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Messaoud Zeggar : L'homme qui savait tout faire

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  • Messaoud Zeggar : L'homme qui savait tout faire

    - Source : impact24.info


    Messaoud Zeggar : L'homme qui savait tout faire - Source : impact24.info
    Messaoud Zeggar est né à El-Eulma (ex-Saint-Arnaud), le 8 décembre 1926. Aîné d'une famille dont le père tenait le café du village, il se lança dans les affaires vers l'âge de 15 ans. En 1940, le jeune Messaoud négocie, autour de la base américaine installée dans la région de Sétif, les surplus de stocks alimentaires, de vêtements et de petits matériels. Et c’est ainsi que le futur allié des Américains inaugurât sa carrière d'affairiste dans une base US en Algérie.

    Ière partie

    Sensible au devenir de son pays, il rencontra, Hadj Ben Alla, officier de l’ALN chargé par les chefs de la Révolution de la structuration de la zone II de la Wilaya V historique. Et c’est lui qui en 1956, mit en contact Messaoud Zeggar avec Abdelhafid Boussouf, chef du MALG, qui fut ravi du recrutement de Messaoud Zeggar, une jeune recrue de poids âgée seulement de 30 ans.

    Avant de devenir Ministère de l’armement et des liaisons générales en août 1957, le MALG était la Direction Centrale des Liaisons Générales (DCLG). Elle a été créée en 1956 par le colonel Abdelhafid Boussouf.

    Quelques temps avant sa mort, Ben Alla avait rendu hommage, dans El Moudjahid du 20 novembre 2008, à son ancien compagnon de lutte Messaoud Zeggar, à l’occasion du 21ème anniversaire de la disparition de l’homme le plus proche de Boussouf et de Boumediene, dont Hadj Ben Alla disait : « Ce négociateur hors-pair et fournisseur d’armement de l’ALN au Maroc, appartenait avant 1954 au Parti du Peuple Algérien (PPA) ».

    Ben Alla avait connu Zeggar en 1948 : « Il fréquentait un marchand de bonbons proche du PPA », soulignait l’homme qui était à l’origine de son incorporation au sein de l’ALN à Oran. Zeggar avait hébergé Ben Alla qui était en mission au profit de l’ALN à Oran, en 1956, parmi sa famille à Medina Djedida. Zeggar, habile homme d’affaires et négociant perspicace, avait déjà ses entrées au port d’Oran. Il livrait des denrées alimentaires à l’entreprise qui s’occupait de la gestion de ce lieu d’affaires à l’ouest du pays. « Il assurait la liaison entre le nouveau chef de la zone II de la Wilaya V historique et le Commandement de la Révolution, à travers Nafissa Hamoud qui prendra, par la suite, le maquis de la Kabylie au sein de l’équipe de santé de la Wilaya III historique conduite par le médecin Lalliam », avait indiqué le défunt Ben Alla. « C’était un homme pétri de qualités exceptionnelles. Son intelligence, son esprit d’initiative, son côté débrouillard et son penchant à concocter des astuces les plus invraisemblables pour arriver à son objectif, m’avait incité à l’envoyer au Maroc », disait Ben Allah qui était à l’origine de l’aventure de Zeggar et qui sera derrière la naissance d’une histoire glorieuse, traversant de bout en bout la légende du MALG de Boussouf, homme secret et organisé.

    Pendant la guerre de libération, Messaoud Zeggar connu sous le nom de Rachid Casa, (Casa pour Casablanca, Maroc) où il se rendait souvent pour rencontrer les officiers américains qui venaient s’amuser dans les bars et cabaret de la ville, avec lesquels il faisait de la contrebande au profit de l’ALN. Ces derniers, installés à la base américaine au Maroc, l’avait surnommé « Mister Harry », et à force de les fréquenter il a appris l’anglais. Messaoud Zeggar récupérât beaucoup d’informations et de matériel de guerre au profit de la révolution Algérienne.

    Zeggar, un homme très organisé, planifiait toutes ces actions à l’avance. Il ne pouvait pas agir autrement, en ces temps de guerre totale que livrait la puissance coloniale au peuple algérien et à ses combattants. Il prouva ces capacités lorsqu’il implanta une usine de bazookas et de mortiers à Nador, dans le Rif marocain, sous couvert d’usines d’ustensiles de cuisine. Zeggar préparait ses entreprises dans les menus détails. C’est ainsi qu’il avait mis à la tête de cette usine des gens de son patelin pour s’assurer du contrôle total de l’embryon de l’industrie d’armement de l’ALN qui fut une prouesse en ces temps de guerre, au point que même le pays hôte ne savait rien de ce qui se tramait dans les monts du Rif. Parmi les hommes de Zeggar à l’intérieur de cette usine secrète, il y avait Djillai Mohamed Seghir, Zeggar Abdellah, Mansouri Khaled, Abdelhamid Zeggar, Oufi Mustapha, Mezenane Ali, Touati Mohamed, tous natifs de la ville d’El Eulma. A rappeler que cette entreprise est de doter l’ALN d’une industrie d’armement et dans l’organisation des réseaux d’achat d’armes au profit de la Révolution, il y avait, aussi, Mansour Boudaoud. Son cousin et proche collaborateur, M. Djillali Mohamed Seghir, avait indiqué, lors de l’hommage rendu à Zeggar, que le défunt avait installé cette fabrique de mortier à la demande de Boussouf et de Boumediene. Mohamed Seghir a été, aussi, catégorique sur la question du matériel de transmissions acquis par l’ALN. Il avait affirmé qu’il tenait l’information de Boussouf lui-même, qui lui avait dit : « 90% de ce matériel a été fourni par Zeggar ».

