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Comment l’éléphant a disparu du Maroc

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  • Comment l’éléphant a disparu du Maroc

    L’éléphant de Maurétanie est décrit par Pline l’Ancien comme le plus grand des animaux terrestres. Dans l’Antiquité, il est présent en grand nombre aux alentours de Sala, près de la capitale du Maroc actuel.

    Un petit voyage sur les sites de gravures rupestres au sud de l’Atlas suffit à nous convaincre de l’ancienneté de la présence de l’éléphant sur l’espace qui correspond au Maroc actuel. Les nombreuses références à l’éléphant dans les textes de l’Antiquité attestent de sa présence durant toute cette période. Mais la fascination que cet animal exerce sur les naturalistes n’a pas empêché sa disparition à la fin de l’Antiquité.

    Il y a 15 000 ans, les chasseurs-cueilleurs d’Afrique circulent du fleuve Niger au littoral méditerranéen au milieu de la faune riche et variée de la steppe arborée. Les gravures rupestres du Sahara témoignent de l’existence de grands herbivores : hippopotames, buffles, rhinocéros, éléphants et girafes. Puis des périodes sèches et humides se succèdent. Progressivement, la désertification compartimente l’espace saharien, donnant naissance aux ergs de sable stérile. Entre le VIIe millénaire et la fin du IIe millénaire av. J.-C., on assiste à un optimum climatique. Des fleuves et des lacs occupent une partie du Sahara actuel, rendant possibles les premières expériences de domestication des espèces végétales. Les meules, les outils et les armes, les villes fortifiées et les axes de communication où circulent les hommes d’origines diverses attestent que le Sahara devient, au cours de cette période, un centre de civilisation qui rayonne vers la Méditerranée et l’Afrique subsaharienne. Les gravures rupestres nous montrent cette fois bœufs, moutons et ânes ; puis viendront, à la fin du IIe millénaire av. J.-C., les représentations du cheval. Enfin, avec l’accentuation de l’aridité aux débuts de l’ère chrétienne, c’est l’image du dromadaire qui commence à apparaître, attestant de sa récente introduction. Le Maghreb, qui avait été si intimement lié au Sahara et à l’Afrique tout au long des temps préhistoriques, se tourne alors vers le Nord, la Méditerranée et l’Europe, au moment même où son insularité s’affirme au Sud par une désertification irréversible. En conséquence, l’habitat de l’éléphant au Maghreb, séparé du gros du troupeau de pachydermes d’Afrique tropicale, se rétrécit progressivement pour ne subsister que sous la forme d’îlots résiduels. Les auteurs grecs et romains témoignent à maintes reprises de la présence d’éléphants en Maurétanie, sur les plaines atlantiques.

    Au cours de la période romaine, l’éléphant devient le symbole du continent africain. Une femme, allégorie traditionnelle de la fécondité des provinces, porte sur la tête une dépouille d’éléphant armée de défenses. Parfois, comme sur la mosaïque de la villa de Piazza Armerina en Sicile, à côté de l’éléphant, on ajoute une défense pour bien signaler la richesse qu’on tire du grand animal. La confusion est d’ailleurs possible avec l’Inde, dont le symbole est aussi l’éléphant. La présence des éléphants aux extrémités est et ouest du monde connu est, pour Aristote, la preuve qu’« il y a continuité de la région des Colonnes d’Héraclès et de la région de l’Inde ». Cette anecdote, toujours reprise par les géographes antiques, passe pour avoir inspiré Christophe Colomb dans sa recherche d’un accès direct du détroit de Gibraltar à l’Inde et à la Chine.

