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Procureur de la CPI jure ne pas être un évadé ou un fraudeur fiscal

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  • Procureur de la CPI jure ne pas être un évadé ou un fraudeur fiscal

    Les deux sociétés offshore d’Ocampo, Yemana Trading (îles Vierges britanniques) et Tain Bay (Panama), détenaient un compte en banque à Genève, au sein de la filiale suisse du Crédit agricole, où l’ancien procureur se rendra personnellement en juillet 2013 pour y chercher 40 000 dollars en espèces. Il faut préciser que, quatre ans après avoir quitté la CPI, Ocampo jouissait d’un patrimoine officiel non négligeable, d’après nos informations : une propriété à La Haye de 1,2 million d’euros, cinq demeures en Argentine (où il est né) évaluées à 2,2 millions de dollars et au moins un million de dollars en banque.

    Plusieurs échanges de mails entre Ocampo et le Crédit agricole montrent par ailleurs le soin pris par le procureur alors en poste pour dissimuler ses affaires, qu’il imaginait très rentables, comme cela ressort de certains documents.

    Exemple : le 21 décembre 2009, quelques jours avant Noël, le procureur en chef de la CPI écrit à son conseiller du Crédit agricole : « J’aimerais trouver un moyen direct d’acheter du pétrole en janvier. » Mais le banquier refroidit ses ardeurs. Pour négocier du pétrole brut, Ocampo doit investir au moins 5 millions de dollars, lui dit-il. Le banquier lui conseille de miser plutôt dans des fonds d’investissement.

    Ce jour-là, les deux hommes discuteront d’un autre sujet, beaucoup plus embarrassant encore. Sous pression de l’OCDE, les îles Vierges ont dû modifier leur législation dans le but de rendre plus difficile, à partir du 31 décembre 2009, l’anonymisation des bénéficiaires économiques des sociétés-écrans. Les échanges entre Ocampo et son banquier montrent que le procureur, bien conscient des risques d’une telle nouvelle législation, a souhaité soustraire ses affaires à la curiosité. Et le temps presse : les nouvelles règles doivent entrer en vigueur dans quelques jours seulement.

    « J’ai contacté le gérant de Yemana Trading à Mossack Fonseca », lui annonce son banquier. Pour dissoudre la compagnie dans les îles Vierges, Ocampo doit renvoyer ses « certificats originaux » de propriété à Mossack Fonseca, lui explique-t-il. Le procureur remercie son conseiller pour son aide et prend soin de faire toutes les diligences nécessaires afin d’éloigner sa société des îles Vierges et d’un risque d’exposition. « J’ai parlé aux gens de Mossack Fonseca pour ouvrir une société au Panama », écrit Ocampo quelques jours plus tard à son conseiller du Crédit agricole. « Ils m’ont dit qu’ils pouvaient le faire en 48 heures », souffle-t-il, manifestement rassuré.

    Résultat : tandis que la réglementation entre en vigueur début 2010 dans les îles Vierges, Yemana Trading est désactivée.

    Ocampo est, semble-t-il, un homme qui a beaucoup d’ambitions… financières. Quand en juin 2015, l’ancien procureur met un terme aux activités de Tain Bay au Panama, un employé du Crédit agricole lui demande s’il veut continuer d’utiliser les services de la banque. Ocampo répond qu’il veut d’abord « faire quelques millions supplémentaires ».

    Interrogé le 25 septembre par l’EIC sur ses multiples sociétés, à l’occasion d’un déplacement à Londres, Luis Moreno Ocampo a d’abord déclaré : « Je ne crois pas que cela soit vos affaires [...] Ce sont des choses privées. » Avant de s’enferrer dans des explications aussi étonnantes que confuses. « Pendant mon mandat [à la CPI], mon salaire n’était pas suffisant », a-t-il notamment assuré. Pour mémoire, le procureur de la CPI touchait 150 000 euros net/an, non imposables.

    Luis Moreno Ocampo : « Mon salaire n'était pas suffisant »
    « Les sociétés offshore ne sont pas illégales [...] J’ai payé mes impôts en Argentine jusqu’en 2003. Quand j’étais à la CPI, j’ai payé tous mes impôts là, mais j’avais le droit d’avoir de l’argent dehors. Je devais me protéger dans un pays [l’Argentine – ndlr] où les banques peuvent décider de prendre votre argent. Donc, oui, j’avais de l’argent hors d’Argentine. Mais regardez mes comptes, il n’y a eu aucun revenu pendant que j’étais à la CPI. Aucun », a également observé l’ancien responsable de Transparency International.

    L’ancien procureur tente de relier ses activités offshore exclusivement à son passé de prospère avocat argentin : « Comment j’ai géré mon argent quand j’étais avocat en Argentine ne vous regarde pas », dit-il. Les documents issus des Secrets de la Cour montrent pourtant que, procureur à la CPI, il a continué de s’occuper de ses affaires dans les paradis fiscaux et s’est même inquiété que son nom puisse être exposé.

    L’ex-magistrat jure ne pas être un évadé ou un fraudeur fiscal. Mais il reconnaît qu’il n’a rien déclaré de son business offshore à la CPI. Avec un argument qui laisse coi : « Ils n’ont rien demandé.

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