Erdogan, grand perdant sur l'échiquier régional, s'est rapproché de Poutine au grand désespoir d'une UE sans envergure.
Avant de décrire les chemins tortueux des rêves aujourd'hui ensablés dans la forteresse syrienne, il n’est pas inutile d’avoir quelques repères notamment de l’histoire et de l’art de la guerre.
Si l’on considère que la guerre est une confrontation de forces matérielles et mécaniques soutenues par un front intérieur politique et idéologique, alors on peut dire que les perdants d’Alep sont des "victimes" de leur non-adaptation aux réalités du monde. Hier, l’Occident gagnait ses guerres coloniales grâce à sa machine de guerre balayant tout sur son chemin avec la bonne conscience que ses croisades allaient apporter au pays conquis les bienfaits de sa civilisation. Cette chanson n’est plus à la mode. Sur les terrains de guerre proprement dite, la place du roi lui est contestée par de redoutables concurrents. Dans le domaine idéologique c’est la Bérézina.
L’Occident qui prétend être le modèle achevé de la démocratie, le voilà pris en flagrant délit de s’acoquiner avec les pires régimes dictatoriaux et moyenâgeux de la planète. Les pays qui se rêvent encore comme le nombril du monde se sont pris les pieds dans leurs propres filets en jouant au jeu de Dames quand leurs adversaires pratiquent le jeu millénaire des échecs. Oui ils ont oublié que la guerre obéissait aux règles du jeu d'échecs où les armées peuvent avancer en sautant ou en contournant des obstacles, se replier pour reprendre des forces ou simplement pour tromper l’ennemi. Aveuglés par leurs puissances, leurs troupes avancent tête baissée pensant que leurs bombes et leurs agitations diplomatiques faisaient d’eux les futurs "vainqueurs". Hélas pour eux, les réalités sont plus têtues qu’ils ne les imaginent car "la guerre est la continuation de la politique par d’autres moyens" (Carl Von Clausewitz).
Une fois ces considérations posées, essayons de cerner les possibles conséquences des déboires des pays occidentaux et des monarchies du Golfe. L’une des premières conséquences est la formation d’une sorte "d’axe" informel Moscou/Téhéran/Ankara symbolisé par les deux rencontres des ministres des Affaires étrangères (à Moscou) et des chefs d’Etats de Russie, d’Iran et de Turquie programmée à Anasta au Khazasthan (mi-janvier). Ce genre de réunion annonce généralement d’importantes décisions. Souvenons-nous de la réunion à Téhéran des Russes et des Syriens avec leur hôte iranien où a été prise la décision de libérer Alep avant l’arrivée de Donald Trump à la Maison Blanche. On remarque aussi bien à Moscou qu’à Anasta, que les protégés des "rebelles" (USA/France) seront absents et pour cause. On peut dire d’ores et déjà que Genève 1 et 2 sont tombés dans les oubliettes puisque "les rebelles" reconnaissent leur amère défaite et s’entredéchirent sur les causes de leur déroute…
La première erreur des "victimes" de la défaite à Alep est d’avoir gobé la théorie sur les fondements de la guerre en Syrie. Celle-ci a été réduite à sa plus banale expression en la qualifiant de guerre de sunnites contre chiites pour mieux cacher les enjeux politiques de la région et les interférences de puissances étrangères. Qualification sommaire quand on sait que la Turquie "sunnite" joue ses propres cartes pour finir par faire des infidélités aux monarchies "sunnites". Elle se tourne aujourd’hui vers la Russie et l’Iran dont l’influence grandissante peut constituer un obstacle à son dessein d’empêcher la constitution d’une entité kurde à ses frontières, son cauchemar de toujours. Ce revirement politico-stratégique s’est imposé à la Turquie (*) pour deux raisons. Son président Erdogan a compris que "ses frères" en religion (Arabie et Qatar) ne lui sont d’aucun secours face à ses bizbiz avec les USA qui ne seraient pas tout à fait étrangers au récent coup d’Etat du 14 juillet 2016. Quant à l’Union européenne qui n’a pas cessé de formuler des exigences humiliantes (politique des droits de l’homme) tout en lui fermant les portes de l’Europe, la Turquie s’aperçoit que cette Europe ne compte guère, prise en sandwich entre son suzerain américain et la Russie qui devient la puissance incontournable dans la région. Erdogan, pour islamiste sunnite qu’il est, a été rappelé par les dures lois de la "realpolitik" qui le pousse à pactiser avec les "mécréants" russes et les "hypocrites" chiites.
