Ian Hamel a rencontré Lucia Canovi, qui s'apprête à publier un livre sans concessions sur Tariq Ramadan, « Le double discours. Tariq Ramadan le jour, Tariq Ramadan la nuit ».
par Ian Hamel - 5 novembre 2017
“Quand j’ai publié mon livre « La vérité sur Tariq Ramadan » en 2007 (1), l’intéressé a fait savoir qu’il ne l’aimait pas du tout. Ce qui était son droit le plus strict. Mais il a prétendu qu’il ne m’avait jamais parlé, ce qui était un mensonge, d’autant plus grossier que je l’avais interviewé à plusieurs reprises dans la presse française et suisse. A la suite de la publication de cet ouvrage, de nombreuses jeunes femmes sont entrées en contact avec moi. Elles tenaient toutes le même discours : Tariq Ramadan n’était qu’un Tartuffe, qui tenait un discours rigoriste et puritain, alors qu’il menait joyeuse vie.
Loin de s’enfermer des heures dans des bibliothèques universitaires, il passait le plus clair de son temps en bonne compagnie. Toutes le décrivaient comme se moquant de l’islam en privé. L’une d’entre elles, Majda, m’avait rencontré à Paris en compagnie de Nicolas Beau, alors rédacteur en chef du site Bakchich aujourd’hui disparu. « Alors qu’il est marié et père de quatre enfants, il m’a demandé de m’épouser en me jurant qu’il était divorcé devant dieu et devant les hommes. Autrement, je ne l’ai jamais vu prier. Manger hallal ? “Hallal ou pas, ce n’est qu’un détail“, répétait-il », nous avait raconté cette jeune femme d’origine marocaine.
Avant de publier mon livre, je connaissais, bien évidemment, la réputation de dragueur de Tariq Ramadan, alors qu’il enseignait dans un collège à Genève les valeurs religieuses les plus réactionnaires. Mais je n’avais pas franchi la ligne jaune de mettre en contradiction sa vie privée avec ses préceptes publics.
Lucia Canovi,une agrégée de lettres qui vit à Alger, prend ce risque en publiant très prochainement un livre sur les incohérences et les duplicités de ce prédicateur doué dont l’écho est réel dans les banlieues françaises.
Ian Hamel
Ian Hamel. Vous annoncez sur votre page Facebook que vous écrivez un livre sur Tariq Ramadan, intitulé « Le double discours. Tariq Ramadan le jour, Tariq Ramadan la nuit », qui doit paraître en 2017. Pourquoi vous intéressez-vous à ce personnage ?
Lucia Canovi. L’une de mes toutes premières impressions de l’Islam est liée à un CD – une biographie du Prophète, que la paix soit sur lui, écrite par Yusuf Islam et lue par la belle voix de Tariq Ramadan. Au départ, je voyais donc l’islamologue suisse comme une figure très positive.
Puis, j’ai lu (ou plutôt, essayé de lire) quelques-uns de ses livres, qui m’ont déçu : style ampoulé, propos abstrait, déconnecté du réel… A cette époque, je n’en croyais pas moins que Tariq Ramadan était un musulman sincère. Quelques années plus tard, l’étape suivante a été franchie lorsqu’une musulmane croisée au Salon du Bourget m’a expliqué que Tariq Ramadan cherche à refondre l’Islam pour le rendre compatible avec les aspirations du Nouvel Ordre Mondial. Naturellement, je ne l’ai pas crue, mais ma curiosité a été piquée.
J’ai donc fait quelques recherches sur Internet, et découvert un petit pamphlet anonyme intitulé « Tariq Ramadan, cheval de Troie de la franc-maçonnerie ». L’auteur y prouve, citations à l’appui, que les idées de Tariq Ramadan sont relativistes et œcuméniques, et donc en total désaccord avec le message de l’Islam.
Je travaillais alors à l’écriture d’un livre, L’Islam au-delà des apparences, et j’en profitai pour ajouter un chapitre où je répondais aux principales idées de Ramadan, sans le désigner précisément. Je pensais alors qu’il fallait attaquer les idées sans nommer les personnes, mais je me suis aperçue par la suite que mes lecteurs ne m’avaient pas comprise, car ils ne faisaient pas du tout le lien avec Tariq Ramadan… Visiblement, je n’avais pas été assez claire.
