Annonce

Réduire
Aucune annonce.

Les offsets au Moyen-Orient : Un contexte géopolitique nouveau

Réduire
X
 
  • Filtre
  • Heure
  • Afficher
Tout nettoyer
nouveaux messages

  • Les offsets au Moyen-Orient : Un contexte géopolitique nouveau

    Les pays du Golfe vont chercher à renforcer leur industrie nationale de défense via les exigences de compensation industrielles.

    En moins d’un siècle, le Moyen-Orient aura finalement connu deux événements structurants ayant un impact majeur sur le contexte géopolitique mondial. L’un au XXe siècle avec l’avènement d’une ère pétrolière qui a permis d’inonder la région de liquidités financières et de supporter un demi-siècle d’un extraordinaire développement. L’autre au tout début du XXIe siècle avec l’émergence quantitative du pétrole et du gaz de schiste ainsi que des sables bitumineux qui permet désormais aux Etats-Unis d’être un des premiers producteurs mondiaux de pétrole.

    Il en résulte tant l’indépendance énergétique des Etats-Unis pour le siècle en cours que la perte d’importance stratégique du Moyen-Orient à leurs yeux.

    Alors que les deux guerres du Golfe pouvaient témoigner de la volonté interventionniste des Etats-Unis au Moyen-Orient, les récentes crises démontrent que l’Amérique modère désormais son implication dans la région et procède au recentrage de ses priorités stratégiques vers l’ouest Pacifique afin de faire face à une Chine expansionniste qui est par ailleurs devenue le principal client des producteurs pétroliers du Golfe.

    A cela, s’ajoute l’ambiguïté de la politique étrangère américaine, de plus en plus perçue par les pays du Golfe comme un manque de fiabilité des Etats Unis à garantir la stabilité de la région.

    Aussi, la plupart des pays du Golfe ont parfaitement compris l’impérieuse nécessité d’être en mesure d’assurer par euxmêmes leur propre sécurité en disposant de capacités militaires autonomes, avec ce que cela implique en termes d’indépendance décisionnelle, de choix

    Des fournisseurs et de développement d’une industrie nationale de Défense.

    Si la plupart des pays occidentaux ont sensiblement réduit leurs budgets de Défense depuis la crise de 2008, le Moyen-Orient dans son ensemble continue d’investir massivement dans le renforcement de ses capacités militaires. Selon les estimations du Sipri (Stockholm International Peace Research Institute), les six pays du GCC (Gulf Cooperation Council :Arabie saoudite, Emirats arabes unis, Qatar, Oman, Bahreïn et Koweït) devraient dépenser de l’ordre de 85 Md$ en 2015, soit un peu plus de deux fois le budget français de la Défense.

    Pour la seule Arabie saoudite, les estimations indiquent 60 Md$ en 2015, c’est-à-dire le 4e budget de Défense au niveau mondial, pas très loin derrière la Russie.

    PLUS DE 10 % DU PIB POUR LA DÉFENSE.

    Ramenées à la taille de leur économie, les dépenses en matière de Défense devraient dépasser les 10 % du PIB 2015 pour de nombreux pays du Moyen-Orient. En effet, ils doivent continuer de financer les investissements antérieurs décidés pendant les années d’opulence financière, alors que la manne du pétrole s’est notablement tarie en deux ans et que beaucoup affichent désormais un déficit important au regard de budgets étatiques qui sont à l’équilibre avec un pétrole entre 80 et 100 dollars le baril.

    C’est notamment le cas du sultanat d’Oman, pour lequel le FMI estime que le déficit budgétaire devait avoisiner les 15 % du PIB en 2015, alors que le pays est confronté à la quadruple nécessité de préserver ses dépenses sociales, de créer de l’emploi pour ses nationaux, de prendre en compte les risques sécuritaires de son environnement géopolitique, et surtout de diversifier une économie qui reste très dépendante du pétrole et du secteur public.

    Face à cette problématique largement commune à l’ensemble du Moyen-Orient, les différents pays du Golfe vont nécessairement chercher à renforcer leur industrie nationale de Défense via les exigences contractuelles de compensations industrielles (offsets).

    Dans les exportations de matériels militaires, il n’y a pas de contrat important si l’industriel, en sus de son offre technique et financière, ne s’engage pas à compenser le contrat par l’achat de biens ou des services au client, ou à développer des activités économiques créatrices de valeur dans le pays acheteur. Si ces obligations de compensations, les offsets, sont le plus souvent tout autant un mal nécessaire qu’un casse-tête contractuel, elles ont au moins le mérite incontournable de renforcer l’emprise du contractant sur son marché.

