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L’Arabie Saoudite sur les réseaux sociaux

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  • L’Arabie Saoudite sur les réseaux sociaux

    Sans aller jusqu’à contester le régime, les réseaux sociaux représentent un petit espace de liberté en Arabie Saoudite.

    Voilà plusieurs années que les saoudiens s’expriment de plus en plus sur les réseaux sociaux, en s’impliquant dans les campagnes, pour demander davantage de droits ou dénoncer les déséquilibres sociaux qui fissurent l’image lisse et maîtrisée d’un royaume obsédé par le contrôle total de l’internet, comme l’analyse Romain Aby, doctorant à l’institut français de géopolitique à l’Université Paris 8, spécialiste de l’Arabie saoudite.
    Le gouvernement Saoudien, ou l’obsession de la maîtrise de la communication digitale

    « Depuis de nombreuses années, le gouvernement maîtrise étroitement sa communication, sur les médias papiers traditionnels mais au début des années 90, une véritable prise de conscience a eu lieu, sur la nécessité de moderniser sa communication, essentiellement à travers la création d’organes de presse en ligne, mais également via des chaînes satellitaires qui viennent concurrencer les autres chaînes comme Al Jazeera ; au début des années 2000, la chaine « Al Arabia » a été lancée par le groupe MBC, pour enrichir cette communication et renforcer ces nouveaux vecteurs de communication », rappelle Romain Aby.

    Le pouvoir Saoudien qui contrôle de près la presse traditionnelle, maîtrise moins les réseaux sociaux, son nouveau challenge
    Les réseaux sociaux représentent de nombreux avantages : ils mobilisent les masses, comme lors du printemps arabe et de la révolution du jasmin. Les réseaux sociaux sont plus émancipés de la ligne officielle de communication gouvernementale. « Rappelons que l’Arabie Saoudite est un pays avec un taux de pénétration de l’internet assez élevé, de l’ordre de 60%.

    Mais la réalité est même supérieure, puisque de nombreuses sociétés étrangères travaillent main dans la main avec les deux grands groupes de communication saoudiens, STC « saudi télécom company »et « Mobily». Les deux grands groupes saoudiens peuvent également compter sur le soutien du groupe ZTE, dans le quadrillage du territoire national, jusqu’aux zones les plus reculées du sud de l’Arabie saoudite, comme Najran. Le dynamisme des réseaux sociaux s’enracine également dans un vivier, celui d’une population très jeune (45% de la population saoudienne a moins de 24 ans), la tranche des 25-30 ans est aussi très représentée. Une jeunesse sensibilisée aux réseaux sociaux, qui aspire à communiquer librement, dans une société où les libertés sont toujours restreintes.
    Sans aller jusqu’à contester le régime, les réseaux sociaux représentent un petit espace de liberté. L’utilisation de Facebook est plus importante que celle de twitter. Toutefois, twitter, moins centré sur les cercles familiaux, permet une mobilisation plus rapide et plus efficace, dans le sens des mobilisations sociales ou de revendications politiques.

    Twitter : nouveau terrain de chasse du gouvernement saoudien

    De nombreux comptes localisés en Arabie Saoudite publient en continue, une actualité complaisante vis à vis du gouvernement. Des comptes qui ne renvoient pas forcément vers des sites internet ou des quotidiens papiers, comme c’était le cas par le passé. Ces comptes permettent par ailleurs de saturer efficacement l’information en ligne.
    La stratégie de communication du gouvernement saoudien défend plusieurs objectifs

    Pour Romain Aby, « l’objectif premier de la cyber-stratégie l’Arabie Saoudite est la consolidation du pouvoir de la monarchie. Le second est soutenir sa politique étrangère et d’asseoir un leadership régional ». Sur des dossiers concernant la Syrie ou le Yémen, la monarchie ne communique pas directement et il est peu probable que le Roi prenne son smartphone pour se mettre à twitter. Mais les organes de presse saoudiens peuvent également compter sur les relais des intellectuels pro-saoudiens à l’étranger.
    Contrairement à la famille royale, les dignitaires religieux communiquent sur les réseaux

    En dehors du cadre traditionnel wahhabite, qui communique un peu moins sur les réseaux sociaux, deux écoles se partagent le terrain de la communication religieuse digitale : la mouvance traditionnelle du grand mufti d’Arabie Saoudite, particulièrement critique à l’égard de twitter et des réseaux sociaux. Ces nouveaux vecteurs seraient la source de tous les maux de la société saoudienne et nuisent à la communication des imams. Par opposition, d’autres comptes religieux publient des fatwas, d’autres adopteront une position politique plus marquée sur la stratégie d’influence de l’Iran, le seul sujet tabou demeurant le régime monarchique et la famille royale.

    Des libéraux présents, mais peu influents sur les réseaux sociaux
    Présents sur les réseaux sociaux, les libéraux n’ont pas une large audience, auprès d’une population saoudienne formatée par le discours wahhabite officiel. Les comptes twitter des libéraux comptent entre 30 et 150 000 abonnés, lorsque certains religieux dépassent les 15 millions d’abonnés alors que le compte du Roi compte 5 millions d’abonnés. Parmi les courants libéraux, celui de « l’éveil islamique », particulièrement médiatisé pendant la guerre du Golfe, opposé au stationnement des américains dans la région. Initialement critique vis à vis de la monarchie, le mouvement s’est peu à peu assagi, jusqu’à s’inscrire dans le prolongement de la stratégie de communication du gouvernement.

    Des sphères d’influence en lutte pour leur influence politique
    Derrière la multitude d’acteurs professionnels de la communication en Arabie Saoudite, Romain Aby distingue le pouvoir politique et les principales figures monarchiques ou religieuses mais aussi des hommes d’affaires à l’influence prépondérante.

    Des acteurs pris dans la spirale du pouvoir politique en Arabie Saoudite et plus globalement pour l’influence sur le monde arabe. Outre son action militaire, le régime saoudien s’ancre solidement sur la base idéologique de l’islam wahhabite, qu’il diffuse à travers le monde par des canaux politico-religieux, publics ou privés, les médias et les réseaux sociaux.
    Mais pour Jean-Christophe Ploquin, rédacteur en chef de La Croix, internet fragilise chaque jour un peu la censure d’Etat. « L’Internet offre des possibilités innombrables de fragmentation ».

    Les médias et les technologies, dont disposent les dissidents, sapent à peu de frais les efforts centripètes de l’État qui, en ayant largement insisté sur le rôle de la famille royale et de la province centrale du Nejd, s’est aliéné de très nombreuses personnes au sein de la société très diversifiée qu’est l’Arabie saoudite ». Un air de fin de règne dans la royaume où l’un des usages favoris de l’internet par les saoudiens est l’interaction. Un engouement de moins en moins passif qui préoccupe les autorités puisque 93 % des saoudiens fréquentent assidument les réseaux sociaux et 63% à se décrivent comme très engagés.

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