En 2016, la sortie et le succès de son livre Génie de l’Islam m’ont donné envie de lire et d’étudier plus sérieusement Ramadan, cette fois-ci pour faire un livre entier sur ses hérésies et ses sophismes. Je me suis donc plongée dans ses ouvrages, et c’est là que j’ai commencé à saisir toute la subtilité et la perversité de sa rhétorique. Un certain passage sur le « philosophe-chasseur » pour qui la femme est « une étape dans le dépassement du corps » m’a interpellé.
D’autres passages ambigus renforçant mes soupçons, j’ai fait des recherches sur le Net, et c’est là que j’ai découvert le témoignage de Majda Laroussi, ainsi que ceux d’autres maîtresses de Tariq Ramadan. Un internaute m’a ensuite mis en relation avec une jeune musulmane qui a rassemblé de nombreuses preuves sur les aventures sordides de l’islamologue. C’est ainsi que j’ai eu, sans effort, accès à une véritable mine d’informations.
Ian Hamel. Le titre laisse clairement entendre que vous allez évoquer la vie privée de Tariq Ramadan. Ne craignez-vous pas qu’il vous fasse un procès ?
Lucia Canovi. Je le souhaite au contraire. Un procès sera l’occasion de faire enfin sortir au grand jour les témoignages et les informations choquantes qui ont été maintenus dans l’ombre jusqu’à aujourd’hui.
Ian Hamel. Plusieurs jeunes femmes ont déjà mis en cause la vie privée de Ramadan. Êtes-vous entrée en contact avec elles ?
Lucia Canovi. Oui. Parfois ce sont elles qui sont entrées en contact avec moi.
Ian Hamel. Vous devez aussi savoir que les personnes qui osent le critiquer, et plus particulièrement les musulmans, font l’objet de graves menaces. Mondafrique a déjà abordé ce sujet. N’avez-vous pas peur ?
Lucia Canovi. Suite aux vidéos que j’ai postées sur YouTube, vidéos centrées sur ses idées, j’ai d’abord reçu un long mail de Tariq Ramadan lui-même. Oui, me disait-il en substance, il n’est pas parfait, il fait des erreurs comme tout le monde, mais il faut les lui signaler en privé, pas en public, car dévoiler les défauts d’un frère n’est pas conforme aux enseignements de l’Islam… Ce mail plein d’onction et de douceur m’inquiéta un peu ; je craignais qu’il soit le prélude à des messages nettement moins amènes. Quelques semaines plus tard, conformément à mes craintes, je découvris dans ma boîte mail ce message anonyme :
« Madame Lucia Canovi,
Vous préparez un livre choc sur Tariq Ramadan. Vous dites aux éditeurs que vous allez mettre dévoilé ces perversités. Vous vous dites comme musulmane. Nous sommes en Algérie et en France. Continuez à faire votre travail qui consiste à critiquer, salir et remuer de la boue, et vous en subirez les conséquences avec votre familles et vos enfants. On laissera pas faire et on est près à tout. Occupez vous de vos affaires, s’est ce que dit l’islam. »
L’auteur de ce mail est très bien informé, puisque, effectivement, j’ai contacté de grands éditeurs parisiens en évoquant les perversités (c’est le mot que j’ai employé) de Tariq Ramadan. Autre point significatif : l’adresse mail du menaçant inconnu correspond au nom et au prénom d’une des jeunes femmes qui ont dénoncé Tariq Ramadan, le but étant, je suppose, de jeter la zizanie entre elle et moi en me donnant à penser contre toute vraisemblance que le message provient d’elle. Ce qui révèle là encore que l’auteur du mail est bien informé : il connaît le nom et le prénom de cette jeune femme et il sait (ou il se doute) que je suis en contact avec elle. J’ai par la suite reçu d’autres mails de menace en provenance de la même adresse mail.
