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Pourquoi l’Algérie n’est pas encore une puissance émergente

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  • Pourquoi l’Algérie n’est pas encore une puissance émergente

    A l’occasion de la visite d’Etat mercredi du président François Hollande en Algérie, il nous a paru opportun de dresser un portrait économique de ce pays qui vient de fêter cette année ses cinquante ans d’indépendance, et dont la relation en dents de scie avec son ancienne tutelle coloniale a été une suite d’occasions manquées. La question de la mémoire coloniale et son traitement dans la douleur, de part et d’autre, a en effet longtemps obscurci et bridé le potentiel de cette relation dont les ressorts historiques et culturels, portés par une importante population d’origine algérienne en France, ne sont plus à démontrer.

    De ce côté-ci de la Méditerranée, cette question de la mémoire, alimentée il y a quelques années par les déclarations intempestives de certains députés français sur le « rôle positif de la colonisation », a constitué un véritable écran de fumée et un prisme réducteur qui a aveuglé les élites économiques et politiques françaises sur les évolutions en cours en Algérie. Cinquante ans après l’indépendance algérienne, une partie des élites françaises continue en effet à regarder l’Algérie et les Algériens avec ce mélange de supériorité et de condescendance si bien décrit par Albert Camus en son temps. Or, le « Printemps arabe » a montré dans le cas tunisien les dangers d’un tel aveuglement, fondé sur une impasse mémorielle et alimenté par la peur de l’immigration et de l’islam.

    De fait, l’Algérie a beaucoup changé au cours des vingt dernières années. Après l’interruption forcée du processus démocratique en 1991 et les années de contestation violente du régime par des groupes islamistes armés, la « concorde civile » orchestrée en 1999 par Abdelaziz Bouteflika, l’homme du consensus entre les différents clans militaires et civils qui se partagent le pouvoir depuis l’indépendance, a réussi à mettre fin à la violence – au prix d’une politique de réconciliation nationale à l’efficacité incontestable. Ensuite, le super-cycle de croissance mondiale des années 2000 alimenté par la bulle immobilière aux Etats-Unis et par l’accélération concomitante de la croissance en Chine a constitué une aubaine pour l’Algérie comme pour beaucoup d’autres pays exportateurs de commodities. Cela s’est traduit par une hausse continue du prix du pétrole et du gaz, qui a bénéficié aux caisses de l’Etat algérien autant qu’à celles des holdings d’importation et aux groupes de BTP étrangers (français, turcs, chinois, etc.) sollicités pour participer à de vastes projets d’infrastructures.

    Cette manne pétrolière et gazière – la deuxième dans l’histoire du pays après celle des années 1970 – a-t-elle été bien gérée ? A première vue, on serait tenté de répondre par l’affirmative. Tirant la leçon des années de crise et s’inspirant des expériences étrangères, les autorités algériennes ont mis de côté une partie des recettes pétrolières et gazières, à travers la création en l’an 2000 d’un Fonds de régulation des recettes (FRR) doté aujourd’hui de près de 80 milliards de dollars. Les réserves de change officielles atteignent quant à elles près de 180 milliards de dollars, cette accumulation étant favorisée par la politique monétaire de la Banque d’Algérie. La dette extérieure a été quasiment effacée et l’inflation a été contenue dans des limites raisonnables, ce qui est remarquable compte tenu de la croissance rapide de l’économie au cours des dix dernières années.

    Toutefois, si les grands équilibres macroéconomiques ont été préservés, les problèmes structurels demeurent. Le revenu nominal par habitant exprimé en dollars a certes été triplé en dix ans, franchissant en 2011 le cap des 5.000 dollars par habitant et faisant de l’Algérie un marché attractif pour les grandes multinationales, mais ce résultat a été obtenu grâce à l’accroissement spectaculaire des recettes des hydrocarbures et à leurs effets induits (augmentation des salaires dans le secteurs public, boom de la construction et de l’immobilier). En outre, la hausse rapide du revenu moyen a masqué l’apparition d’inégalités croissantes entre les insiders du système (fonctionnaires et salariés du secteur public, importateurs et distributeurs) et les outsiders (chômeurs et travailleurs de l’économie informelle). Enfin, le faible taux de participation à l’emploi (45% seulement) dissimule un chômage bien supérieur au taux officiel de 10% (et de 20% pour les jeunes et les femmes), et une forte prévalence de l’économie informelle.

