Annonce

Réduire
Aucune annonce.

Yahia belaskri, a propos de «mohammed dib, un ecrivain de lumiere»

Réduire
X
 
  • Filtre
  • Heure
  • Afficher
Tout nettoyer
nouveaux messages

  • Yahia belaskri, a propos de «mohammed dib, un ecrivain de lumiere»

    YAHIA BELASKRI, A PROPOS DE «MOHAMMED DIB, UN ECRIVAIN DE LUMIERE» : «Il s’agissait de poser un regard amoureux sur son œuvre»


    YAHIA BELASKRI, A PROPOS DE «MOHAMMED DIB, UN ECRIVAIN DE LUMIERE» : «Il s’agissait de poser un regard amoureux sur son œuvre»
    Paru aux éditions Sédia, «Mohammed Dib, un écrivain de lumière» est un recueil collectif qui réunit les textes de quinze contributeurs. Dans cet entretien, Yahia Belaskri, qui a dirigé le livre, revient sur son élaboration et sur les différentes facettes de Dib abordées et célébrées.

    Reporters : Mohammed Dib, un écrivain de lumière» est un recueil coordonné par vos soins qui réunit écrivains et universitaires autour de Mohammed Dib. Comment est né cet ouvrage ?

    Yahia Belaskri : En fait, c’est une sollicitation de la maison d’édition, plus particulièrement l’éditrice Nacéra Khiat. Je crois qu’elle a à cœur avec sa maison de rendre hommage aux grands écrivains algériens en publiant de tels ouvrages, à la suite du livre coordonné par Amel Chaouati sur Assia Djebar. Bien entendu, j’ai eu une petite hésitation, vite balayée par mon désir d’aller à la rencontre de cet écrivain que je n’ai pas eu le plaisir de rencontrer de son vivant. Les éditions Sedia m’ont laissé toute liberté de choisir les contributeurs.

    Comment avez-vous procédé avec les contributeurs ? Y avait-il un objectif éditorial ?

    C’était clair dès le début : rendre hommage à l’écrivain, son œuvre. J’ai demandé aux contributeurs (éventuels) s’ils aimaient Dib et ses textes. A partir de là, il s’agissait de poser un regard amoureux sur son œuvre. J’ai sollicité des amis (ies), des écrivains et universitaires – très peu –, certains ont répondu, d’autres ne pouvaient pas pour des raisons diverses, manque de temps, en résidence, etc. Celles et ceux qui ont écrit l’ont fait avec joie. Parce qu’ils aimaient son œuvre.

    Pourquoi «un écrivain de lumière» ?

    Ah ! Mais c’est évident. Vous avez vu l’homme ? Il dégage du charisme, de la sérénité. Il est lumineux ! L’écrivain n’est pas en reste, car pour ceux de ma génération, c’est à lui et Mouloud Feraoun que nous devons la lumière, je parle de la littérature. Les textes de Dib sortent durant la guerre d’Algérie et de qui il parle ? De nous, de moi, sous la colonisation. Dans l’obscurité coloniale, soudain nous voilà «au-devant de la scène», comme le dit Hubert Haddad, acteurs et non plus fantômes furtifs dans la fiction coloniale. Par ailleurs, la lumière est importante chez Dib, et fondamentale dans le soufisme (voir le verset intitulé «Lumière» dans le Coran).

    Assia Dib-Chambon, la fille de Mohammed Dib, signe un texte émouvant et intime, dans lequel elle évoque sa «quête» de lire son père, et estime que des aspects biographiques se retrouvent dans son œuvre...

    Assia est une femme d’exception qui, avec sa famille, s’occupe de l’héritage littéraire de son père. C’est une femme sensible qui n’a pas beaucoup écrit sur son père ; elle a dû le faire à deux ou trois reprises seulement. Ce texte, émouvant, tendre, nous permet précisément de la découvrir, elle, dans cette relation à l’écrivain qui se trouve être son père. C’est en cela que c’est émouvant. Quant aux aspects autobiographiques, cela est valable pour tout écrivain. Un écrivain essaime ses textes des traces de sa trajectoire, de sa vie. C’est valable pour Dib.

    Anouar Benmalek livre un texte très personnel aussi, et évoque notamment sa correspondance avec Dib, en partageant quelques lettres...

    Anouar Benmalek, tout comme Habib Tengour d’ailleurs, qui n’est pas dans ce livre, a eu une relation privilégiée avec Dib. D’abord, il faut souligner qu’Anouar envoyait à Dib ses livres –ce qui est rare. C’était une marque de respect et d’admiration. Egalement la marque de reconnaissance d’un aîné talentueux et ainsi s’inscrire dans son héritage littéraire et intellectuel. Anouar nous livre dans son texte des moments d’échanges entre eux, une correspondance amicale, faite de respect mutuel.

