7 juillet 2017
La flexibilisation du dirham ressemble fort à un OVNI. On ignore d’où ça vient, à quoi ça sert et si oui ou non il risque de percuter notre économie et causer des dégâts aux équilibres déjà précaires des foyers et à la compétitivité des entreprises?
Même si on en parle depuis quelques années dans les milieux initiés, la flexibilisation reste largement incomprise et sa finalité très peu claire. Il faut dire que Bank Al-Maghrib a échoué dans sa mission de vulgariser le passage à un dirham flottant. Du coup, une véritable phobie s’est installée auprès des opérateurs économiques et faiseurs d’opinion. Aujourd’hui, deux questions empêchent les industriels de dormir: Comment la flexibilité du dirham, qui nous a été imposée par le FMI, sera-t-elle bénéfique aux fondamentaux macroéconomiques? Quelle sera la portée de cette mesure sur le panier des ménages et la compétitivité des entreprises?
Tout d’abord, il faut savoir que depuis près de 20 ans, l’Etat a volontairement mené une politique économique favorisant un Dirham fort. Ce qui a évidemment encouragé les importations, tout en occasionnant un coût substantiel, supporté par l’Etat à travers la banque centrale. Une sorte de subvention qui ne dit pas son nom. Avec la flexibilisation, l’Etat accepte de se plier au jeu de l’offre et de la demande pour déterminer la valeur du Dirham, et donc de réduire graduellement cette «compensation» déguisée.
Pour la seconde question, elle reste centrale et surtout très sensible. Ce qui inquiète avant tout les opérateurs économiques mais aussi le citoyen lambda, c’est bien le spectre de la dépréciation qui pèse sur le dirham. Car, même si sa fluctuation sera encadrée par BAM à travers une bande de fluctuation, tout le monde garde à l’esprit les cas égyptiens, nigérians ou encore tunisiens, dont la flexibilisation des monnaies a eu l’effet d’une bombe chimique sur le pouvoir d’achat.
La crainte d’une dévaluation imminente a, d’ailleurs, soulevé un vent de panique sur les marchés monétaires, poussant les spéculateurs nationaux à vite se positionner pour se protéger, mais aussi pour profiter des gains que cette réforme peut générer. D’où la colère d’Abdellatif Jouahri à l’encontre des banques qui ont copieusement pompé les réserves en devises du Royaume à hauteur de 44 milliards de dirhams en moins d’un mois. Tenez-vous bien: sur les 20 derniers jours, certaines banques ont constitué pour le compte de certains clients, des réserves allant jusqu’à 5 ans d’importations! Même si Jouhari a tapé sur la table, cela ne devrait pas dévier notre attention du vrai sujet (…)
Vous l’aurez compris, la flexibilisation s’apparente à un écran de fumée pour éviter de parler de dévaluation et ainsi affecter la réputation des Etats. C’est une des dernières trouvailles du Fonds Monétaire International visant à accélérer les réformes dans des pays en difficulté tout en préservant leur souveraineté en façade.
Alors que le Maroc bouillonne de revendications sociales, que le morale des patrons est au plus bas, l’on peut se demander quelle mouche a piqué le ministère des Finances et la banque centrale de vouloir persister à introduire la flexibilisation du Dirham, avec ce que celle-ci comporte comme risques inflationnistes.
D’ailleurs, il s’agit d’une décision si sensible pour le pays que, ces derniers mois, il se murmure dans les milieux économiques à Rabat que deux blocs de pensée ont pris forme. Le premier, qui s’est constitué autour de l’orientation de la banque centrale et qui souhaite mener cette réforme jusqu’au bout. Sans doute une velléité du Gouverneur, qui marquera ainsi doublement l’histoire du Maroc. Pour avoir d’abord géré le Programme d’Ajustement Structurel (PAS) en 1983, alors qu’il était ministre des Finances et, aujourd’hui, en supervisant la transition vers un dirham flexible.
Le second bloc, plus conservateur et plus politique et surtout plus conscient des tensions sociales, voudrait qu’un tel choix fasse l’objet d’une validation par les élus du peuple. Les enjeux sont de taille et l’Etat n’aurait pas dû laisser une décision aux conséquences sociales lourdes, touchant directement au pouvoir d’achat des ménages, entre les seules mains de techniciens.
Seulement voilà, les dés sont jetés, et nous n’aurons que les annales d’histoire pour juger.
