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Tâtonnements linguistiques:Les mots de la modernité

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  • Tâtonnements linguistiques:Les mots de la modernité

    Lexique du nouveau monde du numérique et des machines, bouleversant celui des hommes

    Nous vivons, chacun en a bien conscience, un moment de bascule, et la liste des mots pour dire ce passage – le vieux monde meurt, le nouveau n’est pas encore né – s’enrichit en permanence de nouveaux concepts. Des mots non pas sortis de la tête d’un grand théoricien (on risque d’attendre encore longtemps un Karl Marx capable de réaliser la synthèse du capital) mais surgis de la pratique des acteurs de terrain, à la base, donc. Inventoriés ici par le nouvel Economiste, ceux-là forgent les contours de cette modernité naissante à la fois inquiétante et pleine de promesses, dans laquelle les machines et leurs dérivés virtuels s’imposent. Ne laissant pas d’autre choix aux individus et à la société que de s’adapter pour éviter le pire et peut-être obtenir le meilleur.

    Les mots dominants des machines et de leurs dérivés virtuels
    Dans ce nouveau lexique de la modernité, les mots qui décrivent l’arrivée des machines et de leurs dérivés virtuels prennent la première place par leur quantité et leur originalité. Il en ressort un monde partagé entre craintes et espoirs tant les potentialités apparaissent immenses. Forgé dans les laboratoires des universités californiennes, le deep learning décrit ces machines intelligentes capables d’apprendre par expérimentation, ce qui transforme radicalement leur ambition. Un jour viendra où la machine dépassera l’homme. Quelques futurologues proposent même une date : 2038, année de la singularité.

    “Dans ce nouveau lexique de la modernité, les mots qui décrivent l’arrivée des machines et de leurs dérivés virtuels prennent la première place par leur quantité et leur originalité”

    L’acronyme NBIC Nanotechnologies Biotechnologies, Informatique et sciences Cognitives a fait florès. Il décrit le mouvement de convergence entre les sciences naturelles et les technologies. Sans attendre cet horizon, la blockchain construit les bases d’une économie décentralisée et collaborative en permettant de se passer d’intermédiaires faisant office de tiers de confiance. Et déjà se mettent en place de nouvelles organisations d’entreprises, les plateformes, véritables carrefours de l’économie numérique.

    Mais les machines virtuelles se font aussi menaçantes. Émerge le robotariat qui sonne la fin du travail et la perte du contrôle par l’assujettissement des humains aux machines automatiques. Moins sombre mais tout aussi radicale, l’ubérisation, qui illustre le raz-de-marée de l’économie digitale, fait craindre le grand remplacement de l’ancienne économie par la nouvelle économie : “l’ubérisation c’est l’idée qu’on se réveille soudainement en découvrant que son activité historique a disparu”, lance Maurice Lévy, l’ancien patron de Publicis.

    Les tâtonnements linguistiques, reflet de la capacité d’adaptation de la société et des individus
    Face à cette futurologie déjà bien présente mais dont le scénario global reste néanmoins à écrire sans attendre, l’homme fait comme il le fait toujours : il adapte ses comportements, au niveau individuel ou collectif, pour le meilleur ou pour le pire. Les mots qui en rendent compte relèvent largement de la génération spontanée comme la poussée des champignons après les pluies d’orage… Le pire, ce sont ces travailleurs qui se consument au travail (“burn-out”), un mal qui se répand comme une épidémie. Les capacités d’adaptation sont aussi fortement sollicitées dans l’univers de la “gig economy”, l’économie des petits boulots, rapide, collaborative, libre mais aussi précaire et ultra-concurrentielle. Il y a plus encourageant : les individus sont passés maîtres dans l’art de s’approprier les outils – nous sommes ainsi entrés dans l’ère du streaming. Plus généralement, les acteurs économiques savent se construire un écosystème pour optimiser leurs ressources.

