Le 10 mai 2018 se tient la 15e édition de sa Journée mondiale : c’est l’occasion de faire le point sur cette pathologie qui concerne environ 5 millions de personnes dans le monde, soit environ 40 000 en France et près de 20 000 au Maroc ou en Algérie. Ce sont pour la plupart (dans neuf cas sur 10 !) des femmes en âge d’avoir des enfants qui sont touchées par ce mal provoqué par une défaillance du système immunitaire qui se retourne contre l’organisme en attaquant les cellules saines.
Ces femmes en souffrent d'autant plus durement au Maghreb que le diagnostic est souvent tardif ou même jamais établi du fait de symptômes très vastes et différents d’une personne à l’autre. La maladie est en effet susceptible de s’attaquer à pratiquement tous les organes. A ce jour, il n'existe pas de traitement curatif.
En 2011, l’association marocaine des maladies auto-immunes et systémiques (AMMAIS) avait alerté l’opinion sur les risques sous-évalués du lupus en particulier lors de la grossesse en organisant sa première manifestation scientifique, la journée de l’auto-immunité, sur le thème central justement de la grossesse. Beaucoup d’efforts paraissent encore actuellement nécessaires à cet égard.
Rappelons que le lupus est considéré, selon les pays, comme une maladie rare ou peu fréquent : les populations d’origine africaine ou asiatique y sont plus sensibles que les Européens. Elle peut aussi atteindre les enfants et les personnes âgées : le lupus pédiatrique est souvent plus sévère avec des atteintes rénales courantes. En fait, il existe plusieurs types de lupus. La forme la plus sévère, le lupus «systémique», s’attaque à de très nombreuses parties du corps (peau, articulations, cœur, poumons, reins, cerveau…) alors que la forme « cutanée » reste bénigne en général en se limitant à la peau.
1/ La maladie aux facettes innombrables
Les manifestations peuvent être très variées : poussées de fièvre inexpliquées, perte de poids, fatigue, sentiment de mal-être, douleurs articulaires / musculaires, lésions cutanées, inflammation de ganglions, troubles de la vision, état dépressif, symptômes psychiatriques …. L'un des symptômes les plus importants est la sensibilité au soleil, qui touche 80 % des patients et se traduit plus ou moins distinctement par de larges taches de peau rouge qui prennent la forme d'un papillon recouvrant le visage, les joues et le nez. Cette éruption peut toucher d'autres parties du corps exposées au soleil, telles que le cou, la partie supérieure de la poitrine et les avant bras. Le nom de la maladie se réfère d’ailleurs à la marque rouge qui apparaît sur le visage du patient et ressemble au masque de carnaval. C'est un signe très important parce que, grâce à cela et avec d'autres critères de diagnostic, nous pouvons distinguer entre le lupus érythémateux et d'autres maladies auto-immunes comme la polyarthrite rhumatoïde ou le syndrome de Gougerot-Sjogren.
Les causes sont elles aussi multiples. Comme les autres maladies auto-immunes, on pense que des facteurs génétiques, hormonaux, environnementaux (une maladie infectieuse comme la mononucléose, des perturbateurs endocriniens, l’exposition aux rayons UV…) se combinent comme dans un puzzle pour la déclencher. En raison de toutes ses multiples facettes, cette pathologie peut faire penser à des centaines d’autres affections.
2/ Un mal déconcertant et imprévisible
Le lupus est aussi traître qu’imprévisible : Calme, caché ou discret pendant des années, il peut s’activer ou ressurgir brutalement et devenir difficilement maîtrisable. Son diagnostic est souvent posé tardivement, 8, 10, 15 ans ou plus après son début ou même jamais. C’est le cas notamment lorsque les manifestations sont peu claires : un patient traité pour de « simples » douleurs articulaires, pendant des années, peut à un moment donné présenter des symptômes plus graves qui doivent alors orienter vers cette maladie. Sa sévérité est fort variable selon les patients et selon les périodes chez un même individu. Certains vivent normalement, tandis que d’autres doivent renoncer à une activité professionnelle. On peut même mourir de ses poussées et de ses complications, en cas de défaillances d’organes (hémorragie cérébrale ou pulmonaire, insuffisance rénale), en particulier lors ou juste après une grossesse qui est une période à très haut risque. D’où l’intérêt d’un diagnostic précoce, notamment grâce aux examens biologiques, un outil d’aide indispensable, pour la recherche de certains auto-anticorps, des substances produites par le système immunitaire et dirigés contre l'organisme lui-même : ce sont eux qui provoquent des réactions inflammatoires et des lésions de divers tissus. Quand la maladie est diagnostiquée, il faut en plus toujours réaliser un bilan de recherche des éventuelles atteintes sur tous les organes.
