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Séisme: l'Italie pointe son «absence de culture de la prévention»

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  • Séisme: l'Italie pointe son «absence de culture de la prévention»

    Par Eric Jozsef, Rome, de notre correspondant
    Les équipes de sauveteurs tentent de trouver des survivants au lendemain du séisme qui a frappé l'Italie.

    Le bilan du tremblement de terre s'élève à 268 morts et pourrait s'alourdir. Beaucoup déplorent qu'aucune leçon n'ait été tirée des séismes précédents.

    Séisme: l'Italie pointe son «absence de culture de la prévention»
    Depuis la violente secousse initiale de mercredi, des centaines de répliques rendent le travail des sauveteurs extrêmement difficile dans la région au nord de Rome frappée par un séisme de 6,2. Les chances de retrouver des survivants s’amenuisent dans les petits villages d’Amatrice, d’Accumoli et d’Arquata, les trois communes les plus touchées par le séisme alors que le bilan des victimes s’élève déjà à 268 morts et près de 400 blessés. Le nombre de disparus reste pour l’heure incertain. «Les dimensions de ce tremblement de terre pourraient être pires que celles de l’Aquila», a lâché Fabrizio Curcio, le responsable de la Protection civile, en référence au tremblement du 6 avril 2009 qui avait 308 morts dans la ville des Abruzzes.

    Localisation de l'épicentre du séisme

    Des milliers de personnes dorment depuis deux nuits dans les tentes installées par les secouristes ou dans leurs voitures de crainte de voir des leurs maisons endommagées en proie aux pillards. Vendredi, le chef du gouvernement Matteo Renzi a proclamé l’état d’urgence dans les régions concernées et une première enveloppe de 50 millions d’euros a été débloquée pour venir en aide aux victimes. Il a assuré que les petites villes et les hameaux seront reconstruits : «Ces bourgs ne doivent pas seulement être des souvenirs mais avoir un futur». Le maire d’Amatrice Sergio Pirozzi estime néanmoins qu’il «faudra tout raser» avant de reconstruire. Pratiquement aucun bâtiment du centre historique de cette bourgade du nord du Latium ne pourra être restauré.


    De son côté, le ministre des Biens culturels, Dario Franceschini, a indiqué que le séisme avait endommagé ou détruit près de 300 édifices ayant une valeur culturelle. Parallèlement aux mesures d’urgences, le président du Conseil a annoncé un vaste plan de prévention baptisé Casa Italia (La maison Italie). «L’Italie doit avoir une vision qui ne se limite pas à la gestion des situations d’urgence», a insisté Matteo Renzi ajoutant en substance «nous ne voulons pas que ce soit, comme par le passé, des paroles en l’air».

    Enquête pour homicide involontaire
    L’objectif est d’assurer la mise en sécurité des habitations alors que seules 30% des maisons italiennes respectent aujourd’hui les normes antisismiques. Les géologues estiment que 60% des bâtiments transalpins sont exposés au risque d’un tremblement de terre plus ou moins violent. Dans ce contexte, le parquet de Rieti a ouvert une enquête pour «homicide involontaire». En 2009, des fonctionnaires de l’administration communale d’Amatrice auraient envoyé en retard des formulaires pour permettre aux propriétaires d’accéder aux subventions gouvernementales (débloquées après le séisme de L’Aquila) afin de mettre aux normes leur domicile.

    Mais au-delà de l’erreur bureaucratique, des questions se posent plus généralement sur le manque de prévention. Alors qu’Amatrice avait déjà été rayée de la carte par un premier tremblement de terre au début du XVIIe siècle, le responsable du Conseil national de géologie, Domenico Angelone, qui s’est rendu sur place ne cache pas sa colère : «La caserne des carabiniers est hors d’usage, le commissariat aussi. L’hôpital s’est à moitié effondré et l’école est complètement détruite. Les quatre bâtiments qui auraient dû être les derniers à tomber ont été les premiers. Cela nous fait comprendre combien, dans toute l’Italie, il n’existe pas de culture de la prévention. Il n’y a pas une sensibilité suffisante pour que l’on n’oublie pas ce qu’il s’est passé aujourd’hui. Dans dix jours on aura déjà tout oublié.»

    L’Italie aux deux visages
    La presse italienne se fait aussi l’écho d’une Italie à deux visages, capable d’un effort extraordinaire dans la solidarité et l’organisation des secours d’urgence mais presque toujours en retard en ce qui concerne la prévention. «Dans un pays qui a subi au moins huit séismes dévastateurs au cours des quarante dernières années, c’est-à-dire en moyenne un tous les cinq ans, la seule leçon que nous avons apprise : sauver des vies humaines… après le tremblement de terre», s’indignait l’éditorialiste du Corriere della Sera.

    Le problème concerne notamment les centres historiques et les vieilles maisons séculaires («notre beauté, notre faiblesse», se désole la presse locale) mais aussi de nombreuses habitations construites après-guerre, du temps du miracle économique italien. Les incuries politiques et administratives ont fait le reste. Après le tremblement de terre qui avait détruit en 2002 une petite école à San Giulano di Puglia tuant 27 enfants, tous les bâtiments scolaires devaient être contrôlés mais aujourd’hui la moitié des établissements italiens ne sont toujours pas aux normes.

    Selon l’association italienne des constructeurs, le coût total des tremblements de terre depuis 1968 s’élèverait à plus de 180 milliards d’euros. Alors qu’il suffirait de 100 milliards d’investissements pour mettre en sécurité l’Italie. C’est apparemment l’intention de Matteo Renzi qui a évoqué la convocation d’une sorte d’états généraux des risques naturels. Le quotidien La Stampa rappelait que la petite de ville de Norcia, en Ombrie, avait subi deux séismes en 1979 et 1997 faisant au total 16 morts. Mercredi, elle a été de nouveau violemment touchée par le tremblement de terre. Mais cette fois la commune n’a subi que des dommages minimes. «Nous avons respecté strictement les règles antisismiques, a expliqué le maire. La reconstruction a sauvé de nombreuses vies.»
    The truth is incontrovertible, malice may attack it, ignorance may deride it, but in the end; there it is.” Winston Churchill
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