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La saga toyota : Du métier à tisser à la lexus

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  • La saga toyota : Du métier à tisser à la lexus

    C'est un tisserand inventif qui a jeté les bases du futur numéro 1 mondial de l'automobile. Du fondateur à ses héritiers, un fil conducteur : l'obsession de la fiabilité du produit.

    La première Toyota n'était pas une voiture, mais une navette. Si elle n'avait rien à voir avec un manga de science-fiction, elle filait quand même à plus de 25 km/h. Cette navette révolutionna l'industrie et jeta les bases d'un empire industriel.

    Elle est née à la fin du XIX e siècle, dans la période dite de l'ère Meiji. En ce temps-là, l'empereur Mutsuhito, qui a décidé d'ouvrir son pays au monde et à la modernité, compte parmi ses sujets Sakichi Toyoda, fils d'un pauvre charpentier de Yamaguchi (village situé à 280 kilomètres de Tokyo, aujourd'hui intégré à la ville de Kosai).

    En novembre 1896, ce Toyoda a une idée de génie : fabriquer le premier métier à tisser industriel avec système d'arrêt automatique. En cas de panne, la machine cesse tout mouvement et la navette de tissage aussi. Sécurité renforcée, chaîne de production assurée... l'entreprise prospère en profitant de l'essor du commerce de la soie et du textile.
    Mais la guerre russo-japonaise de 1904-1905 ralentit son développement et Sakichi Toyoda cherche d'autres leviers de développement. En 1910, il part visiter les États-Unis. Il en revient persuadé de l'avenir des machines et accélère son processus d'industrialisation.

    Quand la Première Guerre mondiale éclate, le Japon se range du côté franco-britannique. Les besoins en textiles sont forts et les 200 métiers à tisser des usines de la Toyoda Boshoku Corporation tournent à plein régime. Pourtant, le prévoyant Sakichi Toyoda incite son fils aîné à trouver d'autres sources de croissance.

    A l'instar de son père, c'est aux États-Unis et en Europe, où l'automobile est en plein boom, que Kiichiro Toyoda va chercher l'inspiration en 1929. Quand il revient, son père est mourant. Ce dernier a laissé à son beau-fils, Risaburo Toyoda, les rênes de l'entreprise de textile et à son fils la mission de la transformer. Dès 1933, Kiichiro va donc travailler à ce qu'il croit être l'avenir de l'industrie japonaise : l'automobile.

    De Toyoda à Toyota

    Sous le règne de Hirohito, le Japon adopte une politique coloniale. Après la péninsule de Corée, il annexe la Mandchourie (nord-est de la Chine). Pour soutenir cette politique, le gouvernement encourage la construction de voitures. Si Daihatsu (aujourd'hui intégré au groupe Toyota) voit le jour dès 1907, bon nombre de constructeurs nippons apparaissent entre 1917 (Mitsubishi) et 1934 (Nissan).

    Dans ses ateliers de Koromo, Kiichiro Toyoda peine à mettre au point "sa" première voiture. Son moteur est d'abord "très inspiré" par un V8 Ford (alors la marque la plus populaire au Japon) avant d'être remplacé par un six-cylindres en ligne très semblable à ceux fabriqués par Chevrolet. Pour la carrosserie, les designers de Toyoda s'inspirent de la Chrysler Airflow, tout en apportant quelques modifications ; ainsi les phares placés plus haut améliorent la vision nocturne. Car, comme son père, Kiichiro Toyoda a une obsession : la fiabilité du produit.

    Finalement, une première Toyoda, baptisée A1, sort en trois exemplaires en mai 1935. Une cérémonie bouddhiste est organisée pour bénir la voiture et lui assurer le succès... Elle restera au stade de prototype. Ce n'est qu'en 1936 que l'entreprise lance sa première voiture de série, la AA, que l'héritier entend exporter en Amérique.
    Problème : le nom Toyoda sonne mal. L'entrepreneur organise donc un vote au Japon. Vingt-sept mille réponses plus tard, le "d" devient "t", "parce qu'en japonais il faut huit caractères pour écrire Toyota et que ce nombre apporte chance et prospérité", expliquait en 2010 à la BBC, Seijiro Takeshita, directeur des investissements de la banque Mizuho International. Si la bénédiction des moines bouddhistes n'a pas été très efficace, la numérologie semble avoir atteint son but. La Toyota Motor Corporation est née.