3/ Une maladie qu’on sait maîtriser maintenant
La prise en charge du lupus a fait d’énormes progrès ces dernières décennies : le taux de survie à 5 ans pour le lupus était en France inférieur à 50 % en 1955 et supérieur à 90 % maintenant. Au Maroc, on n’en est pas encore à ce stade et d’énormes progrès restent à faire du fait de diagnostics tardifs ou jamais faits, notamment à cause du manque de moyens financiers de beaucoup de personnes atteintes. Les traitements actuels ne permettent pas de guérir définitivement mais assurent des rémissions de durées variables avec un confort lui aussi variable. Le traitement de fond repose sur l’hydroxychloroquine (Plaquenil). Celui-ci est parfois insuffisant et, en cas de poussée et selon leur intensité, il faut ajouter un anti-inflammatoire, la cortisone le plus souvent, et des immunosuppresseurs.
En ce qui concerne plus spécifiquement la néphrite lupique, le Cyclophosphamide, le mycophénolate et l’azathioprine sont les plus utilisés pour l’induction de la rémission et la maintenance Pour les atteintes articulaires, l’imagerie moderne a démontré que l’arthrite lupique est une atteinte inflammatoire agressive comme dans la polyarthrite rhumatoïde. Le méthotrexate, l’azathioprine ou le léflunomide sont alors des thérapeutiques recommandées.
L’apparition ces dernières années de nouveaux traitements révolutionnaires, les biothérapies, permet d’envisager des solutions plus décisives dans un avenir relativement proche. La première biothérapie pour le lupus, le Belimubab, a déjà démontré son efficacité à long-terme pour la réponse globale, la diminution des poussées et l’amélioration des scores de qualité de vie
Dr MOUSSAYER KHADIJA الدكتورة خديجة موسيار
اختصاصية في الطب الباطني و أمراض الشيخوخة Spécialiste en médecine interne et en Gériatrie
Présidente de l’Alliance des Maladies Rares au Maroc رئيسة ائتلاف الأمراض النادرة المغرب
Présidente de l’association marocaine des maladies auto-immunes et systémiques (AMMAIS) رئيسة الجمعية المغربية لأمراض المناعة الذاتية و والجهازية
Vice-président du Groupe de l’Auto-Immunité Marocain (GEAIM)
POUR EN SAVOIR PLUS : QELQUES POINTS UTILES A CONNAÎTRE
La grossesse une période à très haut risque au Maroc
Des risques faibles pour l’enfant de contracter la maladie de sa mère
Le lupus médicamenteux : une atteinte réversible
L’éducation thérapeutique, un élément fondamental du bon suivi par le patient
Le lupus méconnu et pourtant fortement médiatisé : Dr House et Selena Gomez
1/ La grossesse une période très critique au Maghreb pour une femme lupique
La grossesse était contre-indiquée, jusqu’aux années 1980, chez la femme atteinte d’un lupus érythémateux disséminé en raison de la forte mortalité maternelle. Depuis des progrès immenses ont été réalisés dans leurs traitements permettant ainsi actuellement de bien réussir un tel projet dans les pays développés, mais toujours sous réserve d’une prise en charge stricte et adéquate. Cette condition n’est pas encore remplie au Maroc où les grossesses conduisent trop souvent à des catastrophes et même au décès de la future mère. Les deux raisons principales en sont l’ignorance de l’état réel de la femme et le coût élevé de cette prise en charge qui nécessite beaucoup de moyens humains et financiers.
Son efficacité nécessite en effet qu’elle se fasse de manière coordonnée au sein d’équipes multidisciplinaires réunissant médecin généraliste de la mère, gynécologue-obstétricien, spécialiste de la maladie auto-immune, pédiatre, cardiologue, biologiste, sage-femme éventuelle ….
Le bilan préconceptionnel est fondamental, il doit d’abord évaluer l’état de la personne et du traitement en cours : certaines situations contre-indiquent momentanément une grossesse comme une hypertension artérielle mal contrôlée, une atteinte rénale évolutive ou encore une poussée de la maladie. La patiente se verra prescrire avant la conception un traitement associant une corticothérapie et de l'aspirine à dose antiagrégante (pour empêcher les caillots de se former et éviter les fausses couches précoces et naissances prématurées). Par ailleurs, certains médicaments utilisés pour soulager le lupus peuvent entraîner des malformations chez le fœtus et doivent être interrompus avant la grossesse.
