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Les utopies

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  • Les utopies

    VIII. ESSAIS UTOPIQUES LIBERTAIRES DE GRANDE DIMENSION :

    Essais-utopiques-libertaires
    Source : artic.ac-besancon.fr/histoire_geographie/HGFTP/Autres/Utopies/u5-Grand.doc

    Cette partie est plus classique dans les histoires de l’anarchisme, puisqu’elle envisage quelques grands mouvements à portée utopique évidente, dont les incontournables « makhnovtchina » en Ukraine révolutionnaire et la Révolution espagnole de 1936.
    J’y ai ajouté des mouvements moins anarchistes comme l’épopée des kibboutz (ou kibboutzim) ou les utopies communautaires mexicaines, car leur importance, ou leur actualité permettent de compléter bien des anthologies.
    Pour l’utopie libertaire, cette partie est plus ancrée dans l’histoire de l’époque contemporaine et permet de compléter fortement les ouvrages traitant de l’utopie en action.

    VIII. ESSAIS UTOPIQUES LIBERTAIRES DE GRANDE DIMENSION : 1
    A. L’AIT ANTI-AUTORITAIRE, EMBRYON DE SOCIETE FUTURE 2
    1. La Première internationale pour « l’émancipation des travailleurs par les travailleurs eux-mêmes » 2
    2. La Fédération Jurassienne : modèle et moteur des « anti-autoritaires » 4
    B. LA COMMUNE DE PARIS, UTOPIE ANARCHISTE ? 5
    1. Paris 1871 = une utopie en acte, et fondatrice 6
    2. Fortes influences communardes dans les utopies libertaires 8
    C. UNE TENTATIVE INSURRECTIONNELLE UTOPISTE AU MATESE (DANS LE BENEVENT ITALIEN) EN 1877 12
    D. LES TENTATIVES BULGARES 14
    E. QUELQUES « COMMUNES » LATINO-AMERICAINES : CHILIENNES, COLOMBIENNES, PERUVIENNES, BOLIVIENNES… 14
    1. Un mouvement précurseur du Chili en 1851 14
    2. Quelques exemples libertaires colombiens 15
    a) La « Commune libre» de la Magdalena vers 1900 15
    b) La « Commune » de Barrancabermeja (Colombie 1927) 15
    3. Uchabamba, une communauté péruvienne au pays de Cocagne (Jaula) 16
    4. Un soviétisme bolivien ? Années 1950 et 1970 et au-delà 16
    F. DES MOUVEMENTS LIBERTAIRES MEXICAINS TROP MECONNUS (ENVIRON 1860-1930)... 17
    1. Quelques aspects libertaires des cultures amérindiennes. 17
    2. Les premiers mouvements et utopies libertaires de 1860 à 1910 : 17
    3. Le zapatisme historique porte des traits libertaires évidents : 20
    4. Des traces libertaires dans le mouvement de VILLA dans le Nord 23
    5. Le magonisme, le PLM, les insurrections révolutionnaires... 23
    6. Et après ? 26
    G. LA VAGUE LIBERTAIRE RUSSE ET SOVIETIQUE : 28
    1. Traditions pré-libertaires en Russie et dans l’Empire 28
    2. Conseils et soviets « libertaires » 29
    3. Les anarchistes partisans des soviets pendant la révolution de 1917 31
    a) Les positions de l’anarcho-syndicalisme russe et panrusse. 31
    b) Les positions de l’anarcho-communisme russe et panrusse. 32
    4. « La Commune de Kronstadt » en 1921 = vers une 3ème révolution communiste libertaire 34
    5. L’Ukraine makhnoviste de 1918-1921 36
    a) L’utopie du « peuple en armes » 37
    b) Le « premier essai d’ampleur de république autogestionnaire » 39
    c) Une curieuse postérité dans la science fiction 41
    H. LA « COMMUNE » DE MUNICH (NOVEMBRE 1918 A AVRIL 1919) ET LA REPUBLIQUE DES CONSEILS BAVAROISE. 41
    1. De fortes traces libertaires dans la révolution allemande 41
    2. L’anarchisme conseilliste de Erich MÜHSAM 42
    I. DE RARES ESSAIS AUTOGESTIONNAIRES ITALIENS EN 1920-1921 43
    J. LE BRESIL ENTRE CONSEILLISME ET CONTROLE OUVRIER 1917-1920 46
    K. LA TRADITION DES KIBBOUTZ (OU KIBBUTZ, OU KIBBOUTZIM) ISRAELIENS 47
    1. Judaïsme et mouvement libertaire 47
    2. L’utopie du kibbutz et ses traces libertaires 48
    a) Premières analyses et propositions 48
    b) La réalité du kibboutz et ses évolutions 50
    L. LES « COLLECTIVITES » ESPAGNOLES : VERS LE COMMUNISME LIBERTAIRE... 53
    1. Des traces communautaires espagnoles anciennes... 54
    2. L’idéal du communisme libertaire : anticipations 54
    3. Les « collectivités » libertaires de 36-39 : « une utopie réalisée » 54
    a) Une révolution sociale d’ampleur dans la Guerre civile 54
    b) Questions de définitions et de classifications… 54
    c) Le problème de la légalisation 54
    d) Conclusion partielle 54
    4. L’utopie du « peuple en armes » = « le rêve en armes ». 54
    5. Rares prolongements du rêve libertaire sous le franquisme 54
    M. QUELQUES MOUVEMENTS RESISTANTS & UTOPIQUES ITALIENS 54
    1. Un premier mouvement populaire en 1892-94 : les Fasci dei Lavoratori 54
    2. La résistance face à la montée du fascisme 54
    3. La lutte armée à l’extérieur et l’engagement en Espagne 54
    4. La résistance durant le deuxième conflit mondial 54
    5. Traces utopiques et révolutionnaires dans la résistance libertaire et l’œuvre de l’immédiate après-guerre 54
    6. Conseillisme et mouvements de base depuis les années 1960 54
    N. HONGRIE 1956 « PREMIERE REVOLUTION ANTITOTALITAIRE » ? 54
    O. LES ESSAIS DE VINOBA BHAVE EN INDE 54
    P. 1968 : UNE NEO-UTOPIE LIBERTAIRE EN ACTE ? 54
    1. Des traces anarchistes multiples… 54
    2. Un mouvement d’esprit utopique et libertaire ? 54
    3. Des formes d’organisations liées aux utopies libertaires et autogestionnaires 54
    Q. UN PORTUGAL QUI SE DECOUVRE LIBERTAIRE EN 1974 54
    1. La « révolution des œillets » et son arrière plan 54
    2. Le Portugal de 1975 entre autogestion, cogestion et contrôle ouvrier 54
    R. UNE ARGENTINE LIBERTAIRE A REDECOUVRIR 54
    1. Un anarcho-syndicalisme de grande ampleur (fin XIX° – début XX°) 54
    2. Des mouvements « autogestionnaires » (?) récents 54
    S. LES COMMUNAUTES « NEOZAPATISTES » RECENTES DU CHIAPAS ET D’AILLEURS... 54
    1. Le Chiapas néozapatiste et parfois libertaire 54
    2. Autres fronts plus ou moins libertaires dans le Mexique contemporain - La Commune d’Oaxaca (2006) 54

