A écouter les porte-voix du Pentagone, les frappes de la coalition internationale emmenée par les Etats-Unis en Irak et en Syrie sont d’une redoutable précision. Sous les déluges de bombes qui sont tombées sur Raqqa ou sur Mossoul, il n’y aurait que des cadavres de soldats de l’Etat islamique. La population civile serait miraculeusement épargnée, à quelques exceptions près, qui relèveraient de conséquences malheureuses baptisées « victimes collatérales ».
Certes, pour qui a vu à la télévision les images de villes dévastées, quasi rasées, il est difficile de croire à de telles fables. Elles rappellent étrangement celles servies à l’époque de l’invasion de l’Irak (2003), quand on voyait à l’écran des experts présumés expliciter avec force détails le travail d’orfèvre des lanceurs de missiles dits intelligents, capables de les balancer au bon moment, sans risque aucun. Une fois le bilan des victimes établi, on s’est aperçu que l’Irak avait été noyé dans un bain de sang au nom d’une cause respectable (l’éradication de Saddam Hussein) ayant servi à justifier l’injustifiable. La lutte contre l’Etat islamique est encore plus respectable que l’élimination de l’ex-dictateur d’Irak, même si Daech est né en partie de cette folle équipée. Mais, si l’on en croit le New York Times, qui a publié une longue et impressionnante enquête sur le sujet, l’histoire ne ressemble en rien à ce que l’on raconte lors des points de presse du Pentagone. Officiellement, les Etats-Unis n’ont recensé que 466 victimes civiles pour des dizaines de milliers de djihadistes éliminés au terme de 27 500 frappes aériennes depuis août 2014. Après dix-huit mois d’enquête fouillée sur le terrain, après avoir examiné 150 sites bombardés et multiplié les contacts sur place, y compris auprès de militaires, les enquêteurs du journal américain en ont conclu que le bilan officiel devait être multiplié par 31. On pourrait même atteindre ainsi les 30 000 victimes « collatérales ».
Ce chiffre est à des années-lumière des propos lénifiants institutionnels, preuve que l’on bombarde aussi bien la vérité que les villes assiégées. Notons en passant que certains des pays concernés par l’expédition, à commencer par la France, se gardent bien de toute déclaration sur le sujet. Les rares fois où l’on daigne évoquer les victimes civiles, c’est pour condamner la soldatesque de Bachar al-Assad, le recours à l’arme chimique, sans oublier les exactions des parrains russes de Damas, comme si ces derniers étaient les seuls à ne pas se demander qui reçoit les missiles sur la tête. Au vrai, les méthodes des uns n’ont rien à envier à celles des autres. La guerre contre l’Etat islamique, si elle est nécessaire, a un coût humain qui ne sera pas sans conséquences pour les pays concernés. Prétendre le contraire relève de la désinformation, sport qui a plus d’adeptes qu’on ne le croit.
PAR JACK DION pour Marianne.
Certes, pour qui a vu à la télévision les images de villes dévastées, quasi rasées, il est difficile de croire à de telles fables. Elles rappellent étrangement celles servies à l’époque de l’invasion de l’Irak (2003), quand on voyait à l’écran des experts présumés expliciter avec force détails le travail d’orfèvre des lanceurs de missiles dits intelligents, capables de les balancer au bon moment, sans risque aucun. Une fois le bilan des victimes établi, on s’est aperçu que l’Irak avait été noyé dans un bain de sang au nom d’une cause respectable (l’éradication de Saddam Hussein) ayant servi à justifier l’injustifiable. La lutte contre l’Etat islamique est encore plus respectable que l’élimination de l’ex-dictateur d’Irak, même si Daech est né en partie de cette folle équipée. Mais, si l’on en croit le New York Times, qui a publié une longue et impressionnante enquête sur le sujet, l’histoire ne ressemble en rien à ce que l’on raconte lors des points de presse du Pentagone. Officiellement, les Etats-Unis n’ont recensé que 466 victimes civiles pour des dizaines de milliers de djihadistes éliminés au terme de 27 500 frappes aériennes depuis août 2014. Après dix-huit mois d’enquête fouillée sur le terrain, après avoir examiné 150 sites bombardés et multiplié les contacts sur place, y compris auprès de militaires, les enquêteurs du journal américain en ont conclu que le bilan officiel devait être multiplié par 31. On pourrait même atteindre ainsi les 30 000 victimes « collatérales ».
Ce chiffre est à des années-lumière des propos lénifiants institutionnels, preuve que l’on bombarde aussi bien la vérité que les villes assiégées. Notons en passant que certains des pays concernés par l’expédition, à commencer par la France, se gardent bien de toute déclaration sur le sujet. Les rares fois où l’on daigne évoquer les victimes civiles, c’est pour condamner la soldatesque de Bachar al-Assad, le recours à l’arme chimique, sans oublier les exactions des parrains russes de Damas, comme si ces derniers étaient les seuls à ne pas se demander qui reçoit les missiles sur la tête. Au vrai, les méthodes des uns n’ont rien à envier à celles des autres. La guerre contre l’Etat islamique, si elle est nécessaire, a un coût humain qui ne sera pas sans conséquences pour les pays concernés. Prétendre le contraire relève de la désinformation, sport qui a plus d’adeptes qu’on ne le croit.
PAR JACK DION pour Marianne.
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