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Le programme fiscal du Front national contre les plus pauvres

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  • Le programme fiscal du Front national contre les plus pauvres

    Le programme fiscal du Front national est d’abord gouverné par une logique de rentabilité électorale : la première victime en est la justice fiscale.

    Dévoilé par Marine Le Pen à l’occasion de ses assises présidentielles, le programme fiscal du FN a ceci d’étonnant qu’il calque assez largement le système d’imposition actuel. C’est vrai de la TVA et de la CSG. C’est vrai surtout de l’ISF, du taux supérieur de l’impôt sur le revenu (45 %) et du taux facial de l’impôt sur les sociétés (33,33 %, certes réservé aux « grandes entreprises »), que le FN n’envisage nullement de diminuer malgré leurs effets destructifs sur la production, l’épargne et, conséquemment, la croissance française. Tout juste préconise-t-il l’abandon du prélèvement à la source prévu pour 2018 et un léger assouplissement des règles fiscales régissant les donations faites aux enfants et petits-enfants.

    Au-delà du consentement au poids exorbitant des prélèvements obligatoires (45 % du PIB), les choix fiscaux de Marine Le Pen reposent sur un postulat typiquement socialiste, où l’impôt progressif, en tant qu’instrument privilégié de la redistribution des richesses et de l’égalisation matérielle des conditions sociales, doit être chaque fois préféré à l’impôt proportionnel. Or, cette philosophie niveleuse contrevient non seulement à l’éthique, mais aussi à l’efficacité économique, au préjudice de tous et d’abord des plus pauvres (« Toute politique démagogique égalitaire ne peut en réalité que conduire à terme à l’aggravation du sort des plus défavorisés » résumait Maurice Allais, à qui Marine Le Pen rendit un hommage appuyé en 2010, à l’annonce de sa mort, sans ne l’avoir manifestement jamais lu).

    L’anti-économie du Front national

    Maintien de l’ISF, exclusion des grandes entreprises de l’application du taux intermédiaire de l’impôt sur les sociétés, diminution de l’impôt sur le revenu limitée aux trois seules premières tranches du barème progressif : autant de mesures antiéconomiques qui, si elles obéissent à une logique de rentabilité électorale, ne peuvent satisfaire aux règles de justice.

    Car quels sont, une fois affirmée la volonté démagogique de « faire payer les riches », les effets concrets de la fiscalité progressive sur la fortune ? Celui d’abord de pousser hors de France les détenteurs de capitaux – capitaux déjà soumis à l’impôt sur le revenu et encore imposables, dans l’avenir, lors de leur transmission. Il y a là quelque chose de paradoxal à s’étonner, d’un côté, de la stagnation économique et des difficultés à endiguer le chômage, tout en s’ingéniant, de l’autre, à tarir les sources de l’épargne et de la croissance. La surtaxation du capital à laquelle participe l’ISF se répercute nécessairement sur le travail, de sorte que tous les Français en pâtissent.

    Marine Le Pen plaide, en outre, pour une imposition des sociétés à un taux variable suivant leur taille : 15 % pour les « très petites entreprises » (TPE), 24 % pour les « petites et moyennes entreprises » (PME), 33,33 % pour les « grandes entreprises » (GE). Abaisser le taux d’imposition des PME de 33,33 à 24 % serait évidemment une bonne chose pour leur compétitivité. Mais l’on comprend mal pourquoi ce nouveau seuil ne profiterait qu’aux PME à l’exclusion des GE, dès lors que l’importance du nombre de salariés, du chiffre d’affaires ou du total de bilan ne fait que traduire la saine gestion de l’entreprise et sa capacité à offrir des biens ou services innovants appréciés par le consommateur.

    Sans doute l’éviction des GE procède-t-elle de l’idée selon laquelle les grands groupes, déployés à l’international, recourent aux échappatoires fiscales plus facilement que les entreprises de taille plus modeste. Mais ce raisonnement commanderait précisément d’adopter une fiscalité uniforme et compétitive, de façon à ce que le taux réel d’imposition des GE tende au plus près vers le taux nominal.

    Renforcer le fardeau fiscal d’une minorité

    Toujours sous couleur de justice fiscale, le FN suggère de baisser de 10 % les trois premières tranches de l’impôt sur le revenu : la première tranche passerait ainsi de 14 à 12,6 %, la deuxième de 30 à 27 %, la troisième de 41 à 36,9 %, le taux supérieur étant, quant à lui, maintenu à 45 %.

    Pénaliser plus durement les très hauts revenus (en l’espèce supérieurs à 152 260 €) n’a, une fois encore, aucune justification rationnelle : au plan moral, cette nouvelle structure progressive, de laquelle continuerait à être totalement exemptée plus de la moitié des foyers français, renforcerait le fardeau fiscal d’une petite minorité de contribuables au bénéfice d’une majorité d’électeurs toujours plus prompte à réclamer de l’État des dépenses dont elle ne supporte que partiellement les frais ; au plan économique, les gros contribuables seraient d’autant plus incités à consommer voire à dissimuler leurs gains, acquis grâce à leurs aptitudes et leurs efforts, qu’ils auraient le sentiment légitime d’être lésés. Conséquence logique : moins d’épargne et, là encore, moins de croissance.

    En apparence et à court terme, le projet fiscal du FN favorise les plus pauvres. En réalité et à plus long terme, il se retournerait contre eux.

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