La grossesse d'une femme lupique prévoit ensuite une surveillance clinique, biologique et échographique adaptée à la maladie : en général, tous les mois jusqu'à 20 semaines de gestation ; puis tous les 15 jours jusqu'à 32 semaines ; et enfin hebdomadaire jusqu'à l'accouchement.
Une poussée lupique est à redouter dans la majorité des grossesses et les risques d'aggravation de la maladie rénale sont augmentés. Cependant, si les mesures de sécurité et des traitements adaptés sont bien respectés, le danger pour la mère et l'enfant est en général limité.
La surveillance ne doit pas surtout pas enfin s’arrêter à l’accouchement : des poussées lupiques et des phlébites peuvent survenir dans les mois qui suivent.
2 / Des risques minimes pour l’enfant de contracter la maladie de sa mère
La transmission d’un lupus, et plus généralement d’une maladie auto-immune, d’une mère à son enfant est exceptionnelle. Une vigilance s’impose néanmoins à l’égard de l’enfant qui aura toujours par nature une prédisposition, même si elle est faible statistiquement, à contracter plus tard d’autres maladies auto-immunes. On observe parfois un lupus néonatal lié à la transmission passive d'auto-anticorps maternels, se traduisant par des signes divers : éruption cutanée, photosensibilité, hépatite, pneumonie, anémie hémolytique, leucopénie ou thrombopénie… et parfois un ralentissement de la conduction électrique du coeur du fœtus, appelé bloc auriculo ventriculaire (BAV). L’éruption néonatale régresse spontanément, car les anticorps de la mère sont progressivement éliminés. En revanche, le ralentissement de la conduction électrique du cœur persiste le plus souvent et peut justifier d’appareiller par un stimulateur (pacemaker) le cœur de l’enfant dans les 1res semaines après l’accouchement. Hormis ce problème, ces manifestations disparaissent habituellement au bout de 6 mois.
3/ Le lupus médicamenteux : une atteinte réversible
Certains médicaments (phénytoïne, primidone, carbamazépine, trimétadione, streptomycine, isoniazide phénothiazines, chlorpromazine, lévopromazine, prométhazienelane, bétabloquants, hydralazine, alpha-méthyl-dopa, pénicilline, tétracycline…) sont susceptibles d’induire parfois, chez des sujets surtout âgés, un «lupus médicamenteux », réversible à l’arrêt du traitement. Ces médicaments donnés chez un lupique sont, par contre, en général sans risque.
4/ L’éducation thérapeutique, un élément fondamental du bon suivi par le patient
Elle porte en particulier sur le respect du calendrier vaccinal (les vaccins « vivants » doivent être évités en raison du risque infectieux qu’ils présentent chez ces patients), la contraception (les pilules oestroprogestatives sont déconseillées au profit des progestatifs), les précautions d’un traitement anticoagulant assez fréquent par antivitamine K concernant les risques d’interaction avec d’autres molécules, la nocivité du tabac, les risques de l’exposition au soleil, la nécessité d’un régime pauvre en sel et limité en glucides en cas de corticothérapie et, enfin, une évaluation régulière, trimestriellement au moins, pour un patient même en phase inactive.
Ces femmes en souffrent d'autant plus durement au Maghreb que le diagnostic est souvent tardif ou même jamais établi du fait de symptômes très vastes et différents d’une personne à l’autre. La maladie est en effet susceptible de s’attaquer à pratiquement tous les organes. A ce jour, il n'existe pas de traitement curatif.
En 2011, l’association marocaine des maladies auto-immunes et systémiques (AMMAIS) avait alerté l’opinion sur les risques sous-évalués du lupus en particulier lors de la grossesse en organisant sa première manifestation scientifique, la journée de l’auto-immunité, sur le thème central justement de la grossesse. Beaucoup d’efforts paraissent encore actuellement nécessaires à cet égard.
Rappelons que le lupus est considéré, selon les pays, comme une maladie rare ou peu fréquent : les populations d’origine africaine ou asiatique y sont plus sensibles que les Européens. Elle peut aussi atteindre les enfants et les personnes âgées : le lupus pédiatrique est souvent plus sévère avec des atteintes rénales courantes. En fait, il existe plusieurs types de lupus. La forme la plus sévère, le lupus «systémique», s’attaque à de très nombreuses parties du corps (peau, articulations, cœur, poumons, reins, cerveau…) alors que la forme « cutanée » reste bénigne en général en se limitant à la peau.
