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Entrevue avec Noureddine Boukrouh au Heard Tribune: "L'algérie à la croisée des chemins"

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    Entrevue avec Noureddine Boukrouh au Hearld Tribune : "L'algérie à la croisée des chemins"
    American Hearld Tribune - 18 Sept 2017

    Noureddine Boukrouh: “Algeria Is Currently at The Crossroads”
    American Hearld Tribune

    https://ahtribune.com/world/africa/1...-boukrouh.html

    ENTRETIEN AVEC M. MOHSEN ABDELMOUMEN
    (American Herald Tribune)

    1) Votre livre « L’islam sans l’islamisme : vie et pensée de Malek Bennabi » est un livre pertinent et nécessaire pour comprendre l’islam et l’islamisme. Selon vous, peut-on dire que l’islamisme est la négation de l’islam ?

    Il fut un temps, du XVIIIe au XXe, où ces deux mots étaient des synonymes dans les langues européennes parce qu’ils désignaient une seule et même chose, la religion de l’islam.

    Dans la langue arabe le mot « islamisme » n’existait pas parce qu’il n’avait pas lieu d’être, et son apparition est récente sous des déclinaisons comme « ouçouliya » (fondamentalisme), salafiya (orthodoxie liée en particulier au hanbalisme, la plus rigoriste des quatre écoles juridiques sunnites les plus connues) ou islamawiya qui est un terme composé de la racine « islam » et de l’équivalent arabe du suffixe « isme » qui désigne l’hégémonisme, la suprématie, le totalitarisme...

    L’adoption d’un terme consensuel et unique demeure problématique, mais les musulmans ont fini par admettre la réalité de la nuance entre les deux mots et l’existence en leur sein d’un courant théologique et politique tendant à réduire l’islam à lui-même, à l’enfermer dans sa lettre et son histoire originelle, à en faire presque une religion ethnique ayant son centre de gravité dans la péninsule arabique.

    Depuis, ils cherchent comment isoler ce courant du reste de l’islam historique, de l’islam coranique qui est par essence ouvert, éclairé, tolérant et tourné vers le bien du genre humain. Partant de là, on peut en effet conclure que l’islamisme qui veut inscrire l’islam dans une opposition frontale avec le reste du monde, avec les autres cultures, civilisations et religions, qui rejette les apports de l’humanité à l’histoire, à la science et au mode de gestion démocratique des nations, est une négation de l’esprit coranique.

    J’ai donné ce titre générique à mon livre sur le penseur algérien Malek Bennabi (1905-1973) pour le situer d’emblée dans la pensée islamique contemporaine où sont mêlés tous ceux qui ont écrit sur l’islam, qu’ils appartiennent à l’islam ou à son premier adversaire, l’islamisme, qu’incarne aujourd’hui dans toute son horreur « DAESCH ».

    Bennabi est l’homme qui citait dans ses premiers ouvrages à la fin des années 1940 le livre de Wendell Wilkie (1892-1944), « Le monde est un » et qui, dès qu’il a commencé à écrire, a placé le destin de l’islam dans le processus de mondialisation du monde, de l’économie, du savoir et des valeurs humaines.

    2) Pourquoi n’y a-t-il pas une pensée critique dans le monde musulman ?

    A toutes les époques de l’histoire de l’islam, en dehors de la période de décadence et de l’occupation étrangère où régnait un silence sépulcral (du XIVe au XIXe siècle), sont apparus en très petit nombre, ici ou là dans le monde musulman, des cerveaux qui ont eu le courage d’affronter le rigorisme de l’orthodoxie et appelé à la « réouverture des portes de l’ijtihad », autrement dit l’introduction de la rationalité et de l’esprit critique dans la réflexion sur l’état de l’islam, sa situation intellectuelle, politique, sociale, économique et culturelle, et les perspectives de son retour à l’histoire active.

    Ces hommes ont entretenu la flamme de la liberté de pensée au temps des Mûtazilites (VIIIe-XIIIe siècle), de l’esprit critique au temps d’Ibn Khaldoun (XIVe siècle), du renouveau et de la renaissance (Nahda) entre le XVIII et le XXe siècle, jusqu’à nos jours avec les courants appelés « tanwiriste » (philosophie des Lumières) et coranistes (recherche sur les signifiants fondamentaux du Coran en dehors de l’exégèse traditionaliste) dans lesquels je me reconnais.

    En ce début de troisième millénaire le contexte est devenu, grâce aux réseaux sociaux, favorable à l’interconnexion des efforts intellectuels apparaissant dans les pays arabo-musulmans et à leur amplification qui peut donner lieu à la formation d’un courant de pensée structuré comme les ruisseaux, rivières et fleuves se déversant dans un même confluent.

    3) Un intellectuel américain, le Dr. Kevin Barrett, nous disait dans une récente interview que le penseur algérien Malek Bennabi était l’un des penseurs-clés de la renaissance islamique. Vous qui êtes son disciple le plus connu, celui qui a le plus écrit sur lui dans le monde et qui avez reçu des mains de sa famille et héritiers son journal intime, ses manuscrits et ses ouvrages inédits, que pensez-vous de cette déclaration ?

