Cela fait plus de 7 mois que les contestations dans la province d’Al Hoceima vont crescendo, et l’escalade entre les pro-Hirak et anti-Hirak connaît chaque jour sa nouveauté. Le Hirak montre aussi que le modèle marocain de régionalisation n'a pas tenu ses promesses.
Nous avons vu des personnes qui prient dans la rue en signe de protestation pour la neutralité du prêche du vendredi, nous avons vu des passeports brûlés, nous avons vu par milliers des Marocains résidents à l’étranger se solidariser avec les mouvements.
Une fois les contestataires rentrés chez eux, leur combat continue sur les réseaux sociaux, vidéo contre vidéo, fake contre fake.
Mais quelles sont leurs revendications? Au départ le petit mouvement demandait justice pour le décès du petit commerçant Mohsine Fikri qui a trouvé la mort dans une benne à ordures. L’enquête aura démontré que ce tragique événement fut un accident, qui plus est, actionné par un ami de la victime.
Mais cela n’a pas suffi à calmer les esprits, vu la gestion calamiteuse de ce dossier par les autorités, le flou autour de la procédure, le peu de communication, le refus de dialogue en ce temps avec les manifestants.
De doléance en doléance, les manifestations en solidarité avec la victime se sont transformées en revendications socio-économiques et même politiques.
En réalité les projets socio-économiques sont en cours de réalisation partout dans cette province, Pour rappel déjà en 2015, bien avant le mouvement de revendication, le gouvernement Benkirane en coopération avec le Conseil Régional s’était engagé devant SM le Roi à réaliser un programme de mise à niveau exceptionnel sous la dénomination “le Phare de la Méditerranée“.
Il est vrai que ce programme a connu des retards à cause de politique politicienne, car selon certains analystes, le gouvernement Benkirane n’a pas voulu lancer le chantier pour ne pas favoriser le PAM, et Ilyas El Omari dans une longue interview dans Hespress dit également qu’il n’a pas insisté en 2016 pour le lancement du programme pour qu’on ne le taxe pas également de faire de la propagande électorale.
Vu les positions politiques des uns et des autres, la population s’est demandé si le Phare tant attendu n’est pas juste une bougie.
Le programme de Développement Régional (PDR) qui a connu la participation de toutes les forces vives de la Région est sorti avec des propositions qui créeront des dizaines de milliers d’emplois sur 5 ans. Même le PJD et le PPS qui sont pourtant dans l’opposition au Conseil Régional ont voté pour ce programme, c’est dire que les solutions socioéconomiques existent ; certaines sont en cours de réalisation et d’autres comme le PDR attendent la validation du Gouvernement pour son financement et donc sa concrétisation.
Et à nouveau, la Région est dépendante du bon vouloir du gouvernement, celui-ci a un budget national limité et il doit distribuer et ventiler ses actions selon les aléas du moment et selon certains agrégats économiques que les politiques ne maîtrisent pas, alors que dire du citoyen!
Une Région sans prérogatives, sans budgets autonome, sans fonctionnaires, sans autorités, voilà la région dont nous avons hérité lorsque nous avons été élus.
Ainsi, les revendications du “Hirak“ nous ont mis à nu, et nous ont mis face à nos propres contradictions et nos responsabilités. Nous pourrons toujours circonscrire le “Hirak“ avec des solutions à court terme et conjoncturelles, mais qu’en est-il des solutions structurelles et institutionnelles à apporter aux prochains Hirak qui surgiront à travers tous le Royaume? Sachant qu’aujourd’hui, les revendications sont s directement à l’Etat!
La Régionalisation avancée est-elle la solution? Si oui, quel est le modèle proposé par ce gouvernement?
Nous avons tous rêvé après du discours de Sa Majesté le Roi lors de l’installation de la Commission Consultative de la Régionalisation. N’a-t-il pas dit : “La régionalisation élargie escomptée n’est pas un simple aménagement technique ou administratif. Elle traduit, plutôt, une option résolue pour la rénovation et la modernisation des structures de l’Etat, et pour la consolidation du développement intégré“.
Nous nous attendions en effet à nous retrouver avec des prérogatives proches des régimes politiques décentralisés, tel que les Landers d’Allemagne, les Régions autonomes d’Espagne, les Régions d’Italie, les Comptés d’Angleterre ou l’Etat fédéral de Belgique.
Toutes ses divisions administratives ont en commun d’être toutes dotées de gouvernement régional.
Régionalisation n'est pas décentralisation
Ainsi le Maroc à travers la vision royale veut s’approcher de ces modèles régionaux qui ont fait leurs preuves en termes de développement économique et d’inclusion politique.
Seulement, ceux qui ont eu la tâche de la penser et surtout par la suite de la mettre en œuvre ont fait un vulgaire copier-coller du pire des modèles de régime politique décentralisé qui est celui de la France.