    Dans son témoignage, lu à l’occasion du 21ème anniversaire de la disparition de Zeggar, M. Dahou Ould Kablia, responsable de l’Association des anciens membres du MALG, avait relevé le rôle principal joué par Rachid Casa dans l’affaire d’achat d’équipements de transmission utilisé par les troupes américaines dans les bases mises à leur disposition par l’OTAN au Maroc, durant la IIème Guerre mondiale. « Un poste de radio-marine de grande capacité a été acquis par Zeggar et transporté de nuit dans la région de Nador », souligna Ould Kablia. Ce poste a été transformé en poste d’émission pour la radio Sawt El Djazaïr qui émettait de Nador, à partir du 16 décembre 1956.

    « A partir de cette date, il devient le collaborateur le plus proche et le plus efficace du colonel Boussouf, puis il s’occupa de la logistique, en complémentarité avec Mansour Boudaoud ». A partir de 1957 jusqu’à 1960, Zeggar développe une mission au port de Tanger (Maroc) puis dans les pays limitrophes, en Espagne en particulier, dans le sillage de la mise en œuvre des filières d’achat d’armes et d’équipements organisées et efficaces,Boussouf avait fait de Zeggar son homme de confiance pour les missions secrètes à caractère politique. « Son champ d’action devient l’Angleterre et les Etats-Unis d’Amérique, où il se voit ouvrir les portes les plus importantes du microcosme de la politique et des finances de ce pays, tant pour les hommes du parti démocrate, les frères Kennedy, que ceux de la finance, dont le président de la Chase Manhattan Banque et gouverneur de la ville de New York, Nelson Rockefeller ». C’est dans ce champ que Zeggar va prouver ses compétences, son habilité et son sens d’organisation et d’approche opérationnelle.

    L’Egypte de Djamel Abdenasser qui était parmi les deniers pays à reconnaître le GPRA, avait attiré l’attention de Zeggar qui, au même titre que son chef immédiat, le colonel Boussouf, se posait des questions sur l’attitude de l’Egypte qui cherchait à contrôler les structures de l’ALN, par tous les moyens. Là, aussi, la prouesse de « Mister Harry », comme il plaisait aux militaires américains d’appeler Zeggar, fut légendaire. Son côté astucieux fut remarquable et d’une pertinence hors pair, au point où ilmit hors-jeu le « grand frère » égyptien épaulé dans son entreprise de faire une OPA sur la révolution algérienne par l’inénarrable Fethi Dib. C’est dans ce contexte, relève-t-on, que Zeggar avait rédigé une fausse lettre qu’il avait signée du nom de De Gaulle et qu’il avait transmise à l’ambassade d’Egypte, à travers un colonel français qui travaillait à l’Elysée. Dans cette fausse lettre, De Gaulle avait demandé à son homologue le «grand frère » Abdenasser de cesser de fournir de l’aide militaire à la Révolution Algérienne moyennant un soutien économique de la France à l’Egypte. Une proposition qu’avait acceptée le grand révolutionnaire arabe, dans une vraie lettre remise au colonel qui collaborait avec Zeggar et que ce dernier avait remise au colonel Boussouf, soulevant de la sorte l’étonnement des dirigeants de la Révolution. Zeggar s’est aguerri dans le travail du renseignement, au point de placer un équipement d’écoute à l’intérieur même du bureau du président français. Il avait également récupéré un document secret du bureau qu’il avait remis aux responsables de la Révolution. Un document qui a été d’un apport avéré à l’équipe des négociateurs d’Evian, conduite par le défunt Krim Belkacem.



    IIème partie

    1962 c’est l’indépendance de l’Algérie.

    Après le 19 juin 1965, et la prise du pouvoir par Houari Boumediene, Zeggar a été contacté par des agents d’affaires qui désiraient acquérir les fils barbelés et matériel composant les deux barrages frontaliers entre l’Algérie et le Maroc d’une part, et l’Algérie et la Tunisie d’autre part. Ces hommes d’affaires savaient que Zeggar était très proche de Boumediene et que, de ce fait, il obtiendrait facilement l’achat des éléments composant les barrages et qu’il pourrait alors les leurs revendre. En effet, Zeggar en parla à Boumediene qui donna son accord puisque cette transaction allait enlever le matériel séparant les deux pays frères, la Tunisie et le Maroc, d’avec l’Algérie.

    Zeggar eut le privilège d’obtenir le tout au dinar symbolique, qu’il revendit à une somme faramineuse.

    La construction des lignes Morrice (450km) et Challe (300km) sont le fait de l’armée coloniale qui a installé des barbelés électrifiés tout au long des frontières entre l’Algérie et la Tunisie et l’Algérie et le Maroc, croyant venir ainsi à bout des combattants de l’A.L.N. Les barrages larges de 30 à 60 mètres, s’étendent tous deux sur une distance de 750 km. Les deux lignes sont des réseaux parallèles de fils électrifiés et de barbelés de différentes formes et dimensions. Les autorités françaises les ont dotés de tous les moyens tels la haute tension électrique (30.000 volts sur la ligne Challe) sans oublier différents types de mines. Des rumeurs circulèrent sur ce matériel qui aurait abouti en Israël où il aurait été utilisé comme barrière de protection contre les Palestiniens.

    750 km de barbelés, de grillage, de piquets et de tout le système électrifie qui va avec. Il y avait de quoi faire ! Achetés au dinar symbolique et revendus à des millions de dollars, voilà de quoi faire de Zeggar le premier milliardaire de l’Algérie indépendante. Mais ce milliardaire, diront certains, n’était que le prête nom de Houari Boumediene, qui avait besoins d’argent pour financer les activités extérieures de ces agents secrets.

