«Ni guerre aux conservateurs, ni soutien à Benghebrit, mais un besoin urgent d’une école moderne»
Écrit par meriem kaci
Un collectif d’intellectuels et d’universitaires algériens s’inquiète de la «néo salafisation» de la langue arabe : «Ni guerre aux conservateurs, ni soutien à Benghebrit, mais un besoin urgent d’une école moderne»
Des intellectuels algériens, dans une tribune qu’ils ont conjointement signée, ont alerté sur l’état «déplorable» de l’école algérienne, «délabrée», selon eux, par les tenants de «l’obscurantisme et de la salafisation» qui se servent de la langue arabe pour porter atteinte à la qualité d’une école «ruinée», à mille lieues des sciences et du véritable savoir.
Le mathématicien, historien des sciences, professeur émérite à l’université des sciences et des technologies de Lille, également ancien ministre de l’Education nationale Ahmed Djebbar ; le linguiste et professeur à l’université d’Alger Abderrezak Dourari, l’historien et ancien dirigeant du FLN Mohammed Harbi, l’écrivain et professeur de littérature moderne aux universités d’Alger et de Paris-III-Sorbonne-Nouvelle Wassiny Laredj ; la linguiste et enseignante à l’université d’Alger Khaoula Taleb-Ibrahimi et enfin l’historien, directeur d’études à l’Ecole des hautes études en sciences sociales (EHESS) à Paris, Houari Touati, ont signé, en date du 21 novembre, une tribune dans le quotidien français le Monde dans laquelle ils dénoncent «l’appauvrissement et la néo-salafisation de la langue arabe dans la société», particulièrement dans le système éducatif, otage, selon eux, «de l’incompétence et de l’obscurantisme».
Dans un ton pamphlétaire, les signataires relancent de plus belle un débat sensible qui, il y a peu de temps, mettaient la ministre de l’Education nationale, Nouria Benghebrit, sur la sellette des islamo-conservateurs, auxquels les rédacteurs de l’appel reprochent d’avoir considéré cette question comme «existentielle».
«C’est un appel pour relancer le débat sur la réforme de l’école algérienne et également un appel à la raison des acteurs sociaux, politiques et idéologiques du pays», motivent-ils dans leur tribune, parue également depuis quelques jours dans des quotidiens nationaux marocains et même du Moyen-Orient, et qui vise à «attirer l’attention des pouvoirs publics sur la nécessité de corriger une école algérienne délabrée». L’inquiétude est née au lendemain de la tenue de la conférence nationale sur l’évaluation de la mise en œuvre de la réforme de l’école, en juillet 2015, censée instaurer des mesures adéquates qui devaient mettre le système national d’éducation sur les rails et surtout les impératifs de qualité, de transparence, de compétitivité scientifique et pédagogique. A la place, «la ministre de l’Education nationale s’est attirée les foudres des conservateurs», s’indigne M. Dourari, joint hier. «Sa décision de mettre l’école algérienne sous les microscopes de la science lui a valu l’acharnement des islamo-conservateurs» qui l’accusaient «de collusion avec la France» ou encore «de comploter avec la ‘‘juiverie’’ internationale», regrette-t-il. Pourtant, «l’appel des intellectuels algériens, rappelle M. Dourari, n’est pas un précédent, mais une suite à ceux émis en son temps par le défunt Djilali Liabess en sa qualité de président de la commission nationale pédagogique, celui du Haut conseil supérieur de l’Education puis la Commission Benzaghou dans son rapport en 2000». «Toutes ces institutions et personnalités avaient tiré la sonnette d’alarme sur l’urgence de réformer l’école algérienne ; malheureusement, déplore-t-il, rien n’a été fait et aucune disposition n’a été adoptée depuis plus d’une décennie». Une école instrumentalisée, une langue arabe sujette à des tensions politiques et à des disputes idéologiques extrêmes… «On aspire pouvoir déconstruire la pensée et l’argumentation des conservateurs qui veulent sacraliser la langue arabe, sans qu’ils tiennent compte de la pensée scientifique qui se produit dans les autres langues», explique M. Dourari, appelant ainsi à «ne pas confondre la pratique du sacré avec la recherche scientifique». «La langue arabe est, chez nous, mal parlée, mal apprise, parce qu’elle est sans contenu, aussi pauvre et sèche qu’un filet d’oued saharien», lit-on justement dans la tribune.
