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Algérie : Ahmed Ouyahia face à la crise des finances publiques

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  • Algérie : Ahmed Ouyahia face à la crise des finances publiques

    Par Hassan Haddouche

    La loi de finance 2018 a un caractère exceptionnel. Il se traduit d’abord par le niveau des dépenses qu’elle prévoit qui sont en hausse de près de 25% par rapport à l’exercice précédent avec des dépenses d’équipement qui augmentent de 60%. La nature exceptionnelle de la loi de finance 2018 se manifeste aussi par le montant et surtout la nature du financement de son déficit qui sera, pour la première fois depuis plus d’un quart de siècle, réalisé grâce au recours à « la planche à billets ».

    Quand Ahmed Ouyahia révèle que les « caisses de l’État sont vides »

    L’adoption de cette loi de finances intervient dans un contexte de « crise des finances publiques nationales » qui a été évoquée de façon brutale et spectaculaire par le Premier ministre dès son entrée en fonction.
    Dès le mois de septembre dernier, c’est en pleine rentrée sociale que Ahmed Ouyahia annonçait que « les caisses de l’État sont vides et que les salaires des fonctionnaires ne sont pas garantis pour le mois de novembre ».
    On connait la suite : la solution de ce problème, selon le Premier ministre, « n’est pas une option mais un impératif ». Il s’agit du financement monétaire du déficit du budget de l’État au cours des prochaines années.

    Il faut bien sûr faire la part des calculs politiques dans cette stratégie de communication adoptée par le Premier ministre. En dramatisant la situation des finances publiques lors de son entrée en fonction, M. Ouyahia pourra certainement se prévaloir, dans 15 mois, d’avoir assaini une situation présentée comme catastrophique. Il devrait être aidé dans cette démarche par le redressement en cours, et pour l’instant plus rapide que prévu, des cours pétroliers.

    Les finances publiques en crise depuis 2015

    Mais il n’y a pas que des calculs politiques dans la lecture des difficultés financières actuelles de l’État algérien. En fait, ces difficultés remontent déjà à plusieurs années même si, contrairement à Ahmed Ouyahia, ses prédécesseurs n’avaient pas jugé utile de les « dramatiser » en les portant brutalement sur la place publique.
    La chute « régulière et continue » du prix du baril entre juin 2014 et fin 2016 a précipité les finances publiques algériennes dans une crise sans précédent.
    Des rapports qui sont restés confidentiels indiquent que le déficit budgétaire réel de l’État a dépassé le niveau énorme et record de 20% du PIB fin 2015 en raison d’une réaction tardive des pouvoirs publics qui ont maintenu un niveau de dépenses publiques élevé.

    À partir de 2016, l’État commence à réduire ses dépenses et les choses vont un peu mieux. La mission du FMI présente à Alger au printemps dernier relevait une « réduction significative » du déficit budgétaire sans mentionner de chiffre précis.
    En fait, le déficit pour 2016 a encore atteint le niveau considérable de près de 15% du PIB. Pour l’année en cours, la poursuite et l’accélération de la réduction des dépenses de l’État prévues par la loi de finance 2017 devait ramener le déficit aux environ de 7% du PIB au prix d’une coupe drastique (de près de 30%) dans les budgets d’équipements.

    Des déficits qui résistent de façon inquiétante

    C’est ici qu’intervient un problème imprévu dont la note confidentielle adressée le 12 décembre par Ahmed Ouyahia à ses ministres et publiée mardi 26 décembre par TSA éclaire un peu plus la nature. En rappelant qu’« à chaque instant, l’État est en train de fonctionner grandement à crédit », Ahmed Ouyahia demande à son administration de faire preuve de « rigoureuse discipline budgétaire ».
    En 2017, le déficit prévu initialement à un peu plus de 10200 milliards de dinars, soit à peine 7% du PIB, devrait de nouveau se situer à un niveau sensiblement plus élevé.

    M .Ouyahia lui-même a donné quelques indications sur son niveau probable pour l’année en cours en évoquant à plusieurs reprises un chiffre de 2.000 milliards de dinars. Soit encore près de 12% du PIB. Les prévisions de réduction des dépenses d’investissement de près de 30% retenues pour cette année ne semblent pas avoir résisté à la pression des besoins.
    Manifestement, il y a un problème du coté des dépenses de l’État. Mais quelles dépenses ?

    Plus de 1.000 milliards de dinars d’arriérés de paiement de l’administration

    La réponse est dans l’instruction adressée par le Premier ministre à l’administration. « Il a été porté à ma connaissance que des ordonnateurs du budget d’équipement de l’État procèdent à l’engagement de dépenses en violation de la législation et de la réglementation », indique l’instruction n°442 du Premier ministre datant du 27 novembre et actualisée le 12 décembre dernier.
    « Cette situation constitue une voie dangereusement ouverte à la dérive et aux dépassements dans la gestion des finances publiques […]

    Intervenant en période de rareté de ressources, certains ordonnateurs se sont laissé aller à contrevenir à des décisions centrales de gels d’opérations, alors que d’autres se sont engagés dans des dépenses non couvertes par les crédits qui leurs sont notifiés », souligne Ouyahia.
    Le Premier ministre va plus loin et livre même, pour la première fois, un chiffre précis sur le montant des arriérés de paiement de l’administration en estimant que les dépassements ont abouti à « l’accumulation d’un volume gigantesque de créances impayées dépassant les 1.000 milliards de DA, en suspens parfois pendant deux années durant ».

    On comprend ainsi beaucoup mieux pourquoi l’exposé des motifs du projet de loi portant amendement de la loi monnaie et crédit, adopté il y a un peu plus d’un mois, indique que « le besoin de financement du Trésor pour l’année 2017 demeure supérieur à 500 milliards DA ».
    De son côté, le Premier ministre avait indiqué dès le mois d’octobre aux députés que « le projet de loi de finances 2018 prévoira 400 milliards de dinars pour le paiement des créances impayées des entreprises ».
    Ce n’est sans doute qu’un début et M .Ouyahia a suggéré lui-même aux parlementaires que le règlement de la crise financière aiguë que traversent actuellement les finances publiques nationales pourrait prendre encore un an et demi.
    C’est sans doute le temps qu’il faudra pour assainir complètement les impayés de l’administration.
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