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Zine Barka, Professeur de Finances publiques «Sonatrach doit être gérée avec plus d’efficacité»

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  • Zine Barka, Professeur de Finances publiques «Sonatrach doit être gérée avec plus d’efficacité»

    La gouvernance des ressources naturelles dans de nombreux pays est entachée d’irrégularités et de défaillances. Quid de l’Algérie où l’économie est basée sur la rente pétrolière ?

    En effet, l’Indice de gouvernance des ressources naturelles de 2017 révèle que beaucoup de pays – en fait la grande majorité – gèrent très mal leurs secteurs pétrolier, gazier et minier. Seuls 19 pays parmi les 81 pays enquêtés sont bien notés. A cet égard, la Norvège présente la meilleure gouvernance des ressources naturelles au monde. Elle est suivie de près par le Chili, le Royaume-Uni et le Canada. Les Etats-Unis arrivent au 5e rang mondial.

    Quant au premier pays arabe – Oman –, il arrive au 39e rang et se range dans la catégorie «insuffisant». L’Algérie est au 73e rang. Elle se retrouve donc comme bon nombre de pays arabes dans la catégorie «médiocre», ce qui signifie que «des procédures et pratiques sélectives minimales» sont en place pour gérer les ressources naturelles, mais il manque la plupart des éléments nécessaires pour que les citoyens puissent profiter de la richesse dérivée des ressources extractives.

    Quelles sont les principales anomalies relevées dans ce cas, surtout après les scandales de ces dernières années dans le secteur de l’énergie ?

    Il est vrai que le secteur de l’énergie a connu au cours des 10 dernières années de très fortes secousses qui sont le résultat de plusieurs facteurs associés à des considérations politiques et de retournement de la conjoncture du marché des hydrocarbures. La presse écrite – surtout indépendante – en a fait, à chaque occasion, les titres des journaux, des comptes rendus des procès des hauts responsables poursuivis en justice pour des raisons liées à la gestion du secteur des hydrocarbures. Secousses qui ont été également amplement relatées par cette même presse. Des experts indépendants du secteur, et qui y ont exercé dans le passé des responsabilités importantes, se sont aussi exprimés sur les causes de ses dysfonctionnements.

    En outre, d’anciens hauts responsables ont présenté leurs analyses du secteur à travers des publications d’ouvrages, comme tout dernièrement l’ancien ministre Sid Ali Boukrami dans son ouvrage intitulé Questions énergétiques et politique économique. Dans toutes ces publications, les anomalies de la politique énergétique du pays ont été passées en revue, y compris la question de l’exploitation du gaz de schiste pour faire face à la baisse tendancielle du produit de l’exportation des hydrocarbures.

    D’ailleurs, cette option a été contrariée – du moins temporairement – par une féroce hostilité de la population du Sud algérien où les sites devaient être implantés. L’Assemblée populaire nationale a eu à examiner la loi sur les hydrocarbures, mais encore une fois la voie de l’Exécutif s’est montrée plus forte et tous les projets sont passés sans amendements significatifs proposés par l’opposition. Bref, tous les acteurs principaux ont eu à dire, plus ou moins avec vigueur, leurs appréhensions et craintes quant à l’opportunité de l’exploitation du gaz de schiste. Mais il me semble que le vrai débat n’a pas encore eu lieu par manque tout simplement de données du secteur de l’énergie et un manque d’intérêt de la population sur l’avenir énergétique du pays.

    In fine, on peut dire que la gestion du premier secteur pourvoyeur de devises à l’Algérie et qui est à l’origine d’une politique sociale extrêmement généreuse à l’égard de toute la population et un instrument de choix pour mener des politiques de maintien de la stabilité sociale et parfois d’achat de la «paix sociale» ne fait pas l’objet d’un large débat national. Serait-on alors dans une configuration de la pensée où chaque individu trouve son compte avec ce qu’il reçoit ou ce qu’il s’approprie pour s’auto-suffire dans un statu quo de confort individuel, mais qui n’est certes pas optimal pour l’économie dans son ensemble ?

    Quel impact sur les ressources financières du pays ?

    La question de la gestion des entreprises publiques du secteur extractif est fondamentale car elle a un lien direct avec le drainage des ressources financières au profit du Trésor public, qui serviront par la suite à assurer principalement une redistribution des revenus et le financement de l’économie. Ces deux fonctions, avec l’optimisation de l’allocation des ressources publiques, constituent le fondement même de l’intervention de l’Etat dans l’économie. Là encore, l’enquête sur les entreprises publiques du secteur extractif les mieux gérés révèle qu’un grand nombre d’entreprises d’Etat sont notées comme «insuffisant» ou comportent des faiblesses ou leur gouvernance se révèle défaillante.

