Les poètes ont laissé une forte empreinte dans la musique andalouse influençant de leurs traces une lignée de producteurs tlemceniens du zadjel andalou. Les gens de Tlemcen ont toujours eu un naturel porté sur les beaux-arts et les belles-lettres. Ils ont une longue tradition dans les domaines de l'art comme aussi, ils avaient une culture de l'éloquence du roman national de cette musique. Elle eut ses poètes d'art qui contribuèrent à la réputation de la culture arabe : Abou Abdallah Ibn Khamis, Mohamed Benyoussef Ath – Thighri al –Andaloussi, Abou Abdillah Ibn el Hadjam, Abou Abdillah Ibn Benna, Abou Hammou Moussa II… A propos de leurs poèmes, Georges Marçais, écrit : «Ces sont là des poèmes courtisanesques un peu laborieux et plus ingénieux qu'inspirés. Ils témoignent du moins d'une solide culture classique et d'une foi religieuse que l'on sent profonde«.
Dans le «Beldi-Haouzi» Said al-Mandassi (17ième siècle) rivalisa de son temps avec les plus anciens auteurs de la «Qaçida» au Maroc dont Abou Farès al-Maghraoui. Le «Beldi» qui constitue le label musical le plus proche de la «Sana'a» est un type de beauté littéraire créé essentiellement pour la musique. L'auteur de la «Akikia» (la Cornaline), Said al-Mandassi poète officiel honoré pour ses poésies à caractère dithyrambique par le roi saadien al-Mansour (XVIe s), est reconnu comme étant l'ancêtre du «Beldi-Hawzi», un chant élaboré à partir de traditions orales et qui se cristallisa en musique pour atteindre aussi ses lettres de noblesse. Le grand poète de la qacida marocaine Mohamed al-Mesmoudi reconnaît en lui son maître.
Au Maroc ou il a vécu dans la cour des rois alaouites à Sidjelmassa puis Meknés, Said Ben Abdellah rivalisa avec ses pairs dont Abou Farès al-Maghraoui le «Roi des poêtes», l'archétype, le plus ancien producteur, de la «Qaçida» dite «Malhoun» avec ses chants à contenu émotionnels. C'est l'œuvre du grand poète al-Mandassi qui a inspiré la création du pied de mètre «Tilimsaniya», au Maroc. Son disciple Ahmed Ibn Triqui (XVIIe s) allait lui-même faire des émules avec Mohamed Ibn M'saib (18ième siècle), Zaatan tilimsani (XVIIIe s), Mohamed Bendebbah (XVIIIe s.)... Cette addition de poètes postérieurs sera le long des siècles enrichie par d'autres noms ayant participé à l'élan poétique que l'ancienne capitale zianide connut pendant de longs siècles : Mohamed Abi Amer (XVIIIe s) auteur de «Mali sadr h'nin», M'barek Bouletbag (XVIIe s)auteur de « serraba» et de «miradj», Ahmed Belhadj auteur de «Baghi n'toub ya sadat », Mohamed Zaatan (XVIIIe s) «Açabani mard el hawa», Bellahcen Benachenhou (XIXe s) «Lillah ya b'na el ouarchan», l'imam Mohamed Settouti (XXe s) et ses opérettes - bouffes dont «Tandjia», Mostéfa Bendimerad (XIXe s) avec sa version de «Kahoua oula thai»...