    Je connaissais déjà deux intellectuels américains, le professeur Allan Christellow de l’université d’Idaho qui m’a fait l’honneur de préfacer mon livre « L’islam sans l’islamisme », et le révérend David Johnston. Je les ai d’ailleurs fait connaître entre eux par correspondance.

    Un curieux hasard a fait que tous les deux ont découvert Malek Bennabi par hasard, mais en relation avec moi : M. Christellow en achetant en 1972 un magazine où je publiais des extraits de l’œuvre de Bennabi, et M. Johnston en achetant en 1976 un livre de Bennabi que je venais d’éditer en l’ accompagnant d’une préface et de notes (« Les grands thèmes »).

    En ce qui me concerne, j’ai découvert les écrits de Christellow en 1992, et fait la connaissance du pasteur-universitaire en 2003 à Alger. Ce dernier m’a envoyé un an plus tard une copie de son exposé devant la conférence annuelle de l’ « American Academy of religion » intitulé « Les frontières indistinctes entre les mouvements réformiste et islamiste : les pensées de Malek Bennabi et de Rachid Ghanouchi sur la civilisation ». Ghanouchi, que j’ai connu à Alger au début des années 1990, tient ses idées sur la civilisation en totalité de Bennabi ainsi qu’il le revendique publiquement.

    J’aimerais bien que le Dr Kevin Barrett se penche sur les publications du Dr Christellow, il y trouvera la confirmation de son jugement sur Bennabi qui, un an avant sa mort, avait fait une tournée de conférences aux Etats-Unis.

    Parmi les études réalisées par Allan Christellow je peux citer : « Un humaniste musulman du XXe siècle, Malek Bennabi » in « The Maghreb Review », 1992 ; « Malek Bennabi et les frontières culturelles de l’ère globale » (Colloque international sur la pensée de Malek Bennabi, Alger, octobre 2003) : « Malek Bennabi et deux visions mondiales anglophones : les cas de Arnold Toynbee et Wendell Wilkie », septembre 2005).

    J’ajouterais à la déclaration du Dr Barrett que la particularité de Bennabi ne réside pas dans la « renaissance islamique ». Il est l’unique penseur musulman de tous les temps à avoir exclu une renaissance du monde musulman « en vase clos », en tant qu’ensemble spirituel, humain, culturel, politique ou économique, mais en la plaçant dans une dynamique historique qui n’a pas encore vu le monde dans sa plénitude, c’est-à-dire un processus d’intégration humaine sur tous les plans, y compris spirituel, intellectuel et culturel, ce qui est autrement plus difficile à réaliser que l’intégration géographique, économique et politique.

    Voilà ce que personne n’a encore saisi dans la pensée de cet homme et que j’ai essayé d’expliquer dans mon livre sur lui.

    4) Bennabi n’est-il pas un éternel incompris, un visionnaire qui a devancé son temps ?
    Pourquoi les Algériens préfèrent-ils les ulémas de palais, les charlatans des télé-poubelles, plutôt que la pensée critique et clairvoyante d’un homme comme lui ?


    Je viens de vous donner la raison pour laquelle ce visionnaire qui a vu ce que la pensée humaine n’a encore imaginé nulle part dans le monde et à aucune époque de l’histoire, n’a été, ne pouvait être compris ni par la pensée universelle qui l’ignore, ni par les intellectuels musulmans qui ne peuvent se représenter la perspective dans laquelle il se place. Car il est le théoricien non pas de la « renaissance islamique », mais de la renaissance humaine dans son universalité.

    Je crois que lui-même avait peur de l’ampleur de sa vision et qu’il l’a « adoucie », « camouflée » pour ne pas effaroucher ses contemporains et s’exposer à l’ostracisme. Moi-même en en découvrant l’étendue dans les notes figurant dans son journal intime (les carnets) j’en ai eu le vertige. Cet homme qui est mort il y a près d’un demi-siècle a encore un demi-siècle au moins d’avance sur la pensée humaine dans son ensemble.

    5) Comment expliquez-vous que des siècles après l’avènement de l’islam le monde musulman soit devenu la maison de la guerre (« Dar al-Harb ») et que des pays entiers soient menacés de disparition ?

    Je crois que des formules comme « le monde musulman », « l’islam » et « le monde arabe » dont ont usé et abusé le langage courant et les études académiques et orientalistes jusqu’ici ne valent plus et ne correspondent plus à la réalité qu’on découvre plus nuancée qu’il n’y paraissait.

    Le « monde musulman » n’a presque jamais existé comme ensemble politique et religieux uni, centralisé, homogène ou fédéré à l’image des Etats-Unis d’Amérique par exemple. Sur le plan religieux, il s’est divisé en sunnisme et chiisme un quart de siècle à peine après la mort du Prophète.

