Au Caire, le nouvel « homme fort » du pays, le général Abdel Fatah Al-Sissi, semble se complaire à présenter son coup d’État du 3 juillet 2013 et le renversement du président Morsi comme un prolongement de la lutte féroce qui opposa, dès 1954, le régime de Gamal Abdel Nasser aux Frères musulmans. Et on se souvient de ces manifestants « anti-Morsi » brandissant côte à côte des portraits géants de ces deux personnalités.
Une comparaison répercutée avec succès à l’étranger, comme sur les réseaux sociaux où a circulé une vidéo montrant Nasser se moquer des Frères musulmans, appréciée de certains cercles de la gauche laïque européenne. Succès dû, sans doute, à l’appréhension que suscitaient, suite aux « printemps arabes », l’arrivée au pouvoir d’Ennahda en Tunisie, des Frères musulmans en Égypte, voire le poids de leurs pendants syriens dans la rébellion contre le régime de Bachar Al-Assad.
Une comparaison qui ferait bien rire si l’heure n’était tragique…
Socialistes laïcs contre islamistes?
Notre intention, ici, n’est certes pas de ternir les mérites du colonel Nasser. Mérites incontestables, que ce soit dans la restitution de sa souveraineté à l’Égypte et dans sa modernisation ainsi que dans la régénération de l’identité arabe. Il s’agit plutôt d’apporter un éclairage différent sur son action. Et de souligner certaines ambiguïtés et erreurs de perception. La question ici est donc de savoir quelles images certains « choisissent » de retenir du Bikbashi (équivalent de « colonel » en arabe ; Mouammar Kadhafi, qui se voulait une émule de Nasser, reprendra ce surnom que l’on avait donné au président égyptien). Et pourquoi.
À lire Olivier Carré (L’Orient arabe aujourd’hui), il est quelque peu hasardeux d’opposer radicalement l’idéologie du régime issu de la « révolution » du 23 juillet 1952, du moins dans sa première décennie, et celle des Frères musulmans. En effet, des années 1940 à 1953, il y a eu collaboration, parfois étroite, entre « Officiers libres » et les Frères.
Bien plus qu’un désaccord idéologique, c’est surtout une lutte pour le pouvoir qui, selon Carré, a opposé les Officiers libres à la confrérie. Plus encore : ce conflit déclenché, le nouveau régime s’efforcera de procéder – dans un premier temps avec la collaboration de… l’Arabie saoudite ! – à une certaine étatisation de l’islam susceptible de lui rallier les partisans de la confrérie. Samir Amin (La Nation arabe) lui-même le dit : « Loin de poursuivre les tendances radicales du nationalisme bourgeois qui se manifestaient dans l’aile gauche du Wafd [ndlr : Le grand parti nationaliste égyptien, pluriconfessionnel, né aux lendemains de la première guerre mondiale], le nassérisme s’apparentera davantage aux courants réactionnaires de la petite bourgeoisie, celui des Frères musulmans, entre autres. »
Pour l’économiste marxiste égyptien (qui aujourd’hui se félicite du renversement de Mohamed Morsi) comme pour Olivier Carré, ce que le nassérisme a édifié, c’est une nouvelle « bourgeoisie d’État », appuyée sur un « capitalisme d’État » qui bénéficiera e. a. de la nationalisation des entreprises européennes suite à la crise de Suez (1956). Et que les communistes égyptiens finiront par appuyer nolens volens et d’autant plus facilement que ce soutien répondait aux intérêts de politique étrangère de l’URSS.
Il n’est pas inutile de rappeler que, sur le plan social, peu après une réforme agraire somme toute modeste (la réforme agraire de septembre 1952 ne concerna que les très grands propriétaires ; elle ne porta que sur 7% de la surface cultivable totale et ne toucha que 750.000 paysans sur 14,6 millions), l’un des gestes marquants du nouveau régime fut, en août 1952, de faire… pendre deux leaders ouvriers après les émeutes populaires de Kafr Dawwar, dans le Delta. Avant de réprimer durement les groupes communistes.