MarocLeaks
La flexibilisation du dirham ressemble fort à un OVNI. On ignore d’où ça vient, à quoi ça sert et si oui ou non il risque de percuter notre économie et causer des dégâts aux équilibres déjà précaires des foyers et à la compétitivité des entreprises?
Même si on en parle depuis quelques années dans les milieux initiés, la flexibilisation reste largement incomprise et sa finalité très peu claire. Il faut dire que Bank Al-Maghrib a échoué dans sa mission de vulgariser le passage à un dirham flottant. Du coup, une véritable phobie s’est installée auprès des opérateurs économiques et faiseurs d’opinion. Aujourd’hui, deux questions empêchent les industriels de dormir: Comment la flexibilité du dirham, qui nous a été imposée par le FMI, sera-t-elle bénéfique aux fondamentaux macroéconomiques? Quelle sera la portée de cette mesure sur le panier des ménages et la compétitivité des entreprises?
Tout d’abord, il faut savoir que depuis près de 20 ans, l’Etat a volontairement mené une politique économique favorisant un Dirham fort. Ce qui a évidemment encouragé les importations, tout en occasionnant un coût substantiel, supporté par l’Etat à travers la banque centrale. Une sorte de subvention qui ne dit pas son nom. Avec la flexibilisation, l’Etat accepte de se plier au jeu de l’offre et de la demande pour déterminer la valeur du Dirham, et donc de réduire graduellement cette «compensation» déguisée.
Pour la seconde question, elle reste centrale et surtout très sensible. Ce qui inquiète avant tout les opérateurs économiques mais aussi le citoyen lambda, c’est bien le spectre de la dépréciation qui pèse sur le dirham. Car, même si sa fluctuation sera encadrée par BAM à travers une bande de fluctuation, tout le monde garde à l’esprit les cas égyptiens, nigérians ou encore tunisiens, dont la flexibilisation des monnaies a eu l’effet d’une bombe chimique sur le pouvoir d’achat.
La crainte d’une dévaluation imminente a, d’ailleurs, soulevé un vent de panique sur les marchés monétaires, poussant les spéculateurs nationaux à vite se positionner pour se protéger, mais aussi pour profiter des gains que cette réforme peut générer. D’où la colère d’Abdellatif Jouahri à l’encontre des banques qui ont copieusement pompé les réserves en devises du Royaume à hauteur de 44 milliards de dirhams en moins d’un mois. Tenez-vous bien: sur les 20 derniers jours, certaines banques ont constitué pour le compte de certains clients, des réserves allant jusqu’à 5 ans d’importations! Même si Jouhari a tapé sur la table, cela ne devrait pas dévier notre attention du vrai sujet (…)
Vous l’aurez compris, la flexibilisation s’apparente à un écran de fumée pour éviter de parler de dévaluation et ainsi affecter la réputation des Etats. C’est une des dernières trouvailles du Fonds Monétaire International visant à accélérer les réformes dans des pays en difficulté tout en préservant leur souveraineté en façade.
Alors que le Maroc bouillonne de revendications sociales, que le morale des patrons est au plus bas, l’on peut se demander quelle mouche a piqué le ministère des Finances et la banque centrale de vouloir persister à introduire la flexibilisation du Dirham, avec ce que celle-ci comporte comme risques inflationnistes.
D’ailleurs, il s’agit d’une décision si sensible pour le pays que, ces derniers mois, il se murmure dans les milieux économiques à Rabat que deux blocs de pensée ont pris forme. Le premier, qui s’est constitué autour de l’orientation de la banque centrale et qui souhaite mener cette réforme jusqu’au bout. Sans doute une velléité du Gouverneur, qui marquera ainsi doublement l’histoire du Maroc. Pour avoir d’abord géré le Programme d’Ajustement Structurel (PAS) en 1983, alors qu’il était ministre des Finances et, aujourd’hui, en supervisant la transition vers un dirham flexible.
Le second bloc, plus conservateur et plus politique et surtout plus conscient des tensions sociales, voudrait qu’un tel choix fasse l’objet d’une validation par les élus du peuple. Les enjeux sont de taille et l’Etat n’aurait pas dû laisser une décision aux conséquences sociales lourdes, touchant directement au pouvoir d’achat des ménages, entre les seules mains de techniciens.
Seulement voilà, les dés sont jetés, et nous n’aurons que les annales d’histoire pour juger.
MarocLeaks
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