    Un animal fabuleux associé aux mythes de l’âge d’or

    L’éléphant des terres du Couchant a été très tôt associé aux mythes de l’âge d’or. Ainsi, quand Platon évoque dans le Critias la prospérité des terres de l’Atlantide qui « offrait une plantureuse pâture », il ne manque pas de signaler que « paissent au bord des marais, des lacs et des rivières, ou dans les forêts ou dans les plaines » toutes sortes d’animaux et, parmi eux, « une race d’éléphants très nombreuse, animal qui par nature est le plus gros et le plus vorace ». Platon, pour nous faire croire à la réalité de son mythe, plaque des connaissances vraies sur l’éléphant, celle en particulier liée à son besoin d’ingurgiter des quantités énormes de végétaux. Quand l’illustre philosophe décrit le temple de Poséidon de l’île mythique, il précise que sa « voûte était tout entière d’ivoire émaillé d’or ». Ainsi l’éléphant et son ivoire participent-ils largement de la fascination que l’Atlantide devait exercer. Or sans fascination et merveilleux, le mythe de Platon ne pouvait prendre corps. Ovide, quatre siècles plus tard, dans les Métamorphoses, décrivant le Palais du Soleil dans l’extrême Occident, imagine que « l’ivoire luisant en recouvrait le faîte ». A côté des pierres et des métaux précieux réagissant aux dernières lueurs du soleil couchant, on trouve naturellement la matière précieuse de l’ivoire. Quand le géographe antique Pomponius Mela, dans sa Description de la Terre, évoque le mythe du géant Antée, fondateur de Tanger, il donne comme preuve de son existence historique « un bouclier rond de cuir d’éléphant, énorme et dont personne de nos jours ne pourrait se servir à cause de sa grandeur ». Le mythe rejoint ici la réalité d’un usage particulier du cuir d’éléphant, celui qui consiste à le tendre sur une armature de bois pour conférer résistance, souplesse et légèreté à cette arme défensive. Quand le Syrien Lucien de Samosate, au IIe siècle, fait dire des lieux communs sur la Maurétanie à un cavalier maure de passage, il ne manque pas de raconter « comment il avait vu les éléphants paître en bande au même endroit ». Ainsi, tout au long de l’Histoire, le destin de l’éléphant est lié à l’Afrique du Nord antique et particulièrement aux pâturages littoraux de l’extrême Occident.

    Les mœurs des éléphants fascinent les Anciens

    Pline l’Ancien, le grand naturaliste du Ier siècle, s’épanche longuement dans son Histoire naturelle sur l’éléphant en lui prêtant une sensibilité religieuse, une intelligence supé*rieure et des sentiments humains. « L’éléphant est le plus grand et celui dont l’intelligence se rapproche le plus de celle de l’homme ; car il comprend le langage du lieu où il habite ; il obéit aux commandements ; il se souvient de ce qu’on lui a enseigné à faire ; il éprouve la passion de l’amour et de la gloire ; il possède, à un degré rare même chez l’homme, l’honnêteté, la prudence, la justice ; il a aussi un sentiment religieux pour les astres et il honore le soleil et la lune. Des auteurs rapportent que, dans les forêts de la Maurétanie, des troupeaux d’éléphants descendent sur le bord d’un fleuve nommé Amilas, aux rayons de la nouvelle lune : que là, se purifiant, ils s’aspergent solennellement avec l’eau ; et qu’après avoir ainsi salué l’astre ils rentrent dans les bois, portant avec leur trompe les petits fatigués. Ils comprennent même la religion des autres ; et l’on croit que, près de traverser la mer, ils ne s’embarquent qu’après que leur cornac leur a promis par serment le retour. » Pline l’Ancien s’est sans doute inspiré des travaux du roi Juba II de Maurétanie, qui a beaucoup exploré son royaume pour en recenser les curiosités. Ces interprétations anthropomorphiques sur les mœurs des éléphants ont perduré jusqu’à nos jours, puisque l’éthologie apparente encore la structure sociale des troupeaux d’éléphants aux mœurs des sociétés humaines en ce qui concerne le rôle des anciens, la communication, l’apprentissage ou la compassion.