    La Corporation du pétrole et du gaz naturel de l’Inde est classée deuxième. Les remous qu’a connus Sonatrach ces dernières années au niveau de la plus haute hiérarchie expliquent-elles une volonté ou un désir d’assurer les meilleures conditions d’une plus grande mobilisation de la rente au vu des données conjoncturelles persistantes d’un marché des hydrocarbures de moins en moins favorables aux pays exportateurs ? Quoi qu’il en soit, une chose semble sûre, la rente pétrolière ne peut être optimisée que si Sonatrach est gérée avec plus d’efficacité dans le cadre d’une bonne gouvernance globale.

    Quels sont les moyens à mettre en œuvre pour assurer plus d’efficacité dans la gouvernance du secteur ?

    Parmi les moyens souvent évoqués pour introduire plus d’efficacité dans la gouvernance du secteur des hydrocarbures, on peut citer en premier lieu toutes les mesures visant à introduire plus de transparence. Ce qui revient à établir les règles et les pratiques qui «déterminent comment les dirigeants d’entreprises et les agents de l’Etat prennent des décisions, et comment ils prennent en compte l’impact des décisions sur les citoyens ainsi que sur l’environnement». Il s’agit là d’un point important se rapportant à la mise en pratique des règles établies. De ce point de vue, l’Indice de gouvernance des ressources naturelles 2017 montre bien que «les pays qui affichent la plus faible gouvernance des ressources naturelles sont ceux qui généralement ne suivent pas les règles qu’ils ont mises en place».

    Qu’en est-il de la gestion du Fonds de régulation des recettes ?

    Ces fonds répondent à des appellations diverses (fonds de régulation des recettes pour l’Algérie, fonds souverain, de stabilisation et/ou d’épargne dans d’autres pays producteurs de pétrole). Au-delà de ces différences d’appellation, les objectifs sont identiques : il s’agit d’abord de corriger les problèmes liés à la volatilité et à l’imprévisibilité des recettes pétrolières, et ensuite à la nécessité d’épargner une partie des recettes de ce produit.

    Le Fonds de régulation des recettes d’hydrocarbures n’a pas pour objet de transférer la richesse d’une génération à une autre. L’indice évalue 33 fonds souverains. La qualité de la gouvernance de ces fonds varie considérablement. C’est ainsi que, et pour citer un certain nombre de cas, onze fonds sont classés défaillants. Il s’agit notamment de l’Abu Dhabi Investment Authority des Emirats arabes unis. Les fonds qui obtiennent les plus basses notes ont le plus pâti d’une prise de risque excessive, de frais de gestion élevés et d’investissements politiquement motivés.

    Beaucoup d’autres cas de mauvaise gestion pourraient tout simplement ne pas être apparents. Les fonds en Algérie, en Angola, en Arabie Saoudite, au Gabon, en Guinée équatoriale, au Nigeria, au Qatar, au Soudan, au Tchad et au Venezuela sont si opaques qu’il n’y a aucun moyen de déterminer les montants perdus à cause d’une gestion défectueuse, ni qui bénéficie des placements de ces fonds.

    Le classement du Fonds de régulation des recettes en Algérie est assez bas et se situe à 21 points sur 100. Ce score place le pays à la 22e position sur les 28 fonds de régulation évalués dans les secteurs pétrolier et gazier.

    Ce classement met l’Algérie à la 7e position sur les neuf fonds souverains examinés dans la région MENA Il est à relever que le Fonds de régulation des recettes en Algérie obtient de meilleurs scores s’agissant de l’observation stricte des règles de retrait et de dépôt. Cependant, sa position peut être améliorée s’il adopte et met en œuvre des règles sur les investissements, ainsi que sur le renforcement des rapports financiers par la surveillance des organes législatifs et d’audit par la Cour des comptes.

    Encore une fois, la question de la transparence de l’utilisation des ressources de ce fonds reste entière, malgré les efforts faits par le ministère des Finances par la publication d’un tableau succinct reprenant les disponibilités du Fonds de régulation des recettes entre 2014 et 2016 dans le Rapport de présentation du projet de loi de finances pour 2016.

    Samira Imadalou
    El Watan
    Si vous ne trouvez pas une prière qui vous convienne, inventez-la.” Saint Augustin
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