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Réformes du système éducatif : Mostefa Lacheraf et Nouria Benghebrit.. une même bataille ?

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  • Réformes du système éducatif : Mostefa Lacheraf et Nouria Benghebrit.. une même bataille ?

    Après une première phase d’effervescence sous Ben Bella (1962 1965), l’arabisation va connaître trois rythmes sous Boumediene, marqués par les noms de Taleb-Ibrahimi (1965-1970), d’Abdelhamid Mehri (1970-1977) et de Mostefa Lacheraf (1977-1979). Sous la présidence de Chadli, une phase sera marquée par le retour des « barbe-FLN » (1979-1984), puis par la vague islamiste (1985-1998). A partir de 1999, la présidence de Bouteflika conduit à de nouvelles orientations.

    Ben Bella, ou l’arabisation effervescente (1962-1965)

    Pour faire sa marque sur le plan politique, Ben Bella avait, dès sa libération en 1962, choisi la référence arabe, en opposition avec les négociateurs des accords d’Évian. Dès octobre 1962, il annonce l’enseignement de l’arabe dans les écoles : ce qui sera fait à la rentrée de 1963 (dix heures d’arabe sur 30 heures par semaine), puis en 1964, l’arabisation totale de la première année du primaire. Cette même rentrée voit arriver 1 000 instituteurs et institutrices égyptiens : car l’Algérie n’a pratiquement, en dehors des élèves issus des écoles coraniques, pas d’enseignants susceptibles d’enseigner cette langue. Cette arabisation improvisée se fait sans formation pédagogique, celle des enseignants orientaux étant plus que problématique (la plupart étaient des artisans dans leur pays ), et leur langue (égyptienne) leur rendant la communication avec leurs élèves arabes et surtout berbères difficile, voire impossible,. Dans le contexte algérien, leur fonction en fait des maîtres en religion, ce qui ne fait qu’aggraver la situation. À l’Université d’Alger, un Institut islamique est créé et l’ancienne licence d’arabe transformée en licence unilingue sur le modèle oriental.

    Parallèlement, une forte pression est exercée par les successeurs des réformistes des années 1930, menés par Tewfik el Madani, ministre des affaires religieuses, appelant le peuple algérien à l’Islam et à la langue arabe . Ils créent dans le pays, avec l’appui du pouvoir, des Instituts islamiques, pour former des propagateurs de leur idéologie, qui encadreront par la suite l’enseignement arabisé. Leur pression est telle que Ben Bella, dans le climat des controverses suscitées par la question, est amené à dire que « l’arabisation n’est pas l’islamisation ». Si l’Assemblée intègre l’arabe dans ses travaux , une résistance importante à fondement libéral et laïque se manifeste entendre par la voix des étudiants , des Kabyles , des écrivains (Kateb Yacine, Mourad Bourboune, Assia Djebar) et de la presse francophone. Une arabisation radicale représente une pure utopie pour l’élite francophone. Cette période prend fin avec le coup d’État du 19 juin 1965, qui place Boumediene au pouvoir.

    Taleb-Ibrahimi et l’arabisation idéologique (1965- 1970)

    Sous l’impulsion du ministre de l’Éducation nationale Ahmed Taleb-Ibrahimi, descendant d’un réformiste connu , l’arabisation est utilisée pour légitimer un régime impopulaire, en étant présentée comme la face culturelle de l’indépendance. Le ministre fixe les impératifs de l’enseignement : démocratisation, arabisation, orientation scientifique. Mais la mise en place continue : arabisation de la deuxième année du primaire à la rentrée de 1967 , création d’une section arabe à la faculté de droit en 1968 et d’une licence d’histoire en arabe . Le 5 décembre 1969, est créée une Commission nationale de réforme, chargée de préparer un projet de réforme du système éducatif : elle comporte une sous-commission de l’arabisation, présidée par Abdelhamid Mehri.