    D’ailleurs et à ce propos, après la mort de Boumediene, Kaïd Ahmed a révélé que le défunt avait un compte bancaire en Amérique de 17 milliards de l’époque, fruit de juteuses commissions perçues par Zeggar, lequel, comme chacun le sait, avait le quasi-monopole du commerce extérieur. Kaïd Ahmed fut, pour ces déclarations, poursuivi en justice devant le tribunal de Paris le 31 janvier 1990, par la veuve du président Boumediene. Donc, argent personnel ou argent devant servir aux activités liées à l’Etat Algérien, cette question restera sans réponse. Mais curieuse coïncidence, Kaïd Ahmed décéda au Maroc à la même période dans des conditions … mystérieuses ?

    Patriote infatigable, Zeggar qui, après l’indépendance du pays, s’est reconverti aux affaires,« importateur de feux d’artifices par bateaux entiers », fut l’un des artisans majeurs de ce qui a été appelé la diplomatie parallèle. La diplomatie de l’ombre qui caractérisait, dans des proportions importantes, l’action diplomatique algérienne dans le monde, explique la place qu’occupait l’Algérie dans le concert des nations.

    De par ses relations avec les personnalités américaines, dont Georges Bush Senior qui, pendant sa compagne électorale se déplaçait dans l’avion personnel de Zeggar ; il put déjouer plus d’un coup contre l’Algérie, telle la menace de frappe des USA contre l’Algérie en 1967, où la sixième flotte américaine lorgnait du côté de Cherchell, ainsi que la tentative d’assassinat d’un Président arabe. Zeggar accompagnait les orientations patriotiques de Boumediene, dans les domaines politique et économique. Il lui a été d’une grande aide au moment où Boumediene avait décidé de nationaliser les hydrocarbures. C’est dans ce contexte que Zeggar avait prouvé tout son savoir-faire, en allant arracher la neutralité des USA, dans la guerre qui opposait l’Algérie à la France dans cette affaire.
    Dernière modification par nacer-eddine06, 24 mai 2017, 16h00.
    The truth is incontrovertible, malice may attack it, ignorance may deride it, but in the end; there it is.” Winston Churchill

  • #2
    La Sécurité Militaire est employée non seulement dans le musellement de l’opposition, mais aussi dans le renseignement à même d’éclairer la politique de Houari Boumediene. Cela est d’autant plus vrai qu’à peine au pouvoir, son premier but est de nationaliser les richesses du sous-sol dont l’exploitation était assurée jusque-là par des entreprises détenues majoritairement par des firmes étrangères. De ce point de vue, la question relative à la nationalisation des hydrocarbures était devenue, dans l’esprit du chef de l’Etat algérien, une « véritable obsession ».

    En plein conflit israélo-arabe en 1967, Boumediene décide de gérer l’après-rupture des relations diplomatiques avec les Etats-Unis. Par solidarité avec les « pays frères » et pour se doter d’une stature populaire dans le monde arabe et auprès de la rue algérienne, il coupe officiellement les ponts avec Washington mais il sait, par ailleurs, que s’il a beaucoup à gagner d’une telle position en terme de pouvoir, il perd énormément sur le plan économique puisque les Etats-Unis subventionnent certains produits agricoles de première nécessité, importés par l’Algérie, et accordent à ce pays fraîchement indépendant un certain nombre d’aides et autres crédits, notamment dans le cadre de ce qui fut appelé à l’époque le programme « Food for peace ». Ces facilitations avaient permis aux Algériens de recevoir entre 1962 et 1963, en aides alimentaires, de quoi nourrir 4 millions de personnes.

    Le président algérien choisit alors de faire preuve d’un extraordinaire cynisme qui l’incite à adopter un double discours et à jouer ainsi sur deux tableaux. Dans la forme, la prose présidentielle est « anti-impérialiste », sévère à l’égard de l’hégémonie américaine qui de surcroît soutient « l’ennemi sioniste ». Boumediene décide, en même temps, de prendre le contrôle de plusieurs entreprises pétrolières présentes dans le sud du pays, en les mettant sous tutelle algérienne : El Paso, Mobil, Shell, Esso, etc.

    Dans les coulisses, c’est une autre histoire. Messaoud Zeggar, alias Rachid Casa, théoriquement démobilisé des services du MALG, entretient une diplomatie parallèle en direction des Etats-Unis, suite à laquelle, il va renseigner Boumediene sur les réalités de la vie politique américaine. Le chef de l’Etat algérien a ainsi accès à des informations non bureaucratisées, émanant d’une source indépendante des appareils officiels.

    Zeggar a les moyens de mener sa mission

    S’étant lancé dans le monde des affaires florissantes, il est très bien introduit dans le milieu très sélect qui renferme tous ceux qui comptent à Washington : secrétaires d’Etat, sénateurs, agents de la CIA, businessmen, magnats des médias, etc. Il fréquente le gouverneur du Texas, John B. Connally, le milliardaire David Rockefeller, le futur patron de la CIA et futur Président Georges Bush Senior, l’astronaute Frank Borman ou le ministre de la Justice sous Nixon, Richard Kleindienst. De plus, l’homme pèse lourd financièrement. Sa fortune personnelle est alors estimée à plus de 2 milliards de dollars del’époque. Ce n’est pas rien pour un Algérien dont le pays est indépendant depuis à peine cinq ans. En réalité, Rachid Casa est chargé de jouer le rôle de pivot du lobby que Boumediene est en train de constituer afin de défendre les intérêts algériens à Washington malgré l’absence de relations diplomatiques. Il doit financer les déplacements officieux de certains responsables, les prendre en charge durant leur séjour et les mettre en relation avec des décideurs américains. Des contrats importants sont signés à cette époque et plusieurs sources affirment que Messaoud Zeggar touche systématiquement de fortes commissions avec l’accord de Boumediene, pour financer ses propres activités et alimenter, par ailleurs, une « caisse secrète » dont pourrait disposer le Président pour mener à bien sa politique, surtout celle qui vise à subventionner et à aider des mouvements dits« révolutionnaires » aux quatre coins de la planète.