La Turquie est donc l’une des victimes de la tempête qui souffle sur la Syrie. Outre les difficultés avec les USA et l’Union européenne, on peut mieux mesurer son échec quand on se souvient de son appétit d’ogre qui était le sien, il n’y a pas si longtemps. Hier Erdogan exigeait le départ d'Assad (rien que ça !) en plus de ses prétentions d’occuper des territoires syriens pour empêcher les Kurdes de proclamer leur autonomie. Ensuite il voulait participer à la libération de Mossoul qu’il espérait faire revenir dans le giron d’un empire ottoman moderne et fantasmé avec la complicité de Barzani, le chef kurde irakien. Aujourd’hui Mossoul est oublié et dans la ville d'El Bab en Syrie, son armée a eu des pertes sévères en hommes et en tanks et la Syrie et son allié russe lui ont signifié de tirer un trait sur son rêve de s’installer aux portes d’Alep que la Syrie vient de libérer.
Oui la Turquie est dans de beaux draps ; en Irak elle a en face d’elle l’Iran et en Syrie où Assad est conforté dans son fauteuil, elle a la Russie qui garde dans sa mémoire, la destruction d’un avion de son armée et l’assassinat de son ambassadeur à Ankara. Oui la Turquie est dans une position inconfortable car l’allié américain voit d’un mauvais œil ses flirts avec la Russie. Quant au pouvoir même d’Erdogan, il repose sur un trône qui n’est pas totalement stable vu l’état de son armée à qui il a fait subir une purge sans précédent. Friture avec son allié américain, la guerre avec les Kurdes (PKK) qui s’est rallumée, aggravation du contentieux déjà historiquement lourd avec la Syrie et enfin un rapprochement quelque peu encombrant avec des puissances (Russie et Iran) qui ne vont pas lui faire de cadeaux. Notons enfin qu’après avoir joué le jeu de la complicité avec Daech, ce dernier lui mène la vie dure aussi bien en Syrie qu’à l’intérieur du territoire turc. L’avenir nous dira si le capitaine Erdogan a pu ramener le navire "Turquie" à bon port après l’avoir fait traverser au milieu de récifs d’une mer agitée par une tempête dont il n’a pas mesuré la force…
Les autres perdants de la région sont l’Arabie et le Qatar. Pour ces monarchies, leur échec en Syrie va sans doute les calmer et leur servir de leçon. Il ne leur reste que leurs larmes pour pleurer et dire adieu à leur prétention de régir l’ordre dans la région. Ces deux Etats vont finir par comprendre qu’ils "perdent" leur temps et leurs ressources à faire des guerres par procuration à l’Iran. Hier en finançant la guerre de Saddam Hussein contre l’Iran. Ensuite, en offrant son territoire et en payant la note de l’invasion aux USA pour ramener l’Irak à l’âge de pierre selon la vulgaire et haineuse formule du chef des armées américaines. Aujourd’hui l’Arabie saoudite massacre les Yéménites et les Bahreinis qu’elle désigne comme de dangereux alliés de l’Iran. Quant à la Syrie c’est véritablement le cimetière de tous leurs rêves. Toutes ces guerres qu’elles ont suscitées et financées, loin de neutraliser l’Iran, n’ont fait qu’élargir son influence comme le prouve sa présence en Irak et en Syrie. Ces monarques devenus arrogants grâce à leur pétrole apprendront avec un peu de retard et beaucoup de rage que les richesses butent toujours contre la muraille de l’histoire. Et dans le cas présent, l’histoire c’est la forteresse syrienne dont les racines se perdent dans la nuit du temps. Et L’histoire nous apprend que l’Amérique jusque-là leur protectrice mais uniquement soucieuse de ses intérêts a d’autres chats à fouetter ailleurs, en Chine par exemple. Le bilan pour l’Arabie et le Qatar est donc passablement lourd aussi bien sur le plan financier que politique. Les lourds investissements opérés depuis la guerre Iran/Irak ont été engloutis dans les sables mouvants des déserts de la région. Engloutis sans aucun retour sur investissements comme disent les économistes. Pire, ces pays risquent de connaître plutôt un retour de bâton car leur propre sécurité n’est sans doute pas garantie à l’avenir. A moins qu’un nouveau protecteur ne vienne remplacer l’Oncle Sam, un protecteur envahissant que l’on voit poindre à l’horizon, Israël, chez qui généraux et politiciens de l’Arabie font de discrètes visites. Perdantes en Syrie, embourbées au Yémen et violemment contestées à Bahreïn, les monarchies du Golfe ont des soucis à se faire car leur horizon est des plus sombres.