    Le 26 avril 1968, une ordonnance rend obligatoire pour les fonctionnaires et assimilés la connaissance de la langue nationale, à partir du 1er janvier 1971. Les fonctionnaires en place doivent acquérir pour cette date la connaissance de cette langue, et les nouveaux recrutements à cette date se feront sur cette base. Par ailleurs, les actualités dans les cinémas sont arabisées (en arabe moderne) en octobre 1967 .

    Des réserves sur cette politique sont exprimées en divers lieux: chez les magistrats , dans la presse . Selon une enquête menée à cette époque par l’Université de Berkeley , 80 % des jeunes gens interrogés sont hostiles à l’arabisation de l’enseignement universitaire. En 1969, un groupe d’enseignants algériens demande, dans une lettre publiée dans un hebdomadaire, l’utilisation de l’arabe dialectal dans l’enseignement . En 1970, un article de Mohamed Seddik Benyahia, ministre de l’Information, va jusqu’à évoquer, à propos de cette question, « la trahison des clercs ».

    Mehri et l’arabisation systématique (1970-1977)

    Le remaniement ministériel du 21 juillet 1970 substitue au domaine de Taleb-Ibrahimi trois ministères : l’Enseignement primaire et secondaire (Abdelkrim Benmahmoud), l’Enseignement supérieur et la recherche scientifique (Mohamed Seddik Benyahia), et l’Enseignement originel et les Affaires religieuses (Mouloud Qasim). L’agent actif de l’arabisation sera Abdelhamid Mehri, secrétaire général de l’Enseignement primaire et secondaire. Il se heurtera toutefois à la barrière établie au niveau de l’Enseignement supérieur par le ministre Benyahia. Avec l’appui des arabisants réformistes ou baathistes du FLN, il manifestera une grande obstination à contourner les résistances pour mettre les Algériens devant le fait accompli d’un enseignement primaire et secondaire entièrement arabisé, et ayant de ce fait des retombées sur l’enseignement supérieur .

    L’année 1971, année d’application de la réforme administrative décrétée en 1968, avait été déclarée en janvier « année de l’arabisation ». Mais plusieurs faits allaient en détourner l’attention. En janvier l’agitation des étudiants conduit à la dissolution de leur syndicat, l’UNEA, et à l’arrestation d’un grand nombre d’entre eux . Le 24 février, un nouveau front est ouvert avec la nationalisation des compagnies pétrolières et la tension internationale qui la suit. Enfin, le 8 novembre, est publiée l’Ordonnance « portant révolution agraire » pour la réalisation de laquelle le pouvoir allait devoir s’appuyer sur les éléments progressistes de la société, hostiles aux arabisants .
    En attendant, l’arabisation continue. En avril 1971, un colloque des cadres de l’Éducation aboutit aux décisions suivantes : arabisation totale des 3e et 4e années primaires, arabisation d’un tiers de l’enseignement moyen et d’un tiers du secondaire. Mais un décret du même ministère dispensera les hauts fonctionnaires de la connaissance de la langue arabe . Au ministère de la Justice, un décret du 27 juin 1971 impose l’arabisation. À la rentrée universitaire de 1973, est supprimée la chaire de berbère tenue à l’Université d’Alger par Mouloud Mammeri.

    Abdelhamid Mehri expose son programme dans un article du Monde diplomatique de janvier 1972, sous le titre « La langue arabe reprend sa place ». Le 6 novembre 1973, une Commission nationale d’arabisation est instituée au sein du parti du FLN et présidée par Abdelkader Hadjar. Cette commission présentera en décembre 1974 un rapport sur l’état de l’arabisation. A. Mehri y traitera du bilinguisme, du rapport arabe classique-arabe dialectal et du caractère non naturel du fait linguistique en Algérie.
    Toutefois, la tension créée dans le pays par la mise en oeuvre de la révolution agraire s’ajoute aux controverses suscitées par l’arabisation. Celles-ci aboutissent à des heurts entre étudiants, parfois violents comme en mai 1975, à Alger et à Constantine. Ces tensions sont aggravées par la tenue, du 14 au 17 mai, d’une Conférence nationale sur l’arabisation , inaugurée par un discours important du président Boumediene . Elle est suivie d’une Conférence nationale sur la jeunesse (19-22 mai). La pression arabisante, s’exerçant dans un sens hostile à la révolution agraire, entraînera le 16 avril 1976 une Ordonnance décrétant la suppression de l’enseignement religieux et privé ; dirigée en apparence contre les établissements étrangers, cette mesure vise en réalité les foyers d’endoctrinement islamique que représentait l’Enseignement originel.

