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La démocratie tunisienne livrée à elle même dans l’indifférence des démocraties occidentales

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  • La démocratie tunisienne livrée à elle même dans l’indifférence des démocraties occidentales

    Contrairement à d’autres exemples du grand Moyen-Orient comme l’Irak et l’Afghanistan, la démocratisation de la Tunisie n’a rien coûté aux pays occidentaux. Les Tunisiens ont pris leur destin entre leurs propres mains

    Dans son article du 25 mai 2017, le journaliste du Washington post, Christian Caryl, avait dit que la Tunisie est loin d’avoir reçu le soutien qu’elle mérite. Selon lui, les Américains et les Européens ont fait beaucoup moins qu’ils pouvaient réellement faire pour soutenir cette jeune et prometteuse démocratie.

    Malheureusement, force est de constater que ce triste constat aussi édifiant et aussi regrettable qu’il soit est très vrai. Malgré une transition démocratique réussie, les démocraties d’Europe de l’ouest ou de l’Amérique du nord incluant le Canada continuent à être étrangement indifférentes aux développements et aux avancées politiques de la nouvelle Tunisie, incontestablement remarquables dans une région dont l’instabilité et la violence des conflits qui la déchirent n’est plus à prouver. Pendant que la plupart de leurs voisins arabes immédiats ou éloignés s’embourbent de plus en plus dans des guerres identitaires particulièrement meurtrières, les Tunisiens ont réussi à construire à pas lents mais sûrs les institutions de leur deuxième République démocratique, malgré une situation économique d’une extrême difficulté et une situation sociale d’une extrême fragilité. Cet exploit qui relève presque du miracle, vu l’environnement régional et culturel presque maladivement hostile à l’idée même de la démocratie, lui a garanti un prix Nobel de la paix en 2015 considéré unanimement par les observateurs internationaux, comme largement mérité.

    Contrairement à d’autres exemples du grand Moyen-Orient comme l’Irak et l’Afghanistan, la démocratisation de la Tunisie n’a rien coûté aux pays occidentaux. Les Tunisiens ont pris leur destin entre leurs propres mains. Pourtant, et malgré les indiscutables bénéfices géostratégiques à moyen et à long terme que les démocraties traditionnelles du nord pouvaient, sans l’ombre d’un doute, tirer d’une telle transition démocratique d’un pays musulman du sud, les chancelleries occidentales n’ont offert aucune forme d’aide à la Tunisie. Pire encore, l’Union européenne, à titre d’exemple, ne cesse de l’accabler d’accusations absurdes, parfois d’être un paradis fiscal, d’autre fois d’être une plaque tournante de blanchiment d’argent et finalement – et c’est probablement l’accusation la plus dangereuse – d’être un refuge pour les activités terroristes des islamistes radicaux. Inutile de dire qu’en plaçant la Tunisie sur ces différentes listes noires, l’Union européenne n’a malheureusement fait qu’empirer la situation économique et sociale de la Tunisie déjà largement sinistrée par l’instabilité politico-sécuritaire qui a suivi, tout naturellement, le soulèvement populaire qui a mis fin à la détestable dictature de Ben Ali.

    Pendant que les Tunisiens attendaient fièrement des Occidentaux qu’ils leur tendent une main forte afin de les aider à venir à bout de la crise économique qui menace sérieusement leur transition démocratique réussie, les chancelleries occidentales bien au contraire leur ont malheureusement et honteusement tourné le dos. Tristement fidèle à ses politiques traditionnelles qui nous ont en partie emmenés à cette guerre absurde des civilisations et des cultures, l’establishment occidental continue obstinément à soutenir au Moyen-Orient un statu quo très destructeur. Cette politique de court terme, soucieuse uniquement de l’intérêt économique, malgré ses répercussions politiques et culturelles désastreuses sur la paix mondiale, ne fait que rassurer confortablement les dictatures arabes militaro-policières à l’égyptienne ou les totalitarismes religieux à la saoudienne dans leur autoritarisme pathologique. Malheureusement, l’histoire récente a prouvé clairement que consolider les autoritarismes arabes ne fait que miner à priori toute possibilité de dialogue entre l’islam et l’Occident. Cette aveuglement de la part d’une bonne partie de l’intelligentsia occidentale continuera sans doute aussi à fournir aux tendances radicales tout ce qui leur faut pour ré-instrumentaliser indéfiniment ce soutien, afin de continuer eux aussi de diaboliser l’Occident, promouvoir la haine et appeler à sa destruction.

