PIERRE-OLIVIER ROUAUD PUBLIÉ LE 25/10/2016 À 13H55
L'agence publique Masen pilote officiellement depuis fin septembre l'ensemble des projets renouvelables au Maroc. Alors que le nouveau cadre institutionnel se mettait en place, L'Usine Nouvelle a rencontré à Casablanca Mustapha Bakkoury, son président. Celui qui est aussi président de la région Casablanca-Settat fait le point sur les énormes projets à venir de Masen et ses relations avec l'Office public de l'électricité ONEE ou les industriels marocains qui attendent des retombées des projets alors que le pays veut porter d'environ un tiers à 52% la capacité électrique en renouvelables.
Comment le Maroc va développer 12GW en renouvelables d'ici à 2030, selon Mustapha Bakkoury, président de Masen
L'Usine Nouvelle : Quelle route prendre pour parvenir à l'objectif ambitieux de 52% de la capacité électrique installée en 2030 ?
Mustapha Bakkoury : L'objectif des 52% en 2030 est précédé par l'objectif de 42% à horizon 2020 qui est toujours en cours. L'an dernier après analyse, nous avons été rassurés par la faisabilité du premier objectif à 42%. Ce qui a conduit au second. L'objectif de 52% a été construit par rapport à une logique d'ambition et de chiffrage. Il fallait attester de potentiels de ressources solaires, éoliennes, hydroélectriques et éventuellement d'autres.
Nous avons également ouvert la porte pour explorer d'autres sources d'énergies comme la biomasse ou les énergies marines. Ce ne sont pas des objectifs immédiats mais il faut préparer l'avenir.
Nous avons lancé les renouvelables avec l'idée d'en faire un pilier structurel des métiers énergétiques au Maroc. L'idée est d'aller le plus loin et le plus longtemps possible. Il faut garder à l'esprit que nous devons adresser les besoins électriques concrets de notre économie.
Sur quelle capacité raisonnez-vous?
La capacité électrique actuelle du Maroc est d'un peu moins de 10 GW. En 2030 elle devrait plus que doubler compte tenu de la hausse de la demande. Logiquement on devrait dépasser 24 GW y compris le charbon, le gaz et le pétrole. Selon nous, il y aura alors deux bases importantes, le renouvelable et le gaz naturel d'un côté [notamment dans le cadre d’un grand plan GNL à venir NDR] et le reliquat des autres fossiles de l'autre.
Il s'agit donc bien de 52% de la capacité de 2030 [contre 33% aujourd’hui NDR]. Le renouvelable ferait un peu plus de 12 GW. On rajoutera encore 3GW d'ici 2020 et 6GW de 2020 à 2030 au minimum. Pour 2020, le plan de marche a été validé. Celui-ci comprend Noor 2,3 et 4, le plan éolien qui est déjà bien avancé. Dans le photovoltaïque, nous avons plusieurs projets. Il y a aussi le projet Midelt préfiguration de plusieurs autres projets qui va apparaitre dès l'an prochain.
Où en est-il ?
Le process a commencé. Le site a été identifié. La préqualification pour Midelt est en cours et devrait être finalisée avant la fin de l'année. C’est un projet hybride qui sera décliné ailleurs. Il mixera CSP avec stockage et PV avec une petite capacité de stockage pour réguler la production. C'est une centrale qui ne fonctionnerait pas 24h sur 24 mais en fonction des besoins. L'objectif est de couvrir les périodes de pointe avec une relative aisance et d'avoir de la puissance pendant la journée
Qui du cadre institutionnel de Masen ?
La centrale Noor 1 inaugurée le 4 février par Sa majesté est opérationnelle (photo ci dessouq), l'objectif 2020 est dans les tuyaux. Il faut désormais enclencher ce qu'il faut pour tenir le défi de 2030. Pour cela, l'Etat a procédé à cette reconfiguration institutionnelle, qui a été sanctionnée par une modification législative des textes régissant les acteurs comme l'ONEE, Masen qui pilote désormais toutes les ENR, l'Aderee renommé AME qui s'occupe de l'efficacité énergétique. Ces lois sont promulguées, le dispositif est en place.
De plus à cette occasion, le lien entre Masen et l'ONEE va être renforcé. Ce processus a abouti a des promulgations de lois. Depuis fin septembre, Masen -Moroccan Agency for Solar Energy est devenu Masen The Moroccan Agency for Sustainable Energy son nouveau nom avec une nouvelle identité visuelle. Ce volet institutionnel ouvre la voie au volet opérationnel. Le transfert des projets de l’ONEE, la prise en mains de nouveaux projets, et après il faudra explorer les synergies à déployer.