    Cette année 1976 est animée par les discussions publiques proposées sur le projet de Charte nationale . Mais l’arabisation de l’environnement est poursuivie : arabisation de l’état-civil , des noms de rues, des plaques d’immatriculation. Le vendredi est déclaré jour de repos hebdomadaire, à la place du dimanche . Le 10 décembre Houari Boumediene candidat unique à la présidence, est élu à 99 % des voix : le pouvoir est apparemment à son sommet.

    Lacheraf et la pause de l’arabisation (1977-1978)

    En avril 1977, à l’occasion d’un remaniement ministériel, Mostefa Lacheraf est nommé ministre de l’Éducation, et Abdellatif Rahal ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique. Ces nominations marquent une véritable pause de l’arabisation. Les raisons qui poussèrent Boumediene à ce revirement ne furent pas explicitées. Il fut sans doute sensible aux tensions provoquées à propos de la révolution agraire et de l’arabisation, et désireux de faire prévaloir l’aspect progressiste de son action. Il semble par ailleurs que des rapports inquiétants sur la situation de l’enseignement lui soient parvenus. Il est sans doute informé de la gravité de la maladie qui l’emportera fin 1978, et désireux de consolider son oeuvre.

    À peine installé au ministère, Lacheraf limoge Mehri et toute son équipe de hauts fonctionnaires. Ils iront se réfugier au parti du FLN où ils constitueront un groupe de pression redoutable. Il se défait des professeurs irakiens que Mehri avait en réserve pour arabiser l’enseignement supérieur. Il reprend la formation d’enseignants bilingues et rétablit une section « lettres bilingues » alors que toutes les sections littéraires avaient été arabisées. De son côté, Abdellatif Rahal insistera à plusieurs reprises sur les inconvénients que présente une arabisation de l’enseignement supérieur, dans un pays où l’emploi est fortement lié à la langue française, et anglaise éventuellement.

    Cette pause sera de courte durée. Lacheraf se livre à des polémiques maladroites , il se heurte aux intrigues du clan arabisant fort puissant dans l’Éducation nationale et représenté au Conseil des ministres par Taleb-Ibrahimi. Celui-ci se verra rappeler par Lacheraf que, étant à sa place, il avait, dans l’un des conseils des ministres des années 1960, dit à propos de l’arabisation : « Cela ne marchera pas, mais il faut la faire! ». Malade, Boumediene n’aura plus l’énergie de le soutenir, et sa mort, le 27 décembre 1978, met un terme à cette pause de l’arabisation.

  • #2
    Le retour des « barbe-FLN » (1979-1984)

    Les Algériens nomment « barbe-FLN » les officiels du FLN de la tendance arabisante, réticente vis-à-vis de la révolution agraire, qui se rapprochèrent du courant islamiste montant, en espérant bénéficier de son dynamisme tout en conservant les avantages de leur position au sein du parti. C’est parmi eux que se comptaient les partisans les plus acharnés de l’arabisation à tout prix et de l’instauration d’une société islamique.

