fonctionné dans sa forme actuelle. Il nous éloigne les uns des autres. Nous avons alors imaginé une autre réorganisation territoriale et administrative d’où l’idée d’autonomie. Permettez-moi de préciser cependant qu’il ne s’agit pas d’une séparation du Nord et du Sud. Notre intention n’est pas de diviser le pays ni de porter atteinte à l’intégrité territoriale. La Mauritanie demeure telle quelle. Et pour revenir sur le dysfonctionnement de l’Etat, je vais citer Mokhtar Ould Daddah (1er président de la Mauritanie) qui avait pris le pouvoir en 1960. Tout le monde lui avait fait confiance. Mais, il procéda a réorganiser ce territoire sur des bases injustes. Il a accepté que le découpage régional tienne compte des entités politiques arabo-berbères à l’image des émirats du Trarza, du Brakna, du Tagant de l’Assaba et de l’Adrar. En revanche, nos régions historiques qui reflétaient notre identité ont été absorbées. Le Waalo a été dissous dans le Trarza. Pourtant le Waalo était une entité politique, même s’il développait des relations intimes, matrimoniales avec l’Emirat du Trarza. Le Fouta a été amputé de certaines parties rattachées au Brakna. Et le Guidimakha a été dissous dans l’Assaba. Nous allons donc restituer ces entités politiques historiques tant du côté Arabo-berbère que Négro-africains.
Il y a autre chose: les Mauritaniens, inter-tribus, rivalisent durement pour accéder au pouvoir. Les tribus sont en conflit permanant pour conquérir le pouvoir. Dans la réorganisation que nous proposons il sera crée quatre grandes régions autonomes. Cela limitera ou réduira ces conflits pour le pouvoir ainsi que les tensions entre Négro-africains et Arabo-berbères. Il y aura ainsi moins de sollicitations pour le gouvernement central.
ALAKHBAR: Certains ne vous entendent pas de cette oreille. Par exemple, le nouveau président de l’UPR, Ould Maham, vous qualifie de "promoteurs de la séparation" du pays. Il y a aussi des partis politiques qui ont ce même sentiment. Que répondez-vous ?
Samba Thiam: J’aimerais d’abord entendre la réaction des partis d’opposition. Je suis curieux de savoir ce qu’ils en pensent. Ils ne l’ont pas exprimé publiquement. Pour Ould Maham, je l’ai lu. Mais, je dirais simplement que c’est une position ridicule, parce que le projet d’autonomie est publié sur notre site d’information et envoyé en Arabe et Français sur d’autres sites. Allez-y. Lisez-le. Si cela vous parait une séparation du Nord et du Sud vous me direz comment. Il y a des gens qui veulent nous mettre dans un corset et nous faire dire ce que nous n’avons pas dit. Certains souhaiteraient qu’on dise: « Les FLAM veulent diviser les Noirs et les Maures». Ce n’est pas ce que nous disons. Si quelqu’un refuse de voir le soleil vous avez beau le lui montrer il ne le verra pas. C’est ce qui est arrivé à Ould Maham. Il vient d’arriver. Il fait du zèle pour plaire à l’opinion au sein de l’UPR ainsi qu’à une certaine catégorie de l’opinion maure. C’est de bonne guerre.
ALAKHBAR: Le président Mohamed Ould Abdel Aziz a promis, lors de sa deuxième investiture, de faire face à ceux qui cherchent à diviser le peuple mauritanien. Les FLAM se sentent-elles visées?
« La Mauritanie est à la fois négro-africain, harratin et arabo-berbère »
Samba Thiam: Si Ould Abdel Aziz l’a dit peut-être qu’il vise les FLAM. Je ne l’exclus pas, vu qu’il a voulu empêcher la tenue de notre congrès. Ould Abdel Aziz a peut-être dû adhérer à la thèse des lobbies qui nous qualifient de « diviseurs et d’extrémistes qui constituent le pendant des Baasistes». Mais nous ne nous sentons nullement concernés par ses propos. Nous ne sommes pas des diviseurs. Il y a malheureusement des préjugés têtus. Certains ne cherchent pas à comprendre, parce que simplement les politiques menées depuis Maouya Ould Sidi Ahmed Taya jusqu’à nos jours ont déformé les esprits. Cela fait que certains ignorent qui sont les FLAM. C’est pourquoi quand nous sommes revenus au pays, je suis allé voir les sommités intellectuelles et d’affaire arabo-berbères pour leur expliquer qui sommes-nous et quel est le discours que nous véhiculons. Un discours qui ne divise pas, mais redresse. Il faut redresser ce pays sur des bases d’égalité et de justice. Il faut aussi comprendre que ce pays n’est pas exclusivement arabo-berbère. Il est à la fois négro-africain, harratin et arabo-berbère.
ALAKHBAR: Jusqu’où Monsieur Thiam comptez-vous défendre ce projet d’autonomie ?
Samba Thiam: Nous le défendrons jusqu’au bout.
ALAKHBAR: Imaginez-vous déjà des obstacles ?
Samba Thiam: Il y en aura forcement. Quand vous avez des idées nouvelles, vous ferez forcement face à des résistances, surtout que l’idée a été chargée négativement à tort. Quand on parle d’autonomie, certains pensent à une séparation Nord-Sud. Et puis, l’autonomie n’arrange pas ces lobbies qui veulent la perpétuation de la suprématie des uns sur les autres.
ALAKHBAR: Vous avez beaucoup parlé d’autonomie sans précision de zone géographique. Au Mali, par exemple les Touaregs réclament l’autonomie d’un espace bien défini qu’ils appellent « Azawad ». Et vous ?