Pour répondre plus précisément à votre question, oui j’ai eu peur au début, mais ça m’a passé. D’après une parole prophétique, « si tout le monde s’associait pour te faire du bien, ils ne pourront te faire que le bien que Dieu a déjà écrit pour toi, et sache que si tout le monde se coalisait pour te faire du mal, ils ne pourraient te faire que le mal que Dieu a déjà écrit pour toi ».
par Ian Hamel - 5 novembre 2017
“Quand j’ai publié mon livre « La vérité sur Tariq Ramadan » en 2007 (1), l’intéressé a fait savoir qu’il ne l’aimait pas du tout. Ce qui était son droit le plus strict. Mais il a prétendu qu’il ne m’avait jamais parlé, ce qui était un mensonge, d’autant plus grossier que je l’avais interviewé à plusieurs reprises dans la presse française et suisse. A la suite de la publication de cet ouvrage, de nombreuses jeunes femmes sont entrées en contact avec moi. Elles tenaient toutes le même discours : Tariq Ramadan n’était qu’un Tartuffe, qui tenait un discours rigoriste et puritain, alors qu’il menait joyeuse vie.
Loin de s’enfermer des heures dans des bibliothèques universitaires, il passait le plus clair de son temps en bonne compagnie. Toutes le décrivaient comme se moquant de l’islam en privé. L’une d’entre elles, Majda, m’avait rencontré à Paris en compagnie de Nicolas Beau, alors rédacteur en chef du site Bakchich aujourd’hui disparu. « Alors qu’il est marié et père de quatre enfants, il m’a demandé de m’épouser en me jurant qu’il était divorcé devant dieu et devant les hommes. Autrement, je ne l’ai jamais vu prier. Manger hallal ? “Hallal ou pas, ce n’est qu’un détail“, répétait-il », nous avait raconté cette jeune femme d’origine marocaine.
Avant de publier mon livre, je connaissais, bien évidemment, la réputation de dragueur de Tariq Ramadan, alors qu’il enseignait dans un collège à Genève les valeurs religieuses les plus réactionnaires. Mais je n’avais pas franchi la ligne jaune de mettre en contradiction sa vie privée avec ses préceptes publics.
Lucia Canovi,une agrégée de lettres qui vit à Alger, prend ce risque en publiant très prochainement un livre sur les incohérences et les duplicités de ce prédicateur doué dont l’écho est réel dans les banlieues françaises.
Ian Hamel
Ian Hamel. Vous annoncez sur votre page Facebook que vous écrivez un livre sur Tariq Ramadan, intitulé « Le double discours. Tariq Ramadan le jour, Tariq Ramadan la nuit », qui doit paraître en 2017. Pourquoi vous intéressez-vous à ce personnage ?
Lucia Canovi. L’une de mes toutes premières impressions de l’Islam est liée à un CD – une biographie du Prophète, que la paix soit sur lui, écrite par Yusuf Islam et lue par la belle voix de Tariq Ramadan. Au départ, je voyais donc l’islamologue suisse comme une figure très positive.
Puis, j’ai lu (ou plutôt, essayé de lire) quelques-uns de ses livres, qui m’ont déçu : style ampoulé, propos abstrait, déconnecté du réel… A cette époque, je n’en croyais pas moins que Tariq Ramadan était un musulman sincère. Quelques années plus tard, l’étape suivante a été franchie lorsqu’une musulmane croisée au Salon du Bourget m’a expliqué que Tariq Ramadan cherche à refondre l’Islam pour le rendre compatible avec les aspirations du Nouvel Ordre Mondial. Naturellement, je ne l’ai pas crue, mais ma curiosité a été piquée.
J’ai donc fait quelques recherches sur Internet, et découvert un petit pamphlet anonyme intitulé « Tariq Ramadan, cheval de Troie de la franc-maçonnerie ». L’auteur y prouve, citations à l’appui, que les idées de Tariq Ramadan sont relativistes et œcuméniques, et donc en total désaccord avec le message de l’Islam.
Je travaillais alors à l’écriture d’un livre, L’Islam au-delà des apparences, et j’en profitai pour ajouter un chapitre où je répondais aux principales idées de Ramadan, sans le désigner précisément. Je pensais alors qu’il fallait attaquer les idées sans nommer les personnes, mais je me suis aperçue par la suite que mes lecteurs ne m’avaient pas comprise, car ils ne faisaient pas du tout le lien avec Tariq Ramadan… Visiblement, je n’avais pas été assez claire.