    “L’homme adapte ses comportements, au niveau individuel ou collectif, pour le meilleur ou pour le pire. Les mots qui en rendent compte relèvent largement de la génération spontanée comme la poussée des champignons après les pluies d’orage…”

    L’adaptation se réalise au niveau des comportements. C’est affaire de génération : celle des millennials invente un nouveau rapport au monde sur tous les plans. Émerge en son sein l’avant-garde des influenceurs, ces nouveaux leaders d’opinion maîtres des réseaux sociaux. Significatif d’un état d’esprit nouveau : de façon totalement inédite, les jeunes surdoués de l’Internet se mettent à former leurs aînés (“Reverse mentoring”). Tant il est vrai que le savoir-être devient la clé de l’adaptation, au-delà des compétences acquises forcément provisoires. Ce que souligne le concept de “mobication”, forgé à base de mobilité et d’éducation.

    Autre dimension de l’adaptation : il arrive que les solutions soient collectives. C’est ce que laisse entrevoir l’émergence du concept de “consomm’acteur” où l’on voit les consommateurs user d’un nouveau rapport de force pour peser sur les fournisseurs. Les organisations et leurs responsables apprennent aussi à rendre des comptes (accountability). Et au niveau sociétal, la solidarité prend une nouvelle dimension dans la gestion des communs. Enfin, pour ne laisser personne sur le bord de la route, l’OCDE met en avant une nécessaire politique d’inclusion.

    Accountability,
    si familière aux Anglo-Saxons
    Qui paie et qui est responsable ? C’est sans doute parce que ces deux questions soulèvent en général chez nous des abîmes de perplexité que la notion d’“accountabilily” si familière dans l’univers anglo-saxon peine à trouver sa traduction en français. Il faut pour s’en rapprocher le plus en passer par le quasi-néologisme de “redevabilité”. Être redevable, c’est être comptable de son action et surtout de ses résultats : dans un pays où l’on se paie volontiers de mots, la posture ne va pas de soi. C’est vrai au premier chef pour les politiques qui répugnent à l’évaluation de leur travail, pour l’administration habituée à gérer 50 % de la richesse dans l’opacité des fins et des moyens, et même aussi pour les organisations privées où l’idée de rendre des comptes n’est pas toujours pas culturellement entrée dans les mœurs. Mais avec les progrès de la transparence, l’accountability est désormais une valeur en hausse. Et c’est désormais à l’aune des résultats produits, des engagements tenus, des objectifs réalisés qu’une bonne gouvernance est jugée.
    Philippe Plassart

    Burn-out,
    épidémie en milieu professionnel
    Le phénomène semble se répandre telle une épidémie “Les gens sont parfois victimes d’incendie, tout comme les immeubles” décrivait le médecin Herbert Freudenberger en 1974 pour parler du “burn-out”, ou syndrome d’épuisement professionnel. En 2015, 17 % des employés se disaient sur le point de craquer, la proportion passant à 24 % chez les managers, selon un sondage de l’Institut Great to Work. Une proportion discutable tant il est difficile de faire la part des choses entre le malaise ressenti et le travail qui peut en être – ou pas – la cause. À l’origine, ce mal spécifique concerne les travailleurs sociaux, les personnels médicaux et les enseignants, mais par extension, les effets du stress, de la pression et des objectifs inatteignables contaminent tous les cercles professionnels. Au point que Benoît Hamon, lors de la campagne présidentielle, voulait faire reconnaître le burn-out comme maladie professionnelle, ce qui aurait eu pour effet de le faire prendre en charge par les cotisations employeur.
    P.P.

    Blockchain,
    la deuxième révolution numérique
    C’est la deuxième révolution du numérique, après celle d’Internet. Selon le ‘Journal Officiel’ du 7 juin, son nom français est “chaîne de blocs”, mais comme à l’accoutumée, elle est davantage connue sous l’appellation anglo-saxonne de “blockchain”. Il s’agit d’une chaîne de conteneurs numériques – les blocs – dans lesquels chacun peut stocker des données et ensuite les échanger via Internet pour effectuer des opérations diverses. L’originalité du système tient à une technologie totalement décentralisée qui relie les ordinateurs entre eux sur la base d’un consensus collectif qui fabrique de la confiance. Il n’y a plus besoin d’un tiers (de confiance) pour garantir les transactions entre les participants.