En effet, l’opposition de Nasser au communisme – « une religion alors que nous avons déjà la nôtre », devait-il dire – doit être rappelée pour lever certains malentendus.
La plupart des quelque 250 Officiers libres, issus de la petite bourgeoisie, étaient, écrit Hassan Riad (L’Égypte nassérienne), des musulmans traditionnalistes (parmi les Officiers libres, l’on ne comptait qu’un seul copte) qui refusaient le communisme par attachement à la religion. D’autres aussi, une bonne vingtaine, étaient proches des groupes communistes égyptiens. Toutefois, John Calvert nous apprend aussi que quelques jours avant le coup d’État du 23 juillet 1952, Nasser lui-même a discrètement rencontré plusieurs dirigeants des Frères pour s’assurer de leur soutien. Et cela au domicile même de Saïd Qutb (qui, il est vrai, n’adhérera à l’association qu’en février suivant) qui, non seulement sera invité comme conférencier au club des officiers en présence de Nasser, mais se verra aussi proposer la présidence d’un nouveau parti que le Raïs songeait alors à créer.
Remettons-nous aussi en mémoire que le coup d’État du 23 juillet 1952 fut d’abord perçu à Moscou comme organisé par la CIA et que la plupart des organisations communistes égyptiennes condamneront le putsch. À l’exception du Mouvement égyptien de libération nationale, l’un des groupes communistes qu’avait fondé Henri Curiel, et qui sera d’ailleurs condamné comme « suppôt de la dictature fasciste » (sic) par ses pairs (né dans une famille juive égyptienne, exilé en 1950, H. Curiel resta un militant anti-impérialiste actif, e. a. lors de la guerre d’Algérie et en favorisant des contacts israélo-palestiniens, et fut assassiné par des tueurs de l’extrême-droite française le 4 mai 1978 ; Gilles Perrault en a fait un portrait impressionnant dans Un homme à part). Rappelons-nous aussi que c’est avec l’aide des États-Unis que le nouveau régime obtiendra l’évacuation des troupes britanniques du canal de Suez en 1954. En outre, comme les Frères, les communistes dénonceront les concessions consenties par les Officiers libres lors du traité anglo-égyptien sur la voie d’eau, devenue le symbole d’une souveraineté égyptienne retrouvée.
Par ailleurs, le «socialisme» nassérien semble surtout s’être affirmé après l’éclatement de l’union syro-égyptienne (la République arabe unie, RAU, de 1958-1961). Il se serait d’ailleurs inspiré des thèses du baathisme. À partir de 1961, l’étatisation de l’économie égyptienne progresse fortement et le grand capital privé est fort affecté. La seconde réforme agraire, plus ambitieuse, ne concerna toutefois à la fin 1966 que 11,5% de la superficie cultivée et 1,5 millions de ruraux (sur quelque 30 millions d’Égyptiens) et déboucha sur un accroissement des moyennes propriétés (entre 20 et 50 « feddan », c. à d. entre 8 et 21 ha), la masse des fellahs non propriétaires restant, démographie aidant, aussi nombreuse (80%) qu’en 1952.
Dans la Charte d’action nationale du printemps 1962, « la bible du socialisme arabe », note Carré, la lutte des classes était secondaire, subordonnée à l’objectif panarabiste et vouée à disparaître par des mesures étatiques. Le « socialisme arabe » (ou nassérien), conclut Carré, « a une base islamique essentielle », par ailleurs indispensable aux Officiers libres pour se gagner une base sociale.
Les premières années, les discours de Nasser sont ainsi « émaillés d’appels à la sensibilité musulmane ». En 1956, Nasser appellera du haut de la chaire d’Al-Azhar au jihad contre l’agression tripartite anglo-franco-israélienne. Et le socialisme nassérien semble bien proche du « socialisme islamique » des Frères : soutien à la propriété privée (sans ses abus), résolution pacifique des contradictions de classe, participation conjointe des patrons et des ouvriers à la direction de la production…
Il s’agit donc de prendre distance de certaines perceptions essentiellement dues à la Guerre froide : la lutte entre Nasser et les Frères doit être davantage perçue comme une rivalité ayant pour enjeu les mêmes couches sociales. Elle sera accentuée par les ressentiments dus à la répression et aussi par le nationalisme panarabe du Raïs que la confrérie – et particulièrement Saïd Qutb, pendu en 1965 – avait critiqué comme une régression par rapport à un « internationalisme islamique ».