    Au sein du GCC, il existe généralement des règles ou pratiques qui définissent les obligations d’offsets et attribuent la responsabilité de leur suivi à des organismes étatiques : la National Offset Company (NOC) au Koweït, le Tawazun Economic Council (ex-Offset Program Bureau) aux Emirats arabes unis, l’Economic Offset Program (EOP) Committee en Arabie saoudite et la Partnerships Development Program Authority en Oman.

    Néanmoins, même si certains pays comme Bahreïn ou le Qatar n’ont pas encore officiellement instauré des obligations d’offsets, celles-ci font l’objet de pratiques non formalisées mais systématiques pour lesquelles le contractant doit in fine s’adosser à un acteur local au travers d’un partenariat capitalistique dont il est bien évidemment minoritaire.

    TRANSFERT DE TECHNOLOGIES.

    Ces pratiques visent à instituer une obligation de création de valeur pour le contractant, notamment par le transfert de technologies, le développement de compétences nationales et la création d’emplois. Elles sont associées à des dispositions contractuelles incluant consignation bancaire, délais de réalisation et pénalités financières.

    Au regard des 85 Md$ qui seront engagés en 2015 par les pays du GCC pour leurs budgets Défense, l’hypothèse que le tiers de ce montant soit des investissements à compenser à hauteur 35 % conduit à 10 Md$ d’offsets pour la seule année 2015 !

    Compte tenu des montants en jeu, il est illusoire de croire que les seuls offsets en lien direct avec les contrats, tels que la maintenance ou la formation par exemple, suffiront à satisfaire dans la durée aux engagements cumulatifs des contractants. Il est donc indispensable que les grands industriels de la Défense aient une stratégie différente à l’égard des offsets.

    PARTENARIATS COLLABORATIFS.

    En raison de la complexité, de la sophistication et des coûts de développement des matériels, les constructeurs sont devenus des architectes industriels et des intégrateurs de systèmes au travers de partenariats collaboratifs avec leurs fournisseurs de premier rang. Il en résulte qu’une part significative de la valeur des contrats provient de ces systémiers avec, de facto, un effet cascade négocié dans les obligations d’offsets pour lesquelles constructeurs et systémiers ont la taille critique pour opérer à l’international et satisfaire aux obligations de compensation des contrats.

    Néanmoins, le succès de ces acteurs de l’industrie de Défense repose aussi sur un large tissu industriel de fournisseurs de second rang, ou « Tier-2 », aux compétences, expertises et savoir-faire indispensables. Or ces Tier-2 sont dans une situation plus fragile en raison de leur taille insuffisante, de leur niveau de maturité technique, industrielle et de gestion de projet ainsi que de leur structure financière. Il leur est ainsi beaucoup plus difficile de se projeter à l’international.

    D’un autre côté, grâce aux montants colossaux des offsets encourus par les industriels occidentaux et à des investissements étatiques sans réelles limites, les pays du Golfe disposent déjà d’une industrie de Défense avec plusieurs acteurs de taille significative au niveau régional. Or ces conglomérats étatiques ont basé leur développement sur un schéma d’intégration verticale qui contient trois faiblesses structurelles limitatives de leurs perspectives : l’absence de réelles capacités R&D, la non-maîtrise de la Supply Chain et le manque de fournisseurs Tier-2.

    PARADOXE.

    Le paradoxe de la situation est que les contractants occidentaux ont des difficultés accrues à satisfaire à leurs obligations d’offsets avec des possibilités de projets non redondants, donc recevables, qui se réduisent, alors que les obligations de compensations continuent d’augmenter et que leurs Tier-2 ont des besoins de financements et d’accompagnement pour se développer à l’international, notamment au Moyen-Orient, où leur présence répond à la problématique des acteurs industriels étatiques de l’industrie de Défense.

    Face à ce constat, constructeurs et systémiers vont devoir appréhender différemment leurs obligations d’offsets en mettant en place une stratégie proactive et innovante s’ils ne veulent pas supporter les pénalités financières des engagements contractuels non tenus. A cet effet, un axe pertinent de réflexion est immanquablement de transformer les obligations de compensations des contractants en capacité de financement pour l’accompagnement et le développement à l’international des Tier-2.

    Hervé Brivoal est un spécialiste de l’aéronautique et de la défense diplômé de l’Ecole navale, de Sup-aéro et de l’Executive MBA HEC Paris.

    Air & Cosmos
    27 nov. 2015
    Dernière modification par zek, 10 mai 2017, 09h14.
    Si vous ne trouvez pas une prière qui vous convienne, inventez-la.” Saint Augustin

  • #2
    Les arabes ont du pétrole mais pas de cervelle.
    Les gestionnaires de ce projet seront tous des européens, bien Blanc. Bou3mama ne fera qu'ouvrir le portefeuille. Du taf en perspective pour les Gawri.

    Commentaire

    Chargement...
    X