1/ La maladie aux facettes innombrables
Les manifestations peuvent être très variées : poussées de fièvre inexpliquées, perte de poids, fatigue, sentiment de mal-être, douleurs articulaires / musculaires, lésions cutanées, inflammation de ganglions, troubles de la vision, état dépressif, symptômes psychiatriques …. L'un des symptômes les plus importants est la sensibilité au soleil, qui touche 80 % des patients et se traduit plus ou moins distinctement par de larges taches de peau rouge qui prennent la forme d'un papillon recouvrant le visage, les joues et le nez. Cette éruption peut toucher d'autres parties du corps exposées au soleil, telles que le cou, la partie supérieure de la poitrine et les avant bras. Le nom de la maladie se réfère d’ailleurs à la marque rouge qui apparaît sur le visage du patient et ressemble au masque de carnaval. C'est un signe très important parce que, grâce à cela et avec d'autres critères de diagnostic, nous pouvons distinguer entre le lupus érythémateux et d'autres maladies auto-immunes comme la polyarthrite rhumatoïde ou le syndrome de Gougerot-Sjogren.
Les causes sont elles aussi multiples. Comme les autres maladies auto-immunes, on pense que des facteurs génétiques, hormonaux, environnementaux (une maladie infectieuse comme la mononucléose, des perturbateurs endocriniens, l’exposition aux rayons UV…) se combinent comme dans un puzzle pour la déclencher. En raison de toutes ses multiples facettes, cette pathologie peut faire penser à des centaines d’autres affections.
2/ Un mal déconcertant et imprévisible
Le lupus est aussi traître qu’imprévisible : Calme, caché ou discret pendant des années, il peut s’activer ou ressurgir brutalement et devenir difficilement maîtrisable. Son diagnostic est souvent posé tardivement, 8, 10, 15 ans ou plus après son début ou même jamais. C’est le cas notamment lorsque les manifestations sont peu claires : un patient traité pour de « simples » douleurs articulaires, pendant des années, peut à un moment donné présenter des symptômes plus graves qui doivent alors orienter vers cette maladie. Sa sévérité est fort variable selon les patients et selon les périodes chez un même individu. Certains vivent normalement, tandis que d’autres doivent renoncer à une activité professionnelle. On peut même mourir de ses poussées et de ses complications, en cas de défaillances d’organes (hémorragie cérébrale ou pulmonaire, insuffisance rénale), en particulier lors ou juste après une grossesse qui est une période à très haut risque. D’où l’intérêt d’un diagnostic précoce, notamment grâce aux examens biologiques, un outil d’aide indispensable, pour la recherche de certains auto-anticorps, des substances produites par le système immunitaire et dirigés contre l'organisme lui-même : ce sont eux qui provoquent des réactions inflammatoires et des lésions de divers tissus. Quand la maladie est diagnostiquée, il faut en plus toujours réaliser un bilan de recherche des éventuelles atteintes sur tous les organes.
3/ Une maladie qu’on sait maîtriser maintenant
La prise en charge du lupus a fait d’énormes progrès ces dernières décennies : le taux de survie à 5 ans pour le lupus était en France inférieur à 50 % en 1955 et supérieur à 90 % maintenant. Au Maroc, on n’en est pas encore à ce stade et d’énormes progrès restent à faire du fait de diagnostics tardifs ou jamais faits, notamment à cause du manque de moyens financiers de beaucoup de personnes atteintes. Les traitements actuels ne permettent pas de guérir définitivement mais assurent des rémissions de durées variables avec un confort lui aussi variable. Le traitement de fond repose sur l’hydroxychloroquine (Plaquenil). Celui-ci est parfois insuffisant et, en cas de poussée et selon leur intensité, il faut ajouter un anti-inflammatoire, la cortisone le plus souvent, et des immunosuppresseurs.
En ce qui concerne plus spécifiquement la néphrite lupique, le Cyclophosphamide, le mycophénolate et l’azathioprine sont les plus utilisés pour l’induction de la rémission et la maintenance Pour les atteintes articulaires, l’imagerie moderne a démontré que l’arthrite lupique est une atteinte inflammatoire agressive comme dans la polyarthrite rhumatoïde. Le méthotrexate, l’azathioprine ou le léflunomide sont alors des thérapeutiques recommandées.