    Fini le pouvoir de poujadistes mesquins qui traquent les “intermédiaires” ! Nous voilà dans une économie décentralisée et collaborative. Le potentiel est immense. Il dépend directement du nombre d’utilisateurs d’applications blockchain. Leur atout est d’être transparentes, sécurisées et surtout sans organe central de contrôle. À ce jour, l’application la plus connue est la monnaie numérique Bitcoin. Ce qui inquiète fort les milieux financiers : les transactions sont validées sans avoir besoin de la caution qu’offre une banque centrale.

    “L’originalité du système tient à une technologie totalement décentralisée qui relie les ordinateurs entre eux sur la base d’un consensus collectif qui fabrique de la confiance”

    C’est pourquoi les métiers dont l’intermédiation est la vocation sont tous en première ligne face à la disruption blockchain, banques et assurances en tête. Le processus pourrait bien sûr s’étendre à d’autres secteurs : les producteurs fournissant alors directement les produits aux adeptes des “chaînes de blocs”. Mais sur cette route, il y a encore des obstacles à surmonter, notamment ceux d’une totale sécurité et d’une vraie confidentialité des applications blockchain.
    Jean-Michel Lamy

    Consomm’acteur,
    du pouvoir d’achat au pouvoir de nuisance
    Transformer son pouvoir en un véritable pouvoir, voilà le défi du consommateur, et il entend bien en user dans ce nouveau rapport de force, hier si déséquilibré à son désavantage, entre fournisseur et client. De nouvelles caisses de résonance donnent à sa voix une amplitude jamais égalée, et il compte bien désormais la faire entendre. Les réseaux sociaux comme les sites dédiés donnent tant d’importance à ses opinions que les marques en redoutent l’influence négative. Une plainte argumentée et bien tournée ou un témoignage assassin, et voilà nombre d’éventuels clients découragés.

    “Les réseaux sociaux comme les sites dédiés donnent tant d’importance à ses opinions que les marques en redoutent l’influence négative”

    Tout a changé. Le pouvoir de nuisance du “consomm’acteur” est centuplé. Il l’utilise désormais pour influencer de belle façon la stratégie des producteurs. Plus question d’accepter passivement, sans broncher, les prestations et produits à la qualité défaillante. Et si les marques se montrent autistes à ses observations, alors le consomm’acteur peut dégainer l’arme fatale : l’appel au boycott. En théorie, ce dernier est plutôt engagé dans les combats de l’éthique, de la production responsable et équitable. Son comportement – donc ses achats – traduit cet engagement. Qui peut, aussi, avoir une expression positive. Avec le “buycott” par exemple. Cet activisme consiste alors à récompenser une entreprise pour son engagement en appelant à acheter ses produits.
    Patrick Arnoux

    Le bien commun,
    l’autre nom de l’intérêt général
    Face à une économie de marché accusée de transformer le monde en une vaste marchandisation de tous les biens, la notion de “bien commun” gagne des points. Le Prix Nobel Jean Tirole livre cette analyse : “la recherche du bien commun passe en grande partie par la construction d’institutions visant à concilier autant que faire se peut l’intérêt individuel et l’intérêt général”. Au plan philosophique, la démarche peut aussi s’interpréter comme une quête du bien-être.

    La définition la plus large du bien commun recouvre l’ensemble des ressources qui relèvent d’une exploitation collective et/ou d’une utilisation collective. Le climat et la biodiversité en sont les marqueurs emblématiques. En particulier, l’air pur est un exemple des plus parlants : c’est une ressource naturelle que chacun consomme. Naguère, personne ne se souciait ni de sa préservation, ni de sa qualité, ni de son prix. Mais un bouleversement se prépare. Les biens communs pourraient se voir attribuer des prix négociés collectivement au nom de la défense de tel ou tel objectif.