    Sa capitale politique n’a cessé ensuite de se déplacer au fil des luttes intestines pour le pouvoir, passant de l’actuelle Arabie saoudite (Médine) au temps des quatre premiers califes, à Damas avec la dynastie omeyyade, puis à Bagdad avec la dynastie abbasside avant de se fragmenter en plusieurs califats et dynasties non-arabes géographiquement éloignés et autonomes les uns des autres ( Mongolie, Chine, Egypte, Afrique du nord, Espagne, Iran, Turquie, Asie centrale, Afrique noire, sous-continent indien…). Puis, enfin, à Istanbul avec la dynastie ottomane.

    Le monde arabe n’est pas moins hétérogène, comprenant des Arabes proprement dits dans la Péninsule arabique, des Amazighs en Afrique du Nord, des Kurdes en Turquie, Iran, Syrie et Irak, des Druzes au Liban, des Noirs en Afrique, et aussi des religions autres que l’islam (diverses branches du christianisme et autres dérivés de l’islam…).

    Le colonialisme, l’impérialisme et les deux guerres mondiales ont donné à l’ancien « monde musulman » le visage qu’il avait à la fin du XXe siècle, c’est-à-dire une cinquantaine de pays où l’islam est majoritaire mais que ne rassemblent ni des positions communes en matière de politique internationale, ni des projets d’union économique à l’image de l’Union européenne.

    Le plus petit dénominateur commun qui restait à ces pays, c’était la culture religieuse traditionnelle, non renouvelée depuis mille ans et charriant une vision du monde obsolète. Elle était entretenue par les universités islamiques du monde arabe, principalement l’Egypte (al Azhar) et l’Arabie Saoudite.

    C’est de ce résidu culturel qu’est né l’islamisme dans la première moitié du XXe siècle avec les écrits de l’Indo-pakistanais Mawdudi et de l’Egyptien Sayed Qotb qui lui ont donné les apparences d’une conception du monde nouvelle s’appliquant à la politique, à l’économie et au « way of life », et capable de restaurer le « monde musulman » dans son ancienne grandeur. Mais pour cela, il fallait prendre le pouvoir.

    Voilà comment s’est formé, en grossissant comme les ouragans et les typhons et en balayant un pays après un autre, le fléau idéologique qui a précipité les pays musulmans dans un engrenage d’autodestruction qui a enrayé les acquis mentaux, intellectuels et sociaux difficilement conquis au cours du XXe siècle. Le retour au religieux pour interpréter le présent et élaborer les solutions du futur ne pouvait que réveiller les querelles religieuses apparues à l’aube de l’islam entre sunnites et chiites, entre Arabes et Perses

    Tant et si bien que le « monde musulman » est effectivement devenu une zone de guerres civiles où plusieurs pays ont déjà été gravement affaiblis selon des modalités différentes mais visant toutes à leur destruction : Irak, Syrie, Libye, Somalie, Afghanistan, Pakistan, Mali, Nigeria., et peut-être de nouveau l’Egypte et l’Algérie dans l’avenir.
    Dernière modification par Pomaria, 18 septembre 2017, 19h54.
    Lorsque vous changez votre manière de voir les choses, les choses que vous voyez changent !

    Ne cédez donc plus à la tentation de victimisation, si vous voulez êtes l’acteur principal de votre vie.

  • #2
    6) Que pensez-vous de cette dialectique qui établit l’évidence que ce sont les dirigeants politiques qui sont les artisans de l’échec dans les pays musulmans, échec qui a ouvert la voie à l’intervention étrangère ?
    Les dirigeants arabo-musulmans ne sont-ils pas les alliés objectifs de leurs ennemis ?


    Les premiers Etats-nations qui se sont formés dans l’histoire sont apparus en Europe et sont le fruit d’un processus de mutations intellectuelles provoquées par de nouveaux ferments comme la Renaissance, la Réforme, l’humanisme, le cartésianisme, la philosophie des Lumières et la notion des « droits de l’homme » créée par Thomas Payne (1737-1802) qui a été l’inspirateur de la révolution américaine et de la révolution française à la fin du XVIIIe siècle et auxquelles il a personnellement pris part.

    L’Amérique doit beaucoup à cet homme (un Britannique) et à son livre, « The common sense », alors que la France lui doit sa fameuse « Déclaration des droits de l’homme et du citoyen ».

    Les pays musulmans sont revenus à l’histoire au XXe siècle sans avoir réalisé aucune mutation intellectuelle ou culturelle, se contentant de plaquer sur leur ancienne culture les idéologies libérales ou marxistes qui étaient alors en vogue dans le monde. Monarchies rétrogrades et républiques soi-disant progressistes ont entrepris de développer leurs pays sur le plan matériel, économique et militaire sans toucher à la psychologie, à l’esprit et aux valeurs sociales de leurs peuples.