Il reste qu’aujourd’hui, l’État égyptien hérité du nassérisme s’est attribué l’essentiel des prérogatives religieuses dans le pays.
Le nouveau cours imposé par Sadate qui succède à Nasser en 1970 constituera moins une rupture avec celui du Raïs, note Carré, que sa continuation orientée vers la droite, une sorte de retour aux années 1952-1955. C’est que, désormais, la « bourgeoisie d’État » se sent à l’étroit dans un corset étatique dont elle n’avait eu qu’à se féliciter auparavant. Et elle aspire à devenir « bourgeoisie » à part entière. Accompagnant ce mouvement, Sadate, le « président-croyant », renforce la dimension islamique du nassérisme. C’est Sadate, aussi, qui introduira la Charia dans la législation égyptienne.
Nasser, le « nouvel Hitler »…
Comme Saddam Hussein après lui, le colonel Nasser a eu droit, notamment lors de la crise de Suez (1956), à l’infamante comparaison : « Nasser = Hitler ! »
Pourtant, le « nouvel historien » israélien Avi Shlaïm (Le mur de fer. Israël et le monde arabe) a montré que, contrairement à certaines légendes construites a posteriori, Nasser était, de tous les Officiers libres, le plus enclin à rechercher un accord avec le jeune État d’Israël et que c’est principalement l’intransigeance de Ben Gourion et de ses proches qui l’a contraint à renoncer, outre « l’Affaire Lavon » (ce scandale survenu en Israël dans les années 1950 après qu’il a été établi que des poseurs de bombes égyptiens dans des lieux culturel occidentaux étaient en fait des… agents israéliens ; l’objectif du ministre israélien de la Défense, Pinhas Lavon, proche de Ben Gourion, était en fait de saper un éventuel rapprochement du nouveau régime des Officiers libres avec l’Occident). Et à devenir le héros/héraut du nationalisme arabe… Et le « nouvel Hitler » des Israéliens, mais aussi, en 1956 comme en 1967, d’une certaine gauche européenne.
Une comparaison répercutée avec succès à l’étranger, comme sur les réseaux sociaux où a circulé une vidéo montrant Nasser se moquer des Frères musulmans, appréciée de certains cercles de la gauche laïque européenne. Succès dû, sans doute, à l’appréhension que suscitaient, suite aux « printemps arabes », l’arrivée au pouvoir d’Ennahda en Tunisie, des Frères musulmans en Égypte, voire le poids de leurs pendants syriens dans la rébellion contre le régime de Bachar Al-Assad.
Une comparaison qui ferait bien rire si l’heure n’était tragique…
Socialistes laïcs contre islamistes?
Notre intention, ici, n’est certes pas de ternir les mérites du colonel Nasser. Mérites incontestables, que ce soit dans la restitution de sa souveraineté à l’Égypte et dans sa modernisation ainsi que dans la régénération de l’identité arabe. Il s’agit plutôt d’apporter un éclairage différent sur son action. Et de souligner certaines ambiguïtés et erreurs de perception. La question ici est donc de savoir quelles images certains « choisissent » de retenir du Bikbashi (équivalent de « colonel » en arabe ; Mouammar Kadhafi, qui se voulait une émule de Nasser, reprendra ce surnom que l’on avait donné au président égyptien). Et pourquoi.
À lire Olivier Carré (L’Orient arabe aujourd’hui), il est quelque peu hasardeux d’opposer radicalement l’idéologie du régime issu de la « révolution » du 23 juillet 1952, du moins dans sa première décennie, et celle des Frères musulmans. En effet, des années 1940 à 1953, il y a eu collaboration, parfois étroite, entre « Officiers libres » et les Frères.