    Rachid Casa aurait même participé au financement des campagnes électorales de certains candidats, notamment ceux briguant un siège au Congrès. Messaoud Zeggar peut compter sur l’appui de celui qui est le premier ambassadeur d’Algérie à Washington : Chérif Guellal qui a présenté ses lettres de créances à J.F. Kennedy en juillet 1963 et dont il est devenu l’un des proches. L’ambassadeur connaît lui aussi du beau monde aux Etats-Unis. Ami des politiques, des grands noms du journalisme, de l’establishment économique et des stars du showbiz, Guellal a ses entrées partout. Il est très lié aux frères Kennedy et entretiendra de très bonnes relations, par la suite, avec Lyndon B. Johnson. Lors de la rupture des liens diplomatiques, Chérif Guellal est évidemment contraint de laisser son poste d’ambassadeur mais Boumediene, qui connaît ses capacités d’entrisme au sein du sérail américain, le nomme représentant, aux Etats-Unis, de la société pétrolière algérienne Sonatrach. Ce célibataire séducteur aux allures de play-boy italien a tout pour plaire. Il vit d’ailleurs avec Yolande Betbeze, Miss America 1951, mais surtout veuve du patron de la maison de production hollywoodienne Twentieth Century Fox. Le duo formé par Zeggar et Guellal va réaliser, en pleine guerre du Vietnam, un geste que les responsables de Washington ne manqueront pas d’apprécier.

    En effet, à la faveur des relations entretenues par Boumediene avec les Vietnamiens, les deux intermédiaires fourniront à leurs amis la liste des prisonniers américains détenus au Vietnam. Grâce à cette opération, Messaoud Zeggar obtiendra pour l’Algérie de grandes quantités de blé subventionnées par les Etats-Unis.
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    • #3
      IIIème partie

      Dans ce contexte et confiantquant à la réaction américaine en cas de nationalisation, Boumediene décide d’engager des négociations avec les autorités françaises au sujet de l’exploitation des hydrocarbures. Celles-ci sont tendues. De plus, un jugement sévère a été prononcé en Algérie contre des ressortissants français accusés d’espionnage. D’un autre côté, Georges Pompidou ignore que son homologue algérien s’apprête à nationaliser et ce, même si l’information circule sous forme de « rumeur » depuis plusieurs mois dans les milieux bien renseignés. Ses véritables intentions sont traitées en secret d’Etat. Seuls Belaïd Abdesselam, ministre de l’Industrie, Merbah, le patron de la Sécurité Militaire, Sid Ahmed Ghozali, à la tête de la Sonatrach, et quelques-uns de ses plus proches collaborateurs sont mis au courant. Les mieux informés apprendront sa volonté de nationaliser les hydrocarbures quelques semaines seulement avant l’annonce officielle.

      Ces négociations à plusieurs rounds entamées dès 1965 s’éternisent. Kasdi Merbah et son adjoint chargé du renseignement extérieur s’emploient, de leur côté, à obtenir un maximum d’indications sur les intentions françaises. Il leur faut évaluer la réaction de Paris en cas de nationalisation. Pour ce faire, ils font appel à un avocat algérien assez atypique ayant ses entrées ici et là et notamment auprès de la gente féminine. Ce profil les intéresse d’autant plus qu’il s’agit en réalité d’un de leurs hommes. Son nom, Rachid Tabti, mais d’aucuns l’appellent tantôt« Richard » tantôt « Tony ». Il est, depuis le début des années 1960, avant l’indépendance de l’Algérie, très bien introduit en France. Ancien boxeur, cascadeur à ses heures dans des séries ou des films d’action, l’avocat séduit autour de lui. En fait, cet homme aux allures de dandy militait déjà au sein du Mouvement national au cours des années 1950 et il deviendra, plus tard, un élément de la Sécurité militaire. Un lieutenant qui sera affecté, dès 1965, au service « B2 », commandé alors par Noureddine Zerhouni alias Yazid. Détaché auprès du ministère des Affaires étrangères en septembre 1963, il aura pour mission de se rendre à Paris afin de faire du renseignement, notamment sur les questions liées aux échanges économiques. Son diplôme d’avocat et ses multiples hobbies devant lui servir de couverture pour ouvrir un cabinet et s’intégrer dans la haute société française. Pour passer inaperçu, il est officiellement radié du corps de la diplomatie depuis janvier 1965. Cette radiation n’est cependant rendue publique qu’en mars 1966 alors que Tony est déjà à Paris depuis plus d’un an. Ses conquêtes féminines sont nombreuses et l’une d’entre elles est particulièrement intéressante pour les services algériens.Rachid Tabti, âgé alors de 36 ans, fréquente depuis plusieurs mois l’assistante du diplomate Jean-Pierre Brunet, le directeur des Affaires économiques et financières au Quai d’Orsay, mais surtout administrateur d’ERAP, l’entreprise qui exploite, pour le compte de la France, les gisements pétroliers et gaziers en Algérie. Grâce à cette relation très intéressée, entretenue durant plus de deux années, par Rachid Tabti avec Béatrice Halegua,la secrétaire de Jean-Pierre Brunet, les courriers confidentiels et les notes d’analyse que s’échangent les négociateurs français finissent, quelques jours plus tard, sur les bureaux des commandants Noureddine Zerhouni et Kasdi Merbah, pour atterrir ensuite dans le parapheur de Houari Boumediene. Plus de 4.000 documents secrets sont ainsi acheminés vers Alger.