Puisant dans le «Malhoun», les musiciens tlemceniens participèrent aussi à une œuvre fondatrice du genre musical algéro - marocain dit «Gherbi». Ce genre merveilleusement expressif est entré dans la mode il y a au moins trois siècles en Algérie. Il n'est autre que le «Malhoun» dans sa version algérienne les poètes marocains apportant leur poésie, les musiciens algériens leur muse avec des variantes très riches en modes et en rythmes puisant dans les registres mélodiques de la «Sana'a». Le «Gherbi» par référence à «Gharb» notion toponymique qui veut dire le pays de l'ouest désignant la tranche régionale allant d'Oujda jusqu'à Fès et qui, avec Tlemcen partage beaucoup d'affinités du fait d'échanges millénaires. L'évolution de cette musique a suivi la langue par étape, à travers au moins trois périodes coïncidant chacune avec l'avènement de Zyrieb, l'apparition du zadjal en andalousie, du Zadjal maghrébin puis, enfin, ses périphériques mêlés ensemble: «Beldi-Hawzi» en Algérie, «Gherbi-Malhoun» au Maroc et «Z'djoul(s)» en Tunisie et dont la clé de voute d'un ancrage local et que l'historiographie qui a profondément évolué nous permet aujourd'hui de mieux comprendre. Le poète tlemcenien M'barek Bouletbag contemporain de Lakhdar Benkhlouf (XVIe siècle) évoque dans un poème à caractère historique intitulé «Serraba», chanté par Al-Anka, un Maghreb sans frontières avec les aèdes marocains et algériens vivant de son temps: Mohamed Nedjar, Abdelaziz Maghraoui, Aissa Laghouati... Le découpage culturel et artistique «Sana'a» au centre «Hawzi» à sa lisière, «Aroubi» poésie pastorale des bardes - poètes du XVIIIe siècle Hadi Ben Guenoun, Mostéfa Benbrahim , Kaddour Bel Abbés connus pour leurs poèmes : «Dhalma», «al-guit ana ya Khoudat», «fi wahran sakna ghazali»... enfin «Gherbi» correspond à une répartition spatiale des registres et des répertoires du paysage culturel et artistique .
Ces spécificités culturelles et artistiques rattachées souvent à des espaces ont fini, à travers le temps, par se mêler dans l'art dit «andalou» y devenant un lieu de brassages. Ces espaces offrent une vision maghrébine qui met en valeur les différentes composantes sociale et culturelle de son identité. Cette littérature musicale est le produit pur du génie de la langue parlée avec sa propre syntaxe, ses euphémismes et ses fantaisies d'où son incomparable lyrisme et qui continue toujours à revendiquer officiellement une place dans la littérature arabe algérienne en tant que bien ou legs culturel. Comme un monument cette poésie est à la fois un lieu de mémoire, un vécu, une appartenance, une esthétique, une littérature dans l'idiome très symbolique avec ses infimes modulations culturelles et artistiques.
Des auteurs dont les interprètes se sont employés souvent à gommer les noms
Reflets de tendances culturelles et artistiques dynamiques au sein de la société, ils sont caractéristiques d'une véritable littérature maghrébine qui transpire les coutumes, les mœurs, les couleurs locales spécifiques de l'Occident musulman ou Maghreb. En matière d'héritage, cet art est subordonné à la poésie et à la déclamation lyrique par des musiciens qui ont le secret de la séduction dans un rapport chant-langue coulée dans une expression littéraire et artistique raffinée.
Ce sont des étapes linguistiques qui, à travers les âges, ont réconcilié le peuple avec l'art classique, l'enrichissant, enfin, l'appelant souvent aussi, au stade de son évolution de sa société et des influences, à se transformer. C'est ce que signalent, naturellement, l'anthologiste berbère de langue arabe Ahmed Tifaschi (1184-1253) auteur du traité de musique intitulé «Moutaat al'asma'a fi ilm es'sama'a»(Le plaisir des sons dans la science de l'audition) ou encore Ibn Bajja (Avempace) (1085-1136), né en Andalousie, à Saragosse, mort à Fès, évoquant cette musique une fois popularisée en dehors des palais et des cours royales fut influencée inconsciemment par les traditions berbères autochtones d'où son essence en tant qu'art maghrébin constamment revivifié au cours des siècles. Le filtre d'une approche orientalisante fait souvent oublier la dimension andalo-maghrébine, africaine et méditerranéenne de cet héritage qui, pour le défendre dans son authenticité a besoin aussi d'être préservé aujourd'hui de certaines influences indésirables orientales ou occidentales. Le patrimoine légué par cette musique a sa plus haute importance dans l'histoire de l'art et de la culture de la région au même titre que les autres ornements qui ont façonné le goût, l'esprit enfin, la mentalité des habitants dans ce qu'on peut appeler l'identité-singularité maghrébine ou maghrébinité.