Avant de décrire les chemins tortueux des rêves aujourd'hui ensablés dans la forteresse syrienne, il n’est pas inutile d’avoir quelques repères notamment de l’histoire et de l’art de la guerre.
Si l’on considère que la guerre est une confrontation de forces matérielles et mécaniques soutenues par un front intérieur politique et idéologique, alors on peut dire que les perdants d’Alep sont des "victimes" de leur non-adaptation aux réalités du monde. Hier, l’Occident gagnait ses guerres coloniales grâce à sa machine de guerre balayant tout sur son chemin avec la bonne conscience que ses croisades allaient apporter au pays conquis les bienfaits de sa civilisation. Cette chanson n’est plus à la mode. Sur les terrains de guerre proprement dite, la place du roi lui est contestée par de redoutables concurrents. Dans le domaine idéologique c’est la Bérézina.
L’Occident qui prétend être le modèle achevé de la démocratie, le voilà pris en flagrant délit de s’acoquiner avec les pires régimes dictatoriaux et moyenâgeux de la planète. Les pays qui se rêvent encore comme le nombril du monde se sont pris les pieds dans leurs propres filets en jouant au jeu de Dames quand leurs adversaires pratiquent le jeu millénaire des échecs. Oui ils ont oublié que la guerre obéissait aux règles du jeu d'échecs où les armées peuvent avancer en sautant ou en contournant des obstacles, se replier pour reprendre des forces ou simplement pour tromper l’ennemi. Aveuglés par leurs puissances, leurs troupes avancent tête baissée pensant que leurs bombes et leurs agitations diplomatiques faisaient d’eux les futurs "vainqueurs". Hélas pour eux, les réalités sont plus têtues qu’ils ne les imaginent car "la guerre est la continuation de la politique par d’autres moyens" (Carl Von Clausewitz).
Une fois ces considérations posées, essayons de cerner les possibles conséquences des déboires des pays occidentaux et des monarchies du Golfe. L’une des premières conséquences est la formation d’une sorte "d’axe" informel Moscou/Téhéran/Ankara symbolisé par les deux rencontres des ministres des Affaires étrangères (à Moscou) et des chefs d’Etats de Russie, d’Iran et de Turquie programmée à Anasta au Khazasthan (mi-janvier). Ce genre de réunion annonce généralement d’importantes décisions. Souvenons-nous de la réunion à Téhéran des Russes et des Syriens avec leur hôte iranien où a été prise la décision de libérer Alep avant l’arrivée de Donald Trump à la Maison Blanche. On remarque aussi bien à Moscou qu’à Anasta, que les protégés des "rebelles" (USA/France) seront absents et pour cause. On peut dire d’ores et déjà que Genève 1 et 2 sont tombés dans les oubliettes puisque "les rebelles" reconnaissent leur amère défaite et s’entredéchirent sur les causes de leur déroute…
La première erreur des "victimes" de la défaite à Alep est d’avoir gobé la théorie sur les fondements de la guerre en Syrie. Celle-ci a été réduite à sa plus banale expression en la qualifiant de guerre de sunnites contre chiites pour mieux cacher les enjeux politiques de la région et les interférences de puissances étrangères. Qualification sommaire quand on sait que la Turquie "sunnite" joue ses propres cartes pour finir par faire des infidélités aux monarchies "sunnites". Elle se tourne aujourd’hui vers la Russie et l’Iran dont l’influence grandissante peut constituer un obstacle à son dessein d’empêcher la constitution d’une entité kurde à ses frontières, son cauchemar de toujours. Ce revirement politico-stratégique s’est imposé à la Turquie (*) pour deux raisons. Son président Erdogan a compris que "ses frères" en religion (Arabie et Qatar) ne lui sont d’aucun secours face à ses bizbiz avec les USA qui ne seraient pas tout à fait étrangers au récent coup d’Etat du 14 juillet 2016. Quant à l’Union européenne qui n’a pas cessé de formuler des exigences humiliantes (politique des droits de l’homme) tout en lui fermant les portes de l’Europe, la Turquie s’aperçoit que cette Europe ne compte guère, prise en sandwich entre son suzerain américain et la Russie qui devient la puissance incontournable dans la région. Erdogan, pour islamiste sunnite qu’il est, a été rappelé par les dures lois de la "realpolitik" qui le pousse à pactiser avec les "mécréants" russes et les "hypocrites" chiites.