    Les dirigeants, familles régnantes ou juntes militaires, ont improvisé des Etats en copiant les Occidentaux, sans penser à en couler les fondations dans l’âme de leurs peuples, sans forger en eux les valeurs civiques et citoyennes qui les prémuniraient et les immuniseraient contre des intrusions idéologiques néfastes.

    Lorsque Mawdudi et Sayyed Qotb pour le sunnisme, et l’ayatollah Khomeiny pour le chiisme, théorisèrent l’idéologie islamiste et en firent une technique de prise du pouvoir par tous les moyens, celle-ci ne tarda pas à emporter les faux Etats modernes bâtis en Iran (1978), en Afghanistan (1979), en Somalie (1990), en Algérie (1992), en Tunisie, en Egypte, en Libye, en Syrie et au Yémen (2011), sans parler de l’Irak, de la Turquie et du Liban. Il est remarquable que ce sont les républiques dites progressistes qui ont été touchées par l’islamisme, et non les monarchies moyenâgeuses.

    Le discours islamiste a réussi à discréditer et à saper les dynamiques de développement national qui étaient suivies dans ces pays en leur reprochant d’aller à l’encontre des « valeurs islamiques ». Malheureusement, ces dynamiques étaient conduites par des dirigeants incompétents, despotiques et corrompus qui prêtaient idéalement le flanc à cette critique systémique.

    7) Pour mieux protéger l’islam et les musulmans, ne faudrait-il pas mettre des frontières entre les théologiens (les « ulémas ») et les politiciens et hommes de pouvoir, qu’ils soient rois ou présidents ?

    Là est le problème car on constate avec le recul que ni la laïcité préconisée par l’idéologie baathiste (Irak-Syrie), ni les politiques de libéralisation à l’occidentale menées en Turquie (Atatürk), en Iran (Pahlévis), en Tunisie (Bourguiba), ni les politiques « révolutionnaires » suivies en Egypte (Nasser), en Algérie (Boumediene) et en Libye (Kadafi), n’ont donné de résultats satisfaisants. Seules ont réchappé les monarchies archaïques et réactionnaires.

    Est-ce un paradoxe ? Non, de mon point de vue le problème a été mal posé dès le départ, avant même l’accession des pays musulmans au statut de nations-Etats, et il le reste jusqu’au moment où nous discutons vous et moi.

    Il est une constante dans les monarchies arabo-musulmanes que le pouvoir est réparti entre la famille régnante et les ulémas. Les premiers s’occupent de politique, et les seconds des âmes. Cette complicité entre le sabre et le « ilm » (savoir religieux) a protégé les systèmes monarchiques de la contestation sociale et politique parce qu’ils sont censés être conformes à l’archétype islamique, alors que dans les régimes dits progressistes la religion a été éloignée des affaires publiques et abandonnée à la rue qui s’en est emparée pour la retourner contre le pouvoir.

    Les pays musulmans devaient produire leur propre « laïcité », avec leurs outils cognitifs, en tenant compte des résonances culturelles et psychologiques des idées et des mots, mais ils ne l’ont pas fait car ils n’ont pas trouvé à ce jour le chemin intellectuel qui y mène, le trou de souris par lequel passer.

    8) Vous vous inscrivez dans une lignée de réformateurs constituée principalement de Mohamed Abdou, Abderrahman al-Kawakibi, Ali Abderraziq et Malek Bennabi.
    Que doit-on comprendre de l’expression « réforme de la weltanschauung islamique » récurrente dans vos écrits, et qu’apporte-t-elle de nouveau au juste ?


    C’est ce à quoi je faisais allusion à l’instant justement : le chemin, le trou de souris, la piste qui n’a pas encore été trouvée par la pensée islamique ancienne ou contemporaine pour réaliser la réforme de l’islam, je veux dire la transmutation des valeurs islamiques et leur adaptation au sens du monde, à la poursuite de l’histoire humaine.

    Dans mon livre « L’islam sans l’islamisme », j’ai montré la filiation intellectuelle existant entre les quatre hommes malgré des nuances dans leurs pensées respectives. Des quatre, seul Bennabi n’est pas le produit du savoir religieux traditionnel, d’où une plus grande audace chez lui et un horizon universel.

    « Les caractères du despotisme » écrit par al-Kawakibi a certainement influencé Abderrazik dans l’inspiration qui l’a conduit à écrire « L’islam et les fondements du pouvoir », comme « Rissalat at-Tawhid » a marqué Bennabi qui y fait référence dans son ouvrage central, « Vocation de l’islam ».

    Ces quatre penseurs ont beaucoup souffert, ils ont été persécutés, emprisonnés, exilés, et l’un d’entre eux est mort assassiné (al-Kawakibi) parce qu’ils luttaient contre un courant trop fort, celui de l’alliance entre le pouvoir et les ulémas qui défendre un intérêt commun vital pour eux : le maintien des peuples dans des conceptions fatalistes pour mieux les instrumentaliser et les éloigner de l’esprit critique qui peut tourner à la contestation de leur pouvoir.