Le mythe cristallisé autour de Zyrieb laisse pendante l'épineuse question de la mémoire et du déni des œuvres de producteurs qui ont continué à offrir tant de chefs d'œuvre à cette musique plongée, pendant des siècles, dans un long processus de création constituant le socle commun de la culture musicale andalouse en Algérie. Chaque œuvre est tirée de la production de poètes jadis honorés de la considération. Il s'agit bien donc d'un patrimoine d'auteur. Nous posons alors la question de savoir pourquoi aujourd'hui les poètes classiques ou populaires dotés pourtant de leurs droits patrimoniaux sont mis à l'écart par rapport à leurs propres œuvres ? Il faut dire que, depuis, le sens des références a régressé dans l'exploitation littéraire et artistique. Depuis le moment de Zyrieb l'art musical dit andalou n'a cessé certes, de connaître, à travers le temps, une évolution marquée par des innovations, des créations répondant, à chaque fois, à de nouvelles satisfactions esthétiques et cela, au gré de ses nouveaux auditoires. Au début du XXe siècle le classicisme de la «Sana'a», distinction (sana'a ou métier d'art) qui remonte à des siècles pour légitimer la Civilisation, n'est pas resté, dans les temps modernes, figé sous l'effet du conservatoire qui lui a impliqué des changements sur le plan notamment des rythmes, d'où l'influence aujourd'hui grandissante de son école néoclassique.
L'héritage n'est certes pas resté figé dans la tradition en ce sens qu'il n'a pu se transmettre de maître à élève sans changements notables. Le mot-clé dans toutes formes de production artistique est : la sensibilité. Celle-ci évolue à chaque étape, lorsque la structure de la société change et chaque changement implique naturellement une modification corrélative à l'art. La «Sana'a» algérienne ouverte aussi à différents noms : «Gharnati», «Gharnata», «Ala», «Malouf« est essentiellement composée à la fois de poèmes de la période classique de la «Qâçida» et du «Mouwaschah» mais aussi, et en grande partie, de la production de poètes et musiciens de Grenade sous les Nasrides mais également de Tlemcen sous l'empire des Zianides, à l'époque médiévale.
De l'appellation «Sana'a-Gharnata»
De l'appellation «Sana'a-Gharnata» correspond à la trajectoire suivie par cet héritage à Tlemcen et à Grenade. C'est toujours le passé convoqué dans le présent. Ce regard cité-centrique ou péri-centrique est un fait historique. Ces termes pris dans le sens d'archaïsmes traduisent plus, aujourd'hui, pour le musicien.
Les formes poétiques nouvelles sont ainsi de précieux documents archéologiques et lexicologiques pour l'étude de l'évolution de la langue. C'est montrer, par là, que cette musique fut, constamment, en perpétuelle évolution à travers les âges. Elle se chantait dans les cours avant de se produire dans la rue d'où, au fur et à mesure, également ses mutations d'écoles. L'art grenadin eut un effet innovant sur l'évolution artistique à Tlemcen. Cette musique dont l'unité n'est que progressive a commencé par rassembler les textes des poètes, savants, aèdes et chanteurs andalous, puis maghrébins. Le zadjal ensuite le «Beldi-Hawzi» ont eu, successivement, à chaque étape, le temps d'affirmer à cette musique, sa nouvelle identité. Ils se situent, tous les deux, dans un rapport de continuité et de remodelage du matériau poétique avec à chaque fois, l'incursion de l'esprit populaire. Cet art musical est aujourd'hui considéré comme la synthèse-fusion de tous les arts qui se sont nourris de sa culture. Ils sont caractéristiques d'une véritable poétique - musicale au Maghreb.