    Pline l’Ancien nous raconte que, même au milieu d’un spectacle de l’amphithéâtre de Rome, les éléphants de Maurétanie, destinés à un sort funeste, ont réussi à susciter chez les spectateurs l’admiration et même la compassion. « Un seul éléphant rendit ce combat extraordinaire. Les pattes percées de traits, il rampa sur les genoux jusqu’à ses adversaires, leur arracha leurs boucliers et les jeta en l’air. Ceux-ci retombaient en tournoyant, pour le plus grand plaisir des spectateurs qui y voyaient un tour d’adresse de l’animal et non un effet de sa fureur. Mais les éléphants offerts par Pompée, qui avaient perdu tout espoir de s’enfuir, implorèrent la pitié du peuple par des attitudes impossibles à décrire, comme s’ils se lamentaient sur eux-mêmes en gémissant. L’émotion des spectateurs fut telle qu’ils en oublièrent la présence du général et la générosité qu’il avait déployée en leur honneur : le peuple, tout entier, se leva d’un seul bloc en pleurant et lança des malédictions contre Pompée, qui d’ailleurs se réalisèrent bientôt. » Le peuple de Rome, pourtant habitué aux violences infligées aux animaux et aux hommes dans l’arène, n’a pas résisté aux expressions physiques et morales de la douleur ressentie par les éléphants.

    Heurs et malheurs de l’éléphant de guerre

    La force de l’éléphant et son dressage possible en ont fait un animal utilisable pour la guerre. L’origine de cette pratique se trouve en Inde et s’est développée après les conquêtes d’Alexandre. Ptolémée Lagos, le roi de l’Egypte hellénistique, ne pouvant se ravitailler en éléphants orientaux, en fit capturer en Afrique du Nord. L’armée carthaginoise les a utilisés en nombre lors de toutes les grandes batailles qui l’ont opposée à Rome en Sicile, en Espagne et même en Italie, lors de la fameuse expédition d’Hannibal qui leur fit traverser les Alpes. Les souverains numides et maures, Massinissa, Micipsa, Jugurtha et Juba I, entretenaient tous une troupe d’éléphants au sein de leur cavalerie. Juba mit en ligne soixante-quatre éléphants lors de la bataille de Thapsus, sans succès puisqu’il y fut défait par César. Les monnaies d’argent frappées par César portaient d’ailleurs une effigie d’éléphant, tandis que la cinquième légion romaine avait adopté l’éléphant pour emblème. A la suite de ses contacts en Afrique, l’armée romaine utilisa les éléphants de guerre en Espagne ou en Gaule, mais sans grand succès.

    Chasse aux éléphants et éléphants de chasse

    L’éléphant s’est avéré difficile à utiliser lors des combats, sa fureur pouvant devenir un danger pour les deux belligérants. Une armée préparée à l’affronter le laissait foncer hors du champ de bataille. En revanche, si un éléphant était blessé, c’est tout le troupeau qui battait en retraite en écrasant les troupes de son camp. Des tours étaient fixées sur le dos des plus gros éléphants. Derrière des boucliers, des archers pouvaient tirer leurs flèches au sein de la mêlée. Les défenses de l’éléphant de guerre étaient recouvertes de métal pour les rendre plus efficaces et résistantes, tandis que la trompe balayait les hommes à sa portée. Sa peau épaisse était malgré tout recouverte de lames de métal. Parfois, l’éléphant était utilisé pour arracher des pieux, enfoncer les palissades ou des murs. Ainsi, la recherche et l’usage de l’éléphant de guerre ont certainement été l’une des causes de sa disparition.

    Les peuples chasseurs libycoberbères des limites du désert se sont très tôt spécialisés dans la recherche des animaux de cirque que l’on capture pour les ramener vivants. Lucien de Samosate, au IIe siècle, évoque la chasse aux éléphants des Garamantes dans le Grand Sud libyen : « Leur gibier consiste en ânes sauvages, en grandes autruches qui volent sans quitter la terre, en singes et en éléphants. Ces animaux sont les seuls qui puissent supporter la soif et les souffrances que fait endurer l’ardeur d’un soleil dévorant ». La vaste région au sud du Maroc était peuplée par un peuple libycoberbère célèbre dans l’Antiquité, les Gétules. Traditionnellement, l’éléphant de Gétulie était chassé pour sa viande abondante. On prêtait également des vertus roboratives à la chair cartilagineuse de la trompe, par analogie avec une partie de l’anatomie masculine. Pline l’Ancien ajoute qu’on se servait de crins d’éléphant pour enfiler des pierres précieuses.