    Le colonel Chadli Bendjedid, mis en place par ses pairs à la tête de l’État, pratiqua une politique habile qui tendait à consolider son pouvoir personnel. La corruption qui éclata sous son régime, la montée de l’islamisme et, à partir de 1986, la chute des prix du pétrole, affaiblirent sa position et le conduisirent à pactiser avec les islamistes et à les utiliser pour conserver son pouvoir sans la hiérarchie militaire : ces manœuvres sont probablement à l’origine de sa démission forcée en janvier 1992. L’interruption du processus électoral en janvier 1992 amènera la présidence de Mohamed Boudiaf; son assassinat en juin de la même année, en fera un bref intermède dans la politique du pays et n’en changera pas fondamentalement l’évolution.

    Les conditions difficiles de l’accession de Chadli Bendjedid à la présidence redonnèrent du pouvoir au Comité Central du FLN. Dans le gouvernement constitué en mars 1979, le ministre de l’Éducation est Mohamed Kharroubi, celui de l’Enseignement supérieur Abdelhaq Bererhi : le premier est un acharné de l’arabisation alors que le second n’est plus à même d’en protéger l’enseignement supérieur. Au FLN, la présidence de la Commission de l’Éducation, de la Formation et de la Culture, d’abord assurée par Benhamouda, revient en janvier 1980 à Taleb-Ibrahimi : dès février, celui-ci annoncera un plan national d’arabisation de l’Administration, du secteur économique et de la recherche scientifique .
    La pression sur l’arabisation avait été relancée dès novembre1979 par la grève des étudiants arabisants : ceux-ci, ne trouvant pas d’emploi au terme de leurs études, exigeaient l’application immédiate de l’arabisation de l’Administration . La grève se termine en 1980, avec la notification des décisions du Comité central préparant une relance de l’arabisation . Cette grève coïncide avec des émeutes en Kabylie, provoquées par l’interdiction d’une conférence de Mouloud Mammeri à Tizi-Ouzou sur la poésie kabyle : d’importantes manifestations, suivies de répression, ont lieu en faveur de la langue et de la culture berbères.

    Le 14 septembre 1980 est pris un arrêté « portant arabisation de la 1re année des sciences sociales, politiques, juridiques et économiques » applicable dès cette année. Une assemblée générale des enseignants francisants demande un report de la rentrée universitaire. Durant l’été, le FLN a poursuivi sa réorganisation en 5 commissions permanentes : l’une est « Information, culture et formation » : le président en est Abdelhamid Mehri. En décembre, le Comité central fait obligation aux cadres des organisations de masse et des assemblées élues d’adhérer au FLN à partir du 1er janvier 1981 (c’est le fameux article 120, qui consacre la mainmise du parti sur la société). Le même mois est installé un Haut Conseil de la langue nationale, chargé du suivi et du contrôle de l’arabisation . L’agitation du parti autour de cette question se poursuit durant toute l’année 1982, sur fond d’affrontements dans les universités, provoqués par des étudiants islamistes ou berbéristes.

    La campagne d’arabisation est couronnée le 22 mai 1984 par l’adoption par l’Assemblée nationale d’un Code de la famille , sous la pression des « barbe-FLN » qui y voient l’application de la loi musulmane – appliquée principalement au détriment des femmes – et une occasion de s’attirer les faveurs des islamistes (et des machistes par la même occasion).
    Durant ce même mois de mai, l’action d’Abdelhamid Mehri trouve son couronnement : il est nommé ambassadeur à Paris. Cette nomination l’éloigne d’un terrain où l'arabisation semble avoir atteint ses limites..

    La vague islamiste (1985-1998)

    L’opposition violente d’islamistes conduits par Mustafa Bouyali se manifeste entre 1982 et 1987, mais un mouvement islamiste plus légaliste se constitue peu à peu et aboutira au Front islamique du salut (FIS) reconnu en 1989. Ce mouvement saura récupérer la révolte étudiante d’octobre 1988. Il emportera les élections communales de 1990, et les législatives de décembre 1991, dont le second tour sera annulé.

