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Éthiopie, le paradoxe africain

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  • Éthiopie, le paradoxe africain

    Citée pour ses réussites économiques, l'Éthiopie s'enlise doucement, mais sûrement, dans une crise politique et sociale qui pourrait tout hypothéquer.

    Depuis les années 2000, l'Éthiopie résonne de métaphores apologiques. « Miracle africain », « nouvel eldorado », « Far East ». Avec une croissance économique à deux chiffres, le pays a vite renvoyé aux oubliettes les images de famines et de guerres civiles qui l'accompagnaient régulièrement. C'est que les investisseurs étrangers et les membres de la diaspora ont perçu son potentiel et ont contribué à le mettre en valeur. Oui, l'Éthiopie était bien sous les projecteurs.

    Mais aujourd'hui, les zones d'ombre sont difficiles à ignorer. Depuis un an, le pays est secoué par des manifestations antigouvernementales, d'abord de l'ethnie oromo, puis des Amhara. Début octobre, la catastrophe d'Ireecha a précipité la crise. Les mouvements protestataires se sont étendus à la banlieue d'Addis-Abeba, où une douzaine de sites industriels appartenant à des investisseurs étrangers ont été en partie détruits. Ces usines, fermes horticoles ou cimenteries, dont la terre a été cédée par le gouvernement, cristallisent les premiers griefs des manifestants qui reprochent aux autorités les expropriations arbitraires.

    L'état d'urgence imposé
    Le 9 octobre, le gouvernement décrète l'état d'urgence. Une semaine plus tard sont diffusées de nouvelles directives – mais aucune traduction officielle en anglais n'a encore été publiée. Une trentaine au total, qui marque un net durcissement. Les manifestations sont bannies dans les écoles et les universités. Le droit de grève est suspendu. Les diplomates étrangers ne peuvent sortir de la capitale au-delà d'un périmètre de 40 kilomètres qu'en possession d'un laissez-passer. Les partis d'opposition se voient interdire les déclarations à la presse « pouvant inciter à la violence ». Le visionnage des deux chaînes d'opposition ESAT (Ethiopian Satellite Television) et OMN (Oromo Media Network), basées aux États-Unis, est devenu un « acte criminel ». Enfin, toute personne « suspecte » peut être arrêtée sans mandat.

    De quoi conduire le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, à se déclarer « inquiet » des mesures prises par l'Éthiopie et a appelé le gouvernement à « préserver les droits de l'homme fondamentaux ». Dans un communiqué publié mardi 18 octobre, Muthoni Wanyeki, directeur Afrique de l'Est à Amnesty International, considère que « ces mesures vont, non pas atténuer, mais exacerber les griefs des manifestants ».
    Les « suspects ordinaires »
    Sur son blog, le militant des droits de l'homme Befeqadu Hailu écrit cette semaine : « En tant que suspects ordinaires, au vu de nos dissidences, mes amis et moi-même avons peur, encore plus que d'habitude. Critiquer le gouvernement a toujours été risqué. » Befeqadu Hailu fait partie du collectif d'activistes « zone 9 ». Il y a tout juste un an, il sortait de 18 mois d'emprisonnement. Aujourd'hui, il continue à écrire malgré ses « peurs ».

    Le visage fin, le sourire bienveillant, ce journaliste de profession voit son travail comme une nécessité : « En Éthiopie, la liberté de la presse n'existe pas. La société civile est absente. C'est donc notre rôle, à nous activistes des droits de l'homme, de combler ce vide. » Un rôle difficile à incarner. « Ici, prendre une simple photo dans un lieu public peut suffire à vous faire arrêter », estime le trentenaire qui se souvient que quelques lignes l'ont envoyé en prison, avant l'année électorale. « Notre contribution à la démocratisation de l'Éthiopie a été plutôt faible, juge-t-il, mais le prix à payer a été extrêmement élevé. »

