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Enigma: Une église hétérodoxe

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  • Enigma: Une église hétérodoxe

    La musique, c’est des bruits qui pensent. La musique religieuse serait donc des bruits qui prient. Ce qui serait parfaitement ambiguë en parlant de Enigma…. A la différence des autres groupes de chants religieux tel que Era ou Gregorian, Enigma se distingue d’un style à la fois épicurien et mystique.

    Partant de l’idée qu’un Homme n’ayant pas découvert ce qu’est le péché ne pourra jamais atteindre le stade de la vertu, Enigma, un peu comme certains soufis musulmans, prêche la délivrance la plus extrême des sens et des envies humaines et ce pour atteindre la délivrance de l’âme qui, une fois le corps assouvi, serait apte à escalader les cieux pour atteindre le Nirvana, l’Etre Suprême.

    On retrouve dans les paroles et la musique cette soif mystique de l’absolu, une quête du parfait et de l’innocence primaire de l’Homme, le rejet initial de toute valeur traditionnelle inculquée par la communauté, le voyage interminable d’un esprit redevenu libre vers la terre de la vérité.

    Les sens deviennent alors non un obstacle devant l’ascension spirituelle mais plutôt un moyen inéluctable d’atteindre une conviction authentique loin des préjudices communs et des concepts religieux.

    C’est là où renaît encore le combat entre l’Eglise (ou n’importe quel organisme religieux) et l’émancipation de l’art… Tout ce qui est établi est juste, tout ce qui est différent ne l’est pas. Quand on écoute Enigma, on tombe dans une délicieuse torpeur, semblable à celle que ressentent les derviches tourneurs en évoquant Dieu dans une douce absence. Ces voix angéliques qui déferlent dans un flot musical inouï nous rapprochent davantage de l’Essence humaine telle qu’elle est réellement, toute différente du totem idéal conçu par la communauté. On se découvre, on apprend à s’aimer, à nous donner la chance de nous écouter et de distinguer en nous le vrai du faux, la vérité de l’illusion.

    Dans, Principles of lust, l’une des célèbres chansons du groupe, on décèle un semblant de guide spirituel aidant l’Humain à atteindre cette plénitude rêvée, quasi-impossible, que d’autres courants spiritualistes, s’appuyant sur la privation, prétendent connaître.

    Pour Enigma, la privation ne saurait être le chemin de la délivrance. Car il y aura toujours une partie de nous que l’on ignore, que l’on enterre arbitrairement jusqu’à ce que nous ayons l’impression de l’avoir perdue. Mais, bien au contraire, cette partie charnelle ne pourra disparaître par un rejet automatique ; elle se taira peut-être, elle se cachera momentanément dans " le Soi" de Freud mais, tôt ou tard, fatalement, elle finira par immerger du silence…

    Empruntant le chemin inverse, le plus honnête, Enigma veut lui donner tout son dû, à cette partie, pour qu’une fois le but atteint, la plénitude soit absolue et irréductible.

    Si l’on parcourt d’un rapide coup d’œil la philosophie du plaisir, on trouvera que Epicure et le Marquis de Sade ont eu une grande influence sur le cheminement idéologique du groupe. Le ressentiment dont ont été victimes ces deux philosophes n’a pas été épargné à Enigma bien que des années lumières nous sépare de l’époque traditionaliste de l’Europe. On peut, en effet, tolérer les tendances luxurieuses d’un artiste, mais de là à lier ces tendances à la religion !

    Le monde, étant un vieil homme ensommeillé, ne pourra supporter ni accepter ce vent du changement que soufflent sur lui des esprits éclairés pour apporter une quelconque amélioration à la condition humaine. Il peut, à la rigueur, laisser quelques minorités pratiquer leurs convictions dans l’ombre mais si cela pourrait déstabiliser le "bien-être" de l’ignorance, ladite minorité deviendra un danger primordial à éliminer…

    Le combat de Enigma qui tente de réconcilier le mysticisme avec la luxure n’est qu’une simple tentative de se rapprocher de l’Eternel par le biais de l’amour. Un homme et une femme qui font l’amour ne sont, au bout du compte, que deux esprits qui fusionnent en corps à corps. Ces chairs qui se fondent l’une dans l’autre, ce sont deux âmes qui ascensionnent ensemble vers la Source, vers l’Absolu.

    L’acte d’amour, délivrant l’esprit, ne serait qu’une stèle gigantesque dédiée à la miséricorde et à la bonté divine…

    La passion de l’homme pour la femme, c’est le symbole palpable de sa passion pour Dieu et pour l’infini…

    Par la Depêche de Kabylie
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