    L’arabisation de l’enseignement se poursuit. En septembre 1988, le président Chadli interdit aux élèves algériens la fréquentation des établissements de la mission culturelle française : il prive ainsi l’élite algérienne de la seule possibilité qu’il lui restait de faire échapper ses enfants à l’arabisation. Par ailleurs une tentative est faite par le lobby de l’arabisation pour diminuer la place de la langue française en lui substituant la langue anglaise en option à la quatrième année du primaire .

    Dans ce climat de déliquescence du pouvoir central, ce n’est plus l’arabisation qui prime, mais l’islamisation, la première n’étant plus qu’un adjuvant de la seconde. L’imprégnation religieuse l’avait déjà largement emporté dans l’enseignement. Celui-ci entre dans une phase de dégradation importante à partir de 1986, avec la diminution des ressources de l’État : manque de moyens de documentation et arabisation contribuent à l’effondrement de l’enseignement supérieur arabisé. Les émeutes d’octobre 1988 conduisent à une libéralisation du régime, la constitution de février 1989 instaure le multipartisme, l’abandon des références au socialisme (l’abolition de la révolution agraire le 5 novembre 1990). De ce contexte, profite surtout le mouvement islamiste (FIS) pour gagner les élections communales en juin 1990, puis les législatives en décembre 1991.

    L’Assemblée nationale populaire, à majorité « barbe-FIS » a voté en décembre 1990 une loi de généralisation de l’utilisation de l’arabe, rendant obligatoire l’emploi de cette langue à partir du 5 juillet 1992. Cette mesure sera reportée suite à l’épisode Boudiaf (janvier-juin 1992), pour être relancée en décembre 1996 , pour une application le 5 juillet 1998, qui s’est faite dans l’indifférence générale. Sous la pression islamiste, le noyau « barbe-FIS » s’est replié, mais il est toujours là, oriente la politique du président Liamine Zeroual qui, dans l’espoir de rallier les populations attirées par les islamistes, met en oeuvre les mesures qu’ils auraient prises s’ils étaient parvenus à leurs fins : l’arabisation-islamisation en est un élément capital. Au-delà des enjeux politiques et idéologiques, la réforme nécessaire du système éducatif devra susciter une nouvelle réflexion et de nouvelles décisions sur la place respective des langues utilisées en Algérie. Mais celles-ci restent conditionnées par la redéfinition du pouvoir politique.

    La période Bouteflika (à partir de 1999)

    Élu président le 15 avril 1999 à la suite de la démission de Liamine Zeroual, Abdelaziz Bouteflika est placé entre des forces contradictoires, soutenu à la fois par l’armée et les francophones, et par les islamistes sensibles à ses appels à la concorde civile. Sur le plan linguistique, il prononça un discours d’intronisation en un arabe classique recherché, pour démontrer, semble-t-il, qu’il possédait parfaitement cette langue, et qu’elle n’était pas comprise de l’ensemble de la population. Ses interventions ultérieures se firent en français ou en arabe parlé. Il montrait par là qu’il ne s’appliquait pas à lui-même la loi de généralisation de l’usage de la langue arabe précédemment décrétée. Il affirma à plusieurs reprises une position nuancée dans le domaine des langues, notamment lors de la Journée de l’étudiant, le 19 mai 1999 : « Il est impensable d’étudier des sciences exactes pendant dix ans en arabe alors qu’elles peuvent l’être en un an en anglais . » Il exprime un point de vue réaliste sur la politique linguistique suivie : « Il n’y a jamais eu de problème linguistique en Algérie, juste une rivalité et des luttes pour prendre la place des cadres formés en français . » Par contre, sa position réservée vis-à-vis du berbère fait problème : aux Kabyles, il déclare qu’il n’admettra le tamazight comme langue nationale que sur la base d’un référendum, ce qui équivaut à un refus, vu la position majoritaire des arabophones en Algérie.