M. Dourari écarte l’idée que le pays puisse devenir «une arène entre progressistes et islamo-conservateurs». «On ne s’engage en aucun cas dans un combat contre les conservateurs et notre appel ne peut être considéré comme un soutien implicite à la ministre de l’Education nationale, mais nous, étant chercheurs et scientifiques, nous soulignons uniquement notre besoin urgent d’une école moderne, édifiante qui produit une élite et des cadres dont a besoin l’Etat pour son développement», conclut M. Dourari qui espère que l’appel qu’il a signé soit pris au sérieux par le pouvoir.
reporters.dz
Écrit par meriem kaci
Un collectif d’intellectuels et d’universitaires algériens s’inquiète de la «néo salafisation» de la langue arabe : «Ni guerre aux conservateurs, ni soutien à Benghebrit, mais un besoin urgent d’une école moderne»
Des intellectuels algériens, dans une tribune qu’ils ont conjointement signée, ont alerté sur l’état «déplorable» de l’école algérienne, «délabrée», selon eux, par les tenants de «l’obscurantisme et de la salafisation» qui se servent de la langue arabe pour porter atteinte à la qualité d’une école «ruinée», à mille lieues des sciences et du véritable savoir.
Le mathématicien, historien des sciences, professeur émérite à l’université des sciences et des technologies de Lille, également ancien ministre de l’Education nationale Ahmed Djebbar ; le linguiste et professeur à l’université d’Alger Abderrezak Dourari, l’historien et ancien dirigeant du FLN Mohammed Harbi, l’écrivain et professeur de littérature moderne aux universités d’Alger et de Paris-III-Sorbonne-Nouvelle Wassiny Laredj ; la linguiste et enseignante à l’université d’Alger Khaoula Taleb-Ibrahimi et enfin l’historien, directeur d’études à l’Ecole des hautes études en sciences sociales (EHESS) à Paris, Houari Touati, ont signé, en date du 21 novembre, une tribune dans le quotidien français le Monde dans laquelle ils dénoncent «l’appauvrissement et la néo-salafisation de la langue arabe dans la société», particulièrement dans le système éducatif, otage, selon eux, «de l’incompétence et de l’obscurantisme».
Dans un ton pamphlétaire, les signataires relancent de plus belle un débat sensible qui, il y a peu de temps, mettaient la ministre de l’Education nationale, Nouria Benghebrit, sur la sellette des islamo-conservateurs, auxquels les rédacteurs de l’appel reprochent d’avoir considéré cette question comme «existentielle».
«C’est un appel pour relancer le débat sur la réforme de l’école algérienne et également un appel à la raison des acteurs sociaux, politiques et idéologiques du pays», motivent-ils dans leur tribune, parue également depuis quelques jours dans des quotidiens nationaux marocains et même du Moyen-Orient, et qui vise à «attirer l’attention des pouvoirs publics sur la nécessité de corriger une école algérienne délabrée». L’inquiétude est née au lendemain de la tenue de la conférence nationale sur l’évaluation de la mise en œuvre de la réforme de l’école, en juillet 2015, censée instaurer des mesures adéquates qui devaient mettre le système national d’éducation sur les rails et surtout les impératifs de qualité, de transparence, de compétitivité scientifique et pédagogique. A la place, «la ministre de l’Education nationale s’est attirée les foudres des conservateurs», s’indigne M. Dourari, joint hier. «Sa décision de mettre l’école algérienne sous les microscopes de la science lui a valu l’acharnement des islamo-conservateurs» qui l’accusaient «de collusion avec la France» ou encore «de comploter avec la ‘‘juiverie’’ internationale», regrette-t-il. Pourtant, «l’appel des intellectuels algériens, rappelle M. Dourari, n’est pas un précédent, mais une suite à ceux émis en son temps par le défunt Djilali Liabess en sa qualité de président de la commission nationale pédagogique, celui du Haut conseil supérieur de l’Education puis la Commission Benzaghou dans son rapport en 2000». «Toutes ces institutions et personnalités avaient tiré la sonnette d’alarme sur l’urgence de réformer l’école algérienne ; malheureusement, déplore-t-il, rien n’a été fait et aucune disposition n’a été adoptée depuis plus d’une décennie». Une école instrumentalisée, une langue arabe sujette à des tensions politiques et à des disputes idéologiques extrêmes… «On aspire pouvoir déconstruire la pensée et l’argumentation des conservateurs qui veulent sacraliser la langue arabe, sans qu’ils tiennent compte de la pensée scientifique qui se produit dans les autres langues», explique M. Dourari, appelant ainsi à «ne pas confondre la pratique du sacré avec la recherche scientifique». «La langue arabe est, chez nous, mal parlée, mal apprise, parce qu’elle est sans contenu, aussi pauvre et sèche qu’un filet d’oued saharien», lit-on justement dans la tribune.
M. Dourari écarte l’idée que le pays puisse devenir «une arène entre progressistes et islamo-conservateurs». «On ne s’engage en aucun cas dans un combat contre les conservateurs et notre appel ne peut être considéré comme un soutien implicite à la ministre de l’Education nationale, mais nous, étant chercheurs et scientifiques, nous soulignons uniquement notre besoin urgent d’une école moderne, édifiante qui produit une élite et des cadres dont a besoin l’Etat pour son développement», conclut M. Dourari qui espère que l’appel qu’il a signé soit pris au sérieux par le pouvoir.
reporters.dz
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