    La croissance de l’économie algérienne a été « boostée » par le programme d’investissement public mis en place par le gouvernement dans les années 2000. Néanmoins, sur les 155 milliards de dollars programmés sur la période 2004-2010, seuls 25 milliards ont été réellement dépensés, dans des projets emblématiques comme la construction d’un million de logements, l’autoroute Est-Ouest (1.200 kilomètres) ou le métro d’Alger. Les crédits non consommés ont été reportés dans le nouveau programme 2010-2014 d’un montant prévisionnel de 286 milliards de dollars.

    C’est ce nouveau programme au montant colossal, mais dont les perspectives de réalisation sont incertaines, qui nourrit l’appétit des entreprises françaises et qui sous-tend le partenariat stratégique proposé par François Hollande aux Algériens. Mais après des années de délitement de la relation franco-algérienne, les Algériens sont aujourd’hui en position de force, et il n y a guère de doute que les entreprises françaises seront mises en concurrence avec leurs homologues des autres pays européens (Allemagne, Italie, Espagne), des Etats-Unis et des pays émergents (Chine, Turquie, Corée du Sud, Emirats Arabes, etc.).

    En définitive, si les investissements dans les infrastructures permettent de lever les goulots d’étranglement qui entravent la croissance (logements, ressources en eau et en électricité, réseaux de transports), sur un programme de 300 milliards de dollars d’investissements publics, seuls quelques milliards sont destinés à la R&D et au développement des PME. Les perspectives à long terme de l’Algérie reposent sur la capacité des autorités à opérer une véritable diversification de l’économie hors des hydrocarbures, et à faire du secteur privé la locomotive de la croissance.

    Cela passe par un ensemble de réformes structurelles qui ont été trop longtemps ajournées, telles que la convertibilité du dinar algérien, la simplification administrative et judiciaire, et l’introduction d’incitations massives en faveur de l’investissement productif. Pour un pays qui valorise autant sa souveraineté, il est en effet paradoxal d’encourager autant les importations au détriment de la production locale.

    Sortir d’une situation d’économie rentière nécessite aussi une refonte complète des mécanismes de gouvernance et l’instauration d’une culture de la transparence et de la responsabilité, adossée à une véritable capacité de contrôle et d’évaluation des politiques publiques. Or, dans son dernier rapport, l’ONG Transparency International classait encore l’Algérie parmi les pays les plus corrompus au monde, la corruption étant intimement liée à l’existence d’une rente. Les exemples de l’Indonésie ou du Mexique montrent qu’il est possible d’en sortir. Plus près de l’Algérie, les progrès du Maroc, avec le Plan Emergence qui commence aujourd’hui à porter ses fruits, sont encourageants.

    Avec ses ressources humaines et naturelles considérables et sa position géostratégique privilégiée, l’Algérie présente un énorme potentiel. Mais pour se hisser au rang de puissance émergente, il faut plus que des kilomètres d’asphalte et des mètres cubes de béton. Le gouvernement algérien serait bien inspiré de libérer les initiatives individuelles et de mettre en place une stratégie cohérente de développement, conjuguant soutien à l’industrie locale et intégration régionale, dans le cadre du grand Maghreb et d’un partenariat euro-méditerranéen refondé.

    Alexandre Kateb
    La Tribune

    Alexandre Kateb est économiste et directeur du cabinet Compétence Finance. Il est l'auteur de "Les nouvelles puissances mondiales. Pourquoi les BRIC changent le monde" (Ellipses, 2011).
    Si vous ne trouvez pas une prière qui vous convienne, inventez-la.” Saint Augustin

  • #2
    Cette économiste doit reecrire son article 6 ans après surtout après la chute du prix des hydrocarbures qui commença en 2014 avec comme resultats la fonte des réserves de chagnes..

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    • #3
      @ upup

      A ma connaissance, cet économiste a écrit maintes fois sur la situation économique du pays et même après le contre-choc pétrolier de 2014.