Samba Thiam: L’autonomie a deux niveaux. Il y a d’abord sa justification, que j’ai évoquée, et sa matérialisation sur un espace donné. A ce propos, nous allons créer quatre grandes régions à vocation. Le Tiris et l’Adrar, regorgeant de ressources minières, vont, par exemple, constituer une région à vocation minière. Les deux Hods et l’Assaba seront une région à vocation pastorale, le Guidimakha, le Fouta et le Waalo la région agricole et le Tagant, le Brakna et le Trarza agro-pastorale. Le nouveau découpage du pays en grands espaces offrira plus d’opportunités de travail aux fils de ces terroirs. En permettant à ces collectivités de gérer leur propre terroir, on réduira les tensions pour l’accès au pouvoir central. Cela diminuerait également les détournements des biens de l’Etat, car, chaque région va travailler à se développer, tout en établissant de bonnes relations avec les autres, dans une sorte de saine émulation
ALAKHBAR: Quelles seront les compétences de ces nouvelles régions ?
Samba Thiam: Il faut ôter certaines compétences au pouvoir central et les octroyer aux nouvelles régions. Les populations locales vont gérer leur terroir, dans certains secteurs comme l’économie régionale, l’administration, la culture, la police locale etc. Elles vont également élire quelqu’un à qui elles ont confiance. On ne leur parachutera plus un gouverneur inconnu qu’elles ne connaissent pas. Prenons l’exemple des deux Hods et de l’Assaba, ça sera une région. Mais le Hod el-Chargi, le Hod el-Gharbi et l’Assaba vont envoyer des représentants que j'appelle« commissaires de gouvernement» un exécutif avec le gouverneur de la région. Un parlement qui légiférera au niveau régional sera également élu.
Le pouvoir central gardera, lui, les attribues de souveraineté: défense du territoire, relations internationales, télécommunications, transports aériens et politique monétaire.
ALAKHBAR: Vous laissez l’idée d’autonomie pour parler d’une réorganisation territoriale et administrative, qui touche tout le pays, avec la création de 4 nouvelles régions et de 8 provinces. N’Y a-t-il pas une confusion dans votre approche ?
"Imaginez cette autonomie comme une décentralisation très poussée."
Samba Thiam: La confusion est dans vos têtes dans lesquelles on a mis l’idée de séparation. Mais l’autonomie que nous proposons ne signifie pas indépendance. En Espagne, par exemple, les Castillans et les Basques, les Catalans vivent l’autonomie, bien que partageant le même territoire. Au Nigéria, les Etats sont autonomies, mais pas séparés. Pour ce qui est de l’Azawad, c’est un autre cas. Les mouvements du Nord-Mali ont clairement demandé l’indépendance et la réclament pour la partie nord. Ce n’est pas notre cas. Nous avons présenté un projet d’autonomie qui concerne toute la Mauritanie. Pour simplifier, comme cela crée une confusion chez-vous, imaginez cette autonomie comme une décentralisation très poussée. Il s’agit de donner aux régions une certaine capacité autonome pour qu’elles ne dépendent plus du gouvernement central sur certaines questions.
ALAKHBAR: Les FLAM ont-elles perdu leur force de mobilisation à cause d’une longue absence et qu’elles veulent aujourd’hui attirer les regards sur elles en lançant cette idée d’autonomie ?
Samba Thiam: Non. Il ne s’agit pas d’une tactique ou de calcules politiciens. Nous avons plutôt pensé à l’autonomie parce que nous sommes intimement convaincus que l’Etat unitaire, tel qu’il est actuellement ne fonctionne pas. Il est même porteur de danger et d’exclusion, et les risques de dérapage sont énormes. Nous voulons donc endiguer ces menaces. Certes, nous venons de rentrer et nous n’avons pas encore suffisamment de base, mais si l’on discute de nos idées, cela veut dire qu’elles ne sont pas aussi absurdes que ça et qu’elles ont de la substance. L’objectif est donc d’interpeler les Mauritaniens et leur dire : « Voilà la solution que nous proposons. Si vous pensez qu’elle n’est pas la meilleure, proposez ’autre chose ». Il est cependant hors de question qu’on reste sans rien faire face a ce problème, ni impulser le débat sur ces questions de fond.
ALAKHBAR: Ce projet d’autonomie ne risque-t-il pas d’exacerber les réclamations identitaires que connait actuellement le pays ?
Samba Thiam: Pourquoi ne cherchez-vous pas plutôt à comprendre d’abord les causes de ce réveil identitaire! Il est dû à une mauvaise gestion des communautés et du pays depuis l’indépendance. Il y a maintenant une prise de conscience, qu’il faut interpréter ou décrypter comme étant une alerte. On doit permettre aux gens de prendre en charge leur destin: la gestion de leur terroir si l’on veut vraiment apaiser ce réveil identitaire.
ALAKHBAR: Quand et comment comptez vous présenter votre projet au public ?
Samba Thiam: Le document a été publié et les journalistes et notabilités intellectuelles et politiques l’ont reçu et lu.
ALAKHBAR: Vous n'avez donc pas besoin d'aller vers les populations?
Samba Thiam: Si nous ne sommes pas d’accord avec le pouvoir ou avec la classe politique et les intellectuels, nous irons en ce moment vers les populations et leur demander : « ce projet d’autonomie des FLAM vous convient-il ? » Si on leur pose la question et on les laisse se déterminer, je suis convaincu qu’elles vont y adhérer. Faut-il encore qu’on lève la confusion qui recouvre ce projet pour que les populations le perçoivent clairement.
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