Le regroupement autour de Masen de toutes les ENR, c'est une victoire pour vous?
Je n'ai aucune considération personnelle dans cette affaire. L'idée derrière cette reconfiguration est de franchir une nouvelle étape en allant vers 2030 et de continuer à explorer tout ce qui peut être généré comme retombées positives dans l'économie.
Comment va se passer le mode opérationnel ?
Par la recherche de synergies dans le pilotage des projets éolien et solaire. Il ya des économies et des optimisations à réaliser. D'autres possibilités d'intervention ne sont pas exclues.
L'Onee était investisseur pour son compte dans ses moyens de production, Masen le fera …
Justement aujourd'hui on se donne des possibilités nouvelles. Il faut investir pour servir l'ONE mais de ne rien exclure par ailleurs. Il faut élargir pour adresser les usages sans forcément passer par l'électrique. Les possibilités de coopération au niveau continental et international font également partie de cette approche. D'autres investisseurs ne sont pas exclus.
Est-ce le cas aujourd'hui ?
Nous sommes déjà investisseurs dans nos projets. Nous y avons jusqu'à présent pris systématiquement 25%. Ce positionnement peut s'approfondir. Nous avons créé une coentreprise avec une société française Alcen sur le Fresnel avec l'idée de pousser des projets aussi bien au Maroc qu'à l'extérieur. Et l'on reste ouverts tout en ayant une bonne approche des risques.
Pas moins de 12 Gw à réaliser en plus, ça fait au bas mot 12 milliards d’euros de plus de financement ?
Sur le chiffre, je ne sais pas. Masen travaille pour que le coût baisse au Mw et que les 12 Gw soient utiles. Dès que l'utilité existe et que nous sommes dans logique d'optimisation c'est forcément finançable par mon économie parce que je vais vendre mon service. Si je ne fais pas de renouvelable et que je fasse du fossile les 12 Gw j'en ai toujours besoin. C'est notre chance. Nous avons besoin de cette électricité. C'est plus facile quand on doit substituer à l’avenir. Il faut saluer le Maroc parce qu'il a osé prendre cette décision au moment où il doit développer des capacités. Si tous les pays prenaient des décisions du même type, le monde se porterait beaucoup mieux.
Est-ce que vous diriez que les renouvelables aujourd'hui restent plus chère que le conventionnel, notamment ls centrales charbon qui assurent aujorud'hui la moitié de la production électrique du Maroc ?
Ca dépend de ce que l'on fait. Il faut tenir compte de la durée de vie comptable du projet. La durée de vie d'un projet bien conçu est supérieure à la durée d'amortissement des crédits. Et cela n'est pas pris en compte dans les calculs. Il faut calculez ce prix sur une durée de 25 ans. La force du renouvelable est que l'énergie est quasi gratuite. On a une visibilité sur le prix de revient. Prenez deux prix : celui d'un kwh fossile et celui d'un kwh renouvelable. Par nature j'ai une visibilité sur le renouvelable sur la durée du projet. Pour le fossile si je veux la même je dois acheter une option à long terme. Mais vous n'allez trouver personne sur le marché pour cela. En réalité et au contraire, je pourrais dès demain vendre des options sur la base d'un projet renouvelable. C'est une valeur dont peu tiennent compte.
Pourquoi avoir choisi le CSP au départ du plan solaire?
Nous avons estimé qu'il fallait que le renouvelable et en particulier le solaire puisse démontrer sa capacité de se substituer au fossile. Le photovoltaïque ne le permet pas. Il ne s'agit d'ailleurs pas d'opposer le photovoltaique au CSP. Ce sont deux usages complémentaires.
Pour le premier projet Noor se contenter du photovoltaïque, n'aurait pas fait jouer au solaire le rôle de substitution, que nous recherché à terme. Il fallait que nos premiers projets le démontrent d'un point de vue technique et économique sans se fermer aux autres technologies. D'ailleurs nous développons le PV. Mais tenir ce discours au départ tant que l'on ne passait pas à l'action il n'était pas audible. Aujourd'hui les gens voient bien que nous sommes du mix énergétique et que nous sommes aussi sur une logique de compétitivité économique globale. Il va falloir regarder tous les projets et c'est leur somme qui fait que notre stratégie renouvelable ait un sens. Le CSP par exemple était la bonne brique au bon moment. Il y a aussi la question du stockage qui se pose parce qu'on a un problème de pointe. Nous sommes en phase d'investissement. Il faut que les capacités nouvelles viennent couvrir la pointe car si on ne la couvre pas on va brimer le développement économique, la dynamique d'urbanisation…
L'agence publique Masen pilote officiellement depuis fin septembre l'ensemble des projets renouvelables au Maroc. Alors que le nouveau cadre institutionnel se mettait en place, L'Usine Nouvelle a rencontré à Casablanca Mustapha Bakkoury, son président. Celui qui est aussi président de la région Casablanca-Settat fait le point sur les énormes projets à venir de Masen et ses relations avec l'Office public de l'électricité ONEE ou les industriels marocains qui attendent des retombées des projets alors que le pays veut porter d'environ un tiers à 52% la capacité électrique en renouvelables.