    C’est en étudiant leurs œuvres pendant des décennies que j’ai découvert la piste sur laquelle je travaille depuis quelques années et dont le but est de proposer une méthode de rénovation complète de la pensée islamique, de sa représentation du monde, de sa « weltanschauung ».

    9) Mahathir bin Mohamad, surnommé Docteur M, ancien Premier ministre de la Malaisie et qui s’est notoirement inspiré de la pensée de Malek Bennabi, a dit un jour « Quand je veux prier, je me tourne vers la Mecque et quand je veux développer le pays, je me tourne vers le Japon ».

    Ce que je sais du lien souvent fait entre les idées de Malek Bennabi et les succès économiques réalisés par la Malaisie, c’est qu’entre avril 1956 et juillet 1963 Bennabi vivait au Caire et qu’il animait chez lui des séminaires auxquels assistaient des étudiants de diverses nationalités, dont un groupe de Malaisiens dont pourrait avoir fait partie le futur Premier ministre Mohamed Mahathir ou des amis proches de lui qui lui en auraient parlé par la suite, sans être en état de vous fournir des éléments de preuve dans un sens ou l’autre. Je crois savoir aussi qu’un colloque sur la pensée de Bennabi a été organisé dans les années 1990 à Kuala Lampour.

    Ce que je peux dire aussi, c’est que la citation que vous évoquez recoupe parfaitement par son esprit les propres vues de Bennabi dont les références à l’expérience japonaise abondent dans son œuvre. Il a confronté la renaissance civilisationnelle réussie du Japon (Meïji) à l’échec désolant de la renaissance musulmane (Nahda) alors qu’elles se sont déclenchées presque au même moment, dans les années 1860, et en a tiré des conclusions pour se replacer dans l’axe des solutions.

    Il est un fait auquel il faut réfléchir, c’est pourquoi ces pays, qu’ils soient musulmans ou non ont réussi, alors qu’aucun pays arabe (si l’on devait retirer le facteur représenté par le pétrole) n’a réussi sa renaissance. Ils ont certes créé certaines apparences de richesse dans leurs pays, mais pas le développement humain et durable. Car il n’y a pas que la Malaisie, le succès a touché d’autres pays de la région comme Singapour, Hong Kong, la Chine, la Corée du sud, l’Indonésie, etc.

    10) Revenons à la question de l’islamisme.
    Tous les pays occidentaux et leurs services de renseignement sont préoccupés par le radicalisme islamique, et notamment par les djihadistes revenus des zones de combat en Syrie et en Irak comme ce fut le cas en Algérie avec le retour des djihadistes algériens partis combattre en Afghanistan contre l’URSS dans les années 80 et qui ont semé la terreur en Algérie pendant la « décennie noire ».
    L’expérience algérienne dans la lutte antiterroriste n’est-elle pas une clé pour les pays occidentaux afin de mieux comprendre les returnees (les terroristes occidentaux partis combattre en Syrie) ?

    C’est possible, mais à deux conditions.

    Premièrement que cette expérience et cette clé serve d’abord à protéger l’Algérie et les Algériens qui sont loin d’en avoir fini avec le terrorisme puisque deux attentats-suicides revendiqués par « Daech » ont eu lieu ces dernières semaines dans une ville de l’est et une autre de l’ouest.

    Deuxièmement, que les services de renseignement algériens et les autres parties prenantes au problème (enquêteurs, magistrats, avocats, criminologues, sociologues, journalistes spécialisés, etc) se soient intéressés au versant psychologique et intellectuel du radicalisme islamiste et du terrorisme et qu’ils en aient tiré les enseignements permettant d’affiner leurs stratégies et tactiques pour l’extirper du cerveau de candidats potentiels.

    Je crois que ce volet a été négligé par les services en charge de la lutte contre le terrorisme à travers le monde qui, bien sûr, doivent faire face à l’urgence, aux effets, à l’aspect opérationnel, mais ils ne parviendront jamais à l’éradiquer tant qu’ils n’auront pas neutralisé ses causes qui sont religieuses, intellectuelles, culturelles et accessoirement politiques, sociales et économiques. La solution selon moi est dans la piste dont je vous ai parlé, dans le trou de souris par où passer pour réaliser la transformation et la pacification de la vision islamique du monde. On en reparlera ensemble, je l’espère.

    12) L’Algérie n’a pas de président en ce moment alors qu’elle est en pleine crise économique. Le lobby de l’argent qui s’est formé autour du frère cadet du président (Saïd Bouteflika) et son ami, l’homme d’affaires Ali Haddad, ne représente-t-il pas une menace pour l’Algérie ? Surtout après le renvoi il y a quelques semaines d’un Premier ministre, moins de trois mois après sa nomination, qui voulait « séparer l’argent de la politique ». L’évènement a choqué le pays et vous a incité à rédiger plusieurs articles virulents contre la présidence et l’Armée au sujet de laquelle vous avez écrit qu’« elle était devenue l’Armée du président », ce qui vous a valu un lynchage médiatique et une réponse officielle du ministère de la Défense…

    L’Algérie se trouve actuellement à la croisée des chemins. Elle peut aller vers le meilleur comme elle peut sombrer dans le pire. Le meilleur proviendrait d’une alternative à l’impasse politique et économique qui a résulté de l’insistance du président Bouteflika à ne pas quitter le pouvoir alors qu’il n’a plus les moyens physiques et intellectuels de l’exercer.