    “La définition la plus large du bien commun recouvre l’ensemble des ressources qui relèvent d’une exploitation collective et/ou d’une utilisation collective”

  • #2
    suite

    En France, le coup de tonnerre est venu du Conseil d’État. Le 12 juillet dernier, dans une décision, l’instance administrative a enjoint le gouvernement “de prendre toutes les mesures nécessaires pour que soit élaboré et mis en œuvre un plan relatif à la qualité de l’air permettant de ramener les concentrations en dioxyde d’azote et en particules fines PM10 sous les valeurs limites fixées par le Code de l’environnement”. En cas de non-respect de normes édictées au niveau européen, le gouvernement français devra s’acquitter la première année d’une amende de 100 millions d’euros pour le seul contentieux lié aux particules.
    Aussitôt, les services de Nicolas Hulot, ministre de la Transition écologique, ont assuré que les “mesures qui s’imposent seront prises dans les mois à venir”. Cette judiciarisation du bien commun “air” est annonciatrice d’une révolution dans les comportements des agents économiques. Les entreprises seront les premières à devoir s’adapter à la préservation des biens communs.
    J-M. L.



    Deep learning,
    et les machines devinrent intelligentes
    Ce concept bouscule toutes les règles établies dans le domaine de l’intelligence. En effet, le “deep learning”, cet ensemble de méthodes d’apprentissage utilisant algorithmes et intelligence artificielle, se révèle comme une vraie rupture technologique. De celles qui ont permis par exemple de battre le champion européen du jeu de go en 2015 grâce à des processus “apprenants”. De ceux aussi et notamment qui sont aujourd’hui utilisés par les automobiles autonomes. Cette nouvelle capacité de “raisonnement” donnée au robot par le traitement massif de données et les algorithmes de l’analyse discriminante transforme radicalement l’ambition des “machines”.

    L’apprentissage profond utilisant les couches cachées des neurones artificiels permet à un ordinateur de reconnaître les émotions. Il est aussi bien utilisé pour les diagnostics médicaux que pour l’étude de l’ADN, la robotique, la biométrie, etc. Des mal-voyants ont pu reconnaître des formes, des couleurs et même des personnes. Nous ne sommes sans doute qu’à l’orée des potentialités de ce deep learning qui pourrait bien contribuer à transformer nos vies.
    P. A.

    Écosystème,
    la création de valeur à plusieurs
    “Système formé par un environnement et par l’ensemble des espèces qui y vivent, s’y nourrissent et s’y reproduisent”, voilà pour la définition scientifique du dictionnaire Larousse. Si le concept fait fort justement florès dans la vie des affaires d’aujourd’hui, ce n’est pas pour ses traits biologiques. Les écosystèmes économiques voient le jour dans les années 90. La notion d’“écosystème” est un enfant de la mondialisation. Elle illustre la multiplicité et l’importance des liens et des relations entre agents économiques. Cette communauté de destin stratégique change tout. De fait, les entreprises ne peuvent plus demeurer isolées si elles veulent relever les enjeux de l’innovation. Le partage, la collaboration et les échanges vont ainsi se faire dans un nouvel espace appelé “écosystème”. L’un des plus célèbres est la Silicon Valley où innovateurs, universitaires et financiers ont développé les champions économiques du XXIe siècle tels Facebook, Google ou Apple. Le concept a fait ses preuves. Les écosystèmes se multiplient autour des grandes thématiques comme la finance (la fintech), l’industrie (smart industry), les start-up (la French tech) ou encore la politique (civic tech). Grandes entreprises, jeunes pousses, financiers et pouvoirs publics s’y côtoient dans le but de créer de la valeur.
    E. L.