L'identification des auteurs des textes poétiques nous permet aujourd'hui d'avancer cette hypothèse. Pour comprendre les variations du temps de cette musique, il faut appliquer, dans un rapport critique aux textes, le critère historique de la datation des textes poétiques et cela, pour distinguer les époques et caractériser les variantes, les influences locales et régionales par rapport à ce qui reste de tangible, de l'héritage ancien de l'Espagne musulmane. Cette musique explique le philosophe et musicien Ibn Bajja (Avempace) (1085-1138) de Saragosse «en quittant les lieux des palais, assimilé les formes anciennes existantes».
le quotidien d'oran
Dans le «Beldi-Haouzi» Said al-Mandassi (17ième siècle) rivalisa de son temps avec les plus anciens auteurs de la «Qaçida» au Maroc dont Abou Farès al-Maghraoui. Le «Beldi» qui constitue le label musical le plus proche de la «Sana'a» est un type de beauté littéraire créé essentiellement pour la musique. L'auteur de la «Akikia» (la Cornaline), Said al-Mandassi poète officiel honoré pour ses poésies à caractère dithyrambique par le roi saadien al-Mansour (XVIe s), est reconnu comme étant l'ancêtre du «Beldi-Hawzi», un chant élaboré à partir de traditions orales et qui se cristallisa en musique pour atteindre aussi ses lettres de noblesse. Le grand poète de la qacida marocaine Mohamed al-Mesmoudi reconnaît en lui son maître.
Au Maroc ou il a vécu dans la cour des rois alaouites à Sidjelmassa puis Meknés, Said Ben Abdellah rivalisa avec ses pairs dont Abou Farès al-Maghraoui le «Roi des poêtes», l'archétype, le plus ancien producteur, de la «Qaçida» dite «Malhoun» avec ses chants à contenu émotionnels. C'est l'œuvre du grand poète al-Mandassi qui a inspiré la création du pied de mètre «Tilimsaniya», au Maroc. Son disciple Ahmed Ibn Triqui (XVIIe s) allait lui-même faire des émules avec Mohamed Ibn M'saib (18ième siècle), Zaatan tilimsani (XVIIIe s), Mohamed Bendebbah (XVIIIe s.)... Cette addition de poètes postérieurs sera le long des siècles enrichie par d'autres noms ayant participé à l'élan poétique que l'ancienne capitale zianide connut pendant de longs siècles : Mohamed Abi Amer (XVIIIe s) auteur de «Mali sadr h'nin», M'barek Bouletbag (XVIIe s)auteur de « serraba» et de «miradj», Ahmed Belhadj auteur de «Baghi n'toub ya sadat », Mohamed Zaatan (XVIIIe s) «Açabani mard el hawa», Bellahcen Benachenhou (XIXe s) «Lillah ya b'na el ouarchan», l'imam Mohamed Settouti (XXe s) et ses opérettes - bouffes dont «Tandjia», Mostéfa Bendimerad (XIXe s) avec sa version de «Kahoua oula thai»...
Puisant dans le «Malhoun», les musiciens tlemceniens participèrent aussi à une œuvre fondatrice du genre musical algéro - marocain dit «Gherbi». Ce genre merveilleusement expressif est entré dans la mode il y a au moins trois siècles en Algérie. Il n'est autre que le «Malhoun» dans sa version algérienne les poètes marocains apportant leur poésie, les musiciens algériens leur muse avec des variantes très riches en modes et en rythmes puisant dans les registres mélodiques de la «Sana'a». Le «Gherbi» par référence à «Gharb» notion toponymique qui veut dire le pays de l'ouest désignant la tranche régionale allant d'Oujda jusqu'à Fès et qui, avec Tlemcen partage beaucoup d'affinités du fait d'échanges millénaires. L'évolution de cette musique a suivi la langue par étape, à travers au moins trois périodes coïncidant chacune avec l'avènement de Zyrieb, l'apparition du zadjal en andalousie, du Zadjal maghrébin puis, enfin, ses périphériques mêlés ensemble: «Beldi-Hawzi» en Algérie, «Gherbi-Malhoun» au Maroc et «Z'djoul(s)» en Tunisie et dont la clé de voute d'un ancrage local et que l'historiographie qui a profondément évolué nous permet aujourd'hui de mieux comprendre. Le poète tlemcenien M'barek Bouletbag contemporain de Lakhdar Benkhlouf (XVIe siècle) évoque dans un poème à caractère historique intitulé «Serraba», chanté par Al-Anka, un Maghreb sans frontières avec les aèdes marocains et algériens vivant de son temps: Mohamed Nedjar, Abdelaziz Maghraoui, Aissa Laghouati... Le découpage culturel et artistique «Sana'a» au centre «Hawzi» à sa lisière, «Aroubi» poésie pastorale des bardes - poètes du XVIIIe siècle Hadi Ben Guenoun, Mostéfa Benbrahim , Kaddour Bel Abbés connus pour leurs poèmes : «Dhalma», «al-guit ana ya Khoudat», «fi wahran sakna ghazali»... enfin «Gherbi» correspond à une répartition spatiale des registres et des répertoires du paysage culturel et artistique .