    Entre 1936 et 1942, la berline AA est produite à 1.404 exemplaires, auxquels il faut ajouter 353 modèles décapotables, les AB. Mais la Seconde Guerre mondiale réduit à néant les ambitions commerciales de Kiichiro Toyoda... ainsi que sa production d'avant guerre. Toutes les AA ont été détruites. A tel point que le groupe a dû en refabriquer, en 1987, lorsqu'il a voulu célébrer le cinquantenaire de Toyota Motor Corporation.
    Pourtant, en 2008, un jeune Russe de Vladivostok a contacté le musée automobile Louwman, près de La Haye, après avoir trouvé une survivante de cette première série, probablement exportée sur le territoire du Mandchoukouo, un État fantoche résultant de l'annexion de la Mandchourie par le Japon et récupéré par les Soviétiques après les bombardements de Hiroshima et de Nagasaki. Depuis 1945, elle dormait dans une grange. Envoyée aux Pays-Bas avec l'accord de la Russie, elle y est aujourd'hui exposée dans l'état où elle fut découverte.

    Des Jeep pour la Corée

    La fin de la guerre marque pour Toyota un nouveau départ... très difficile. Le Japon est en ruine. La production redémarre avec le modèle SA qui ressemble cette fois à la Coccinelle de Volkswagen. Mais il est impossible de vendre des voitures dans un pays où l'on n'a rien à manger.

    En 1950, la Toyota Motor Corporation est placée en redressement judiciaire. Elle ne doit son salut qu'au gouvernement japonais, qui perfuse l'entreprise, et aux États-Unis qui, pour soutenir leurs troupes pendant la guerre de Corée, passent commande de 5.000 camionnettes et de Jeep sous licence. Toyota est sauvé.
    Son nouveau patron, Taizo Ishida, met en place une politique de développement industriel tous azimuts. Il agrandit l'usine de Koromo au point qu'en 1959 la ville change de nom pour s'appeler Toyota avant de se jumeler avec Detroit, capitale américaine de la voiture.

    Le pragmatisme à l'œuvre

    L'Amérique a toujours tenté le constructeur. Dès 1957, il essaie d'y vendre sa Crown. Sans succès. Mais bientôt le japonais réalise une percée internationale grâce à son 4 x 4, diffusé en Asie, puis en Australie, en Afrique et en Amérique du Sud. La réputation du modèle s'établit vite : aussi performant que le britannique Land Rover, il est moins cher et plus fiable.

    Pourtant, il faut attendre la Corolla pour que la firme s'impose aux Etats-Unis. Lancée en 1966, cette compacte y devient un best-seller. Toujours commercialisée, elle a dépassé les 40 millions d'unités vendues. En 1967, le groupe se flatte d'avoir produit 3 millions de voitures. Sur le marché intérieur, il renforce sa position sur le segment des K-Car (moins de 3,40 m et 660 cm 3 maximum) en rachetant Daihatsu, l'ancêtre des constructeurs japonais.
    En 1968, il fabrique plus de 1 million de voitures par an, en appliquant le "toyotisme". Cette version du travail à la chaîne repose sur la recherche du "zéro défaut", l'optimisation de la production et du temps de travail. Elle hisse le japonais au quatrième rang mondial de son secteur, mais elle a des travers : embauché comme ouvrier pendant cinq mois, le journaliste Satoshi Kamata décrit dans son livre Toyota, l'usine du désespoir (1973) un univers quasi carcéral où les salaires sont misérables et où règne un endoctrinement idéologique.

