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Enquête. Le blé, l’autre richesse pillée. Comment cette denrée stratégique est détournée en Algérie

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  • Enquête. Le blé, l’autre richesse pillée. Comment cette denrée stratégique est détournée en Algérie

    stabiliser les besoins algériens en céréales et dérivés.



    La production céréalière locale, faible, s’élève à une moyenne (2009/2015) de 3 millions de tonnes annuellement, ce qui est expliqué par les mauvaises conditions climatiques naturelles et une désorganisation chronique dans la gestion de cette filière et impose de l’OAIC de recourir à des importations massives de blé dur, blé tendre, mais, orge.. Aujourd’hui, cet établissement détient le monopole des importations avec 80% de parts de marché mais refuse de donner des chiffres sur les achats de céréales justifiant cela par le fait que le niveau des stocks est une donnée stratégique !



    Pourtant, les informations concernant les importations de céréales en Algérie sont disponibles sur les sites économiques et financiers tels Reuters et peuvent également être transmis par le service du CNIS des douanes. Ainsi, nous pouvons déduire de ces informations que l’Algérie a importé des céréales pour 3.18 milliards USD en 2012, 3.16 Milliards USD en 2013, 3.54 Milliards USD en 2014 et 3.43 Milliards USD en 2015.

    Cette baisse enregistrée en valeur qui s’est poursuivie durant l’année 2016 ne l’est pas en quantité, cela s’explique par le recul des cours sur les marchés mondiaux des céréales depuis 2015, pour cause de stocks abondants et de bonnes récoltes mondiales. Ce sont donc pas moins d’une moyenne de 10.5 millions de tonnes de céréales que l’Algérie importe annuellement, faisant de notre pays un des plus gros importateurs mondiaux de céréales.

    La consommation moyenne annuelle céréalière est de l’ordre de 8 millions de tonnes d’après les calculs faits par Omar Zeghouane, DG Institut technique des grandes cultures. Le calcul du stock stratégique est vite établi et il s’évalue en moyenne à 5.5 millions de tonnes (10.5+3-8) soit autour de 8 mois de consommation nationale ! La procédure d’acquisition de céréales s’effectue par la division du marché extérieur (DCE), un des services de l’OAIC, qui met en place une commission des achats, selon décision OAIC n°009/DG du 17 février 2004, pour procéder au lancement d’une consultation, prenant en considération les différentes prévisions préparées par la division de la commercialisation, de régulation et d’appui à la production, en respect d’un cahier de charges agrée par le ministère de tutelle (Ministère de l’Agriculture), qui détaille les spécificités et exigences de chaque produit.



    Après avoir porté son choix sur un fournisseur après négociation, la Division du Commerce Extérieur de l’OAIC a pour mission de contrôler et de suivre la marchandise au point de vue quantitatif et qualitatif au port d’embarquement à l’étranger et de déchargement en Algérie et ce avec des partenaires étrangers tel le groupe suisse de l’inspection, du contrôle, de l’analyse et de la certification SGS, pour les contrôles de navires avant expédition et concernant 9 millions de tonnes par an. Un contrôle au débarquement est encore effectué par les équipes de la DCP, Douane, OIAC, l’INPV, le centre national des recherches nucléaires et les représentants de la société de contrôle et du fournisseur.



    Malgré toute cette organisation, de graves écarts existent quant aux quantités que reçoit l’OAIC et qui coûtent au trésor algérien des pertes colossales. Comme nous l’avions indiqué dans un de nos récents articles sur le port d’Oran, les surestaries dues par les navires de l’OAIC, maintenus en rade par la commission de programmation des navires est un premier niveau de perte sèche, les pouvoirs publics devraient mettre en place une procédure informatisée et désigner une autorité de programmation des navires indépendante du syndicat des ports.

    L’autre problème que nous avons relevé durant notre enquête a trait à la pesée des camions au niveau du port. Dans la passé, les agents responsables de la pesée passaient au tribunal pour être assermentés dans leur rôle de contrôleur pour le compte de l’Etat. Ce n’est plus le cas.



    Les techniques pour sous-estimer le poids d’un camion au niveau de la pesée sont nombreuses et permettent de partager le produit du vol de plusieurs tonnes sur chaque camion entre plusieurs intervenants. Nos sources nous indiquent que les agents en charge de la pesée et les chauffeurs s’entendent par exemple pour ne pas complètement positionner les dernières roues de la remorque du camion sur la balance. A quelques centimètres près, ce stratagème permet de ‘’gagner’’ entre 3 et 5 tonnes de céréales par camion revendus sur le marché parallèle et au noir à raison de 3000 Da le quintal, c’est entre 100.000 DA et 150.000 DA de pertes par camion…



    L’autre façon malhonnête de subtiliser des quantités importantes de céréales au niveau des portiques est de faire de fausses déclarations sur le poids de céréales d’un premier navire et utiliser la marchandise du deuxième navire pour combler le manque du premier navire. Pour cela lors de l’opération de balayage par des équipes travaillant en trois shifts censés ramasser les grains tombés dans les trémies une fois les cales du navire vidées, les quantités récupérées serviront à combler les manques dans le navire précédent.



    Mais la fraude qui serait la plus difficile à détecter est celle qui a trait au poids spécifique, consigné sur un bulletin d’analyse par l’OAIC et le représentant du fournisseur et effectuée par le laboratoire central de l’OAIC et le laboratoire portuaire dépendant également du même office. Elle consiste en la différence de poids entre l’achat et la réception de céréales, et donnant droit en cas de différence négative à une compensation financière qui se chiffre en millions de dollars sur une année. L’astuce est d’informer l’armateur et le fournisseur de cette différence de poids qui risquerait de bloquer et faire saisir le navire, et par la suite négocier le silence des responsables au niveau de la commission de contrôle de la qualité des céréales de l’OAIC contre une compensation financière et personnelle à l’étranger…



    Comme vous le voyez, les pertes que subit le trésor lors de l’importation de céréales sont très importantes, l’OAIC ne peut ignorer tous ces vols et ces déficits de marchandise. Pourquoi n’y remédie-telle pas ?



    Il est fondamental de l’avis des experts que nous avons sollicités, de séparer les fonctions de contrôles et inspection de l’OAIC et de les déléguer à une entité indépendante. L’audit sérieux d’un organisme indépendant tel l’IGF, la cour des comptes ou la nouvelle Inspection Générale du Gouvernement permettra de situer toutes les responsabilités au niveau de la chaîne d’approvisionnement de l’OAIC et des services de vérifications et de contrôle dépendants du ministère de l’Agriculture afin de proposer de nouvelles procédures de suivi et d’expertise. Nous suivrons l’évolution de ce dossier et reviendrons vers vous pour vous en informer dans les prochaines semaines.
    Abdou semmar
    عيناك نهر من جنون... عيناك أرض لا تخون
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