    En février 2000 est installée à Alger une Commission Nationale de Réforme du Système Educatif (CNRSE), composée d'une centaine de membres, qui poursuivra ses travaux durant une année. Ses débats, parfois houleux, opposent deux tendances pouvant être dénommées "traditionaliste" et "moderniste". Les points de discorde concernent la place de la langue française dans l'enseignement, et celle de l'islam dans la formation religieuse ou morale. Le rapport remis le 15 mars 2001 au président Bouteflika a été tenu secret par celui-ci, mais la tendance majoritaire a été celle des modernistes : ceux-ci préconisent la réintroduction du bilinguisme dans l'enseignement à tous ses niveaux, une modernisation de la pédagogie et la substitution d'une formation civique à un endoctrinement islamiste. Les conclusions de ce rapport n'ont pas fait l'objet d'une proclamation officielle, du fait de l'opposition d'associations des partisans de la langue arabe, mais ils sont appliqués dans la réforme de l'enseignement actuellement en cours. Autre signe de l'évolution : le 3 octobre 2001, un décret a reconnu le tamazight (berbère) comme langue nationale. Enfin, bien que l'Algérie ne fasse pas partie de la francophonie, le président Bouteflika s'est rendu à Beyrouth, le 18 octobre 2002, au somment de cette organisation, à titre d'invité du président libanais : geste qui peut faire présager d'une évolution de la position de l'Algérie en ce domaine.

    ...

    Tiré de l'article : L'arabisation au Maghreb
    Source : Revue d’Aménagement linguistique, Aménagement linguistique au Maghreb, Office Québécois de la langue française, N°107, hiver 2004, p.15-40.

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    • #3
      Après avoir été chargé par Boumediene de réformer en profondeur le système éducatif algerien, Mostefa Lacheraf fut évincé du gouvernement comme un malpropre par Chadli !
      L'histoire se répétera-t-elle ?.. Nouria Benghebrit subira-t-elle le même sort ?..

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      • #4
        Un aperçu du CV de Mostefa Lacheraf :

        - Conseiller à la Présidence pour les problèmes éducatifs et culturels de 1970 à 1974.
        - Nommé d'avril 1977 à 1979 ministre de l'éducation du gouvernement Houari Boumédienne ;
        Il doit cependant donner sa démission à la suite de l'opposition du parti unique de cette époque à son programme éducatif, qui favorise le bilinguisme, l'enseignement de la langue française et la formation des enseignants en langue arabe pour parvenir a un niveau supérieur de formation nationale.

        Wiki

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        • #5
          Témoignage de Mostefa Lacheraf sur une réforme de l'école algérienne

          Dans les circonstances actuelles, le lecteur algérien appréciera assurément ce témoignage de feu Mostefa Lacheraf (intellectuel et politique qui n'est pas à présenter, décédé en 2007) sur l’école algérienne et une tentative de réforme qui s’est déroulé à la période de Boumediene, tiré de ses mémoires. Bonne lecture.

          «En avril 1977, ayant été nommé ministre de l’Éducation nationale dans le dernier gouvernement de Boumediene et, cela, malgré mes refus répétés, je me vis aussitôt en butte aux attaques et sabotages du clan des conservateurs activistes qui, dans la chasse gardée de l’enseignement à ses différents degrés, avait réalisé depuis 1962 l’union sacrée entre les débris déphasés de certains vieux Oulémas et la nouvelle vague d’arabisants frénétiques et médiocres dominés par le Baath.

          J’avais, en ma double qualité d’ancien professeur titulaire de lycée, depuis 1950, et de conseiller auprès de la Présidence du Conseil (de 1971 à fin 1974) à Alger pour les problèmes éducatifs et culturels, une certaine expérience pratique de l’école en général et de la désastreuse situation scolaire en particulier dont étaient victimes les enfants algériens. Comme préalables à mon acceptation du poste ministériel j’avais obtenu du Président Boumediene qu’il m’autorise à informer les parents d’élèves et l’opinion publique de l’état gravement carencé de l’école algérienne et de la nécessité d’opérer un sévère bilan à son sujet, chose que les tenants de l’arabisme idéologique et non de la légitime arabité culturelle (n’ayant cure de l’exigence qualitative de la langue scolaire) voulaient cacher à tout prix à leurs partisans sectaires et chauffés à blanc.
          (…)