Ces spécificités culturelles et artistiques rattachées souvent à des espaces ont fini, à travers le temps, par se mêler dans l'art dit «andalou» y devenant un lieu de brassages. Ces espaces offrent une vision maghrébine qui met en valeur les différentes composantes sociale et culturelle de son identité. Cette littérature musicale est le produit pur du génie de la langue parlée avec sa propre syntaxe, ses euphémismes et ses fantaisies d'où son incomparable lyrisme et qui continue toujours à revendiquer officiellement une place dans la littérature arabe algérienne en tant que bien ou legs culturel. Comme un monument cette poésie est à la fois un lieu de mémoire, un vécu, une appartenance, une esthétique, une littérature dans l'idiome très symbolique avec ses infimes modulations culturelles et artistiques.
Des auteurs dont les interprètes se sont employés souvent à gommer les noms
Reflets de tendances culturelles et artistiques dynamiques au sein de la société, ils sont caractéristiques d'une véritable littérature maghrébine qui transpire les coutumes, les mœurs, les couleurs locales spécifiques de l'Occident musulman ou Maghreb. En matière d'héritage, cet art est subordonné à la poésie et à la déclamation lyrique par des musiciens qui ont le secret de la séduction dans un rapport chant-langue coulée dans une expression littéraire et artistique raffinée.
Ce sont des étapes linguistiques qui, à travers les âges, ont réconcilié le peuple avec l'art classique, l'enrichissant, enfin, l'appelant souvent aussi, au stade de son évolution de sa société et des influences, à se transformer. C'est ce que signalent, naturellement, l'anthologiste berbère de langue arabe Ahmed Tifaschi (1184-1253) auteur du traité de musique intitulé «Moutaat al'asma'a fi ilm es'sama'a»(Le plaisir des sons dans la science de l'audition) ou encore Ibn Bajja (Avempace) (1085-1136), né en Andalousie, à Saragosse, mort à Fès, évoquant cette musique une fois popularisée en dehors des palais et des cours royales fut influencée inconsciemment par les traditions berbères autochtones d'où son essence en tant qu'art maghrébin constamment revivifié au cours des siècles. Le filtre d'une approche orientalisante fait souvent oublier la dimension andalo-maghrébine, africaine et méditerranéenne de cet héritage qui, pour le défendre dans son authenticité a besoin aussi d'être préservé aujourd'hui de certaines influences indésirables orientales ou occidentales. Le patrimoine légué par cette musique a sa plus haute importance dans l'histoire de l'art et de la culture de la région au même titre que les autres ornements qui ont façonné le goût, l'esprit enfin, la mentalité des habitants dans ce qu'on peut appeler l'identité-singularité maghrébine ou maghrébinité.