    Gig economy,
    l’emploi indépendant bouleversé
    Uber et Lyft dans le transport de personnes, Deliveroo ou Foodora pour les livraisons de repas à domicile ou au bureau… ces plateformes appartiennent à la “gig economy”. “Gig” signifie concert en anglais. Evoquant le musicien qui court les cachets, expression désigne ainsi cette nouvelle “économie des petits boulots”. Rendue extrêmement aisée grâce aux applications mobiles, l’intermédiation entre une offre de travail et une demande de service fait sauter les digues. La “gig economy” est au digital ce que les free-lances et les travailleurs indépendants étaient à l’ancienne économie. Rapide, collaboratif et libre, ce modèle de travail est aussi précaire et ultra-concurrentiel. Côté demande, les interminables queues à la station de taxis le samedi soir ont disparu. Côté offre, derrière les succès de l’auto-entrepreneuriat se cache une nouvelle génération de “slashers”, des actifs hyper-flexibles qui enchaînent plusieurs tâches auprès de différents employeurs au cours d’une même journée. Ces nouveaux comportements mettent au défi les règles du marché travail élaborée après la Seconde guerre mondiale. Rémunération, lien de subordination, sécurité sociale… La gig ecomony symbolise un marché de l’emploi en grande mutation et questionnement.
    E. L.

    Inclusion,
    le nouveau mantra de l’OCDE
    Pour contrer la montée des populismes, il faut promouvoir la “croissance inclusive”. L’inclusion ? Tel est le nouveau mantra de l’OCDE, le think tank des pays riches dont l’objectif est de partager les “bonnes pratiques” entre les pays membres. Idée forte : la croissance économique n’est pas une fin en soi. Celle-ci ne règle pas tout car elle laisse bien souvent de côté des franges de la population. Un constat qui invite les experts habitués à mesurer les progrès accomplis au niveau de l’individu moyen à dépasser cette vision univoque pour s’intéresser aux sous-groupes que forment les jeunes, les femmes et les immigrés. Promouvoir la croissance pour qu’elle profite à une large couche de la population devient un impératif. “L’inégalité des revenus est inédite en ce moment et met en danger la cohésion sociale”, lance Angel Gurria, le secrétaire général de l’OCDE. Une révolution conceptuelle de la part d’une organisation qui a longtemps promu les recettes libérales.
    P. P.

    Influenceurs,
    les médias de la génération Y
    Cyprien, Norman, Jiraya, Enjoy Phoenix… Vous ne les connaissez peut-être pas, mais ces jeunes gens sont pourtant de véritables stars de l’Internet francophone. Chaque jour, ils réunissent des centaines de milliers, voire des millions de spectateurs sur les grands carrefours d’audience du web. Ils sont “Youtubers” humoristiques, “Instagrameurs” de mode ou “Twicheurs” de jeux vidéo. Professionnels dans leur genre, ils sont surtout des influenceurs. Prescripteurs en chef de la génération Y, ils occupent une place de plus en plus importante dans le paysage médiatique, agrégeant des communautés de fidèles très significatives.

    “Pour qui roulent donc les influenceurs ? Leurs messages sont-ils de l’information ou de la communication ? Il n’y a pas d’évidence, car justement il n’y a pas de règles”

    Sans surprise, les entreprises se les arrachent et les marques s’en servent pour faire la promotion de leurs produits jusqu’à franchement brouiller les messages. Pour qui roulent donc les influenceurs ? Leurs messages sont-ils de l’information ou de la communication ? Il n’y a pas d’évidence, car justement il n’y a pas de règles. Les nouvelles stars des réseaux sociaux ne sont pas tenues d’indiquer articles, vidéos ou photos sponsorisés. Des pratiques qui questionnent en particulier au rapport à l’information des jeunes publics.
    E. L.

