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Afrique du Sud: un Nouvel An sur fond de crise

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  • Afrique du Sud: un Nouvel An sur fond de crise

    Les festivités commencent avant le 31 décembre en Afrique du Sud où, comme toutes les semaines de l’année, on commence à boire dès le jeudi soir, jusqu’au dimanche après-midi. Au Cap, il existe autant de façons de célébrer le Nouvel An que de lieux de sortie, jusque sur les plages ou à bord de yachts privés. Mais le cœur n’est pas toujours à la fête, en raison de la faible croissance économique et de la gestion contestée de l’actuel président, Jacob Zuma.

    Chaque 31 décembre, la rue la plus animée du Cap, Long Street, est fermée à la circulation. Sous surveillance policière, cette artère devient une rue piétonne d’où les fêtards peuvent déborder des bars et des boîtes, congolaises notamment, pour danser sur le bitume. Le son d’une house music sud-africaine se mélange aux appels à la prière de la mosquée de Bo-Kaap, un quartier tout proche en partie habité par des métis musulmans.

    Une radio locale, Five FM, organise de grandes fêtes populaires dans des lieux publics, avec des DJ en vue derrière les platines. De Sea Point à Camps Bay, en passant par Clifton, les plages qui bordent le littoral du côté Atlantique deviennent elles aussi des pistes de danse à ciel ouvert. Sur le sable blanc de Camps Bay, une « All White Party » est ainsi courue par une foule multicolore, prête à répondre non pas à une injonction ségrégationniste, mais à un code vestimentaire qui veut que chacun soit habillé en blanc, des pieds à la tête.

    Les plus riches peuvent prendre des billets pour passer le Nouvel An à bord de catamarans ou de yachts privés qu’il faut louer en dollars, sous prétexte que les équipages emmènent les passagers dans les eaux internationales. Le tarif ? Entre 4 000 et 5 000 rands, soit deux fois le salaire minimum des employés de maison, fixé par le gouvernement à 2 422 rands (169 euros) par mois dans les grandes villes, contre 2 205 rands (154 euros) dans les villes secondaires.

    « Phuza Thursday », la fête dès le jeudi

    Partout, la fête commence bien avant l’heure. Une habitude nationale, pratiquée toutes les semaines de l’année et surnommée « Phuza Thursday » - « boire » en isizoulou, l’une des onze langues nationales. Dès le jeudi soir, donc, on attaque les bouteilles de bière, de cidre et de « champagne » sud-africain, un pétillant brut ou rosé fait dans la région du Cap, mais aussi des alcools plus forts, rhum, brandy, gin et whisky, allègrement mélangés à du Coca-Cola. On ne s’arrête que le dimanche après-midi pour surmonter l’inévitable « babalaas » (cuite, en argot) avant de reprendre le travail – pour ceux qui en ont.

    Autre façon de fêter la nouvelle année au Cap : quitter la ville et louer en famille ou entre amis l’une de ces résidences secondaires de Betty’s Bay qu’aime la classe moyenne et supérieure. Cette baie protégée, située à une centaine de kilomètres à l’est de la ville, abrite une colonie de pingouins et des jardins botaniques renommés. Située en pleine réserve naturelle de Kogelberg, la première à avoir été labellisée ainsi par l’Unesco en Afrique du Sud, Betty’s Bay offre une nature luxuriante, connue pour ses buissons (fynbos) et ses innombrables variétés de fleurs.

    « Nous irons à Betty’s Bay comme chaque année, même si je dois avouer que le cœur n’y est pas trop », explique Kayla Olifant. Cette enseignante métisse du Cap, militante de l’ANC, rêvait de passer sa retraite à voyager en Europe, en Amérique et en Asie. Elle se trouve durement pénalisée par la dépréciation du rand, dans un contexte de stagnation économique. La devise sud-africaine ne cesse de chuter depuis 2015, en raison de la chute des cours des matières premières et de la gestion contestée de Jacob Zuma. Le chef de l’Etat a plusieurs fois limogé son ministre des Finances, rompant avec la stabilité qu’avait fini par incarner Trevor Manuel, ministre des Finances de 1996 à 2009.

    Incertitude politique

    « Nous essaierons de ne pas parler de politique le 31 décembre, poursuit Kayla, mais nous attendons clairement le départ de Jacob Zuma en 2017, à l’occasion du congrès de l’ANC qui doit se tenir avant la fin de l’année ». Un précédent existe : Thabo Mbeki, le prédécesseur de Jacob Zuma, avait été désavoué par son propre parti et contraint de démissionner avant la fin de son mandat, en 2008, à la suite d’un congrès houleux de l’ANC. C’est au tour de Jacob Zuma de faire face à la fronde interne, sans scénario clair sur sa succession.

    La politique, cependant, ne reprendra ses droits qu’après le 15 janvier, à la rentrée des classes. Les émeutes étudiantes du mouvement Fees must fall, qui ont éclaté à travers le pays à partir de septembre « vont reprendre de manière encore plus intensive », prédit le politologue sud-africain William Gumede.

    En 2016, l’Afrique a fêté ses 25 ans de liberté, depuis le démantèlement en 1991 des lois de l’apartheid. Elle a aussi commémoré les émeutes scolaires du 16 juin 1976 à Soweto, réprimées dans le sang alors que les élèves refusaient une éducation au rabais.

    Aujourd’hui, les étudiants se battent pour des frais d’inscription moins élevés, dans des universités qui ne comptent toujours que 25% d’étudiants noirs, issus d’un groupe qui représente 79% de la population. En 2017, l’Afrique du Sud se souviendra de Nelson Mandela et de Steve Biko, cinq et quarante ans après leurs disparitions respectives, tout en espérant voir émerger un dirigeant de la même trempe.


    RFI
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