Le mythe cristallisé autour de Zyrieb laisse pendante l'épineuse question de la mémoire et du déni des œuvres de producteurs qui ont continué à offrir tant de chefs d'œuvre à cette musique plongée, pendant des siècles, dans un long processus de création constituant le socle commun de la culture musicale andalouse en Algérie. Chaque œuvre est tirée de la production de poètes jadis honorés de la considération. Il s'agit bien donc d'un patrimoine d'auteur. Nous posons alors la question de savoir pourquoi aujourd'hui les poètes classiques ou populaires dotés pourtant de leurs droits patrimoniaux sont mis à l'écart par rapport à leurs propres œuvres ? Il faut dire que, depuis, le sens des références a régressé dans l'exploitation littéraire et artistique. Depuis le moment de Zyrieb l'art musical dit andalou n'a cessé certes, de connaître, à travers le temps, une évolution marquée par des innovations, des créations répondant, à chaque fois, à de nouvelles satisfactions esthétiques et cela, au gré de ses nouveaux auditoires. Au début du XXe siècle le classicisme de la «Sana'a», distinction (sana'a ou métier d'art) qui remonte à des siècles pour légitimer la Civilisation, n'est pas resté, dans les temps modernes, figé sous l'effet du conservatoire qui lui a impliqué des changements sur le plan notamment des rythmes, d'où l'influence aujourd'hui grandissante de son école néoclassique.
L'héritage n'est certes pas resté figé dans la tradition en ce sens qu'il n'a pu se transmettre de maître à élève sans changements notables. Le mot-clé dans toutes formes de production artistique est : la sensibilité. Celle-ci évolue à chaque étape, lorsque la structure de la société change et chaque changement implique naturellement une modification corrélative à l'art. La «Sana'a» algérienne ouverte aussi à différents noms : «Gharnati», «Gharnata», «Ala», «Malouf« est essentiellement composée à la fois de poèmes de la période classique de la «Qâçida» et du «Mouwaschah» mais aussi, et en grande partie, de la production de poètes et musiciens de Grenade sous les Nasrides mais également de Tlemcen sous l'empire des Zianides, à l'époque médiévale.
De l'appellation «Sana'a-Gharnata»
De l'appellation «Sana'a-Gharnata» correspond à la trajectoire suivie par cet héritage à Tlemcen et à Grenade. C'est toujours le passé convoqué dans le présent. Ce regard cité-centrique ou péri-centrique est un fait historique. Ces termes pris dans le sens d'archaïsmes traduisent plus, aujourd'hui, pour le musicien.
Les formes poétiques nouvelles sont ainsi de précieux documents archéologiques et lexicologiques pour l'étude de l'évolution de la langue. C'est montrer, par là, que cette musique fut, constamment, en perpétuelle évolution à travers les âges. Elle se chantait dans les cours avant de se produire dans la rue d'où, au fur et à mesure, également ses mutations d'écoles. L'art grenadin eut un effet innovant sur l'évolution artistique à Tlemcen. Cette musique dont l'unité n'est que progressive a commencé par rassembler les textes des poètes, savants, aèdes et chanteurs andalous, puis maghrébins. Le zadjal ensuite le «Beldi-Hawzi» ont eu, successivement, à chaque étape, le temps d'affirmer à cette musique, sa nouvelle identité. Ils se situent, tous les deux, dans un rapport de continuité et de remodelage du matériau poétique avec à chaque fois, l'incursion de l'esprit populaire. Cet art musical est aujourd'hui considéré comme la synthèse-fusion de tous les arts qui se sont nourris de sa culture. Ils sont caractéristiques d'une véritable poétique - musicale au Maghreb.
L'identification des auteurs des textes poétiques nous permet aujourd'hui d'avancer cette hypothèse. Pour comprendre les variations du temps de cette musique, il faut appliquer, dans un rapport critique aux textes, le critère historique de la datation des textes poétiques et cela, pour distinguer les époques et caractériser les variantes, les influences locales et régionales par rapport à ce qui reste de tangible, de l'héritage ancien de l'Espagne musulmane. Cette musique explique le philosophe et musicien Ibn Bajja (Avempace) (1085-1138) de Saragosse «en quittant les lieux des palais, assimilé les formes anciennes existantes».
le quotidien d'oran
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