    Millénials,
    au-delà du marketing
    C’est un fait : les jeunes nés après 1990, façonnés tout à la fois par la crise, la globalisation et l’irruption d’Internet et des smartphones, portent des valeurs singulières. La réalité des millénials dépasse de loin la simple approche marketing. Ils bousculent bon nombre d’institutions de l’ancien monde en court-circuitant les intermédiaires et les hiérarchies. Les millénials s’affranchissent des groupes d’appartenances fixes, préférant la fluidité des réseaux. Pragmatiques, ils s’insinuent dans les interstices de la crise pour modifier le cours des choses. Ainsi dans le monde de l’entreprise, les millénials imposent de plus en plus les nouveaux codes du “travail indépendant”, faisant exploser au passage les cadres anciens du salariat. Ils ne se réclament d’aucune autorité instituée – et surtout pas celle des experts ou des politiques – pour penser par eux-mêmes. Les baby boomers voulaient changer la société, les millénials changeront l’homme.
    P. P.

    Mobication,
    savoir-faire + savoir-être
    L’avenir du travail passe par la “mobication”, néologisme importé du Danemark qui résulte de la contraction des mots anglais “mobility” et “education”, et dont l’économiste Jean-Marc Daniel est l’un des plus ardents promoteurs en France. L’idée de base ? Le travailleur doit faire preuve de souplesse en acceptant une forte mobilité au travers de l’exercice de métiers successifs. Le pilier de la mobication ne se résume pas aux savoir-faire, “skills” en anglais. Il combine compétence technique et bonne volonté relationnelle, c’est-à-dire des savoir-être dont l’acquisition relève de l’éducation. La mobication devient l’exigence d’une période où les carrières se réinventent sans cesse et où les métiers changent à toute vitesse. Et dans ce contexte, le travailleur doit en permanence se remettre en question. “La France, qui a loupé le coche de la flexisécurité, devrait songer à passer directement à la mobication”, préconise Jean-Marc Daniel.
    P. P.

    NBIC, les vertiges
    du transhumanisme
    ‘La mort de la mort’, ça vous dit quelque chose ? Le best-seller de Laurent Alexandre repose sur l’essor incontestable des NBIC. L’acronyme de Nanotechnologies, Biotechnologies, Informatique et sciences Cognitives définit surtout le mouvement de convergence entre les sciences naturelles et les technologies. Un nouveau big bang, présage à de multiples bouleversements, parmi lesquels l’interfaçage homme-machine, le mariage entre le naturel et l’artificiel, bref entre la chair et la matière. Voilà que s’ouvrent de nouvelles perspectives aussi vertigineuses que troublantes : l’homme augmenté, l’homme réparé, l’homme amélioré… Le transhumanisme est en marche. Jusqu’à l’immortalité ? La question s’inscrit clairement dans le champ de la réflexion métaphysique, mais aussi de l’éthique. Peut-on manipuler et recombiner les gènes pour réparer ou former des organismes ? Jusqu’à quel degré l’homme se permettra-t-il de modifier sa nature ? Avec les NBIC, la technologie a de moins en moins de limites. Et c’est bien là le problème.
    E. L.

    Plateforme,
    le carrefour l’économie numérique
    Entreprise-plateforme, média-plateforme, plateforme de services, de paiement, de rencontres… on assiste à une prolifération de ces organisations d’un nouveau type. Apparues il y a une quinzaine d’années avec le web, les plateformes numériques contribuent déjà à la vie de milliards de personnes. “Une plateforme est une nouvelle manière de produire et de consommer (…) Leur trait principal est de coordonner des myriades de micro-activités” définit l’universitaire Christophe Benavent*. Le grand public les connaît au travers du réseau social Facebook, de Uber ou BlablaCar dans les transports, de Amazon dans le commerce. Elles ont successivement intrigué, bousculé et inquiété les agents économiques car évidemment, ces nouveaux espaces de coordination cassent l’ordre établi de certains marchés. Largement critiqué pour ses effets destructeurs, le modèle, dit biface, est pourtant adopté très rapidement par les utilisateurs d’un côté, les offreurs de services ou produits de l’autre. Dans son confortable rôle d’entremetteur, la plateforme inspire de plus en plus les entreprises dites traditionnelles qui elles aussi ambitionnent de devenir l’incontournable pivot sur leur marché. Arthur Sadoun ne veut-il pas transformer Publicis en plateforme de services pour les collaborateurs et les clients de son groupe ? Même l’État se rêve en plateforme… Synonyme d’efficacité opérationnelle, la “plateformisation” de l’économie est bien en marche.
    E. L.