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    suite

    L’éléphant est aussi appelé « pachyderme », mot d’origine grecque, qui signifie « peau épaisse ». Sa peau constituait une matière recherchée pour la fabrication des boucliers. Le géographe Strabon, décrivant les pratiques militaires des Maures au Ier siècle avant l’ère chrétienne, précise que « leurs fantassins se protègent avec des peaux d’éléphant en guise de bouclier ». Les besoins énormes d’animaux sauvages pour les jeux constituent une autre cause de disparition des éléphants d’Afrique du Nord. A l’époque romaine, l’éléphant était capturé pour animer les spectacles violents des amphithéâtres. La taille de l’animal et sa vaillance au combat causeront sa perte.

    Pline l’Ancien signale qu’il a commencé à être massivement exploité au Ier siècle avant l’ère chrétienne. Pompée offrit dans l’arène de Rome le spectacle extraordinaire d’un combat d’une vingtaine d’éléphants contre des Gétules amenés de Maurétanie, armés de boucliers et de lances pour la circonstance. Il a certainement paru fort exotique de montrer dans l’arène une chasse aux éléphants de Maurétanie par les Gétules. Le naturaliste poursuit l’histoire des venationes (chasses en latin) à l’éléphant : « Vingt éléphants combattirent aussi pour le dictateur César lors de son troisième consulat. Ils avaient pour adversaires cinq cents fantassins et tout de suite après, il y eut un deuxième combat : vingt éléphants porteurs de tour avec chacune soixante combattants contre cinq cents fantassins et autant de cavaliers. Dans la suite, sous les règnes de Claude et de Néron, les éléphants ne combattirent plus que, un à la fois, contre un gladiateur lors de son dernier combat ». Le plus souvent, les éléphants combattaient contre des gladiateurs spécialisés (les bestiarii) ou contre des animaux tels que les taureaux, les tigres ou les lions. Le dernier exploit des gladiateurs qui demandaient leur congé était de les combattre seul à seul.

    Sous l’empire, les besoins en animaux de cirque n’ont fait que croître car les empereurs devaient offrir au peuple romain des jeux fabuleux dans les amphithéâtres ou le grand cirque de Rome. Lors des grandes étapes du cursus honorum, la carrière des honneurs que mènent les sénateurs, et particulièrement lors de l’accès au consulat, les impétrants devaient offrir des spectacles dispendieux pour être dignes de ce titre prestigieux. Il fallait aussi des moyens considérables pour organiser de tels spectacles dans des bâtiments colossaux qu’on nomme amphithéâtres. Le Colisée à Rome et El-Jem en Tunisie sont des exemples exceptionnels par leur taille et leur état de conservation, mais beaucoup de petites cités avaient aussi un théâtre convertible en amphithéâtre. A Lixus, les ruines du petit amphithéâtre s’appuient sur le versant est de la colline et surplombe un méandre de l’oued Loukkos. Partout dans les cités romaines de l’empire, les magistrats, lors de leur entrée en fonction, imitaient localement, suivant leurs moyens, l’évergétisme (les bienfaits) des familles sénatoriales les plus puissantes.

    La quête de l’ivoire

    Les chasseurs d’éléphants ne se proposaient pas seulement de prendre ces animaux vivants ; les besoins toujours croissants du commerce de l’ivoire en faisaient tuer un plus grand nombre encore. La troisième source de disparition des éléphants est ainsi la quête de l’ivoire. Pendant un millénaire au moins, les chasseurs d’éléphants ont prélevé les défenses des animaux abattus. Dès l’aube de l’Histoire, les Phéniciens troquaient déjà l’ivoire que proposaient les peuples de l’extrême Occident. Selon le Périple de Scylax, au VIe siècle av. J.-C., les peuples du Sud du Maroc antique « boivent dans des coupes d’ivoire. Leurs femmes se parent de colliers d’ivoire ; même pour leurs chevaux, ils ont des ornements d’ivoire ». Quelques siècles plus tard, Pline l’Ancien rapporte qu’« un petit roi appelé Gulussa, à l’extrémité de l’Afrique, sur les confins de l’Éthiopie, s’en servait de poteaux dans les maisons ou de clôtures pour ses parcs à bestiaux ». La débauche d’une matière si noble se déduit de la répétition et du vil usage qu’on en fait. La littérature n’est peut-être pas si loin de la réalité. A Sidi Slimane, dans un monument funéraire en forme d’habitation cachée sous un tertre et dont la chambre funéraire était couverte de rondins de thuya, on a retrouvé des pièces d’ivoire qui devaient faire partie d’un coffret. Des amphores du IIIe siècle avant l’ère chrétienne fixent la date de l’excavation du tombeau. Non loin, une inscription libyque évoque un père et son fils. Le goût de l’ivoire des aguellides (roi ou chef de tribu) libycoberbères devrait être confirmé par d’autres fouilles.