    Befeqadu est passé par les prisons redoutées de Maekalawi à Addis-Abeba et de Kilinto en banlieue de la capitale. Si l'homme a conservé son militantisme, il est plus prudent que jamais. « Quand je m'apprête à publier un texte, je lis et relis chaque ligne, car je m'attends à ce qu'un de mes propos soit interprété et détourné. Et se retourne contre moi. » À sa sortie de prison, il avait pourtant promis à ses geôliers, et surtout à lui-même, de ne plus jamais écrire. « Mais j'ai réalisé le soutien que nous avions, je ne pouvais pas m'arrêter. Si je ne le fais pas, qui le fera ? C'est mon pays. » Même s'il est loin d'être une tête brûlée, Befeqadu conclut : « Parfois, cela vaut la peine d'être arrêté, d'être torturé. »
    « La condition des droits de l'homme ne fait qu'empirer »
    Befeqadu est loin d'être le seul dans ce cas. Kumlachew Dagne, le président adjoint du Conseil éthiopien des droits de l'homme (HRCO) estime qu'en 2009, « après la proclamation de la loi antiterroriste, des centaines de citoyens ont été persécutés en raison de leurs soi-disant activités terroristes – mais en réalité parce qu'ils avaient exprimé leurs désaccords politiques et critiqué l'État ». Dans les bureaux étriqués de l'institution, les étagères plient sous les rapports de la Croix rouge et les textes de la Convention de Genève. Le HRCO vient de fêter ses 25 ans. Il a le même âge que la coalition EPRDF au pouvoir. « Depuis un quart de siècle, juge Kumlachew Dagne, la condition des droits de l'homme n'a fait qu'empirer. Un exemple simple : entre 1991 et 1993, durant la période de transition, nous avions 60, 70 journaux. La plupart couvrant la politique, l'économie, les questions sociales. » Aujourd'hui, ce nombre s'est réduit à peau de chagrin.

    Son collègue Betsate Terefe, le directeur exécutif, se souvient d'une autre année noire : 2010, quand le gouvernement a proclamé la loi sur les associations caritatives. Désormais, les financements étrangers des ONG devront plafonner à seulement 10 % de leur budget. Pour le Conseil des droits de l'homme, c'est un coup de massue. « Avant cette loi, nous avions 13 bureaux régionaux en dehors d'Addis-Abeba. Nous avons été forcés d'en fermer dix. Vous imaginez notre handicap ? Nous avons aussi dû licencier 60 employés… » Betsate Terefe fronce les sourcils derrière ses lunettes plantées sur le bout du nez. « En Éthiopie, nous n'avons pas pour habitude de soutenir les efforts en faveur des droits de l'homme. Ce n'est pas dans notre culture. Il y a cette atmosphère de peur : les gens nous évitent.
    Des promesses encore attendues
    Si les Nations unies, les ambassades, les organisations des droits de l'homme expriment leur crainte de voir, en Éthiopie, les libertés fondamentales s'effriter, le gouvernement a cependant émis des signes d'ouverture. Début octobre, le Premier ministre Hailemariam Desalegn a promis un dialogue avec l'opposition et une volonté de « réformer le système électoral » alors que l'EPDRF avait remporté 100 % des sièges au parlement en 2015. Mais depuis ces annonces, les actes se font toujours attendre.

    En revanche, le réseau internet mobile est coupé dans le pays depuis le 5 octobre. À Sebeta, en bordure de la capitale, un millier de personnes ont été arrêtées depuis le début du mois. Si certaines ont été relâchées, la plupart font toujours l'objet d'une enquête. Élias*, un étudiant oromo de la banlieue d'Addis-Abeba, et engagé dans les manifestations, se confie : « Depuis une semaine, je ne dors plus chez moi. Je change de maison tous les jours. Je sais que la police me cherche. J'ai peur d'être arrêté. » Témoin aux premières loges d'une gronde populaire, Élias ne voit plus d'alternatives : « Je ne lui ai jamais fait confiance, mais si le régime avait fait preuve d'ouverture plus tôt, il y aurait peut-être eu une chance de sortir de l'impasse. Mais aujourd'hui, on veut juste un nouveau gouvernement. »

    le Point fr

  • #2
    le paradoxe éthiopien vient du fait également que ce pays ne peut pas se justifier de son retard en prétextant la colonisation puisqu'il jamais été colonisé, en dehors d'une parenthèse infime par l'Italie

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    • #3
      Beaucoup d arabe de l est ont des origines habchi
      La haine aveugle

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      • #4
        Citée pour ses réussites économiques
        je ne crois pas que des reussites economiques puissent émerger comme ca,les autorités ne font que louer des terrains pour les sociétés étrangères qui ne font que sucer les richesses du pays.
        Dernière modification par jabroun7, 29 octobre 2016, 23h08.

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