Nous rêvions du modèle allemand, mais nous ne pouvons pas nous défaire du suivisme de notre ex-protecteur français.
Ainsi lorsque vint le gouvernement Benkirane II, puis le gouvernement Otmani 1, tous les deux ont essayé de réduire le nombre de ministres en espérant satisfaire les doléances des réseaux sociaux. Comment un pays comme la Chine ou les Etats-Unis ou même nos voisins espagnols ont-ils 15 ministres et nous nous en avons 40?
Mais vu que le chef du gouvernement pense centralisation, il a fait le choix de la facilité et a regroupé des ministères.
Et pourtant les chefs de Gouvernement successifs avaient une occasion inespérée pour rénover et moderniser les structures de l’Etat. Ils auraient pu éliminer les prérogatives d’un ministère et transférer cette compétence centrale aux régions, avec tous les budgets et fonctionnaires qui vont avec.
Prenons l’exemple de M. Hassad, il se trouve être à la tête du Ministère de l’Education Nationale, du Ministère de la Formation Professionnelle et du Ministère de l’enseignement Supérieur et de la recherche Scientifique.
La vision royale telle que nous l’avons comprise voudrait que ce département soit tout simplement inexistant au niveau du gouvernement central. La solution institutionnelle est une décentralisation effective et réelle. Certaines prérogatives devraient être entièrement transférées aux régions.
Ainsi la région aurait un ministre régional en charge de l’éducation, un autre ministre en charge de la formation professionnelle et un troisième chargé de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique et ainsi de suite avec d’autres prérogatives qui doivent et peuvent être transférées aux régions.
Certaines problématiques telles que la crise de l’enseignement seront tous simplement diluées au niveau des régions avec tous les avantages qu’offre la proximité avec la population cible et la complétion saine entre service public d’une région à l’autre.
Ainsi au lieu d’avoir des supers ministres avec leurs nombreuses prérogatives et loin de la réalité du peuple, nous aurions des régions avec des pouvoirs propres, des finances propres et des responsabilités réelles.
Oui je rêve du jour où il n’y aura plus de ministre de l’’Education nationale à Rabat, où la région prendra ses propres responsabilités avec les fonctionnaires enseignants et chercheurs, où elle pourra former elle-même sa population en fonction de ses propres débouchés, où elle pourra assumer ses propres choix touristiques et économiques, où elle valorisera son propre patrimoine artisanal et culturel, etc etc
En attendant le prochain Hirak, je continuerai à rêver d’un Royaume qui serait doté d’une gouvernance régionale authentique!
Mohamed Saoud
Premier Vice-Président Région Tanger-Tetouan-AlHoceima
Nous avons vu des personnes qui prient dans la rue en signe de protestation pour la neutralité du prêche du vendredi, nous avons vu des passeports brûlés, nous avons vu par milliers des Marocains résidents à l’étranger se solidariser avec les mouvements.
Une fois les contestataires rentrés chez eux, leur combat continue sur les réseaux sociaux, vidéo contre vidéo, fake contre fake.
Mais quelles sont leurs revendications? Au départ le petit mouvement demandait justice pour le décès du petit commerçant Mohsine Fikri qui a trouvé la mort dans une benne à ordures. L’enquête aura démontré que ce tragique événement fut un accident, qui plus est, actionné par un ami de la victime.
Mais cela n’a pas suffi à calmer les esprits, vu la gestion calamiteuse de ce dossier par les autorités, le flou autour de la procédure, le peu de communication, le refus de dialogue en ce temps avec les manifestants.
De doléance en doléance, les manifestations en solidarité avec la victime se sont transformées en revendications socio-économiques et même politiques.
En réalité les projets socio-économiques sont en cours de réalisation partout dans cette province, Pour rappel déjà en 2015, bien avant le mouvement de revendication, le gouvernement Benkirane en coopération avec le Conseil Régional s’était engagé devant SM le Roi à réaliser un programme de mise à niveau exceptionnel sous la dénomination “le Phare de la Méditerranée“.
Il est vrai que ce programme a connu des retards à cause de politique politicienne, car selon certains analystes, le gouvernement Benkirane n’a pas voulu lancer le chantier pour ne pas favoriser le PAM, et Ilyas El Omari dans une longue interview dans Hespress dit également qu’il n’a pas insisté en 2016 pour le lancement du programme pour qu’on ne le taxe pas également de faire de la propagande électorale.
Vu les positions politiques des uns et des autres, la population s’est demandé si le Phare tant attendu n’est pas juste une bougie.
Le programme de Développement Régional (PDR) qui a connu la participation de toutes les forces vives de la Région est sorti avec des propositions qui créeront des dizaines de milliers d’emplois sur 5 ans. Même le PJD et le PPS qui sont pourtant dans l’opposition au Conseil Régional ont voté pour ce programme, c’est dire que les solutions socioéconomiques existent ; certaines sont en cours de réalisation et d’autres comme le PDR attendent la validation du Gouvernement pour son financement et donc sa concrétisation.