    C’est en pensant à cette issue que j’ai écrit quelques articles dans lesquels je demandais aux anciens militaires qui ont ramené cet homme et l’ont imposé au pays pendant bientôt vingt de le convaincre par les voies de la sagesse de se retirer ou, à tout le moins, à ne pas postuler pour un cinquième mandat en 2019. C’est en observant les conditions scandaleuses dans lesquelles il a renvoyé un Premier ministre parce qu’il s’était accroché avec le patron du patronat que j’ai écrit ces articles justement.

    Depuis, je subis des attaques violentes et ordurières ordonnées par la présidence et exécutées par le Premier ministre et son parti qui a officiellement demandé qu’on me poursuive en justice pour me faire taire.
    Dernière modification par Pomaria, 18 septembre 2017, 19h56.
    Lorsque vous changez votre manière de voir les choses, les choses que vous voyez changent !

    Ne cédez donc plus à la tentation de victimisation, si vous voulez êtes l’acteur principal de votre vie.

    Commentaire


    • #3
      13) Vous estimez que l’armée qui a installé Bouteflika en 1999 doit se situer dans le processus de sortie de crise, et non couvrir un régime finissant. D’autres acteurs de l’opposition pensent que l’institution militaire doit piloter une période de transition et amorcer ainsi un début de sortie de l’impasse politique dans laquelle se trouve l’Algérie…

      L’armée algérienne représente la colonne vertébrale du pays et de l’Etat parce que le pouvoir n’a jamais voulu émanciper la société et la laisser s’entraîner à participer à la vie politique et électorale.

      Ces dernières années, Bouteflika a opéré d’importants remaniements au sein de l’armée et placé sous sa coupe directe les services de renseignements pour les utiliser à se maintenir au pouvoir alors qu’il n’en a plus les moyens physiques ou mentaux. Il a verrouillé le pays dans une non-gestion et une absence de gouvernance alors que l’Etat est fragilisé par la perte de plus de la moitié de ses ressources d’exportation qui proviennent toutes du pétrole.

      Le nouveau Premier ministre vient de déclarer que le déficit du budget de l’Etat a atteint un niveau tel qu’il ne pourra pas payer les salaires du mois de novembre. Qu’arriverait-il alors ? Ce sera le chaos. Et qui fera face à ce chaos ? Forcément la police et l’armée, comme actuellement au Venezuela.

      Je ne suis pas et n’ai jamais été partisan du coup d’Etat militaire, mais il est impossible de nier que l’armée a une grande responsabilité dans le maintien du pouvoir finissant de Bouteflika qui persiste à vouloir encore rester après la fin de son mandat en 2019. Elle ne peut pas ignorer que la détérioration de la situation économique aura des conséquences sur le plan social et politique.

      14) Comment imaginez-vous le processus politique qui mènerait l’Algérie vers un État de droit ?

      Depuis son accession à l’indépendance, l’Algérie est demeurée constamment sous l’emprise d’un pouvoir despotique. Sur les six chefs d’Etat qui l’ont dirigée, un seul est parti de son plein gré, deux ont été renvoyés par l’armée, un est mort de mort suspecte, un a été assassiné et le sixième a perdu ses fonctions motrices et intellectuelles mais ne veut pas quitter le pouvoir.

      Le temps est venu pour l’Algérie de se libérer du despotisme et de se reconstruire sur des valeurs démocratiques. Quelque chose est en train de bouger dans la conscience du peuple qui est fatigué des échecs du pouvoir et rêve d’une vie politique et économique régie par des paramètres rationnels.

      Si le président ne veut pas démissionner et donner leur chance aux Algériens de partir d’un nouveau pied, on est obligé d’attendre l’échéance de la prochaine élection présidentielle en avril 2019. Mais cette fois, il faudra que l’élection soit sincère et transparente.

      15) Les puissances occidentales ont-elles intérêt à continuer à soutenir le régime des frères Bouteflika, de plus en plus impopulaire ? Ne jouent-ils pas elles avec le feu en cautionnant l’impasse politique en Algérie, un pays qui risque de s’effondrer avec des conséquences telles que le flux migratoire et le terrorisme sans frontière ? N’y a-t-il pas un risque de déstabilisation du bassin méditerranéen, voire du monde ?

      Les puissances occidentales ont d’importantes responsabilités dans la destruction de plusieurs pays soit parce qu’ils en soutenaient les dirigeants contre leurs peuples, soit parce qu’ils ont voulu imposer des dirigeants à ces peuples. Chez elles, elles croient à la souveraineté populaire et à la démocratie, mais chez les autres elles s’accommodent de régimes dictatoriaux et corrompus avec qui elles font des affaires jusqu’à ce que des troubles et des révolutions éclatent.