      Celui qui était appelé Tony les remet à l’un de ses collègues, Boumaza Ouali alias Tayeb, resté en retrait et entretenant une cellule chargée d’effectuer la navette entre les deux capitales.C’est un hôtel situé dans le 12e arrondissement de Paris, géré par un Algérien, Mustapha, qui sert de boîte aux lettres.C’est là que Tabti vient déposer, plusieurs fois par semaine, les documents qu’il récupère auprès de sa belle afin que ceux-ci soient acheminés rapidement vers Alger. Cette action est cruciale pour la partie algérienne. Elle a pu évaluer ainsi les conséquences d’une nationalisation en ayant régulièrement, à travers les pièces officielles qu’elle analysait, un aperçu sur l’état l’esprit des autorités françaises.

      Le 24 février 1971 en fin d’après-midi, Houari Boumediene annonce que toutes les richesses du sous-sol algérien sont nationalisées. Il s’agit alors d’une prise de contrôle de 51% des sociétés pétrolières françaises qui décideront finalement de céder la totalité de leurs parts et de quitter l’Algérie. Seul Total préférera poursuivre ses activités.

      A partir de là, Boumediene va doter la Sonatrach de tous les moyens pour en faire une très grande firme. L’une des plus importantes au monde. Elle deviendra très vite un mastodonte de la planète hydrocarbures.En vérité, Houari Boumediene vient d’opter pour une logique de radicalisation quant aux choix stratégiques dans le but de garantir à son régime un maximum de stabilité. Il se démarque ainsi du bricolage de son prédécesseur. Sa vision consiste alors à faire accroître les ressources de l’Etat afin de mettre en application une politique intérieure à même de pérenniser le système et de donner naissance à une diplomatie qui lui permettrait de briller sur la scène internationale en se présentant comme un interlocuteur sérieux, valable et incontournable.Cette réalisation -qui restera sans conteste l’œuvre majeure du règne de Boumediene- et, par ailleurs, l’ensemble de sa stratégie seront vécus comme un coup de tonnerre dans les milieux politiques et diplomatiques français. L’Elysée décide de boycotter les hydrocarbures et les vins de son ancienne colonie. Pendant ce temps, les autorités algériennes choisissent, quant à elles, de dégager la monnaie locale, le dinar algérien, de la zone du franc français. De plus, la diplomatie parallèle, engagée par Boumediene, a porté ses fruits. Un mois après la nationalisation des hydrocarbures et alors que les relations algéro-françaises sont au plus bas, le président Nixon rend publique une lettre personnelle adressée au chef de l’Etat algérien, dans laquelle,le locataire de la Maison Blanche annonce que les Etats-Unis sont prêts à « établir des relations diplomatiques normales avec l’Algérie quand elle le désirera ».

      Si les négociateurs sont surpris d’une telle décision, les enquêteurs de la DST, Direction de la surveillance du territoire (le contre-espionnage français) ne le sont, eux, qu’à moitié. Ils surveillent depuis un moment Rachid Tabti et sa relation avec la secrétaire de Jean-Pierre Brunet. Cette dernière ainsi que les deux espions algériens seront arrêtés. Tabti est interpellé chez lui durant l’année 1970, quelques mois avant la nationalisation.Il a été filé et mis sur écoute durant de longues semaines. Mais lorsque les services français découvrent son véritable rôle, les dés sont déjà joués. Tabti et Ouali seront alors condamnés respectivement à dix et huit ans de prison pour « intelligence avec une puissance étrangère ». Béatrice Halégua, l’assistante du patron del’ERAP, écopera, quant à elle, de « cinq ans de prison avec sursis», le tribunal ayant considéré qu’elle était de « bonne foi » et qu’elle fut tout simplement abusée par son amant-espion dont elle était éperdument amoureuse. Les deux hommes de la Sécurité militaire algérienne effectueront un séjour de deux ans de détention avant d’être discrètement échangés contre cinq agents du SDECE arrêtés, en Algérie, pour les mêmes motifs.

      Suite et fin au prochain article...
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      • #4
        IVème partie



        Messaoud Zeggar étant devenu un homme important en Algérie, tant sur le plan économique que politique, vient de voir sa sœur Dalila s’enfuir avec un Français, Denis Mashino qu’elle épousa à Paris le 10 mars 1975.

        Dalila savait que son frère aîné qui est aussi le chef de famille, n’aurait jamais accepté qu’elle épouse quelqu’un de nationalité française qui, de surcroît, est un ancien collaborateur de l’armée Française ; c’était une honte pour Zeggar que de laisser sa sœur épouser un tel homme.

        Pour ce couple, le moment était venu de quitter l’Algérie afin de pouvoir vivre ensemble. Dalila prétendit avoir des problèmes de santé et obtint la permission d’aller voir un spécialiste en Suisse. De là, ils sont allés à Paris où ils se sont mariés.

        Bien entendu, ils étaient parfaitement conscients du fait que Messaoud réagirait très violemment en apprenant leur mariage. Cela constituait une suprême insulte pour lui, remettant en question son prestige social et son autorité familiale.

        Le couple avait tout d’abord pensé rester à Paris où réside le père de Denis et certains de leurs nombreux amis. Et, pensaient-t-ils, si Messaoud tentait d’employer la violence contre Dalila, leur cause recevrait un appui de l’Etat Français.