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    • #3
      fin

      Plateforme,
      le carrefour l’économie numérique
      Entreprise-plateforme, média-plateforme, plateforme de services, de paiement, de rencontres… on assiste à une prolifération de ces organisations d’un nouveau type. Apparues il y a une quinzaine d’années avec le web, les plateformes numériques contribuent déjà à la vie de milliards de personnes. “Une plateforme est une nouvelle manière de produire et de consommer (…) Leur trait principal est de coordonner des myriades de micro-activités” définit l’universitaire Christophe Benavent*. Le grand public les connaît au travers du réseau social Facebook, de Uber ou BlablaCar dans les transports, de Amazon dans le commerce. Elles ont successivement intrigué, bousculé et inquiété les agents économiques car évidemment, ces nouveaux espaces de coordination cassent l’ordre établi de certains marchés. Largement critiqué pour ses effets destructeurs, le modèle, dit biface, est pourtant adopté très rapidement par les utilisateurs d’un côté, les offreurs de services ou produits de l’autre. Dans son confortable rôle d’entremetteur, la plateforme inspire de plus en plus les entreprises dites traditionnelles qui elles aussi ambitionnent de devenir l’incontournable pivot sur leur marché. Arthur Sadoun ne veut-il pas transformer Publicis en plateforme de services pour les collaborateurs et les clients de son groupe ? Même l’État se rêve en plateforme… Synonyme d’efficacité opérationnelle, la “plateformisation” de l’économie est bien en marche.
      E. L.

      *Plateformes. Christophe Benavent. FYP Éditions 2016

      Reverse mentoring,
      quand le stagiaire forme le dirigeant
      De tout temps, les sachants – ces aînés ayant collectionné savoirs, connaissances et expériences – transmettaient aux plus jeunes ce précieux capital, les initiant à des savoir-faire, des cultures indispensables pour vivre et travailler.

      Puis soudain, ce traditionnel mode d’apprentissage a basculé jusqu’à s’inverser. Plus agiles, plus habiles, les plus jeunes – génération Y – se sont retrouvés dans le rôle d’initiateur des plus chenus. La révolution digitale est passée par là. Transformant les plus jeunes, virtuoses des hard et soft numériques – les digital natives –, en mentors des quinquas et autres sexas moins à l’aise avec ces outils faisant muter les façons de travailler. Et l’on vit soudain des stagiaires “former” les dirigeants expérimentés de grands groupes.

      “La légitimité du professeur ne vient plus de son exclusivité sur la détention de la connaissance – elle est partout disponible grâce au net – mais de sa capacité à lui donner du sens, l’éclairer, la contextualiser”

      Cette innovation pédagogique modifie sensiblement les modes d’enseignement. La légitimité du professeur ne vient plus de son exclusivité sur la détention de la connaissance – elle est partout disponible grâce au net – mais de sa capacité à lui donner du sens, l’éclairer, la contextualiser. Sinon, ce sont les étudiants qui formeront leurs professeurs



      Robotariat. Critique de l’automatisation de la société par Bruno Teboul. Éditions Kawa 2017.