      On dit depuis longtemps que l’Algérie est la « chasse gardée » de la France dans le partage des zones d’influence, ce qui ne plaît pas aux citoyens algériens qui tiennent à leur indépendance de toute influence extérieure même si le pouvoir fait tout pour complaire aux puissances qui comptent.

      Personnellement je suis contre toute influence extérieure visant à soutenir le régime ou à encourager une révolte populaire. Si l’Algérie venait à connaître de nouveaux troubles, évidemment qu’il y aura des répercussions sur les pays du bassin méditerranéen.

      16) Votre expérience de ministre dans plusieurs secteurs a-t-elle été une plus-value dans votre parcours, ou bien en concluez-vous que la participation à un g6uvernement dans un pays comme l’Algérie n’est d’aucune utilité, les décisions importantes se prenant ailleurs, dans d’autres sphères ?

      J’ai occupé au sein du Gouvernement pendant les cinq années que j’y ai passé des postes économiques et je suis satisfait de l’expérience acquise et de ce que j’ai appris surtout en matière de négociations multilatérales.

      Comme dans tous les gouvernements du monde, je suppose, toutes les décisions ne se prennent pas en conseil de gouvernement ou des ministres. Mais cela est plus vrai des pays comme l’Algérie où ce ne sont pas des règles démocratiques qui sont appliquées à la gestion des affaires publiques.

      17) Vous avez un parcours atypique : économiste, chercheur dans la pensée islamique, écrivain prolifique, ministre... Vous avez connu des personnages tels que Bennabi, Ferhat Abbas et même l’ayatollah Khomeini, etc.

      À vingt ans, vous avez polémiqué avec Maxime Rodinson, et bien d’autres anecdotes jalonnent votre vie. Cela fait de vous le témoin d’une époque. Êtes-vous satisfait de vos expériences ou bien votre exigence intellectuelle vous pousse-t-elle toujours plus loin ? La quête de la lumière est-elle dans l’infini chez vous ?


      Ma particularité dans la classe politique algérienne est que j’ai été dès mon jeune âge un acteur de la vie intellectuelle, d’abord, ensuite politique car l’Algérie était un pays à parti unique et à économie administrée jusqu’en 1989. Mes écrits de 1970 à 2017 avaient pour objet trois thématiques principales : la politique algérienne, le rôle et la place de l’islam dans le monde musulman et les évènements internationaux. C’est ce qui m’a ouvert des portes et fait rencontrer de grandes personnalités algériennes et étrangères.

      https://ahtribune.com/world/africa/1...-boukrouh.html
      Dernière modification par Pomaria, 18 septembre 2017, 19h57.
      Lorsque vous changez votre manière de voir les choses, les choses que vous voyez changent !

      Ne cédez donc plus à la tentation de victimisation, si vous voulez êtes l’acteur principal de votre vie.

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      • #4
        Jamais pu lire une analyse suffisamment claire, fouillée, et bien argumentée sur l'origine de l'islamisme et ses évolutions en Algérie et dans le monde musulman.

        Vraiment un travail à contre-courant de tout ce que j'ai pu lire dans le passé.

        Les écrits de Boukrouh commencent à m’intéresser de plus en plus !
        Lorsque vous changez votre manière de voir les choses, les choses que vous voyez changent !

        Ne cédez donc plus à la tentation de victimisation, si vous voulez êtes l’acteur principal de votre vie.

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        • #5
          Jamais pu lire une analyse suffisamment claire, fouillée, et bien argumentée sur l'origine de l'islamisme et ses évolutions en Algérie et dans le monde musulman.
          « L’islam sans l’islamisme : vie et pensée de Malek Bennabi »
          il y'a de quoi pour que boukrouh s'empare d'une tel faculté intellectuelle et prendre le dessus pour s'imposer,il s'abreuve d'une littérature issus d'un sociologue geant
          L'escalier de la science est l'échelle de Jacob,il ne s'achève qu'aux pieds de Dieu
          Albert Einstein

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          • #6
            Entrevue de qualité ,Boukrouh égal à lui même ,rationaliste et moderniste dans le sillage du grand penseur Malek bennabi .
            j'aimerais assisté à un débat entre lui et kamel daoud par exemple ,deux personnalités de haute facture intellectuelle .
            ارحم من في الارض يرحمك من في السماء
            On se fatigue de voir la bêtise triompher sans combat.(Albert Camus)

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            • #7
              Depuis son accession à l’indépendance, l’Algérie est demeurée constamment sous l’emprise d’un pouvoir despotique.
              donc, tout en sachant que le pouvoir était despotique, M. Boukrouh l'a rejoint au moins pendant 5 ans !

              Ceci dit, j'aime bien ce qu'il dit...