    « La révolution est l’utopie qui passe à l’action, mais (qui) se nie comme utopie en se réalisant. Triomphante elle devient une nouvelle topie, diverse de la précédente » et engendre donc de nouvelles utopies. Les grands courants réformateurs ou révolutionnaires liés à l’anarchisme n’ont pas échappé à cette règle.
    A. L’AIT ANTI-AUTORITAIRE, EMBRYON DE SOCIETE FUTURE
    1. La Première internationale pour « l’émancipation des travailleurs par les travailleurs eux-mêmes »
    L’Association Internationale des Travailleurs, plus connue sous le nom de Première Internationale, regroupa un micro milieu de militants très diversifiés de par leurs origines sociales et nationales, et par leurs doctrines. Microcosme pluraliste aux influences multiples, il vit l’imprégnation forte des blanquistes et proudhoniens mutuellistes lors de sa fondation vers 1864-66, puis des collectivistes anarchistes se regroupant auprès de BAKOUNINE ensuite, qui s’opposèrent aux socialistes étatistes surtout marxistes. Mais beaucoup d’autres nuances s’y font jour, et l’analyse purement idéologique de l’AIT est chose parfois vaine.
    Analyser rapidement l’AIT est essentielle, non pas pour refaire une histoire déjà largement entreprise et diversifiée, mais parce que les débats de l’AIT sont liés à la naissance de l’anarchisme historique. Ce qui se fait, se dit et s’écrit autour des années 1860-1870 va se retrouver sous des formes démultipliées et diversifiées dans toute l’histoire du mouvement ouvrier libertaire, et dans ses propositions utopiques.