        Cependant, cet avantage leur est apparu comme dangereux, dans la mesure où leur problème pourrait rapidement servir de point de départ à une polémique politique : d’un côté, la gauche française aurait saisi l’occasion pour attaquer le gouvernement français, l’accusant de ne pas être assez actif pour défendre le droit. De l’autre côté, l’opposition algérienne à Paris aurait pu saisir cette occasion pour attaquer le gouvernement algérien du fait des relations étroites que Messaoud entretient avec des membres du gouvernement et divers officiers de l’armée algérienne.

        Le résultat de tout ceci aurait été une marginalisation de leur problème aux dépens de Dalila. Il était donc préférable de quitter la France pour aller au Canada où ils sont arrivés en août 1975.

        En décembre 1976, Messaoud vint à Montréal et demanda à Dalila de la rencontrer seule. Au cours de la discussion qui s’ensuivit, il insista auprès d’elle pour qu’elle revienne en Algérie, elle montra à son frère l’acte de mariage et lui déclara qu’elle était liée à Denis et qu’elle ne le quitterait jamais. Messaoud s’emporta et se mit à insulter sa sœur qu’il menaça, de sorte que celle-ci décida de ne plus le revoir.

        En mai 1977, Messaoud revint à Montréal avec les deux sœurs préférées de Dalila, pour essayer de la convaincre de revenir à la maison. Encore une fois, ils demandèrent à la rencontrer seule. Elle accepta de les voir, afin de leur expliquer clairement qu’elle voulait rester au Canada avec Denis et que, quelle que soit l’évolution de leur relation de couple dans le futur, elle ne rentrerait jamais en Algérie. Pourtant, pendant trois jours, ses sœurs essayèrent par tous les moyens de la convaincre de rentrer avec eux en Algérie. C’est alors que Dalila décida que, dorénavant, elle ne rencontrerait des membres de sa famille qu’en présence de Denis.

        Devant une telle décision, Messaoud et ses sœurs quittèrent Montréal.

        Pendant la première semaine d’avril 1978, Messaoud revint à Montréal avec les deux sœurs préférées de Dalila, leurs enfants que Dalila aime beaucoup et leurs maris respectifs. Le jour de leur arrivée, ils demandèrent à Dalila devenir seule à l’appartement. Une fois de plus, elle leur expliqua qu’elle ne les rencontrerait qu’en présence de Denis. Trois jours plus tard, les sœurs rappelèrent en disant que Messaoud avait quitté Montréal et qu’il était donc possible de se voir tous ensemble. Durant les deux semaines qui suivirent, Dalila fut très heureuse ; elle pouvait enfin voir ses sœurs librement chez elle, avec les enfants. De plus, du fait de l’absence du frère, aucune de ses sœurs ne se sentait obligée de parler du retour en Algérie. .

        Les sœurs de Dalila, sa nièce et les maris commencèrent à les inviter souvent au restaurant. Et Dalila acceptait parfois de sortir seule avec eux.

        C’est ce soir-là, le 24 avril 1978, que l’enlèvement s’est produit.

        Les faits concernant l’enlèvement

        L’aéroport : mardi 25 avril 1978 à 7 heures du matin, de nombreux témoins ont vu Dalila, inanimée, traverser l’aéroport dans une chaise roulante. Dalila a vomi (elle a déclaré ensuite avoir été droguée) plusieurs fois.

        Des témoins ont entendu Dalila dire à un certain moment : « Mais je suis dans un aéroport » et l’une de ses sœurs a répondu : « Mais non, tu es dans un hôpital, ne t’inquiète pas »,

        Les employés de l’aéroport de Wilmington (Ohio) ont dit (à un journaliste de l’AFP) que l’avion était un D.C. 8 remis en état spécialement pour ce voyage.

        Le commandant de bord, de cet avion, Luis Furlong, est un pilote retraité qui, en vertu des règlements américains, ne peut plus piloter d’avions de lignes aux Etats-Unis, mais il a dit (à un journaliste de l’AFP) reprendre des vols spéciaux pour certaines occasions.

        Le steward, un réfugié sud-vietnamien aux Etats-Unis, est rentré et resté illégalement sur le territoire canadien pendant les deux jours qui ont précédé l’enlèvement.

        Dalila est sortie avec un faux passeport, délivré le 13 mars 1978 à El Eulma, sur lequel l’ambassade du Canada à Alger a émis un visa de tourisme d’un mois pour que Dalila vienne visiter le Canada. Pourtant, Dalila était à Montréal depuis août 1975 avec un visa d’immigrante.

        Dans son communiqué, le procureur général déclare que les autorités du ministère de la Justice du Québec ont des motifs raisonnables et probables de croire qu’un crime d’enlèvement a été commis au Québec, à l’endroit de Dalila Zeghar Maschino par Messaoud Zeghar. « II apparaît clair, poursuit-il, que cette dame n’a pas quitté librement et volontairement le Québec et qu’elle n’est pas libre actuellement de quitter l’Algérie. Une telle situation touchant une personne ayant le statut d’immigrante reçue et jouissant de ce fait des droits reconnus par nos lois est intolérable et doit faire l’objet de l’action des gouvernements responsables».

        Dalila étant donc réintégrée en Algérie. N’ayant plus aucun papier et son signalement ayant été donné à tous les postes frontière, elle était prisonnière du pouvoir de son frère qui avait tissé autour d’elle une barrière qui l’empêcherait de repartir.