          J’entrepris, à la mi-avril 1977, une semaine après ma désignation à la tête du ministère, d’inspecter la wilaya qui me paraissait la plus évoluée de toutes celles dont se composait l’Algérie de l’époque, l’enseignement, pour moi, étant aussi un problème de société. Je choisis donc Béjaïa et m’en fus voir de près comment fonctionnent les écoles, collèges et lycées à travers le territoire de sa wilaya ; de quel façon enseignaient les maîtres à tous les niveaux, les coopérants étrangers et, surtout, quelles étaient dans tout cela les réactions des élèves dans des rapports, précisément, de maître à élève pour le meilleur et pour le pire.

          Et c’est à Béjaïa, ville évoluée par excellence, ancienne cité de culture et de responsabilité ou de ville-Etat dans le passé, modelée par les siècles révolus et la dynamique du présent, que j’entendis, pour ma première visite un cri unanime, innombrable, d’enfants ; un cri douloureux de réprobation qui me toucha profondément. C’était une classe d’une quarantaine d’élèves de dix à douze ans. Je voulais assister à une leçon de lecture expliquée et, d’emblée, le contraste entre des enfants éveillés, d’une tenue vestimentaire propre et décente et les yeux pétillant d’intelligence, et entre le maître hirsute, avec une chevelure abondante, une barbe de plusieurs jours, un maintien et une allure négligés, me frappa beaucoup. Le maître, la voix mal-assurée, non pas à cause de l’inspection ministérielle, mais pour des raisons d’insuffisance pédagogique, lisant le texte à haute voix, cependant que les élèves très disciplinés, suivaient, chacun dans son livre. Mais voilà qu’à un moment donné il commet une faute grossière de prononciation, butant sur un mot qu’il ne connaissait pas et voulant l’expliquer de travers. Ce fut alors la tempête qui n’excluait, bizarrement, ni le respect ni la fermeté du propos. En effet, un cri unique s’éleva de cet ensemble studieux de quarante élèves penchés sur leur livre de lecture puis relevant la tête pour protester avec véhémence. «Yà-cheikh, mawch hakdha !» (Maitre, ce n’est pas ça ! Maitre, ce n’est pas comme ça) dirent-ils d’une même voix comme s’ils s’étaient concertés. Il était aussi spontané que bouleversant, ce cri d’enfants sérieux corrigeant la faute énorme de leur maitre mais le faisant sans rire, ni se moquer, le visage crispé, une physionomie d’adulte succédant tout à coup à la fraicheur de leurs traits d’adolescents.

          L’observateur, ignorant des réflexes et habitudes mentales de notre enfance scolaire à l’époque (quinze ans seulement après la Libération), se serait sans doute attendu à voir éclater un chahut hilare et débridé se propageant d’un rang à l’autre et venant battre l’estrade du professeur comme un flot vulgaire de propos narquois et railleries. Il n’en fut rien, je peux en témoigner, mais tout cela me confirma dans la certitude tragique et impardonnable à la fois, qu’on avait livré à des enseignants incompétents et parfois mal léchés et peu soucieux de leur propre dignité humaine et professionnelle, des élèves à la fleur de l’âge, l’esprit vif et les manières correctes, encore pleins de respect et de retenue envers leurs professeurs et suffisamment capables – et motivés – pour rectifier leurs bourdes et chercher, hélas ! en vain, à apprendre, comme cela se fait dans un pays normal.

          Ma tournée d’inspection scolaire dans la wilaya de Béjaïa m’avait durant trois jours entiers, mené d’un village à l’autre, d’un lycée de filles à un collège de garçons et, partout je découvrais des richesses juvéniles de bonne volonté, des visages souriant à l’avenir mais toutes et tous ou presque étaient rebutés objectivement par le même obstacle humain, un personnel médiocre qui ne comprenait pas cette grande chance qu’il gaspillait en pure perte pour le pays…»

          Extrait de : Des noms et des lieux. Mémoires d’une Algérie oubliée
          Mostefa Lacheraf, CASBAH éditions, 1998.
          Dernière modification par Capo, 14 septembre 2016, 01h40.