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              • #8
                Des poursuites en vue, ou la revanche des tronches !

                Les graves accusations de Boukrouh contre Ouyahia et Saïd Bouteflika

                Cerné par les hauts responsables de l’Etat, Noureddine Boukrouh se défend. L’homme politique, qui multiplie ces derniers temps les sorties publiques pour s’opposer à un cinquième mandat du chef de l’Etat, a publié, lundi, un nouveau pamphlet contre Ahmed Ouyahia et Saïd Bouteflika.

                Dans un texte très mesuré, l’ancien ministre du Commerce accuse les deux hommes d’avoir distillé des informations selon lesquelles il n’aurait pas écrit des discours au chef de l’Etat. Or, dans une interview accordée à El Watan, Boukrouh rappelle qu’il a écrit une vingtaine de discours au président de la République. Il appelle les témoins de l’époque, notamment l’ancien secrétaire général de la Présidence de la République, Mohamed Rougab et l’ancien premier ministre, Ali Benflis, à témoigner.


                Mais plus que cela, Noureddine Boukrouh craint des poursuites judiciaires contre ses affirmations selon lesquelles le chef de l’Etat a perdu sa raison. « (…) de petits, moyens et grands médias connus pour être des marionnettes entre les mains de Saïd Bouteflika et Ahmed Ouyahia, en échange de la publicité étatique, se dépensent en infamies, insultes, accusations et diffamations non seulement contre moi mais contre ma famille jusqu’à mon vénérable grand-père décédé il y a près de quarante ans, et qui aurait été, selon ces crapules, un « gaïd » », accuse-t-il.


                Mais dans le fond, Boukrouh ne nie rien à ses écrits. « La seule manière qui reste de prouver que ce que j’ai dit est faux est de constater l’état du plaignant en s’aidant de l’expertise médicale à laquelle je pourrais opposer une contre-expertise. Il me semble que c’est comme ça que ça se passe dans les tribunaux, sauf si notre justice « indépendante » sera encore une fois instrumentalisée pour dire le non-droit et condamner un innocent parce que le calife l’a ordonné. Je n’accepte pas que notre pouvoir, après avoir recouru au « financement non conventionnel » recoure à la « justice non conventionnelle », écrit-il. Et d’enfonce le clou : « un chef d’Etat en possession de ses esprits ne viole pas la constitution pour s’accorder deux mandats auxquels il n’avait pas droit avant de rétablir, après le quatrième, leur limitation à deux. Même si la nation a laissé faire. Un homme dans sa situation ne devrait pas être à de telles fonctions alors qu’il compte y rester jusqu’à la limite de sa vie, ce qui est en soi une preuve d’altération mentale », écrit-il. La polémique n’est donc pas encore enterrée.


                Source : Algerie-part
                وإن هذه أمتكم أمة واحدة

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                • #9
                  Les pays musulmans devaient produire leur propre « laïcité », avec leurs outils cognitifs, en tenant compte des résonances culturelles et psychologiques des idées et des mots, mais ils ne l’ont pas fait car ils n’ont pas trouvé à ce jour le chemin intellectuel qui y mène, le trou de souris par lequel passer.
                  Voila pourquoi ces pays n'ont pas trouvé le chemein intellectuel qui y mene a ce trou de souri:
                  Mahathir bin Mohamad, surnommé Docteur M, ancien Premier ministre de la Malaisie et qui s’est notoirement inspiré de la pensée de Malek Bennabi, a dit un jour « Quand je veux prier, je me tourne vers la Mecque et quand je veux développer le pays, je me tourne vers le Japon ».
                  7) Pour mieux protéger l’islam et les musulmans, ne faudrait-il pas mettre des frontières entre les théologiens (les « ulémas ») et les politiciens et hommes de pouvoir, qu’ils soient rois ou présidents ?

                  Là est le problème car on constate avec le recul que ni la laïcité préconisée par l’idéologie baathiste (Irak-Syrie), ni les politiques de libéralisation à l’occidentale menées en Turquie (Atatürk), en Iran (Pahlévis), en Tunisie (Bourguiba), ni les politiques « révolutionnaires » suivies en Egypte (Nasser), en Algérie (Boumediene) et en Libye (Kadafi), n’ont donné de résultats satisfaisants. Seules ont réchappé les monarchies archaïques et réactionnaires.
                  Il est une constante dans les monarchies arabo-musulmanes que le pouvoir est réparti entre la famille régnante et les ulémas. Les premiers s’occupent de politique, et les seconds des âmes. Cette complicité entre le sabre et le « ilm » (savoir religieux) a protégé les systèmes monarchiques de la contestation sociale et politique parce qu’ils sont censés être conformes à l’archétype islamique, alors que dans les régimes dits progressistes la religion a été éloignée des affaires publiques et abandonnée à la rue qui s’en est emparée pour la retourner contre le pouvoir.
                  Oui un débat pas seulement avec KD,mais avec d'autres penseurs ferait beaucoup de bien.

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