Comment le Maroc va développer 12GW en renouvelables d'ici à 2030, selon Mustapha Bakkoury, président de Masen
L'Usine Nouvelle : Quelle route prendre pour parvenir à l'objectif ambitieux de 52% de la capacité électrique installée en 2030 ?
Mustapha Bakkoury : L'objectif des 52% en 2030 est précédé par l'objectif de 42% à horizon 2020 qui est toujours en cours. L'an dernier après analyse, nous avons été rassurés par la faisabilité du premier objectif à 42%. Ce qui a conduit au second. L'objectif de 52% a été construit par rapport à une logique d'ambition et de chiffrage. Il fallait attester de potentiels de ressources solaires, éoliennes, hydroélectriques et éventuellement d'autres.
Nous avons également ouvert la porte pour explorer d'autres sources d'énergies comme la biomasse ou les énergies marines. Ce ne sont pas des objectifs immédiats mais il faut préparer l'avenir.
Nous avons lancé les renouvelables avec l'idée d'en faire un pilier structurel des métiers énergétiques au Maroc. L'idée est d'aller le plus loin et le plus longtemps possible. Il faut garder à l'esprit que nous devons adresser les besoins électriques concrets de notre économie.
Sur quelle capacité raisonnez-vous?
La capacité électrique actuelle du Maroc est d'un peu moins de 10 GW. En 2030 elle devrait plus que doubler compte tenu de la hausse de la demande. Logiquement on devrait dépasser 24 GW y compris le charbon, le gaz et le pétrole. Selon nous, il y aura alors deux bases importantes, le renouvelable et le gaz naturel d'un côté [notamment dans le cadre d’un grand plan GNL à venir NDR] et le reliquat des autres fossiles de l'autre.
Il s'agit donc bien de 52% de la capacité de 2030 [contre 33% aujourd’hui NDR]. Le renouvelable ferait un peu plus de 12 GW. On rajoutera encore 3GW d'ici 2020 et 6GW de 2020 à 2030 au minimum. Pour 2020, le plan de marche a été validé. Celui-ci comprend Noor 2,3 et 4, le plan éolien qui est déjà bien avancé. Dans le photovoltaïque, nous avons plusieurs projets. Il y a aussi le projet Midelt préfiguration de plusieurs autres projets qui va apparaitre dès l'an prochain.
Où en est-il ?
Le process a commencé. Le site a été identifié. La préqualification pour Midelt est en cours et devrait être finalisée avant la fin de l'année. C’est un projet hybride qui sera décliné ailleurs. Il mixera CSP avec stockage et PV avec une petite capacité de stockage pour réguler la production. C'est une centrale qui ne fonctionnerait pas 24h sur 24 mais en fonction des besoins. L'objectif est de couvrir les périodes de pointe avec une relative aisance et d'avoir de la puissance pendant la journée
Qui du cadre institutionnel de Masen ?
La centrale Noor 1 inaugurée le 4 février par Sa majesté est opérationnelle (photo ci dessouq), l'objectif 2020 est dans les tuyaux. Il faut désormais enclencher ce qu'il faut pour tenir le défi de 2030. Pour cela, l'Etat a procédé à cette reconfiguration institutionnelle, qui a été sanctionnée par une modification législative des textes régissant les acteurs comme l'ONEE, Masen qui pilote désormais toutes les ENR, l'Aderee renommé AME qui s'occupe de l'efficacité énergétique. Ces lois sont promulguées, le dispositif est en place.
De plus à cette occasion, le lien entre Masen et l'ONEE va être renforcé. Ce processus a abouti a des promulgations de lois. Depuis fin septembre, Masen -Moroccan Agency for Solar Energy est devenu Masen The Moroccan Agency for Sustainable Energy son nouveau nom avec une nouvelle identité visuelle. Ce volet institutionnel ouvre la voie au volet opérationnel. Le transfert des projets de l’ONEE, la prise en mains de nouveaux projets, et après il faudra explorer les synergies à déployer.
