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A Mourmansk, la fin de la poubelle nucléaire russe, le «Tchernobyl flottant»

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  • A Mourmansk, la fin de la poubelle nucléaire russe, le «Tchernobyl flottant»

    RussieLes combustibles de l’ex-base soviétique de sous-marins près de Mourmansk sont enfin traités. Au prix d’efforts internationaux.

    Ce sont des décennies d’efforts qui, aujourd’hui, sont récompensés. Nous pouvons être fiers de ce que nous laissons à nos petits enfants: un monde avec un cimetière nucléaire en moins!» Dans la baie d’Andreyeva, près de Mourmansk, légendaire ville portuaire soviétique sur la mer de Barents, Alexandre Nikitine ne cache pas sa joie. A l’ère de l’URSS, la zone était fermée aux étrangers. Et pour cause: c’était la base nord de la flotte de sous-marins soviétiques qui, pour leurs moteurs comme pour leurs armements, dépendaient du combustible nucléaire. Une flotte longtemps laissée en ruines et à l’abandon avant même la chute de l’URSS. Mais aujourd’hui, la situation est enfin en train de changer. Depuis un peu plus d’un mois, les déchets nucléaires du site sont évacués pour être traités. Le 27 juin, sous le faible soleil polaire de la baie d’Andreyeva, le bateau spécialement conçu pour l’inédite opération d’évacuation nucléaire est enfin parti de l’ancienne base, avec à son bord le premier des chargements. Ce fut l’occasion d’une cérémonie officielle.

    Ces sous-marins soviétiques, c’est un «Tchernobyl flottant», résume Alexandre Nikitine. Cet ancien officier de sous-marin s’est transformé en défenseur de l’environnement. Depuis le début des années 1990, il se bat pour le démantèlement de cette flotte à haut risque et pour le transfert de tous les combustibles nucléaires. A terme, 22 000 assemblages de combustibles doivent être transportés jusqu’à l’usine russe de traitement des déchets nucléaires de Mayak, dans l’Oural.

    Accusé d’espionnage

    «Personne ne se souvient plus de ce qu’il y avait ici il y a vingt ans», ironise Alexandre Nikitine qui, dans son combat pour nettoyer la région des déchets radioactifs, s’est associé à Bellona, la fondation écologiste norvégienne très active à Mourmansk. La Norvège est particulièrement concernée car sa frontière se trouve à 50 kilomètres de la base. Mais ce combat, mené à Oslo et par quelques écologistes audacieux à Mourmansk, a été longtemps mal vu par les autorités à Moscou. En 1996, Alexandre Nikitine a même été accusé et emprisonné pour espionnage après avoir révélé des informations sur le mauvais état de la base notamment après l’accident de 1982 dans l’une des piscines de stockage.

    Fait impensable sous l’URSS, de nombreux drapeaux occidentaux flottaient le 27 juin, date du début de l’opération, dans l’ancienne base interdite aux étrangers. Le programme de nettoyage, dont la réalisation doit s’étaler sur de longues années, est en effet financé par la BERD (la Banque européenne pour la reconstruction et le développement) avec l’Union européenne et sept pays occidentaux (Allemagne, Canada, Danemark, Finlande, France, Norvège et Royaume-Uni).

    En dix ans de coopération internationale, les installations dangereusement en ruines ont été remplacées par des infrastructures aux normes internationales. «Dès le début, les Russes avaient conscience de l’ampleur du problème mais n’avaient ni les moyens ni les finances pour le résoudre», se souvient Jane Smith-Briggs, Britannique en charge des dossiers nucléaires à la BERD, qui est venue en moyenne cinq fois par an sur le site depuis quinze ans. «C’est un bel et rare exemple de bonne coopération internationale!»

    ONG mal traitée

    Lors de la cérémonie du 27 juin, les Russes ne cachaient pas satisfaction et soulagement. «Une étape a été franchie. Grâce à une infrastructure technologique qui, unique au monde, permet d’agir en toute sécurité», s’est félicité Oleg Kryukov, directeur du département «decommissioning» de Rosatom, le géant nucléaire russe. Il a évalué à 18 milliards de roubles (quelque 260 millions d’euros) le coût de ce vaste nettoyage nucléaire. Un budget couvert à moitié par la Russie et à moitié par les aides occidentales. Dans son discours, il n’a cependant pas dit un mot de reconnaissance pour les ONG et la société civile.

    Triste ironie de l’histoire, la filiale à Mourmansk de Bellona, l’ONG norvégienne pourtant au cœur de la sensibilisation de l’opinion publique, vient d’être classée «agent étranger» par les autorités, accusée d’être financée de l’étranger avec une présupposée «activité politique». «Depuis des années, nous faisons simplement le travail d’information que personne d’autre ne fait», s’inquiète Andreï Zolotkov, le représentant de Bellona à Mourmansk. Sans surprise, il n’était pas sur la liste des invités pour la cérémonie du 27 juin…

    (TDG)
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