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NIGERIA,Buhari, le capitaine est-il toujours à la barre?

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  • NIGERIA,Buhari, le capitaine est-il toujours à la barre?

    Les rumeurs sur l'état de santé du président nigérian vont bon train dans le pays. Muhammadu Buhari est actuellement soigné dans un hôpital londonien, sans qu'on en sache plus sur la nature de sa maladie. Le Nigeria craint qu'un éventuel décès de son président, élu en 2015, ne ravive les tensions etniques dans le pays.

    La santé du président. Les Nigérians n'ont plus que ces mots à la bouche. Baba (le père, surnom du chef de l'Etat) est-il mort ? La folle rumeur court sur les réseaux sociaux. Le séjour prolongé de Muhammadu Buhari à Londres donne naissance à toutes les spéculations et à tous les débats. La presse de Lagos se passionne, elle aussi, pour la question.

    A commencer par l'éditorialiste Ray Ekpu qui note « qu'à l'époque du triomphe des réseaux sociaux, les plus folles rumeurs se répandent à la vitesse de l'éclair. Sans que personne ne soit jugé responsable ».

    Des « personnes bien informées » conseillent à leurs amis de limiter les sorties dans les quartiers chauds. L'annonce brutale du décès du chef de l'Etat pouvant, selon eux, « provoquer des émeutes ». Mais comme le souligne le Guardian de Lagos, il convient avant tout de prendre du recul. « Annoncer le décès du président bien avant l'heure, les Nigérians ont coutume de le faire », estime le quotidien de référence.

    Un manque d'infrastrucutures médicales

    En 2007, lorsque le président Umaru Yar Adua s'était rendu en Allemagne pour des soins médicaux, la rumeur avait vite couru qu'il était mort. Il en alla de même pour le président Ibrahim Babangida lors de ses séjours médicaux à l'étranger. Au Nigeria, les riches et les puissants ont pris l'habitude de se faire soigner hors du pays, notamment en Europe.

    Muhammadu Buhari avait promis de mettre fin à ce « tourisme médical », mais il a dû se rendre à l'évidence. Son pays ne possède pas encore d'infrastructures hospitalières de qualité. Peuplé de 188 millions d'habitants, le Nigeria (1ère puissance économique du continent avec l'Afrique du Sud) ne possède par exemple, aucun centre de traitement des cancers.

    Ainsi, le professeur Wolé Soyinka (prix Nobel de littérature), qui souffrait de cette maladie, a dû se faire soigner à l'étranger. L'écrivain de 82 ans a dénoncé le fait que « les pauvres et les classes moyennes étaient condamnés au Nigeria à mourir de cette maladie ». En 2016, l'espérance de vie a diminué dans le pays : elle est désormais de 53 ans.

    Agé de 74 ans, Buhari, qui a effectué un séjour en prison, en 1985, a la réputation d'être d'une constitution fragile. Les rumeurs autour de sa santé peuvent être répandues par ses rivaux voulant accréditer l'idée que cela l'empêcheraient de se présenter à la présidentielle de 2019. Mais au-delà des petits calculs politiciens, la vacance du pouvoir inquiète au plus au point au Nigeria.

    En cas de décès ou d'incapacité du chef de l'Etat, la Constitution prévoit que le vice-président lui succède, en l'occurrence Yemi Osinbajo. Ce scénario s'est déjà produit : là encore au profit d'un sudiste. Lorsque Umaru Yar Adua est décédé en mai 2010, il a été remplacé par son vice-président Goodluck Jonathan. Mais les nordistes sont-ils prêts à laisser le pouvoir leur échapper à nouveau, un an et demi à peine après l'élection de Buhari ? Rien n'est moins sûr.

    Tensions ethniques grandissantes

    Selon la presse nigériane, des gouverneurs du Nord auraient fait pression sur Yemi Osinbajo pour le forcer à démissionner. Ils souhaiteraient le remplacer par l'un des leurs ou de leurs protégés. Mais Bola Tinubu, l'ex-gouverneur de Lagos et le parrain politique d'Osinbajo ne l'entend pas de cette oreille.

    Le décès de Buhari pourrait provoquer un affrontement majeur entre les Haoussas (ethnie dominant le Nord) et les Yoroubas (sud-ouest du Nigeria) pour le contrôle du pouvoir fédéral. De puissants politiciens yoroubas, tels que Bola Tinubu ont joué un rôle majeur dans l'élection de Buhari. Ils ont mis à sa disposition leurs moyens financiers et leurs réseaux politiques pour le soutenir.

    Ils attendaient un « renvoi d'ascenseur » à la hauteur de leur investissement, mais ils ont eu l'impression que Buhari ne faisait confiance qu'aux siens - les élites du Nord - et qu'il écartait les Yoroubas des postes de décision. Ils se sont sentis floués et ne l'ont pas caché. De son côté, Buhari a snobé le Sud. Depuis son élection en avril 2015, il n'est jamais venu à Lagos. Lui et ses proches ont rebaptisé la capitale économique du Nigeria, « Sin city », la ville du péché. Le président nigérian ne s'est pas davantage rendu à Port-Harcourt, la capitale pétrolière de la Fédération.

    Epargner une crise majeure à leur pays

    Pour leur part, les nordistes veulent coûte que coûte conserver le pouvoir politique. Ils tiennent au principe « d'alternance géographique », règle non écrite de la vie politique nigériane. Goodluck Jonathan (au pouvoir jusqu'en mai 2015) était originaire du Sud. Pour eux, il est donc normal qu'un nordiste occupe désormais le pouvoir. Les nordistes rappellent à volonté que comme les richesses économiques sont au Sud (notamment le pétrole), il convient que le pouvoir politique aille au Nord. Un argument qui ne convainc guère les sudistes qui soulignent que depuis l'indépendance, le pouvoir politique est généralement resté concentré entre les mains des nordistes. Ils réclament un partage plus équitable de ce pouvoir. On le voit tous les ingrédients sont réunis pour une montée des tensions ethniques.

    A cela s'ajoute le fait que le professeur de droit Yemi Osinbajo est également pasteur. Un profil qui passe mal dans le Nord musulman. Du coup, conscients des risques encourus - qu'ils soient chrétiens ou musulmans – nombre de Nigérians prient pour le chef de l'Etat. Ils lui souhaitent de vivre le plus longtemps possible afin d'épargner une crise politique majeure à leur pays.

    RFI
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