      Singularité,
      l’avènement des machines
      La “singularité technologique”, drôle de concept venu tout droit de la Silicon Valley. L’idée ? Un jour viendra où la machine sera capable de dépasser l’homme. Quelques futurologies américaines proposent même une date : 2038, année de la singularité. Très concrètement, les ordinateurs seront à ce point intelligents qu’ils pourront auto-apprendre. Cette explosion d’intelligence ne sera pas sans conséquence, créant une fracture grandissante entre cerveaux artificiels d’une part et humains d’autre part. Voilà pour l’impact : cataclysmique. Comment pourrait-on en arriver là ? Tout simplement en considérant le cerveau comme un ordinateur. L’un des promoteurs les plus actifs de la singularité, le futurologue Ray Kurzweill, résume : “Dire que le cerveau n’est pas un ordinateur revient à affirmer que le jus de pomme n’est pas une pomme. Techniquement c’est vrai, mais on produit bien du jus avec une pomme. Un ordinateur peut donc devenir un cerveau s’il contient un logiciel qui l’imite”*. À la fois contestable et contestée, le thème n’en demeure pas moins d’actualité. L’informatique n’est-elle pas portée par les sujets de machine et deep learning et autre apprentissage automatique ?
      E. L.

      * La chute de l’empire humain. Charles-Edouard Bouée. Grasset 2016

      Streaming,
      adieu propriété, bonjour jouissance
      Hier, l’un montrait avec fierté sa bibliothèque de beaux ouvrages, l’autre sa collection de vinyles 100 % pur jazz, un autre ses piles de DVD immortalisant les chefs-d’œuvre du 7e art. Tous ces biens culturels très concrets, très physiques, étaient la possession d’amateurs sacrifiant aux valeurs d’avoir. Mais c’était hier. Le streaming a tout changé. Avec lui, elles ont été supplantées par les valeurs d’être.

      “Là encore, le numérique a transformé le mode de consommation des biens culturels, leur modèle économique mais aussi les mentalités”

      Adieu propriété, bonjour jouissance. La possession a fait place, radicalement, à l’usufruit. On ne possède plus un livre à ranger dans les rayons de sa bibliothèque, on le lit sur sa tablette, on n’achète plus un disque – d’ailleurs les disquaires en sont morts – mais on écoute Louis Amstrong ou Daft punks en streaming sur Spotify ou Deezer. Et à l’achat d’un DVD pour regarder en famille le dernier Luc Besson, on préfère les offres des si nombreux sites proposant la plupart des longs-métrages en dégustation aussi instantanée qu’éphémère. Là encore, le numérique a transformé le mode de consommation des biens culturels, leur modèle économique mais aussi les mentalités. Ce chamboule-tout, d’une façon très schumpetérienne, a fait disparaître quelques acteurs et en a fait émerger d’autres. Soulevant au passage d’épineux débats : rémunération des droits intellectuels, piratage, “gratuité”, etc.
      P. A.

      Ubérisation,
      la peur du grand remplacement
      Le mot de la décennie ? Pourquoi pas. Le néologisme qui s’appuie sur les succès de l’entreprise de transport Uber illustre le raz-de-marée de l’économie digitale. “Tout le monde commence à craindre de se faire ubériser”, explique Maurice Lévy dans un entretien au ‘Financial Times’ le 17 décembre 2014. Et l’ancien patron de Publicis de définir le concept : “l’ubérisation, c’est l’idée qu’on se réveille soudainement en découvrant que son activité historique a disparu”. Il y aurait donc l’avant-Uber et l’après-Uber, car l’impact du numérique est systémique, et non pas réservé à quelques secteurs comme la musique ou la presse, ou expertises telles la communication et le marketing. L’ubérisation, c’est la digitalisation appliquée à tous. Le concept marque les esprits. Les mentalités changent. Dans les entreprises, les managers raisonnent désormais transformation et innovation. Jadis au fond du couloir à gauche, le responsable du numérique devient directeur du digital. Le Comex écoute enfin ses recommandations. La grande transformation est lancée : entreprise digitale, expérience client, open innovation… Les chantiers sont nombreux, les résultats encore inégaux. Telle la peur du gendarme, celle du grand remplacement par l’ubérisation aura au moins eu le mérite de basculer les entreprises dans le XXIe siècle.
      E. L.


      le nouvel éco

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