    Né avec le Japon moderne, l'industriel travaille à la grandeur de son pays et de son propre empire. Pour contourner les 25% de droits de douane qui touchent les importations automobiles aux Etats-Unis, il y installe des usines. Ces externalisations lui permettent aussi de rationaliser sa production : le pick-up Hilux destiné à l'Asie du Sud est fabriqué en Thaïlande, les citadines Aygo et Yaris en Europe.

    L'hybride, un pari gagnant

    En 1997, Toyota entame une nouvelle mutation. Alors que les États-Unis ne jurent que par l'essence et l'Europe par le diesel, il lance l'hybride Prius, qui annonce déjà le plan Toyota Environmental Challenge 2050 - dont l'objectif est de réduire de 90% les émissions de CO2, de n'utiliser que de l'eau de pluie pour ses usines et de parvenir à fabriquer des voitures totalement recyclables.

    Aujourd'hui, le constructeur est devenu le champion de l'hybride... et le leader mondial de l'automobile, délogeant en 2007 General Motors d'une première marche que l'américain occupait depuis soixante-quinze ans !

    En 2015, Toyota vendait plus de 10 millions de véhicules dans le monde, quand le numéro 2, Volkswagen, restait bloqué sous cette dizaine symbolique. Il faut dire que les choix stratégiques du japonais lui ont évité d'être atteint par le "Dieselgate" : depuis l'arrivée de l'hybride, la part des motorisations diesels n'a cessé de décroître. Aujourd'hui, elles ne concernent que 1% des véhicules au Japon et moins de 15 % des ventes de Toyota en France.

    TOP MODÈLE LEXUS : LA PÉPITE DE TOYOTA

    En 1983, une Mercedes est dépêchée pour accueillir Eiji Toyoda à l'aéroport de Los Angeles. En effet si au Japon la gamme Toyota va de la K-Car à la limousine, à l'étranger la marque propose surtout des modèles populaires, peu dignes de recevoir le big boss.

    Pourtant cet impair courrouce le président, qui lance aussitôt le projet F1 : F pour flagship (navire amiral) et 1 pour premier véhicule. Son objectif : dépasser la référence allemande du luxe. Six ans plus tard naît la Lexus LS 400. Cette grande berline, du niveau des Classe S et des Série 7, est fabriquée au Japon mais n'y est pas commercialisée. Priorité est donnée aux clients américains, avec un succès immédiat : la voiture, sortie en janvier 1989, affiche 16.000 ventes en décembre. D'autres modèles voient le jour, souvent des Toyota améliorée

    Mais très vite le marché de Lexus s'étend au monde entier avec une vraie gamme. Il faut toutefois attendre 2005 pour que cette marque apparaisse au Japon. Afin de se distinguer du trio allemand qui règne sur l'automobile de luxe, Lexus a un atout : ses modèles hybrides, essence/ électricité présents dans toute la gamme, de la compacte CT au coupé RC en passant par les SUV RX et NX.
    Depuis près de vingt ans, le cabinet d'études américain JD Powers classe ces voitures comme les plus fiables de toutes et quelque 700.000 modèles en ont été vendus en 2016. Un sommet du savoir faire de Toyota... et de l'art de vivre japonais.

    DES NAVETTES SPÉCIALES AUX MOTEURS HYBRIDES

    1896
    Sakichi Toyoda invente un système d'arrêt automatique pour les métiers à tisser industriels.

    1935
    La première Toyoda, la A1, sort en trois exemplaires.

    1937
    Toyoda devient Toyota, un nom censé apporter chance et prospérité.

    1941

    Kiichiro Toyoda est le nouveau président de Toyota Motor Corporation.
    1963
    Toyota s'implante en Europe : il exporte ses premiers véhicules au Danemark.

    1966
    Avec la Corolla, la conquête des États-Unis commence.

    1972
    10 millions de voitures sont déjà sorties des usines du groupe.

    1989
    Lancement de la gamme Lexus.

    1997

    Premières motorisations hybrides avec la Toyota Prius, toujours commercialisée.
    2016
    3 millions de Yaris ont été assemblées dans l'usine de Valenciennes, inaugurée en 2001.

    Capital
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