Le regroupement autour de Masen de toutes les ENR, c'est une victoire pour vous?
Je n'ai aucune considération personnelle dans cette affaire. L'idée derrière cette reconfiguration est de franchir une nouvelle étape en allant vers 2030 et de continuer à explorer tout ce qui peut être généré comme retombées positives dans l'économie.
Comment va se passer le mode opérationnel ?
Par la recherche de synergies dans le pilotage des projets éolien et solaire. Il ya des économies et des optimisations à réaliser. D'autres possibilités d'intervention ne sont pas exclues.
L'Onee était investisseur pour son compte dans ses moyens de production, Masen le fera …
Justement aujourd'hui on se donne des possibilités nouvelles. Il faut investir pour servir l'ONE mais de ne rien exclure par ailleurs. Il faut élargir pour adresser les usages sans forcément passer par l'électrique. Les possibilités de coopération au niveau continental et international font également partie de cette approche. D'autres investisseurs ne sont pas exclus.
Est-ce le cas aujourd'hui ?
Nous sommes déjà investisseurs dans nos projets. Nous y avons jusqu'à présent pris systématiquement 25%. Ce positionnement peut s'approfondir. Nous avons créé une coentreprise avec une société française Alcen sur le Fresnel avec l'idée de pousser des projets aussi bien au Maroc qu'à l'extérieur. Et l'on reste ouverts tout en ayant une bonne approche des risques.
Pas moins de 12 Gw à réaliser en plus, ça fait au bas mot 12 milliards d’euros de plus de financement ?
Sur le chiffre, je ne sais pas. Masen travaille pour que le coût baisse au Mw et que les 12 Gw soient utiles. Dès que l'utilité existe et que nous sommes dans logique d'optimisation c'est forcément finançable par mon économie parce que je vais vendre mon service. Si je ne fais pas de renouvelable et que je fasse du fossile les 12 Gw j'en ai toujours besoin. C'est notre chance. Nous avons besoin de cette électricité. C'est plus facile quand on doit substituer à l’avenir. Il faut saluer le Maroc parce qu'il a osé prendre cette décision au moment où il doit développer des capacités. Si tous les pays prenaient des décisions du même type, le monde se porterait beaucoup mieux.
Est-ce que vous diriez que les renouvelables aujourd'hui restent plus chère que le conventionnel, notamment ls centrales charbon qui assurent aujorud'hui la moitié de la production électrique du Maroc ?
Ca dépend de ce que l'on fait. Il faut tenir compte de la durée de vie comptable du projet. La durée de vie d'un projet bien conçu est supérieure à la durée d'amortissement des crédits. Et cela n'est pas pris en compte dans les calculs. Il faut calculez ce prix sur une durée de 25 ans. La force du renouvelable est que l'énergie est quasi gratuite. On a une visibilité sur le prix de revient. Prenez deux prix : celui d'un kwh fossile et celui d'un kwh renouvelable. Par nature j'ai une visibilité sur le renouvelable sur la durée du projet. Pour le fossile si je veux la même je dois acheter une option à long terme. Mais vous n'allez trouver personne sur le marché pour cela. En réalité et au contraire, je pourrais dès demain vendre des options sur la base d'un projet renouvelable. C'est une valeur dont peu tiennent compte.
Pourquoi avoir choisi le CSP au départ du plan solaire?
Nous avons estimé qu'il fallait que le renouvelable et en particulier le solaire puisse démontrer sa capacité de se substituer au fossile. Le photovoltaïque ne le permet pas. Il ne s'agit d'ailleurs pas d'opposer le photovoltaique au CSP. Ce sont deux usages complémentaires.
Pour le premier projet Noor se contenter du photovoltaïque, n'aurait pas fait jouer au solaire le rôle de substitution, que nous recherché à terme. Il fallait que nos premiers projets le démontrent d'un point de vue technique et économique sans se fermer aux autres technologies. D'ailleurs nous développons le PV. Mais tenir ce discours au départ tant que l'on ne passait pas à l'action il n'était pas audible. Aujourd'hui les gens voient bien que nous sommes du mix énergétique et que nous sommes aussi sur une logique de compétitivité économique globale. Il va falloir regarder tous les projets et c'est leur somme qui fait que notre stratégie renouvelable ait un sens. Le CSP par exemple était la bonne brique au bon moment. Il y a aussi la question du stockage qui se pose parce qu'on a un problème de pointe. Nous sommes en phase d'investissement. Il faut que les capacités nouvelles viennent couvrir la pointe car si on ne la couvre pas on va brimer le développement économique, la dynamique d'urbanisation…
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