La Turquie est donc l’une des victimes de la tempête qui souffle sur la Syrie. Outre les difficultés avec les USA et l’Union européenne, on peut mieux mesurer son échec quand on se souvient de son appétit d’ogre qui était le sien, il n’y a pas si longtemps. Hier Erdogan exigeait le départ d'Assad (rien que ça !) en plus de ses prétentions d’occuper des territoires syriens pour empêcher les Kurdes de proclamer leur autonomie. Ensuite il voulait participer à la libération de Mossoul qu’il espérait faire revenir dans le giron d’un empire ottoman moderne et fantasmé avec la complicité de Barzani, le chef kurde irakien. Aujourd’hui Mossoul est oublié et dans la ville d'El Bab en Syrie, son armée a eu des pertes sévères en hommes et en tanks et la Syrie et son allié russe lui ont signifié de tirer un trait sur son rêve de s’installer aux portes d’Alep que la Syrie vient de libérer.
Oui la Turquie est dans de beaux draps ; en Irak elle a en face d’elle l’Iran et en Syrie où Assad est conforté dans son fauteuil, elle a la Russie qui garde dans sa mémoire, la destruction d’un avion de son armée et l’assassinat de son ambassadeur à Ankara. Oui la Turquie est dans une position inconfortable car l’allié américain voit d’un mauvais œil ses flirts avec la Russie. Quant au pouvoir même d’Erdogan, il repose sur un trône qui n’est pas totalement stable vu l’état de son armée à qui il a fait subir une purge sans précédent. Friture avec son allié américain, la guerre avec les Kurdes (PKK) qui s’est rallumée, aggravation du contentieux déjà historiquement lourd avec la Syrie et enfin un rapprochement quelque peu encombrant avec des puissances (Russie et Iran) qui ne vont pas lui faire de cadeaux. Notons enfin qu’après avoir joué le jeu de la complicité avec Daech, ce dernier lui mène la vie dure aussi bien en Syrie qu’à l’intérieur du territoire turc. L’avenir nous dira si le capitaine Erdogan a pu ramener le navire "Turquie" à bon port après l’avoir fait traverser au milieu de récifs d’une mer agitée par une tempête dont il n’a pas mesuré la force…
Les autres perdants de la région sont l’Arabie et le Qatar. Pour ces monarchies, leur échec en Syrie va sans doute les calmer et leur servir de leçon. Il ne leur reste que leurs larmes pour pleurer et dire adieu à leur prétention de régir l’ordre dans la région. Ces deux Etats vont finir par comprendre qu’ils "perdent" leur temps et leurs ressources à faire des guerres par procuration à l’Iran. Hier en finançant la guerre de Saddam Hussein contre l’Iran. Ensuite, en offrant son territoire et en payant la note de l’invasion aux USA pour ramener l’Irak à l’âge de pierre selon la vulgaire et haineuse formule du chef des armées américaines. Aujourd’hui l’Arabie saoudite massacre les Yéménites et les Bahreinis qu’elle désigne comme de dangereux alliés de l’Iran. Quant à la Syrie c’est véritablement le cimetière de tous leurs rêves. Toutes ces guerres qu’elles ont suscitées et financées, loin de neutraliser l’Iran, n’ont fait qu’élargir son influence comme le prouve sa présence en Irak et en Syrie. Ces monarques devenus arrogants grâce à leur pétrole apprendront avec un peu de retard et beaucoup de rage que les richesses butent toujours contre la muraille de l’histoire. Et dans le cas présent, l’histoire c’est la forteresse syrienne dont les racines se perdent dans la nuit du temps. Et L’histoire nous apprend que l’Amérique jusque-là leur protectrice mais uniquement soucieuse de ses intérêts a d’autres chats à fouetter ailleurs, en Chine par exemple. Le bilan pour l’Arabie et le Qatar est donc passablement lourd aussi bien sur le plan financier que politique. Les lourds investissements opérés depuis la guerre Iran/Irak ont été engloutis dans les sables mouvants des déserts de la région. Engloutis sans aucun retour sur investissements comme disent les économistes. Pire, ces pays risquent de connaître plutôt un retour de bâton car leur propre sécurité n’est sans doute pas garantie à l’avenir. A moins qu’un nouveau protecteur ne vienne remplacer l’Oncle Sam, un protecteur envahissant que l’on voit poindre à l’horizon, Israël, chez qui généraux et politiciens de l’Arabie font de discrètes visites. Perdantes en Syrie, embourbées au Yémen et violemment contestées à Bahreïn, les monarchies du Golfe ont des soucis à se faire car leur horizon est des plus sombres.
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