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Algérie - Violences faites aux femmes : ce que le cas Leila Touchi nous dit

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  • Algérie - Violences faites aux femmes : ce que le cas Leila Touchi nous dit

    Menacée dans son domicile, harcelée sur la route parce que comédienne de plus en plus reconnue, Leila Touchi symbolise une certaine violence faite aux femmes dans l'Algérie d'aujourd'hui.

    Âgée de 31 ans, Leila Touchi est un visage qui commence à être connu des téléspectateurs de la télévision algérienne. Dans la soirée du 21 février, la jeune comédienne a vécu un traumatisme qu'elle n'est pas près d'oublier. « Il devait être 22 heures ; je me suis changée dans une pièce et je me suis rapprochée du chauffage. Au moment où j'ai levé les yeux vers la télé, j'ai aperçu un homme accroché aux barreaux de ma fenêtre. Il était en train de me regarder. Il semblait m'observer depuis quelque temps », relate Leila Touchi au Point Afrique.

    « Il menaçait de m'étrangler »


    La jeune femme est glacée. « Durant les premières secondes, j'ai eu l'impression que je n'avais plus de voix. Je n'ai rien entendu de ce qu'il a pu dire mais j'ai vu ses gestes. Il menaçait de m'étrangler », poursuit Leila, qui indique avoir fini par crier. Le harceleur n'a pas bougé jusqu'à ce que son père arrive dans la pièce. Il faut dire que la comédienne habite avec ses parents dans une maison à Fouka Marine (Tipaza), à près de 70 kilomètres de la capitale. Le plus effrayant, c'est que pour arriver à la fenêtre, son harceleur a dû escalader le mur de la maison et traverser le jardin.


    « Depuis ce jour-là, je n'arrive pas vraiment à travailler. Je ne dors presque plus. J'attends que mes parents se réveillent le matin pour m'assoupir », assure-t-elle. La police est intervenue. Une enquête est ouverte. Mais la jeune femme a du mal à décrire son harceleur. « Je n'ai pas pu les aider », dit-elle. Les policiers lui ont demandé d'être encore plus prudente vu la zone où elle habitait. « Ils m'ont dit : Vous êtes dans une zone où il n'y a pas d'éclairage, c'est dangereux et il faut faire attention », précise-t-elle.

    « Pour eux, la télévision, c'est la débauche »

    Le plus dur, c'est que ce n'est pas la première fois que Leila Touchi est confrontée à une situation délicate. « Cette histoire de harcèlement fait partie du quotidien depuis toujours mais à l'extérieur de chez moi. Je ne fais pas très attention puisque toutes les femmes vivent cette situation », lance-t-elle. Cela ne l'empêche pas de prendre ses précautions. Quand les répétitions ou le tournage à Alger se prolongent jusqu'au soir, elle est obligée de rester sur place. « Mes parents aussi préfèrent que je ne rentre pas le soir à Fouka parce que c'est risqué, même pour les hommes d'ailleurs », affirme-t-elle.

    Mais le risque est encore plus important pour une femme. Leila Touchi l'a bien compris. « J'étais sur la route de Douaouda une fois quand deux motards se sont approchés et m'ont demandé de m'arrêter. Je ne l'ai pas fait. Ils m'ont menacée. Ils m'ont dit que je salis la réputation de Fouka et que je vais plus pouvoir y accéder », se souvient-elle. Pourquoi cet acharnement ? Il ne s'agit certainement pas d'une scène sensuelle que les téléspectateurs du quartier n'auraient pas appréciée. « Vous connaissez la télévision algérienne. On ne peut pas imaginer ce genre de scène. Ils m'ont juste vue à l'écran. Chaque année, j'ai un programme. J'habite ici depuis ma naissance. Cela a toujours été comme ça. Pour eux, la télévision, c'est la débauche », estime-t-elle. Et d'ajouter : « Ils m'en veulent parce que je suis une femme libre. » Son entourage lui a proposé de changer de maison. « Moi je veux être en sécurité là où j'habite. Ce n'est pas à nous de changer. C'est à eux de partir », lâche la comédienne.

    Montée de l'intolérance ?

    « Le cas de Leila Touchi a été médiatisé, mais il y en a énormément d'autres », regrette Myriam Belala, présidente de SOS femmes en détresse, qui s'alarme sur le « regain de violence incroyable à l'égard des femmes ». Son association est de plus en plus sollicitée par les victimes. En Algérie, tout le monde se souvient encore du cas de Razika Cherif. La jeune femme a été assassinée par un chauffard en 2015 dans la rue. Ce dernier l'a froidement renversée parce qu'elle a refusé de céder à ses avances sexuelles. Début 2016, une nouvelle loi sur les violences faites aux femmes est pourtant entrée en vigueur. Le texte resté bloqué plusieurs mois au Parlement avant d'être finalement adopté prévoit des peines de prison et même la perpétuité quand « les coups portés ou les blessures faites volontairement, mais sans intention de donner la mort, l'ont pourtant occasionnée ». Il sanctionne aussi le harcèlement dans les lieux publics avec une peine de six mois de prison et une amende. « La peine est portée au double si la victime est une personne mineure de seize ans », selon la loi.

    Mais sur le terrain, l'évolution reste très lente pour les militantes des droits des femmes. « On ne peut pas dire que la loi n'a rien changé. Mais le dépôt de plainte demeure un parcours de combattant pour une femme victime de violences conjugales par exemple », assure Myriam Belala. « Dans certains cas, il y a une sorte de réticence de la part de la police. On fait la morale à la femme et on exerce sur elle une certaine pression [pour l'empêcher de déposer une plainte] », détaille-t-elle.

    Pas autant de plaintes que de victimes


    Résultats : de nombreuses victimes ne déposent jamais de plainte, comme le confirment les chiffres de la police. Durant les neuf premiers mois de l'année 2017, la police a enregistré 7 586 cas de femmes victimes de violence, dont 737 ont abandonné les procédures. 52,48 % d'entre elles avaient subi des violences dans le milieu familial. La responsable du bureau des catégories vulnérables à la direction de la police judiciaire avait rappelé que ces chiffres étaient très loin de la réalité puisque les femmes ne portent pas systématiquement plainte contre un proche ou un membre de leur famille.

    Myriam Belala s'inquiète aussi de la montée de l'intolérance qui fait rappeler la montée de l'extrémisme islamiste du début des années 1990. Elle évoque le harcèlement et les menaces dont font l'objet également les couples. « Récemment, un couple au centre-ville a été interpellé par un homme qui a commencé à réprimander ces jeunes avant d'appeler la police qui est venue pour leur demander les papiers. Cela me fait rappeler les brigades d'islamistes du début des années 1990. Sauf qu'à l'époque, ils réglaient leurs comptes seuls. Ils ne faisaient pas appel aux policiers », raconte-t-elle.

    source: Le Point Afrique

  • #2
    Ce n'est pas grand chose, mais elle a tout mon soutien et toute ma sympathie. J’espère qu'elle continuera à exercer librement son métier sans céder aux menaces et intimidations des extrémistes religieux, le combat de ces femmes est salutaire pour l'avenir du pays.

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    • #3
      Je pense que le gouvernement devrait financer une grande enquête nationale sur le harcèlement et les violences faites aux femmes pour avoir une bonne idée sur l'ampleur de ces problèmes en Algérie. Partant des conclusions de cette enquête, le gouvernement devrait alors proposer des mesures et des réformes pour sensibiliser/éduquer la population sur ces problèmes, et adopter des lois visant à sanctionner sévèrement les coupables impliqués dans des faits de harcèlement et de violences contre les femmes.

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