Et à nouveau, la Région est dépendante du bon vouloir du gouvernement, celui-ci a un budget national limité et il doit distribuer et ventiler ses actions selon les aléas du moment et selon certains agrégats économiques que les politiques ne maîtrisent pas, alors que dire du citoyen!
Une Région sans prérogatives, sans budgets autonome, sans fonctionnaires, sans autorités, voilà la région dont nous avons hérité lorsque nous avons été élus.
Ainsi, les revendications du “Hirak“ nous ont mis à nu, et nous ont mis face à nos propres contradictions et nos responsabilités. Nous pourrons toujours circonscrire le “Hirak“ avec des solutions à court terme et conjoncturelles, mais qu’en est-il des solutions structurelles et institutionnelles à apporter aux prochains Hirak qui surgiront à travers tous le Royaume? Sachant qu’aujourd’hui, les revendications sont s directement à l’Etat!
La Régionalisation avancée est-elle la solution? Si oui, quel est le modèle proposé par ce gouvernement?
Nous avons tous rêvé après du discours de Sa Majesté le Roi lors de l’installation de la Commission Consultative de la Régionalisation. N’a-t-il pas dit : “La régionalisation élargie escomptée n’est pas un simple aménagement technique ou administratif. Elle traduit, plutôt, une option résolue pour la rénovation et la modernisation des structures de l’Etat, et pour la consolidation du développement intégré“.
Nous nous attendions en effet à nous retrouver avec des prérogatives proches des régimes politiques décentralisés, tel que les Landers d’Allemagne, les Régions autonomes d’Espagne, les Régions d’Italie, les Comptés d’Angleterre ou l’Etat fédéral de Belgique.
Toutes ses divisions administratives ont en commun d’être toutes dotées de gouvernement régional.
Régionalisation n'est pas décentralisation
Ainsi le Maroc à travers la vision royale veut s’approcher de ces modèles régionaux qui ont fait leurs preuves en termes de développement économique et d’inclusion politique.
Seulement, ceux qui ont eu la tâche de la penser et surtout par la suite de la mettre en œuvre ont fait un vulgaire copier-coller du pire des modèles de régime politique décentralisé qui est celui de la France.
Nous rêvions du modèle allemand, mais nous ne pouvons pas nous défaire du suivisme de notre ex-protecteur français.
Ainsi lorsque vint le gouvernement Benkirane II, puis le gouvernement Otmani 1, tous les deux ont essayé de réduire le nombre de ministres en espérant satisfaire les doléances des réseaux sociaux. Comment un pays comme la Chine ou les Etats-Unis ou même nos voisins espagnols ont-ils 15 ministres et nous nous en avons 40?
Mais vu que le chef du gouvernement pense centralisation, il a fait le choix de la facilité et a regroupé des ministères.
Et pourtant les chefs de Gouvernement successifs avaient une occasion inespérée pour rénover et moderniser les structures de l’Etat. Ils auraient pu éliminer les prérogatives d’un ministère et transférer cette compétence centrale aux régions, avec tous les budgets et fonctionnaires qui vont avec.
Prenons l’exemple de M. Hassad, il se trouve être à la tête du Ministère de l’Education Nationale, du Ministère de la Formation Professionnelle et du Ministère de l’enseignement Supérieur et de la recherche Scientifique.
La vision royale telle que nous l’avons comprise voudrait que ce département soit tout simplement inexistant au niveau du gouvernement central. La solution institutionnelle est une décentralisation effective et réelle. Certaines prérogatives devraient être entièrement transférées aux régions.
Ainsi la région aurait un ministre régional en charge de l’éducation, un autre ministre en charge de la formation professionnelle et un troisième chargé de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique et ainsi de suite avec d’autres prérogatives qui doivent et peuvent être transférées aux régions.
Certaines problématiques telles que la crise de l’enseignement seront tous simplement diluées au niveau des régions avec tous les avantages qu’offre la proximité avec la population cible et la complétion saine entre service public d’une région à l’autre.
Ainsi au lieu d’avoir des supers ministres avec leurs nombreuses prérogatives et loin de la réalité du peuple, nous aurions des régions avec des pouvoirs propres, des finances propres et des responsabilités réelles.
Oui je rêve du jour où il n’y aura plus de ministre de l’’Education nationale à Rabat, où la région prendra ses propres responsabilités avec les fonctionnaires enseignants et chercheurs, où elle pourra former elle-même sa population en fonction de ses propres débouchés, où elle pourra assumer ses propres choix touristiques et économiques, où elle valorisera son propre patrimoine artisanal et culturel, etc etc
En attendant le prochain Hirak, je continuerai à rêver d’un Royaume qui serait doté d’une gouvernance régionale authentique!
Mohamed Saoud
Premier Vice-Président Région Tanger-Tetouan-AlHoceima
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