    Dans le monde arabe, seule la Tunisie échappe incontestablement, à ce paradigme. Après l’échec cuisant des révoltes arabes, elle est aujourd’hui indiscutablement le seul pays de l’islam arabophone qui a commencer à adopter des valeurs démocratiques et qui est engagé de fait dans un double processus d’islamisation et d’universalisation des principes des droits de l’homme. Malgré le caractère titanesque de cette tâche de civilisation, les citoyens tunisiens sont livrés à eux-mêmes. Abandonnés par l’Occident, ils se battent courageusement pour défendre leur démocratie inachevée contre le terrorisme djihadiste qui méprise l’ensemble des fondements philosophiques de la démocraties et des droits humains. Ils se battent aussi contre les conspirations des pays du Golfe arabo-persique qui, craignant un effet d’entraînement, mobilisent de plus en plus ouvertement leurs moyens financiers gigantesques afin d’écraser dans l’œuf l’expérience démocratique tunisienne. Dans les deux cas, le combat semble à l’image du combat de David et Goliath.

    Comme nous l’avons souligné dans un ancien article sur le même sujet, “La Tunisie, aujourd’hui, n’a jamais autant eu besoin de soutien et de protection. Les démocraties occidentales ont le devoir moral et politique de préserver ce pays qui, malgré sa petite taille géographique et son petit poids démographique, représente la seule lueur d’espoir pour sortir le monde arabe de sa culture despotique et pour déradicaliser l’islam et le démocratiser. Afin de vaincre Al-Qaeda, l’État islamique et les autres groupes du même type, il n’est pas suffisant de les détruire militairement, il faut les vaincre aussi sur le terrain des idées. C’est malheureusement l’élément que l’intelligentsia occidentale ne semble pas avoir compris. Pourtant c’est l’élément le plus important de notre guerre contre le terrorisme. Pour vaincre l’islamisme radical militairement et sur le terrain des idées, l’Occident a besoin d’un contre modèle. Pour l’instant, seule la Tunisie offre ce contre-modèle dans le monde arabe … L’avenir de la paix et la stabilité du bassin méditerranéen et du Moyen-Orient dépend en partie de la réussite du processus de démocratisation en Tunisie. C’est la réforme de toute une culture et le renouvellement de toute une civilisation qui dépendent de ce processus. L’abandonner c’est se condamner à une guerre éternelle avec le monde arabe et l’espace de l’islam. C’est pour cette raison que la Tunisie mérite notre support et notre protection. L’Occident à tout gagner d’appuyer la Tunisie et de la protéger. Les moments de ce type sont très rares dans l’histoire humaine. Il faut savoir les saisir”.

    Une occasion d’appuyer cette démocratie naissante s’offre à l’occasion de l’organisation du G7 sur le territoire canadien au mois de juin prochain. Si vous êtes un citoyen ou un résident d’un pays du G7, envoyez cet article à votre député afin de l’encourager à inviter la Tunisie pour participer à cet événement international afin de lui offrir l’aide et le soutien économique qu’elle mérite pour consolider sa transition démocratique et immuniser ses institutions.

    Quoi qu’il en soit, une chose est certaine aujourd’hui. Comme l’a dit le journaliste du Washington post cité ci-haut, l’avenir d’un Moyen-Orient démocratique, stable et en paix et par conséquent moins menaçant à la sécurité occidentale, réside dans la Tunisie et nulle part ailleurs dans le monde arabe. Quand les occidentaux le comprendront-ils!


    Noomane Raboudi Islamologue et politologue, professeur à l’Université d’Ottawa


    Huffpost

  • #2
    Démocratie et misère ne riment pas ensemble.
    Comment convaincre des gens qui mangent pas à leur faim que la démocratie est mieux que faire la révolution?

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    • #3
      Les tunisiens sont en partie résponsables. Ils auraient dû choisir un président jeune, capable de convaincre du bien-fondé de la démcratie et de la politique qu'il méne aussi bien en interne (l'expilquer aux tunisiens) qu'on externe (l'expliquer au monde). Ne pouvoir travailler que moin de 4h sur 24h, c'est très peu.

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      • #4
        les sionistes ne permettront jamais que des pays musulmans soient dirigés par un démocrate :22:

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        • #5
          Il n'y a rien de choquant ou d'extraordinaire dans le fait que la situation économique de la Tunisie soit relativement difficile. De nombreux pays du monde sont dans des situations pires que la Tunisie.

          La Tunisie doit continuer à se prendre en main elle-même en se modernisant et en adoptant les réformes institutionnelles et économiques nécessaires pour encourager l'investissement privé national et étranger en Tunisie.

          L'une des clés pour la réussite de ce grand chantier est que la Tunisie soit dirigée par un président relativement jeune, compétent et charismatique qui saura inspirer et mobiliser les Tunisiens en général, et les jeunes en particulier. Le président actuel de la Tunisie, Beji Caid Essebsi (91 ans), est un vieux dinosaure qui ne semble pas à la hauteur des défis de la Tunisie.

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