En 2016, la sortie et le succès de son livre Génie de l’Islam m’ont donné envie de lire et d’étudier plus sérieusement Ramadan, cette fois-ci pour faire un livre entier sur ses hérésies et ses sophismes. Je me suis donc plongée dans ses ouvrages, et c’est là que j’ai commencé à saisir toute la subtilité et la perversité de sa rhétorique. Un certain passage sur le « philosophe-chasseur » pour qui la femme est « une étape dans le dépassement du corps » m’a interpellé.
D’autres passages ambigus renforçant mes soupçons, j’ai fait des recherches sur le Net, et c’est là que j’ai découvert le témoignage de Majda Laroussi, ainsi que ceux d’autres maîtresses de Tariq Ramadan. Un internaute m’a ensuite mis en relation avec une jeune musulmane qui a rassemblé de nombreuses preuves sur les aventures sordides de l’islamologue. C’est ainsi que j’ai eu, sans effort, accès à une véritable mine d’informations.
Ian Hamel. Le titre laisse clairement entendre que vous allez évoquer la vie privée de Tariq Ramadan. Ne craignez-vous pas qu’il vous fasse un procès ?
Lucia Canovi. Je le souhaite au contraire. Un procès sera l’occasion de faire enfin sortir au grand jour les témoignages et les informations choquantes qui ont été maintenus dans l’ombre jusqu’à aujourd’hui.
Ian Hamel. Plusieurs jeunes femmes ont déjà mis en cause la vie privée de Ramadan. Êtes-vous entrée en contact avec elles ?
Lucia Canovi. Oui. Parfois ce sont elles qui sont entrées en contact avec moi.
Ian Hamel. Vous devez aussi savoir que les personnes qui osent le critiquer, et plus particulièrement les musulmans, font l’objet de graves menaces. Mondafrique a déjà abordé ce sujet. N’avez-vous pas peur ?
Lucia Canovi. Suite aux vidéos que j’ai postées sur YouTube, vidéos centrées sur ses idées, j’ai d’abord reçu un long mail de Tariq Ramadan lui-même. Oui, me disait-il en substance, il n’est pas parfait, il fait des erreurs comme tout le monde, mais il faut les lui signaler en privé, pas en public, car dévoiler les défauts d’un frère n’est pas conforme aux enseignements de l’Islam… Ce mail plein d’onction et de douceur m’inquiéta un peu ; je craignais qu’il soit le prélude à des messages nettement moins amènes. Quelques semaines plus tard, conformément à mes craintes, je découvris dans ma boîte mail ce message anonyme :
« Madame Lucia Canovi,
Vous préparez un livre choc sur Tariq Ramadan. Vous dites aux éditeurs que vous allez mettre dévoilé ces perversités. Vous vous dites comme musulmane. Nous sommes en Algérie et en France. Continuez à faire votre travail qui consiste à critiquer, salir et remuer de la boue, et vous en subirez les conséquences avec votre familles et vos enfants. On laissera pas faire et on est près à tout. Occupez vous de vos affaires, s’est ce que dit l’islam. »
L’auteur de ce mail est très bien informé, puisque, effectivement, j’ai contacté de grands éditeurs parisiens en évoquant les perversités (c’est le mot que j’ai employé) de Tariq Ramadan. Autre point significatif : l’adresse mail du menaçant inconnu correspond au nom et au prénom d’une des jeunes femmes qui ont dénoncé Tariq Ramadan, le but étant, je suppose, de jeter la zizanie entre elle et moi en me donnant à penser contre toute vraisemblance que le message provient d’elle. Ce qui révèle là encore que l’auteur du mail est bien informé : il connaît le nom et le prénom de cette jeune femme et il sait (ou il se doute) que je suis en contact avec elle. J’ai par la suite reçu d’autres mails de menace en provenance de la même adresse mail.
Pour répondre plus précisément à votre question, oui j’ai eu peur au début, mais ça m’a passé. D’après une parole prophétique, « si tout le monde s’associait pour te faire du bien, ils ne pourront te faire que le bien que Dieu a déjà écrit pour toi, et sache que si tout le monde se coalisait pour te faire du mal, ils ne pourraient te faire que le mal que Dieu a déjà écrit pour toi ».
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