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Crise du Golfe : les Émirats manipulent-ils Donald Trump ?

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  • Crise du Golfe : les Émirats manipulent-ils Donald Trump ?

    Quel rôle les Emirats Arabes Unis ont-ils précisément joué dans la rupture des relations entre le Qatar et les pays du Golfe ?

    Pendant la campagne américaine, Donald Trump n’avait pas de mots assez durs contre les monarchies sunnites du Golfe. Son revirement soudain et son soutien appuyé à l’Arabie saoudite dans son bras de fer avec le Qatar ont déstabilisé toute la région. Mais comment expliquer cette volte-face ? Les discrets, mais très influents Émirats arabes unis n’auraient-ils pas joué un rôle dans ce coup de force diplomatique ?

    Si les origines de la crise actuelle dans le Golfe sont profondes et s’inscrivent dans une longue rivalité entre les États et les familles régnantes de la région, il n’en est pas moins vrai que le dernier épisode en date a éclaté de façon soudaine et dans des conditions peu claires.

    Tout a commencé deux semaines après le déplacement du président américain à Riyad, une visite couronnée de succès pendant laquelle Donald Trump a fait passer un message fort : les États-Unis sont prêts à resserrer les liens avec leurs alliés traditionnels, notamment les pays du Golfe (au premier rang desquels l’Arabie saoudite) et Israël.

    Et quelle meilleure façon de sceller cette alliance qu’en désignant un adversaire commun ? « En attendant que le régime iranien montre sa volonté d’être un partenaire dans la paix, toutes les nations dotées d’un sens des responsabilités doivent travailler ensemble pour l’isoler », a lancé Donald Trump le 21, à Riyad, devant une cinquantaine de pays musulmans dont 37 chefs d’État ou de gouvernement.

    Deux semaines plus tard, l’Arabie saoudite, Bahreïn, les Émirats arabes unis (EAU), ainsi que l’Égypte, les Maldives et le Yémen, ont rompu leurs relations diplomatiques avec le Qatar, allié stratégique de l’Iran, avec lequel il partage le plus grand gisement de gaz naturel au monde.

    Il est vrai que les rivalités viennent de loin. L’Iran est considéré comme un ennemi par l’ensemble des monarchies du Golfe, mais un antagonisme peut en cacher d’autres. Afin de combattre l’islam politique sous toutes ses formes, les EAU sont en opposition frontale avec le Qatar, accusé de soutenir les Frères musulmans.

    LE QATAR DANS LE COLLIMATEUR

    La chaîne qatarie Al-Jazeera est particulièrement visée par Abu Dhabi. En accordant la liberté de parole à tous les opposants politiques de la région, notamment lors des printemps arabes, la chaîne est perçue comme un redoutable facteur de troubles et d’instabilité pour les régimes en place.

    Des plus islamistes aux plus progressistes, tous les courants politiques arabes s’expriment sur la chaîne, et la fermeture d’Al-Jazeera était justement l’une des 13 exigences formulées par les Saoudiens, les Égyptiens et les Émiratis – avant qu’elles ne se transforment en six principes généraux à respecter.

    Dans une tribune publiée dans les colonnes du Monde le 16 juin, le ministre des Affaires étrangères émirati, Cheikh Abdallah Ben Zayed pointait du doigt la trop grande liberté de ton que le gouvernement de Doha accordait à Al-Jazeera. Il faut dire que la chaîne est un instrument redoutable de soft Power et d’influence pour le petit émirat qatari.

    Or, selon plusieurs membres des renseignements américains interrogés par le Washington Post, les EAU seraient à l’origine d’une cyberattaque visant les réseaux sociaux et les sites de l’Etat qatari fin mai. Une « entité inconnue » avait en effet diffusé de fausses déclarations attribuées à l’émir qatari, cheikh Tamim ben Hamad Khalifa Al-Thani, dans lesquelles il faisait l’éloge du Hamas et surtout de l’Iran. Des déclarations qui avaient justement servi de prétexte au déclenchement de la crise actuelle.

    Là aussi, il s’agit de pratiques anciennes qui ne surprennent plus les connaisseurs du dossier. Selon le New York Times, cité par le média français Orient XXI, « plusieurs pays mènent une intense action de lobbying contre le Qatar avec, à leur tête, les Émirats arabes unis ». La raison : « une féroce compétition qui ne dit pas son nom afin de se hisser à la position de premier centre économique, financier, culturel et religieux du Golfe ».

    LE SECRET LE MOINS BIEN GARDÉ À WASHINGTON

    Et c’est là que tout cet échiquier diplomatique commence à prendre une certaine forme. Car la proximité entre les EAU et l’administration Trump est aujourd’hui le secret le moins bien gardé à Washington.

    Le prince héritier d’Abu Dhabi, Mohammed ben Zayed ben Sultan, a aidé à arranger une rencontre en janvier dernier entre Erik Prince, un proche du président américain, et un représentant russe dont l’identité reste inconnue.

    Selon l’enquête du Washington Post, l’objectif de cette réunion était d’établir un canal de communication secret entre Trump et le président russe Vladimir Poutine durant la campagne américaine.

    En outre, l’influence de l’ambassadeur des EAU à Washington, Yousef Al Otaiba, est de plus en plus commentée dans la presse et les milieux diplomatiques américains. Très proche de Jared Kushner, le gendre de Donald Trump et désormais envoyé spécial pour la paix au Proche-Orient, Yousef Al Otaiba s’est lui-même fait pirater son compte mail récemment.

    Les messages diffusés par les pirates montrent une relation très étroite entre les EAU et le think tank néoconservateur et pro-israélien Foundation for Defense of Democracies (FDD). Certes, les EAU font partie des États ne reconnaissant ni l’existence ni la légitimité d’Israël, mais « les deux pays se sont alliés par le passé contre leur adversaire commun, l’Iran », analyse The Intercept, un des médias américains ayant pu consulter les mails de Yousef Al Otaiba.

    Quel rôle les EAU ont-ils précisément joué dans la rupture des relations entre le Qatar et les pays du Golfe ? Il est possible qu’en poussant l’administration Trump à donner un accord implicite à l’Arabie saoudite pour rentrer en conflit avec l’Iran et le Qatar, les Émiratis aient déclenché la crise diplomatique actuelle. Tel un jeu de domino, ils ont pu provoquer les événements les uns après les autres pour tenter d’éliminer leur rival qatari.

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