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Les lettres secrètes de Gandhi à Hitler

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  • Les lettres secrètes de Gandhi à Hitler

    Dans son nouveau livre, l'écrivain et reporter Gilles Van Grasdorff s'attaque au mythe de Gandhi et dévoile, à travers deux lettres méconnues, la grande naïveté (ou le fol espoir) du héros indien. Jusqu'à l'aveuglement. Extraits.
    "En 1930, Mohandas Karamchand Gandhi a 61 ans lorsqu'il reçoit un exemplaire de Mein Kampf, dans une édition bon marché, à 8 reichsmarks, envoyée depuis Berlin par des indépendantistes radicaux indiens pronazis. [...] Il lit avec beaucoup d'attention les mots du Führer sur le Lebensraum dont l'Allemagne aurait besoin pour redevenir la grande nation qu'elle fut par le passé. "Sur cette Terre, seul un espace suffisamment vaste assure à une nation la liberté d'existence." [...]

    Il s'attarde sur les passages où l'auteur évoque sa conception du monde: la vie est un combat, le monde une jungle, "où le rôle du plus fort est de dominer et non point de se fondre avec le plus faible, en sacrifiant ainsi sa grandeur". Hitler précisant quelques lignes plus loin: "Si la nature ne souhaite pas que les individus faibles s'accouplent avec les forts, elle veut encore moins qu'une race supérieure se mélange avec une inférieure, car, dans ce cas, la tâche qu'elle a entreprise depuis des milliers de siècles pour faire progresser l'humanité serait rendue vaine d'un seul coup."

    Plus loin, l'évocation d'Allemands de sang aryen, d'hommes physiquement supérieurs, mais également porteurs d'une morale et d'une culture plus élevées que celles des autres peuples, interpelle beaucoup l'avocat gujarati: mais Gandhi comprend surtout que la guerre est proche. [...]

    Janvier 1937, Indes... Les ministres congressistes démissionnent pour protester contre la décision britannique d'impliquer les Indes dans la Seconde Guerre mondiale. Le 5 novembre, rue Wilhelmstrasse, dans le centre névralgique du IIIe Reich, se tient une réunion capitale autour de Hitler. La séance s'ouvre à 16h15. Le Führer prend continuellement la parole, précisant que les déclarations qu'il s'apprête à faire sont le fruit "de mûres réflexions et d'une expérience acquise au bout de quatre ans et demi d'exercice de pouvoir". Selon lui, plus de doute: les Allemands "ont droit à un espace plus grand que celui des autres peuples".

    "Une guerre qui verrait l'humanité ramenée à l'état sauvage"

    Le 23 juillet 1939, depuis Wardha, Gandhi écrit quelques mots à Hitler. Voici cet appel:

    Cher ami,

    Nombreux sont ceux qui m'ont supplié de vous écrire au nom de la sauvegarde de l'humanité. Mais j'ai résisté à leur requête. Je pensais que vous me trouveriez impertinent. Néanmoins, quelque chose me souffle que je dois passer outre ce genre de considération et faire appel à vous sans tenir compte des conséquences.

    Aujourd'hui, il est clair que vous êtes la seule personne au monde capable d'empêcher que n'éclate une guerre qui verrait l'humanité ramenée à l'état sauvage. Croyez-vous vraiment, quel que soit le but que vous cherchez à atteindre, que cela en vaille le prix?

    Prêterez-vous l'oreille à l'appel de celui qui a délibérément rejeté le choix de la guerre, non sans remporter un succès considérable?

    Quoi qu'il en soit, je vous prie de me pardonner, si j'ai commis une erreur en vous écrivant.

    Je reste votre ami sincère,

    M. K.Gandhi

    "Nous ne pouvons pas souhaiter le succès de vos armes"
    Dix jours plus tard, le 3 septembre, la France et le Royaume-Uni déclarent la guerre à l'Allemagne nazie. Certains nationalistes ultras, comme Subhas Chandra Bose, rejoignent le camp de l'Axe. En parallèle, la Ligue musulmane et nombre des Etats princiers ainsi que plusieurs membres du congrès soutiennent l'effort de guerre britannique.

    Le 24 décembre 1940, Mohandas Gandhi écrit, depuis Wardha, une deuxième lettre à Adolf Hitler:

    Cher ami,

    Que je m'adresse à vous en tant qu'ami n'est pas une simple formalité. Je n'ai pas d'ennemi. Depuis ces trente-trois dernières années, mon entreprise dans l'existence a été d'obtenir l'amitié de toute l'humanité en me liant avec le genre humain, quelle que soit sa race, sa couleur ou sa croyance.

    J'espère que vous aurez le temps et le souhait de savoir ce qu'une bonne portion de l'humanité, qui a en vue de vivre sous l'influence de cette doctrine d'amitié universelle, pense de votre action. Nous n'avons aucun doute sur votre courage et votre dévotion envers votre patrie, nous ne croyons pas non plus que vous êtes le monstre décrit par vos opposants.

    Mais vos écrits et vos déclarations et ceux de vos amis et admirateurs ne laissent aucune place au doute que beaucoup de vos actes sont monstrueux et étrangers à toute dignité humaine, spécialement du point de vue de personnes qui comme moi croient à l'amitié universelle.

    Je veux parler de l'humiliation de la Tchécoslovaquie, du viol de la Pologne et de l'invasion du Danemark. Je suis conscient que votre conception de l'existence vous fait considérer ces actes comme vertueux. Mais nous avons été éduqués depuis notre enfance à les considérer comme des actes déshonorant l'humanité. En conséquence, nous ne pouvons pas souhaiter le succès de vos armes.