        Le mari de Dalila, Denis Maschino, se morfondait d’avoir perdu sa bien-aimée. Il retourna à Paris auprès de son père pour essayer de trouver une solution. En effet, il trouvèrent la solution : celle-ci consistait pour Denis à descendre à Alger et de demander audience au directeur générale de la Sécurité Militaire auquel il révéla un secret très important à savoir le lieu où se trouve enterré le colonel Amirouche, tué avec son compagnon El Haouès, par l’armée Française et enterré dans une caserne à Boussaâda.

        Cette importante information était ignorée de tous. Elle fut donc échangée contre l’autorisation de sortie d’Algérie de Dalila, Denis son mari restant sur place en garantie, et pour montrer l’endroit où sont les deux héros de la révolution.

        Boumediene ayant été mis au courant de l’affaire jugea très important de savoir où sont enterrer Amirouche et Si El Haouès, et comme il était le seul à pouvoir influer sur Messaoud Zeggar, il lui imposa de laisser sa sœur faire sa vie en échange de cette révélation. C’est ce qui fut fait, et chacun y trouva son compte.

        En effet Denis Maschino savait ou se trouvait les corps des deux héros, Amirouche et Si El Haoués : ces corps furent récupérés par les autorités algériennes[1].

        Depuis, Denis s’est converti à l’Islam. Il se prénomme Dalil. Il a fait une longue déclaration au quotidien montréalais Le Devoir. Il s’estime victime d’un drame familial et déplore l’utilisation faite de « l’affaire » par divers groupes et de nombreux journaux. Il conclut : « Le jour où ma belle-famille, ma femme et moi-même seront réunis, tous ceux qui auront tenté de tirer profit de nos difficultés présentes seront contraints de faire amende honorable ».

        Sans doute pour Dalil Maschino, par sa conversion et ses déclarations, tente-t-il de séduire sa belle-famille.
        The truth is incontrovertible, malice may attack it, ignorance may deride it, but in the end; there it is.” Winston Churchill

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        • #5
          Vème partie

          Zeggar au secours de Boumediene

          Le 26 avril 1968, un officier du Corps National de Sécurité a, devant le Palais du gouvernement à Alger, tiré sur la voiture officielle du Président Houari Boumediene. Le Président vient d’échapper à la mort, il en sort avec une éraflure au visage due aux bris de vitre.

          Une photo prise après l’attentat le montre, courroucé, pansement au visage chevauchant sa moustache rousse, le regard dardant l’airain. Tout ce qui allait guider Boumediene était dorénavant fixé dans ses yeux.

          Les auteurs de l’attentat arrêtés, il ne fut pas difficile d’établir l’identité des commanditaires. Il s’agissait de deux de ses pairs, membres du Conseil de la Révolution, colonels comme lui et même un moment proches compagnons, Tahar Zbiri et Mohamedi Saïd.

          Sentant ses rivaux, prêts eux aussi à vouloir prendre le pouvoir par le putsch, leur culture commune, Boumediene préféra disparaître, pour d’évidentes raisons de sécurité. Sa planque fut tenue secrète.

          On le disait à l’étranger, sans que personne ne sache précisément dans quel pays. Son entourage semblait avoir favorisé cette rumeur.

          En vérité, il était chez son ami Messaoud Zeggar, chemin Poirson, sur les hauteurs d’Alger. Là où, non seulement il se sentait en sécurité, mais aussi où personne n’aurait songé à venir le chercher.

          Amin Mohamed, secrétaire général de la Présidence de la République à l’époque, le côtoya quotidiennement pendant des années. Il témoigna en 1984, lorsque Messaoud Zeggar, victime de la déboumediénisation, fut traîné devant les tribunaux. Il confirma que ce dernier «était l’ami et le confident du Président Boumediene».

          Dans sa retraite ultrasecrète au domicile de Zeggar, Boumediene ne recevait, bien entendu, personne, à l’exception de son ministre des Affaires étrangères, Abdelaziz Bouteflika. Alors qu’Alger bruissait des rumeurs les plus folles, que les chancelleries et officines conjecturaient, pour occuper Boumediene rongeant son frein dans sa villa, Zeggar eut «une de ces idées originales dont il avait le secret».

          C’est Seddik S. Larkeche (1) qui rapporte cette séquence. Pour distraire ce rescapé d’une tentative d’assassinat, le colonel ascétique présidant aux destinées de l’Algérie, Zeggar pousse la vigilance jusqu’à faire venir auprès du Président son assistante suisse.

          Voici comment le biographe de Zeggar rapporte cet épisode époustouflant. «Il (Zeggar) appela sa société de négoce à Genève et demanda à sa collaboratrice de l’époque, Jacqueline Scharwtz, de prendre le premier avion pour Alger.

          Un chauffeur vint la chercher à l’aéroport et la conduisit chez Messaoud Zeggar. Elle entra, fut présentée à Houari Boumediene qui logeait dans une villa attenante et on l’installa dans cette même demeure avec le Président. Elle fut chargée de lui faire la conversation pendant toute une semaine.» Au menu, en tout bien tout honneur, littérature et politique !

          On pourrait s’interroger sur l’attitude de la Sécurité militaire, qu’on suppose alors au summum de sa puissance et de son ubiquité, concernant la présence d’une étrangère auprès du chef de l’Etat.

          Kasdi Merbah, patron de la SM, déclarait sur procès-verbal en 1984, lors de la chute de Zeggar, qu’il n’était pas «toujours au courant des activités» de ce dernier.

          Le patron des services donnait les raisons suivantes à son relatif déficit d’informations à propos des activités de Zeggar. C’est que Boumediene «maintenait un strict cloisonnement sur ses relations personnelles ainsi qu’une discrétion absolue sur ses contacts. Zeggar était l’ami du Président qu’il recevait en son domicile».