    A suivre...
    Tuer ce monstre le temps, n'est-ce pas l'occupation la plus ordinaire et la plus légitime de chacun ?
    Charles Baudelaire ; Le spleen de Paris, Le galant tireur (posthume, 1869)

  • #2
    Les utopies (suite)

    Dès 1870, les internationaux belges d’abord, puis espagnols, affirment que l’AIT porte en son sein les « germes » de la société future (« sociedad del porvenir »). Dans un écrit théorique, traduit du français en espagnol dans La Solidaridad de Madrid, le 05/03/1870, Les institutions actuelles de l’Internationale – Las instituciones actuales de la Internacional, bajo el punto de vista del porvenir sont vues comme opératoires pour l’avenir, car « l’Internationale porte en elle la régénération sociale ». Les militants belges se « proposent de démontrer que dès aujourd’hui l’Internationale offre parfaitement le type de société de l’avenir et que ses diverses institutions, bien sûr en tentant compte des modifications nécessaires, formeront l’ordre social futur » avec à la base, la section de village ou de quartier, et un Comité administratif pour exécuter les décisions. Un regroupement fédéral (Conseil Fédéral) regroupent les représentants des sections, des sociétés de résistance et des caisses d’entraide. Les coopératives de consommation, un crédit gratuit et une « Banque d’échange » assurent une économie solidaire. Le fédéralisme dépasse les frontières, sous le contrôle d’un « Conseil Général International », dont le rôle se réduit à une diplomatie basique .
    Dans cette optique, « la Fédération locale (composée des sections de métiers de la localité) constitue la commune libre de l’avenir – Comuna Libre del Porvenir » ; cette formule de 1872 devient le principal objectif et la forme essentielle du mouvement libertaire ibérique.
    Les anti-autoritaires sont donc très nettement majoritaires numériquement dans l’AIT, mais pas encore pour le nombre de délégués.

    Le dernier congrès (le IX°) de cette Internationale libertaire à lieu à Verviers (Belgique) en septembre 1877. L’ultime congrès prévu en 1878 n’est pas réalisé. Le départ du principal animateur et écrivain, James GUILLAUME, et le déclin global des sections en sont les deux causes principales.

    B. LA COMMUNE DE PARIS, UTOPIE ANARCHISTE ?
    La Commune est revendiquée par tous les mouvements socialistes et révolutionnaires. Les anarchistes ne sont pas en reste, légitimement, puisqu’ils font souvent de l’expérience communaliste la première réalisation de « comune libertaria » , en reprenant et développant le texte de BAKOUNINE sur l’évènement : La Commune de Paris et la notion de l’État . La Commune parisienne devient donc le précurseur de la Commune du futur, comme l’écrit l’anarchiste bulgare Georgi GRIGORIEV (BALKANSKI) en 1961 (La Commune de Paris et la Commune de demain) .
    Il faut donc être prudent, car tous les mouvements révolutionnaires actifs ont fait de la Commune une sorte de modèle, mais malheureusement en le réécrivant parfois : « chacun modelait le mouvement parisien selon ses propres désirs » confirme MALATESTA ; et les bakouninistes « accentuèrent, exagérèrent pour raison propagandiste le caractère socialiste, voire anarchiste, largement décentralisateur et fédéraliste… » .
    L’impact de la notion de Commune libre et autonome doit beaucoup à PROUDHON et avant lui à une partie des fouriéristes. En 1839 Jan CZYNSKI dans l’Avenir des ouvriers rêvait déjà d’édifier une « commune modèle » car la commune « c’est la pierre fondamentale de l’édifice social » .
    1. Paris 1871 = une utopie en acte, et fondatrice
    Dès septembre 1870, à Lyon, BAKOUNINE tente une première tentative « communaliste » avec d’autres disciples comme Albert RICHARD ou le russe Armand ROSS (Mikhaïl Petrovitch SAZIN). Il anime le Comité fédéral de la Croix-Rousse et celui de la Guillotière. Le Manifeste de la Fédération Révolutionnaire des Communes du 28/09/1870, un des premiers textes libertaires, n’empêche pas le désastre de l’insurrection. MARX, toujours perfide, saura s’en servir pour se gausser de l’anarchisme révolutionnaire, ce qui est très facile pour un penseur qui ne se mêle pratiquement jamais aux mouvements populaires.