Bien plus qu’un désaccord idéologique, c’est surtout une lutte pour le pouvoir qui, selon Carré, a opposé les Officiers libres à la confrérie. Plus encore : ce conflit déclenché, le nouveau régime s’efforcera de procéder – dans un premier temps avec la collaboration de… l’Arabie saoudite ! – à une certaine étatisation de l’islam susceptible de lui rallier les partisans de la confrérie. Samir Amin (La Nation arabe) lui-même le dit : « Loin de poursuivre les tendances radicales du nationalisme bourgeois qui se manifestaient dans l’aile gauche du Wafd [ndlr : Le grand parti nationaliste égyptien, pluriconfessionnel, né aux lendemains de la première guerre mondiale], le nassérisme s’apparentera davantage aux courants réactionnaires de la petite bourgeoisie, celui des Frères musulmans, entre autres. »
Pour l’économiste marxiste égyptien (qui aujourd’hui se félicite du renversement de Mohamed Morsi) comme pour Olivier Carré, ce que le nassérisme a édifié, c’est une nouvelle « bourgeoisie d’État », appuyée sur un « capitalisme d’État » qui bénéficiera e. a. de la nationalisation des entreprises européennes suite à la crise de Suez (1956). Et que les communistes égyptiens finiront par appuyer nolens volens et d’autant plus facilement que ce soutien répondait aux intérêts de politique étrangère de l’URSS.
Il n’est pas inutile de rappeler que, sur le plan social, peu après une réforme agraire somme toute modeste (la réforme agraire de septembre 1952 ne concerna que les très grands propriétaires ; elle ne porta que sur 7% de la surface cultivable totale et ne toucha que 750.000 paysans sur 14,6 millions), l’un des gestes marquants du nouveau régime fut, en août 1952, de faire… pendre deux leaders ouvriers après les émeutes populaires de Kafr Dawwar, dans le Delta. Avant de réprimer durement les groupes communistes.
En effet, l’opposition de Nasser au communisme – « une religion alors que nous avons déjà la nôtre », devait-il dire – doit être rappelée pour lever certains malentendus.
La plupart des quelque 250 Officiers libres, issus de la petite bourgeoisie, étaient, écrit Hassan Riad (L’Égypte nassérienne), des musulmans traditionnalistes (parmi les Officiers libres, l’on ne comptait qu’un seul copte) qui refusaient le communisme par attachement à la religion. D’autres aussi, une bonne vingtaine, étaient proches des groupes communistes égyptiens. Toutefois, John Calvert nous apprend aussi que quelques jours avant le coup d’État du 23 juillet 1952, Nasser lui-même a discrètement rencontré plusieurs dirigeants des Frères pour s’assurer de leur soutien. Et cela au domicile même de Saïd Qutb (qui, il est vrai, n’adhérera à l’association qu’en février suivant) qui, non seulement sera invité comme conférencier au club des officiers en présence de Nasser, mais se verra aussi proposer la présidence d’un nouveau parti que le Raïs songeait alors à créer.
Remettons-nous aussi en mémoire que le coup d’État du 23 juillet 1952 fut d’abord perçu à Moscou comme organisé par la CIA et que la plupart des organisations communistes égyptiennes condamneront le putsch. À l’exception du Mouvement égyptien de libération nationale, l’un des groupes communistes qu’avait fondé Henri Curiel, et qui sera d’ailleurs condamné comme « suppôt de la dictature fasciste » (sic) par ses pairs (né dans une famille juive égyptienne, exilé en 1950, H. Curiel resta un militant anti-impérialiste actif, e. a. lors de la guerre d’Algérie et en favorisant des contacts israélo-palestiniens, et fut assassiné par des tueurs de l’extrême-droite française le 4 mai 1978 ; Gilles Perrault en a fait un portrait impressionnant dans Un homme à part). Rappelons-nous aussi que c’est avec l’aide des États-Unis que le nouveau régime obtiendra l’évacuation des troupes britanniques du canal de Suez en 1954. En outre, comme les Frères, les communistes dénonceront les concessions consenties par les Officiers libres lors du traité anglo-égyptien sur la voie d’eau, devenue le symbole d’une souveraineté égyptienne retrouvée.