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          • #6
            Le rôle de la France dans l'Arabisation !!!



            مولود قاسم نايت بلقاسم رائد التعريب في الجزائر

            Dernière modification par abderahmane1, 14 septembre 2016, 14h32.
            "نحن قوم أعزنا الله بالإسلام ..." Omar Ibn El Khettab RA

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            • #7
              Personnellement, je suis un adepte du bilinguisme..mais il faudrait un miracle pour que Benghebrit puisse l'imposer à la classe politique, syndicale et sociale !.. Le dernier à avoir tenté une réforme pareille n'était autre qu'un révolutionnaire de haut calibre... Et pourtant, il fut broyé par le système !

              Pour expliquer sa vision des choses, Mostefa Lacheraf, alors ministre de l’éducation en 1977, avait publié sur le journal El Moudhahid 3 superbes articles. Ces articles-là sont introuvables sur le web...mais je m’attelle à les mettre prochainement en ligne !

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              • #8
                Et dire que Mouloud Kacem , est un fervent adepte de la consommation de bon wiskie ! ...

                il est du bled
                peut etre ala fete de biere a munich entre 59-61

                tu dois confondre avec kafi et bouteflika and co

                les nuits d alger...
                The truth is incontrovertible, malice may attack it, ignorance may deride it, but in the end; there it is.” Winston Churchill

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                • #9
                  puis par la vague islamiste (1985-1998)

                  puis par la vague islamiste (1985-a nos jours)
                  The truth is incontrovertible, malice may attack it, ignorance may deride it, but in the end; there it is.” Winston Churchill

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                  • #10
                    mais je m’attelle à les mettre prochainement en ligne !
                    dejaposte
                    The truth is incontrovertible, malice may attack it, ignorance may deride it, but in the end; there it is.” Winston Churchill

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                    • #11
                      Solas

                      où ça ?.. j'en doute fortement

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                      • #12
                        où ça ?.. j'en doute fortement

                        a l epoque ou j etais marin
                        2005
                        The truth is incontrovertible, malice may attack it, ignorance may deride it, but in the end; there it is.” Winston Churchill

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                        • #13
                          Solas

                          Je t'encourage à retrouver les articles.. et à les re-poster ;
                          Car de mon point de vue, ils sont indisponibles sur le web !!

                          Ce sont des articles d'une extrême valeur publiés uniquement sur : El Moudjahdid (9,10 et 11 août 1977) et la Revue Algérienne des Sciences Juridiques, Economiques et Politiques (septembre 1977).
                          La série d'articles porte le titre : Les problèmes de l’enseignement et de l’éducation .

                          Bonne recherche !

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                          • #14
                            Et dire que Mouloud Kacem , est un fervent adepte de la consommation de bon wiskie ! ...
                            Je ne vois pas le rapport avec notre sujet et la langue arabe ! Mais tu dois savoir que le wiski est américain ou anglais à la rigueur, qui n’a jamais été français même si les Français en sont les premiers consommateurs au monde ! Non monsieur, notre Penseur et linguiste Mouloud Kacem Nait Belkacem est un pieux pur sang kabyle qui avait choisi, des 9 langues qu’il maitrise parfaitement, la langue arabe pour ses études académiques et ses activités politiques.

                            "نحن قوم أعزنا الله بالإسلام ..." Omar Ibn El Khettab RA

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                            • #15
                              Réformes du système éducatif : Mostefa Lacheraf et Nouria Benghebrit.. une même bataille ?
                              Une même bataille peut-être comme certains de fA, mais surement pas la même stature intellectuelle !
                              "نحن قوم أعزنا الله بالإسلام ..." Omar Ibn El Khettab RA

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