    "Une révolte sans armes contre la domination britannique"
    Gandhi poursuit en décrivant sa politique de non-violence et son satyagraha:

    Mais notre position est unique. Nous résistons à l'impérialisme britannique comme au nazisme. S'il existe une différence, c'est une différence de degré. Un cinquième de l'humanité a été placé sous le joug britannique par des moyens qui ne supportent pas l'examen. Notre résistance à cette tutelle ne signifie pas que nous souhaitions du mal au peuple britannique. Nous cherchons à les convertir, et non pas à les vaincre sur un champ de bataille.

    C'est une révolte sans armes contre la domination britannique. Mais que nous les convertissions ou pas, nous sommes déterminés à rendre leur domination impossible par une non-coopération non violente. C'est une méthode par nature indéfendable. Elle est fondée sur la compréhension qu'aucun spoliateur ne peut aboutir à ses fins sans un minimum de coopération volontaire ou involontaire de sa victime.

    Nos dirigeants peuvent avoir nos terres et nos corps, mais pas nos âmes. Ils peuvent les obtenir uniquement par une destruction de tout Indien, homme, femme et enfant. Le fait que l'on ne puisse pas atteindre un tel niveau d'héroïsme et qu'un certain niveau d'atrocités fasse courber l'échine de la révolte est vrai, mais l'argument serait hors sujet.

    Car, si un nombre suffisant d'hommes et de femmes se trouvent en Inde prêts, sans aucune mauvaise volonté à l'égard de leurs spoliateurs, à mettre en jeu leurs vies plutôt qu'à plier le genou devant eux, alors ils auront montré le chemin de la liberté envers une tyrannie de la violence. Je vous demande de me croire lorsque je vous dis que vous trouveriez un nombre inattendu d'hommes et de femmes de cet acabit en Inde. Ils ont eu cet entraînement pendant ces vingt dernières années.

    Nous avons essayé depuis un demi-siècle de nous débarrasser de la domination britannique. Le mouvement pour l'indépendance n'a jamais été aussi fort qu'aujourd'hui. L'organisation politique la plus puissante, je veux parler du Congrès, essaie d'atteindre cet objectif d'indépendance. Nous avons déjà obtenu une bonne part de succès avec un effort non violent. Nous étions en train de tâtonner pour trouver les meilleurs moyens de combattre la violence la plus organisée dans le monde que représente le pouvoir britannique. Vous l'avez défié.

    "Agis ou meurs sans tuer ni faire souffrir"
    Il reste à savoir quel est le pouvoir le plus organisé, l'allemand ou le britannique. Nous savons ce que la tutelle britannique signifie pour nous et pour les races non européennes dans le monde. Mais nous ne voudrions jamais nous défaire de la domination britannique avec l'aide allemande.

    Nous avons trouvé dans la non-violence une force qui, organisée, peut sans nul doute convenir pour lutter contre une combinaison des forces les plus violentes au monde. Dans la technique de non-violence, il n'existe pas, comme je vous l'indiquais, quelque forme de défaite. C'est "agis ou meurs sans tuer ni faire souffrir". Cela peut être mis en oeuvre pratiquement sans argent et bien entendu sans l'aide de la science de destruction qui a atteint un niveau élevé de perfection.

    C'est un grand étonnement pour moi que vous ne constatiez pas qu'elle n'est le monopole de personne. Si ce n'est pas l'Angleterre, ce sera certainement une autre puissance qui perfectionnera votre méthode et vous battra avec vos propres armes. Vous ne laisserez aucun héritage à votre peuple dont il puisse se sentir fier. Il ne peut pas tirer fierté d'un récital de cruautés, aussi ingénieusement organisées qu'elles puissent être.

    Par conséquent, j'en appelle à vous au nom de l'humanité pour arrêter la guerre. Vous ne perdrez rien en présentant tous vos différends avec l'Angleterre devant un tribunal international de votre choix. Si vous gagnez la guerre, cela ne signifiera pas que vous aviez raison. Cela prouvera seulement que votre pouvoir de destruction était plus fort. Alors qu'un avis d'un tribunal impartial montrera autant qu'il est humainement possible qui était dans son droit.

    "Des millions d'Européens dont j'entends le cri muet pour la paix"
    Vous savez que récemment j'ai lancé un appel à tous les Britanniques d'accepter ma méthode de la résistance non violente. Je l'ai fait, car les Britanniques me connaissent comme leur ami, bien que rebelle, tandis que je suis un inconnu pour vous et votre peuple. Je n'ai pas le courage de vous adresser le même appel qu'aux Britanniques. Non qu'il n'ait pas la même force que pour les Britanniques. Mais ma proposition est plus simple, car plus pratique et plus habituelle.

    Durant cette période où les coeurs des peuples d'Europe aspirent à la paix, nous avons suspendu notre propre lutte pacifique. Est-il trop de vous demander de faire un effort pour la paix pendant un temps qui ne signifie rien pour vous personnellement, mais par contre beaucoup pour des millions d'Européens dont j'entends le cri muet pour la paix à mes oreilles habituées à entendre les masses silencieuses?

    J'avais l'intention de lancer un appel conjoint à vous ainsi qu'au Signor Mussolini, dont j'ai eu le privilège de faire la connaissance lorsque j'étais à Rome pour ma visite à Londres en tant que délégué à la Table ronde. J'espère qu'il prendra la présente comme un appel qui lui est aussi adressé.

    Je suis votre ami sincère.

    M. K. Gandhi

    On n'a jamais retrouvé aucune réponse de Hitler."


    LES VIES CACHÉES DE GANDHI, PAR GILLES VAN GRASDORFF. ED. DU CERF, 384P

    l'express
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