Par ailleurs, le «socialisme» nassérien semble surtout s’être affirmé après l’éclatement de l’union syro-égyptienne (la République arabe unie, RAU, de 1958-1961). Il se serait d’ailleurs inspiré des thèses du baathisme. À partir de 1961, l’étatisation de l’économie égyptienne progresse fortement et le grand capital privé est fort affecté. La seconde réforme agraire, plus ambitieuse, ne concerna toutefois à la fin 1966 que 11,5% de la superficie cultivée et 1,5 millions de ruraux (sur quelque 30 millions d’Égyptiens) et déboucha sur un accroissement des moyennes propriétés (entre 20 et 50 « feddan », c. à d. entre 8 et 21 ha), la masse des fellahs non propriétaires restant, démographie aidant, aussi nombreuse (80%) qu’en 1952.
Dans la Charte d’action nationale du printemps 1962, « la bible du socialisme arabe », note Carré, la lutte des classes était secondaire, subordonnée à l’objectif panarabiste et vouée à disparaître par des mesures étatiques. Le « socialisme arabe » (ou nassérien), conclut Carré, « a une base islamique essentielle », par ailleurs indispensable aux Officiers libres pour se gagner une base sociale.
Les premières années, les discours de Nasser sont ainsi « émaillés d’appels à la sensibilité musulmane ». En 1956, Nasser appellera du haut de la chaire d’Al-Azhar au jihad contre l’agression tripartite anglo-franco-israélienne. Et le socialisme nassérien semble bien proche du « socialisme islamique » des Frères : soutien à la propriété privée (sans ses abus), résolution pacifique des contradictions de classe, participation conjointe des patrons et des ouvriers à la direction de la production…
Il s’agit donc de prendre distance de certaines perceptions essentiellement dues à la Guerre froide : la lutte entre Nasser et les Frères doit être davantage perçue comme une rivalité ayant pour enjeu les mêmes couches sociales. Elle sera accentuée par les ressentiments dus à la répression et aussi par le nationalisme panarabe du Raïs que la confrérie – et particulièrement Saïd Qutb, pendu en 1965 – avait critiqué comme une régression par rapport à un « internationalisme islamique ».
Il reste qu’aujourd’hui, l’État égyptien hérité du nassérisme s’est attribué l’essentiel des prérogatives religieuses dans le pays.
Le nouveau cours imposé par Sadate qui succède à Nasser en 1970 constituera moins une rupture avec celui du Raïs, note Carré, que sa continuation orientée vers la droite, une sorte de retour aux années 1952-1955. C’est que, désormais, la « bourgeoisie d’État » se sent à l’étroit dans un corset étatique dont elle n’avait eu qu’à se féliciter auparavant. Et elle aspire à devenir « bourgeoisie » à part entière. Accompagnant ce mouvement, Sadate, le « président-croyant », renforce la dimension islamique du nassérisme. C’est Sadate, aussi, qui introduira la Charia dans la législation égyptienne.
Nasser, le « nouvel Hitler »…
Comme Saddam Hussein après lui, le colonel Nasser a eu droit, notamment lors de la crise de Suez (1956), à l’infamante comparaison : « Nasser = Hitler ! »
Pourtant, le « nouvel historien » israélien Avi Shlaïm (Le mur de fer. Israël et le monde arabe) a montré que, contrairement à certaines légendes construites a posteriori, Nasser était, de tous les Officiers libres, le plus enclin à rechercher un accord avec le jeune État d’Israël et que c’est principalement l’intransigeance de Ben Gourion et de ses proches qui l’a contraint à renoncer, outre « l’Affaire Lavon » (ce scandale survenu en Israël dans les années 1950 après qu’il a été établi que des poseurs de bombes égyptiens dans des lieux culturel occidentaux étaient en fait des… agents israéliens ; l’objectif du ministre israélien de la Défense, Pinhas Lavon, proche de Ben Gourion, était en fait de saper un éventuel rapprochement du nouveau régime des Officiers libres avec l’Occident). Et à devenir le héros/héraut du nationalisme arabe… Et le « nouvel Hitler » des Israéliens, mais aussi, en 1956 comme en 1967, d’une certaine gauche européenne.
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