          Seddik S. Larkeche note que durant la guerre de Libération, Zeggar cacha Boumediene lorsque Boussouf, leur mentor commun, voulut neutraliser le colonel ambitieux. Dans ce duel au sommet entre un Boussouf au faîte de sa puissance et un Boumediene en construction, Zeggar, pariant sur l’avenir, misa sur Boumediene. Bien vu !

          Avec l’avènement de Chadli Bendjedid à la tête de l’Etat algérien et l’ascension de la bande à Larbi Belkheir, le vent a tourné dans le mauvais sens pour Zeggar.

          Belkheir a sous-traité cette affaire pour le compte de l’Elysée sous l’œil vigilant de son maître, Jacques Attali. Les services français à l’époque ne pouvaient pas se permettre d’abandonner l’Algérie aux Américains. En éliminant des circuits « mafieux » un homme proche des Américains comme Zeggar, le terrain était vacant pour les vautours de l’ombre pour récupérer le butin de guerre du FLN et les bénéfices des trafics d’armes que menaient Abdelkader Koudjeti et Messaoud Zeggar.

          Comme il a été dit ci-dessus, Zeggar avait de très bonnes relations avec des sommités de la politique américaine dont le père du Président Bush qui était son ami.

          L’arrestation de Zeggar a permis à Belkheir de récupérer toutes les informations relatives aux comptes numérotés du FLN et des biens immobiliers et de mettre main basse sur tout le réseau d’acheminements d’armes vers l’Afrique.

          Et du jour au lendemain, Zeggar est présenté en ouverture de l’édition de 20h du journal télévisé de l’unique chaîne algérienne, comme un vulgaire agent de la CIA. Pas plus, pas moins. Messaoud Zeggar, le milliardaire, l’ami de Boumediene tombe de très haut. Il est menotté et jeté dans une cellule de la prison militaire de Blida. Il dormira sur un banc en ciment durant plusieurs mois. Le temps de lui vider ses comptes à l’étranger et le déposséder de tous ses biens. Quelques mois plus tard, celui qui était présenté comme « un dangereux agent de la CIA doté d’un matériel ultramoderne et menaçant la stabilité de l’Algérie » est libéré en catimini. Quelques mois après sa libération, on lui rend son passeport pour qu’il puisse voyager librement.

          Principaux témoins au procès de Zeggar :

          Kasdi Merbah, Slimane Hofman, Abdelmadjid Aouchiche, Abdellah Chengriha, Mohamed Amir. Tous ces témoins, hautes personnalités du pays, ont confirmé que Messaoud Zeggar n’a fait que rendre service à son pays.

          Messaoud Zeggar meurt dans l’indifférence totale en 1987. Officiellement, il est décédé des suites d’une crise cardiaque qui l’avait terrassé dans l’un de ses hôtels à Madrid (Espagne), lieu de son exil volontaire après sa sortie de prison pour un délit aussi farfelu qu’étrange. C’est au moment de son enterrement que les Algériens découvrirent cet homme pétri de qualités et au parcours patriotique exemplaire. L’un des artisans de la guerre secrète que menait le Ministère de l’Armement et des Liaisons Générales, ancêtre des services secrets algériens, aux services français de la DST, réputés pour leurs coups tordus et les liquidations physiques perpétrés dans les territoires mêmes des Etats européens, à l’instar de la bombe qui avait secoué Evian, l’assassinat d’Européens proches du GPRA et de militants nationalistes algériens.

          (1) Seddik S. Larkeche, titulaire d’un doctorat en sciences de gestion, d’un autre en sciences politiques et d’un diplôme d’avocat. Expert en gestion stratégique des risques, il fut rapporteur, en 1998, à la commission «risque» à la Conférence mondiale sur le commerce (Cnuced). Il est enseignant chercheur et expert consultant.

          Seddik S. Larkeche, Si Zeghar, l’iconoclaste algérien – La véritable histoire de Rachid Casa, Ena Editions, Lyon (France), 2014, 353p. hors annexe.

          Fin
          The truth is incontrovertible, malice may attack it, ignorance may deride it, but in the end; there it is.” Winston Churchill

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          • #6
            La diplomatie de l’ombre qui caractérisait, dans des proportions importantes, l’action diplomatique algérienne dans le monde, explique la place qu’occupait l’Algérie dans le concert des nations.
            Une telle action diplomatique ne pouvait subsister sans caisse noire..
            La fortune de Zeggar, l'homme de confiance de Boumediene, était-elle la sienne ou celle de l'Algerie ?.. Là est la question !

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            • #7
              on va dire qu il en a bien profiter au passage ...
              The truth is incontrovertible, malice may attack it, ignorance may deride it, but in the end; there it is.” Winston Churchill

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              • #8
                On va dire .. chouia .. pas beaucoup
                Boumediene s'en est bien servi toutefois.. pour un pays officiellement non aliéné

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                • #9
                  cet argent a servi a faire surtout du lobying pour les interets superieurs du pays

                  le jour on dejeune avec le bon dieu le soir on soupe avec le diable
                  The truth is incontrovertible, malice may attack it, ignorance may deride it, but in the end; there it is.” Winston Churchill

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                  • #10
                    Exact..

                    Fut un temps.. Bush Père et Henry Kissinger se promenaient au complexe d'Arzew le plus normalement du monde

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                    • #11
                      ah si la camel pouvait parler...
                      The truth is incontrovertible, malice may attack it, ignorance may deride it, but in the end; there it is.” Winston Churchill

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                      • #12
                        ah si la camel pouvait parler
                        The truth is incontrovertible, malice may attack it, ignorance may deride it, but in the end; there it is.” Winston Churchill

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