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La Chine débordée par ses seniors

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  • La Chine débordée par ses seniors

    Corruption, mauvaise gestion des fonds sociaux, pénurie de maisons de retraite : un cocktail explosif auquel doit faire face la Chine.

    Très loin du centre-ville trépidant, Wang Yuebing laisse couler ses journées. À 91 ans, elle continue de faire son taï chi - gymnastique chinoise traditionnelle - « quasi » quotidien dans le jardin de la maison de retraite de Minhang. Dans ce district mi-résidentiel mi-industriel du sud de la ville, peu de retraités profitent, comme elle, d'une vie jugée confortable dans un pays où à peine 15 % de la population sont assurés de toucher une pension. Ancien professeur, Mme Wang a la chance de percevoir une petite retraite de 200 euros par mois, essentiellement consacrée au paiement de sa chambre, une des plus belles de la résidence, qu'elle occupe seule.

    Déjà 150 millions de seniors


    La vieille dame aurait pu s'installer chez son fils, qui vit à Shanghaï, comme c'est encore la règle dans une société où les solidarités familiales restent souvent nécessaires à la survie. Mais, « je ne voulais pas être un fardeau pour mon fils. Avant, je vivais dans mon propre appartement. Maintenant je suis bien ici. La vie est réglée. Je lis les journaux, je joue au mah-jong et la famille vient me voir de temps en temps », explique-t-elle.

    Pour d'autres, la situation est beaucoup plus compliquée. Aux « quatre générations sous un même toit » décrites par l'écrivain chinois moderne Lao She, a succédé l'impossible formule « 1 + 2 + 4 », c'est-à-dire un enfant unique avec deux parents et quatre grands-parents à charge. En fait, les plus âgés doivent de plus en plus compter sur eux-mêmes. Mais dans les maisons de retraite, les places sont rares. « Nous avons un nombre limité de lits qui nous contraint à donner la priorité aux gens en mauvaise santé. Ceux qui ont un réel besoin d'assistance médicale, ou qui n'ont pas de famille », déplore Chen Fang, directeur de l'établissement de Minhang. Les maisons de retraite chinoises totalisent 1,5 million de lits, pour 7 millions de demandes. Les 3 millions de lits supplémentaires promis par le gouvernement d'ici à quatre ans ne suffiront même pas pour absorber la demande, forcément croissante.

    L'empire du Milieu compte près de 150 millions de seniors, dont le nombre augmente de 3 % chaque année. À ce rythme ils seront plus de 400 millions en 2040, soit un quart de la population chinoise. « Très peu de personnes ont les moyens de financer leur vie dans une maison de retraite », précise M. Chen. De fait, à Minhang, les autorités locales subventionnent déjà la moitié des dépenses de chaque patient.

    Ce poids va s'alourdir. En 2040, il y aura deux actifs chinois pour un retraité, contre dix pour un en 1993. Qui pourra supporter le fardeau financier de cette nation, vieillissante avant d'être riche ? Les innombrables affaires de corruption ont mis au jour ce casse-tête, devenu en 2006, devant les questions d'emploi, la première préoccupation des Chinois, selon un rapport de l'Académie des sciences sociales de Chine.

    Le scandale du fonds de pension de la ville de Shanghaï n'est pas étranger à cette prise de conscience. Au total, 320 millions d'euros ont été détournés dans la métropole chinoise, faisant tomber Chen Liangyu, numéro un du Parti, et de fait plus haute personnalité de la ville. Très médiatisée en Chine, l'affaire n'est pourtant qu'une illustration de la gestion désastreuse des fonds sociaux. Une enquête, lancée en août dernier par le National Audit Office (NAO), a montré que près de 710 millions d'euros ont été détournés sur l'ensemble du territoire. Par ailleurs, l'argent de ces fonds est investi dans des projets immobiliers, voire prêté à des entreprises ou investi à l'étranger. Liquidité minimum, risques maximum... Les fonds dont les performances ne dépassent pas 2 à 3 % sur les marchés domestiques, ne peuvent pas suivre la hausse moyenne des salaires, de l'ordre de 10 %. « La mauvaise gestion des fonds sociaux est à la fois le résultat d'un système inadapté et d'un manque de supervision, sans oublier la corruption », souligne Qiu Yulin, directrice de la faculté de sécurité sociale, à l'Institut du travail et des ressources humaines à l'université du Peuple.

    En clair, le gouvernement doit assainir et surtout optimiser la gestion des quelque 30 milliards d'euros de fonds de la sécurité sociale. Pékin tente de répondre au premier défi avec la mise en place d'instances de contrôles et la centralisation accrue de la gestion pour éviter que les intérêts locaux ne l'emportent. Le China's National Social Security Fund (NSSF), créé en 2000, relève le second défi. Il compte investir 20 % de ses deniers sur les marchés mondiaux, dont quelque 770 millions d'euros seront gérés par des assureurs étrangers. Il y a urgence. En 2005, la Banque mondiale chiffrait à 1 250 milliards d'euros les fonds non provisionnés des retraites chinoises.

    Par Le figaro
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