    La demande d’ivoire dans le monde gréco-romain explique l’énorme prédation et l’envolée des prix de la précieuse matière. Les souverains numides et maures en faisaient des cadeaux aux villes de l’Orient hellénistique, en échange de quoi on les honorait du titre de philhellène (ami des Grecs) et évergète (bienfaiteur). Les cités de Rhodes ou de Délos ont ainsi dressé des statues en l’honneur du roi numide Massinissa et de sa descendance.

    Dans la statuaire grecque, l’ivoire était utilisé pour les parties visibles du corps des dieux qui trouvaient dans la texture et la couleur de cette matière un aspect semblable à la carnation divine. Cette pratique s’est perpétuée à Rome puisque Pline l’Ancien précise que « les défenses ont un prix énorme ; c’est la plus riche matière pour les statues des dieux ». L’ivoire était aussi la matière première des bijoux et de la vaisselle précieuse. Les empereurs possédaient des tables en thuya de Maurétanie aux pieds d’ivoire et le lit de mort de César, dressé sur le Champ de Mars, était entièrement fait d’ivoire.

    Il reste de nos jours les ivoires antiques des diptyques consulaires, qu’il était d’usage d’offrir à ses relations à chaque étape de la carrière des honneurs, en particulier à son sommet lors de l’accession au consulat. Les empereurs de l’antiquité tardive, comme Anastase ou Justinien, ont fait sculpter des pièces magnifiques qui seront conservées durant tout le Moyen-Age dans les trésors des grands évêchés même lorsque les motifs sculptés évoquaient le paganisme. C’est ainsi que des siècles de massacres d’éléphants pour s’approprier le précieux ivoire sont venus à bout de l’espèce au Maroc.

    Le dernier éléphant
    Pline l’Ancien explique qu’au début de l’ère chrétienne, « la pénurie de l’ivoire a fait qu’on s’est mis à couper les os en lames » et que « tout l’ivoire a été consommé par le luxe ». De fait, l’os sera un substitut à l’ivoire sans jamais prétendre d’ailleurs à égaler sa beauté. Dans les propos de Pline l’Ancien, on trouve des accents contemporains d’un naturaliste alarmé par un appétit du luxe, destructeur de la biodiversité. « On fouille les forêts pour trouver de l’ivoire et du bois précieux, et tous les rochers de la Gétulie pour chercher des murex et des pourpres » Quelques siècles après Pline, à la fin de l’Antiquité, le massacre des pachydermes a pris une telle ampleur que les auteurs de l’Antiquité tardive déplorent la disparition irrémédiable de l’éléphant d’Afrique du Nord.

    Le panneau inférieur de l’ivoire Barberini, une œuvre exceptionnelle datant du règne de Justinien (527-565), présente des représentants de peuples soumis offrant le tribut sous la forme d’une défense d’éléphant. La présence d’un éléphant et d’un tigre, ainsi que le costume des vaincus permettent d’identifier une provenance orientale de l’ivoire. L’Inde sera désormais la seule source d’approvisionnement en ivoire. Isidore de Séville affirme d’ailleurs que de son temps, au VIIe siècle, il n’y a plus d’éléphants en Maurétanie Tingitane. En 573, pourtant, un peuple de Maurétanie, les Maccuritae, offrent encore des défenses d’éléphant comme cadeau diplomatique à l’empereur de Constantinople. Il s’agit là peut-être des défenses du dernier éléphant du Maroc antique !

    Zamane

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