    la Commune de Paris participent bien des proudhoniens ou des proches de ce penseur important mort peu auparavant (1865), mais dont les idées sont alors largement diffusées ; c’est le cas de cet autre comtois qu’est Gustave COURBET notamment, et qui a un grand rôle dans la Commune à un poste équivalent à celui de ministre de la culture. Comme VALLÈS, qui lui aussi reconnaît parfois son proudhonisme, il chante la fête parisienne, tout en étant reconnaissant à PROUDHON pour ses anticipations « Ah ! Paris, Paris la grande ville, vient de secouer la poussière de toute féodalité. Les prussiens les plus cruels, les exploiteurs du pauvre étaient à Versailles. La révolution est d’autant plus équitable qu’elle part du peuple. Ses apôtres sont ouvriers, son Christ a été PROUDHON » . Parmi les artistes, COURBET tente de développer les principes fédératifs et autogestionnaires issus du proudhonisme en demandant aux intéressés de gérer eux-mêmes toutes les institutions artistiques qui seraient ainsi émancipées de l’État.
    L’idée d’autonomie communale, d’auto-administration exprimée en 1871 est bien dans la droite file du proudhonisme et anticipe les écrits anarchistes ultérieurs. Elle est revendiquée, de manière modérée, par les BESLAY, MURAT, voire par le gendre de MARX lui-même Charles LONGUET. Mais le proudhonisme, trop modéré, trop non-violent est déjà en perte de vitesse pour des militants plus déterminés.
    Enfin des militants proches, ou futurs membres, de l’anarchisme, ont joué un certain rôle durant les évènements : du bref passage d’Élisée RECLUS (engagé avec le 109° Bataillon), au martyre d’Eugène VARLIN (internationaliste ami de BAKOUNINE et premier grand fondateur du syndicalisme français ; 1839-1871) en passant par la participation un peu « bravache » de Louise MICHEL sur les barricades et surtout devant le VI° Conseil de Guerre de Versailles en décembre 1871 (« j’appartiens toute entière à la révolution sociale », « si vous n’êtes pas des lâches, tuez moi ! »), nombreux sont les noms cités dans toute histoire de l’utopie anarchiste.
    Louise MICHEL, aux multiples rôles, va pour longtemps rester un symbole de la Commune libertaire : institutrice dans le XVIII° arrondissement, agitatrice permanente, présidente du Comité de Vigilance des citoyennes du XVIII° arrondissement, porteuse de fusil et combattante (61° Bataillon de Montmartre), responsable des ambulancières… Le 18 mai 1871 encore, elle préside la séance du Club de la Révolution ! Lors de la Semaine sanglante, elle est constamment sur les barricades de Montmartre : elle combat surtout sur la barricade de la Chaussée Clignancourt. Recherchée après la défaire, pour sauver sa mère emprisonnée à sa place, elle se livre sans hésiter. La prison (Satory, Versailles, Arras, Auberive) et le bagne (déportation en Nouvelle Calédonie depuis décembre 1873, matricule 2182, jusqu’à l’été 1880) vont continuer à forger sa légende et renforcer sa popularité. Dès le lendemain du procès, le poème Viro Major chante la gloire de Louise.
    Toujours du côté des femmes, l’amie de VARLIN, et internationaliste depuis 1866, Nathalie LEMEL, née DUVAL (1827-1921) est proche des anti-autoritaires. C’est surtout André LÉO (1824-1900), de son vrai nom Léodile BÉRA (puis Léodile CHAMPSEIX et enfin Léodile MALON), qui est de plus en plus considérée comme une auteure anarchisante et utopiste. Margueritte Victoire TYNAIRE (née GUERRIER 1881-1898), future aide de plume de Louise MICHEL sous le pseudonyme de Jean GUÊTRÉ (Cf. Les méprisés, La misère), tient un rôle essentiel sous l’Empire et la Commune ; elle est liée à l’Internationale et à VARLIN depuis 1865, et est grâce à Édouard VAILLANT (poste ministériel de l’enseignement), inspectrice des écoles de filles du XII° arrondissement sous la Commune.
    Dans les milieux artistiques et littéraires, en plus de Gustave COURBET et de Jules VALLÈS (1832-1885), on peut ajouter l’ami de Louise, Henry BAUER (1851-1915), fils illégitime d’Alexandre DUMAS, qui reste fidèle à ses engagements communards, et défend ensuite le théâtre libre, aux côté de libertaire comme Lucien DESCAVES. Il va côtoyer dans les théâtres et cabarets culturels et sociaux, l’infatigable Maxime LISBONNE (1839-1905), très ouvert cependant au niveau politique. Jean-Baptiste CLÉMENT, le poète né en 1837, illustre auteur du Le Temps des cerises, sera un compagnon de route des libertaires, mais également de tout le mouvement socialiste, jusqu’à sa mort en 1903. Quant à Élie RECLUS, le frère d’Élisée, il assume une charge essentielle pour la préservation des ouvrages de la Bibliothèque nationale.