    Il y a beaucoup de poésie, également, dans le recueil. Est-ce que la meilleure façon de dire Dib c’est par la poésie ?

    Avant tout, Mohammed Dib est poète. Son œuvre romanesque l’a fait oublier mais, il est «pleinement poète», dirait Tengour. Son influence est grande sur les écrivains de ma génération et, parmi eux, les poètes se reconnaissent dans son héritage. Soumya Amar-Khodja, Amine Khan ou Ali Chibani –même s’il est jeune– sont dans cette ligne. Que dire d’Anne Mulpas, poète française, qui n’a pas la même histoire et qui a été bouleversée par ses textes. Lorsque je l’ai invitée à se joindre à cette aventure, elle a eu les mots suivants : «Je ne sais plus trop quoi penser, je crois que j’ai le cœur et la tête chavirés. Je n’ai pas de distance, pas eu le temps de laisser reposer les mots. A bien des égards, le chemin qu’a suivi Dib me touche terriblement, profondément.» Ainsi, les poètes se reconnaissent en Dib. Dire Dib c’est évoquer la poésie, indubitablement.

    Ce qui ressort de l’ouvrage est que l’écriture de Dib est transcendante. Les textes nous renvoient toujours à son écriture, à l’imaginaire, à la création, à la langue, à l’autre. Hervé Sanson qualifie d’ailleurs l’œuvre de Dib d’«hétérogène» et «plurielle». Comment la définiriez-vous vous-même ?

    L’écriture de Dib est plurielle et forte. A la trilogie algérienne a succédé le temps de l’onirisme. Il revient à l’Algérie avec le projet d’une nouvelle trilogie, il ne publiera que deux. Ensuite c’est la Norvège qui entre dans son univers, d’où une trilogie nordique. L’écriture réaliste des premiers ouvrages laisse place à une littérature de l’imaginaire foisonnante. Les textes d’Hervé Sanson et Ali Chibani essaient de donner un aperçu de cette pluralité de l’œuvre.

    Vous êtes vous-même écrivain, quelle a été l’influence de Dib et de son œuvre sur vous ?

    Mohammed Dib, comme Kateb Yacine, Mouloud Feraoun et tous les autres font partie de mon héritage et je me revendique pleinement d’eux. Je me suis fait à partir de cette pâte –à l’image de tous les écrivains algériens d’aujourd’hui, le nier serait à tout le moins prétentieux. Jeune adolescent, j’ai lu Dib, Kateb –je n’avais rien compris à Nedjma ; c’est beaucoup plus tard que j’y suis revenu et saisi le propos du poète–, Feraoun, plus tard Boudjedra, et ceux qui ont suivi. Je suis pétri par leur imaginaire. Grâce aux éditions Sedia, j’ai pu me replonger dans l’œuvre de Dib et proposer avec mes amis (ies) cet ouvrage mais je compte aussi aller sur les pas de Kateb Yacine, dans un ouvrage, non plus collectif, mais personnel, pour évoquer cet immense poète. Pour revenir à Mohammed Dib, je suis très heureux de cet ouvrage qui réunit nombre d’écrivains remarquables que j’apprécie et qui m’ont fait l’honneur de me rejoindre dans cette belle aventure. Je peux vous dire que tous, Anouar Benmalek, Abdelkader Djemaï, Alain Mabanckou, Hubert Haddad, Amine Khan, Soumya Amar-Khodja, Anne Mulpas, Ali Chibani, Nathalie Philippe, Guy Dugas, Hervé Sanson, Abdelmadjid Kaouah, Abdecelem Ikhlef, tous ont répondu spontanément à mon appel. Parce que Dib est «une maison de lumière».

    p12* «Mohammed Dib, un écrivain de lumière», sous la direction de Yahia Belaskri, avec : Soumya Ammar-Khodja, Yahia Belaskri, Anouar Benmalek, Ali Chibani, Assia Dib-Chambon, Abdelkader Djemaï, Guy Dugas, Hubert Haddad, Abdecelem Ikhlef, Abdelmadjid Kaouah, Amin Khan, Alain Mabanckou, Anne Mulpas, Nathalie Philippe et Hervé Sanson. Recueil, 156 pages. Editions Sédia, Alger, octobre 2017. Prix : 700 DA.

    Sara Kharfi-REPORTERS.DZ
    The truth is incontrovertible, malice may attack it, ignorance may deride it, but in the end; there it is.” Winston Churchill
Chargement...
X