Annonce

Réduire
Aucune annonce.

Guerre, chaos et dolce vita

Réduire
X
 
  • Filtre
  • Heure
  • Afficher
Tout nettoyer
nouveaux messages

  • Guerre, chaos et dolce vita

    Only in Lebanon... Pourquoi ils s'attendaient à voir passer une charette avec des gueux, nous sommes à Beyrouth quand même




    Immédiatement, le contraste entre le premier et l'arrière-plan arrête le regard. En bas de l'image, une scène qui aurait pu être saisie à Hollywood ou sur la Croisette, à Cannes, au moment du Festival de cinéma. Quatre jeunes filles en tenue d'été et lunettes noires, dans un cabriolet décapotable conduit par un jeune homme, semblent sortir d'une séance de pose devant les flashes des photographes. Derrière, le chaos. Un amoncellement de tôles et de béton d'où surgissent quelques branches de palmier.

    La photo a été prise à Beyrouth, le 15 août 2006, le lendemain du cessez-le-feu décidé par le Conseil de sécurité de l'ONU après plus d'un mois de guerre, dans une rue de la capitale libanaise dévastée lors des bombardements israéliens. Son auteur, Spencer Platt, un photographe américain de l'agence Getty Images, a remporté avec ce cliché le World Press Photo Award 2006. "On ne se lasse pas de regarder cette photo. Elle contient la complexité et les contradictions de la vraie vie, au milieu du chaos. Cette photo vous fait dépasser l'évidence, a commenté Michele McNally, du New York Times, la présidente du jury de ce prestigieux prix de photojournalisme, qui s'est réuni du 27 janvier au 8 février à Amsterdam. Mme McNally a précisé que l'image avait été sélectionnée le dernier jour, après plus de 75 000 photos regardées par les membres du jury.

    SITUATIONS IRRÉALISTES

    Leur avis n'a pas été unanimement partagé. Le photographe libanais Samer Mohdad a ainsi, sur son blog, hébergé sur la plateforme mesarabies.com, reproché à "la noble institution" de faire preuve d'"ironie de mauvais goût" et de "compromettre le niveau" de cette compétition internationale. Même s'il reconnaît que "le Liban présente des situations étranges et irréalistes" et que cette photo "montre une certaine réalité", il qualifie le cliché de Spencer Platt d'"insulte vis-à-vis de tous les photojournalistes qui risquent leur vie en couvrant cette horrible guerre". M. Mohdad estime que traduire de cette manière la guerre au Liban "contrevient au sens commun et à l'éthique". Par ailleurs, le photographe libanais critique la composition du cliché - "une photo d'amateur" selon lui - et s'interroge sur la réaction des jeunes passagers de la voiture lorsque leurs visages "se retrouveront publiés à la "une" de la presse internationale" et "qu'ils incarneront le symbole de cette guerre cruelle".

    Le Français Jean-François Leroy, membre du jury du World Press, lui a directement répondu sur son blog qu'il trouvait ces propos "insultants", ajoutant que les événements du Liban avaient du reste été "très largement représentés" dans la sélection de photos faite par le jury. Dans la presse libanaise, le cliché a été publié le week-end du 10-11 février sans, jusqu'à présent, soulever de polémique.

    Spencer Platt, qui rejette l'étiquette de "photographe de guerre" estime, lui, qu'une image comme celle qui a été distinguée permet d'attirer l'attention sur un conflit sans réduire celui-ci à un bain de sang. Dans un article paru dans la lettre d'information Photographie.com, il explique que son ambition est de raconter le Liban "avec toutes ses ironies" pour se confronter "aux stéréotypes sur ce qu'est en fait une victime de guerre et même sur ce qu'est la guerre".

    Sylvie Kerviel
    18.02.07. Le Monde
    Si vous ne trouvez pas une prière qui vous convienne, inventez-la.” Saint Augustin
Chargement...
X