    Fortes influences communardes dans les utopies libertaires
    De la Commune à l’anarchie . C’est ce que confirme aujourd’hui l’analyse de Caroline GRANIER pour qui « la Commune, malgré sa brièveté, joue un rôle capital dans la formation de la doctrine et de l’imaginaire anarchistes, en marquant l’acte de naissance officiel de l’anarchisme » .
    En effet, dès 1871 le mot « commune » désigne à la fois une référence indispensable à défendre, à honorer et à citer (La Commune de Paris), et une méthode de démocratie directe à appliquer ainsi qu’un choix de société reposant sur des entités autonomes et fédérées. L’utopie « communarde » ou « communaliste » (MOSS parle de « République communaliste décentralisée » ) ou « municipaliste » va désormais inspirer et enrichir toutes les utopies « soviétistes » ou conseillistes, communistes libertaires et autogestionnaires…
    Il est étonnant de voir combien d’utopies écrites (Cf. les exemples cités dans les parties sur les utopies) prennent comme point de départ un mouvement très proche de celui de la Commune, voire la Commune elle-même, ou revendiquent ouvertement d’en proposer une revanche victorieuse. Il y a là une histoire de l’influence communarde à creuser et sans doute tout simplement à écrire.

    Même sans l’aspect utopiste, ou très partiellement, la plupart des écrivains libertaires, mêlés de près ou de loin à l’évènement, vont faire de leurs « récits-témoignages » « l’expression d’une utopie » , partiellement réalisée, et souhaitée pour un proche avenir, parfois revanchard. C’est Élisée RECLUS qui, comme souvent, en présente la synthèse la plus assurée, puisque dans sa réponse à L’enquête sur la Commune de la Revue Blanche de 1897, il affirme « que partout le mot ‘’Commune’’ a été compris dans le sens le plus large, comme se rapportant à une humanité nouvelle, formée des compagnons libres, égaux, ignorant l’existence des frontières anciennes et s’entraidant en paix d’un bout du monde à l’autre » . Pour illustrer son propos, on peut mettre en avant le texte à la fois commémoratif et utopique de William MORRIS, The pilgrims of hope – Les pélerins de l’espérance, qu’il publie en 1885 dans la revue Commonweal, journal d’une Socialist League de plus en plus dominée par un courant anarchiste à la fin des années 1880. Le frère d’Élisée, Élie, a lui aussi contribué à écrire l’histoire de La commune au jour le jour .
    Dans sa thèse très fouillée de 2003, Caroline GRANIER s’est largement penchée sur ces acteurs-analystes du mouvement parisien, qui utilisent le roman et le théâtre, mais surtout la chanson, comme supports essentiels.
    Dès 1871, c’est l’auteure André LÉO qui écrit le tumultueux La guerre sociale sur l’expérience communarde. Avec La Commune de Malenpis de 1874, elle propose une réflexion pertinente sur une expérience révolutionnaire dont le nom rappelle largement la révolution de 1871.
    La même année, Gustave LEFRANÇAIS publie à Neuchâtel Étude sur le mouvement communaliste à Paris en 1871 . Ce terme (« communaliste ») est définitivement lancé, et sera largement repris plus tard par une grande partie du mouvement anarchiste. LEFRANÇAIS va constamment ramener le souvenir de son expérience parisienne dans ses ouvrages ultérieurs, comme le plus achevé, ses mémoires intitulées Souvenirs d'un révolutionnaire en 1902 ou son pamphlet La Commune et la révolution de 1896 . Ses Souvenirs, publiés dans la maison libertaire Les Temps nouveaux, est en outre préfacé par Lucien DESCAVES, un des écrivains les plus proches de l’anarchisme.
    Toujours en 1871, Prosper LISSAGARAY analyse l’impact des 8 journées de mai derrière les barricades , avant de formuler plus expressément ses remarques dans l’ouvrage le plus estimé des premiers écrivains de la Commune : Histoire de la Commune de Paris, qui sort en 1876. Une réédition recherchée, préfacée par le syndicaliste révolutionnaire Amédée DUNOIS, sort en 1929 à la Librairie du Travail.
    Et encore en 1871, dans la librairie familiale du fondateur de l’anarchisme en Suisse (GUILLAUME fils), Benoît MALON, alors de plus en plus anarchiste, se penche sur La troisième défaite du prolétariat français .
    En 1872, dans une pièce en « 5 actes et 11 tableaux » qui n’est pas jouée, Jules VALLÈS relance « son cri » via rôles interposés. C’est La Commune de Paris, pièce inédite, publiée par les EFR.

    A suivre..
    Tuer ce monstre le temps, n'est-ce pas l'occupation la plus ordinaire et la plus légitime de chacun ?
    Charles Baudelaire ; Le spleen de Paris, Le galant tireur (posthume, 1869)

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