      Ses analyses sont pertinentes même si je le trouve parfois plutôt optimiste...
      N'est jamais déçu celui qui s'attend au pire !

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      • #4
        Pourquoi l’Algérie n’est pas encore une puissance émergente
        parce que ses gestionnaires médiocres fonctionnent dans un système médiocre encadré par un régime médiocre.
        Les pays arabes, tous les pays arabes, sauf ceux du golfe, sont des médiocraties.
        Dernière modification par Bachi, 12 juin 2017, 00h16.

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        • #5
          les progrès du Maroc, avec le Plan Emergence qui commence aujourd’hui à porter ses fruits, sont encourageants.
          Les programmes economiques algeriennes n'ont pas de plan de contrôle ni de vision à long terme ils sont focalisés sur le volume de l'Investissement ! Plus l'annonce de l'enveloppe est importante plus le programme est emblématique exemple le programme de logement ou de l'autoroute est-ouest en très grande partie raflés par les chinois !

          Avec ses ressources humaines et naturelles considérables et sa position géostratégique privilégiée, l’Algérie présente un énorme potentiel.
          Le problème reside justement dans les ressources humaines !

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          • #6
            Il y a trop de voleurs voraces et prédateurs ........
            L’ignorant affirme, le savant doute, le sage réfléchit.”Aristote

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            • #7
              Le peuple est aussi fainéant personne ne veut bosser dans des métiers difficiles comme l'agriculture ou le bâtiment !

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              • #8
                Le problème reside justement dans les ressources humaines !
                C'est le maillon faible de la chaîne effectivement.

                Grand territoire, importantes réserves énergétiques et minières, mais sérieux déficit humain capable d'en sortir quelque chose.

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                • #9
                  Quelques grands visionnaires ont FAIT et FONT et FERONT toujours de nos enfants de futurs chaumeurs ou des savants tres pauvres ou des travailleurs sans outils ou des agriculeurs sans terres etc


                  Il ya tout mais il n ya rien qui vaille.

                  Tuut simplement LA BASE DE L EDUCATION qui ne sait pas ou n as pas le plaisir de confectionner un avion en papier ,que pourrait il aimer faire dans le futur.

                  IL N YA PAS DE PARCIPATION SOCIALE INTELLECTUELLE ECONOMIQUE SCIENTIFIQUE .............

                  Quelques HOMMES et FEMMES peuvent le faire si on leur donne les moyens.

                  https://youtu.be/boYlPxzpCIU?list=WL
                  en regardant dans ce film une fille " travailler avec une corde " Elle refait toute la vie de l "ducation , de l école , de :a famille , de l amerique OUI CE SONT NOS MOTIVATIONS QUI NOUS POUSSENT TOUJOURS MIEUX FAIRE- MAIS QUAND LES BAGAGES DES MOTIVATIONS SONT SUFFISEMENT MULTIPLES VARIEES ELLES RENOVENT LE MONDE ENTIER -MAIS ATTENTION UN PAUVRE QUI FAIT LA MANCHE RESTERA TOUTE SA VIE MENDIANT MEME RICHE
                  Dernière modification par m1111, 12 juin 2017, 17h40.

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                  • #10
                    L'Algérie et le reste des pays arabes sont très loin de l'emergence il faut au minimum 20 à 30 ans pour faire émerger un pays quand les bonnes decision sont prises et lorsque le contexte économique international le permet !

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                    • #11
                      Il n'y a pas d'élite en Algérie, il suffit de voir l'incompétence de nos médecins et donc pourquoi les Algériens préfèrent se soigner à l'étranger...

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                      • #12
                        Sans parler d'élite tous les pays arabes manquent des compétences les plus simples ! C'est propre à notre culture !

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                        • #13
                          qui peut valider la travail d un savant ou un scientifique.

                          Chez nous ce sont au poids des billets et devise.

                          Le réste est du charabia pour la société mendiante de tout a pérpetuité.

                          Seuls les arrivistes sont écoutés.

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                          • #14
                            A l’occasion de la visite d’Etat mercredi du président François Hollande en Algérie
                            ah non pas encore lui
                            tchek tchek tchek

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