L’apparition ces dernières années de nouveaux traitements révolutionnaires, les biothérapies, permet d’envisager des solutions plus décisives dans un avenir relativement proche. La première biothérapie pour le lupus, le Belimubab, a déjà démontré son efficacité à long-terme pour la réponse globale, la diminution des poussées et l’amélioration des scores de qualité de vie
Dr MOUSSAYER KHADIJA الدكتورة خديجة موسيار
اختصاصية في الطب الباطني و أمراض الشيخوخة Spécialiste en médecine interne et en Gériatrie
Présidente de l’Alliance des Maladies Rares au Maroc رئيسة ائتلاف الأمراض النادرة المغرب
Présidente de l’association marocaine des maladies auto-immunes et systémiques (AMMAIS) رئيسة الجمعية المغربية لأمراض المناعة الذاتية و والجهازية
Vice-président du Groupe de l’Auto-Immunité Marocain (GEAIM)
POUR EN SAVOIR PLUS : QELQUES POINTS UTILES A CONNAÎTRE
La grossesse une période à très haut risque au Maroc
Des risques faibles pour l’enfant de contracter la maladie de sa mère
Le lupus médicamenteux : une atteinte réversible
L’éducation thérapeutique, un élément fondamental du bon suivi par le patient
Le lupus méconnu et pourtant fortement médiatisé : Dr House et Selena Gomez
1/ La grossesse une période très critique au Maghreb pour une femme lupique
La grossesse était contre-indiquée, jusqu’aux années 1980, chez la femme atteinte d’un lupus érythémateux disséminé en raison de la forte mortalité maternelle. Depuis des progrès immenses ont été réalisés dans leurs traitements permettant ainsi actuellement de bien réussir un tel projet dans les pays développés, mais toujours sous réserve d’une prise en charge stricte et adéquate. Cette condition n’est pas encore remplie au Maroc où les grossesses conduisent trop souvent à des catastrophes et même au décès de la future mère. Les deux raisons principales en sont l’ignorance de l’état réel de la femme et le coût élevé de cette prise en charge qui nécessite beaucoup de moyens humains et financiers.
Son efficacité nécessite en effet qu’elle se fasse de manière coordonnée au sein d’équipes multidisciplinaires réunissant médecin généraliste de la mère, gynécologue-obstétricien, spécialiste de la maladie auto-immune, pédiatre, cardiologue, biologiste, sage-femme éventuelle ….
Le bilan préconceptionnel est fondamental, il doit d’abord évaluer l’état de la personne et du traitement en cours : certaines situations contre-indiquent momentanément une grossesse comme une hypertension artérielle mal contrôlée, une atteinte rénale évolutive ou encore une poussée de la maladie. La patiente se verra prescrire avant la conception un traitement associant une corticothérapie et de l'aspirine à dose antiagrégante (pour empêcher les caillots de se former et éviter les fausses couches précoces et naissances prématurées). Par ailleurs, certains médicaments utilisés pour soulager le lupus peuvent entraîner des malformations chez le fœtus et doivent être interrompus avant la grossesse.
La grossesse d'une femme lupique prévoit ensuite une surveillance clinique, biologique et échographique adaptée à la maladie : en général, tous les mois jusqu'à 20 semaines de gestation ; puis tous les 15 jours jusqu'à 32 semaines ; et enfin hebdomadaire jusqu'à l'accouchement.
Une poussée lupique est à redouter dans la majorité des grossesses et les risques d'aggravation de la maladie rénale sont augmentés. Cependant, si les mesures de sécurité et des traitements adaptés sont bien respectés, le danger pour la mère et l'enfant est en général limité.
La surveillance ne doit pas surtout pas enfin s’arrêter à l’accouchement : des poussées lupiques et des phlébites peuvent survenir dans les mois qui suivent.
2 / Des risques minimes pour l’enfant de contracter la maladie de sa mère
La transmission d’un lupus, et plus généralement d’une maladie auto-immune, d’une mère à son enfant est exceptionnelle. Une vigilance s’impose néanmoins à l’égard de l’enfant qui aura toujours par nature une prédisposition, même si elle est faible statistiquement, à contracter plus tard d’autres maladies auto-immunes. On observe parfois un lupus néonatal lié à la transmission passive d'auto-anticorps maternels, se traduisant par des signes divers : éruption cutanée, photosensibilité, hépatite, pneumonie, anémie hémolytique, leucopénie ou thrombopénie… et parfois un ralentissement de la conduction électrique du coeur du fœtus, appelé bloc auriculo ventriculaire (BAV). L’éruption néonatale régresse spontanément, car les anticorps de la mère sont progressivement éliminés. En revanche, le ralentissement de la conduction électrique du cœur persiste le plus souvent et peut justifier d’appareiller par un stimulateur (pacemaker) le cœur de l’enfant dans les 1res semaines après l’accouchement. Hormis ce problème, ces manifestations disparaissent habituellement au bout de 6 mois.
3/ Le lupus médicamenteux : une atteinte réversible
Certains médicaments (phénytoïne, primidone, carbamazépine, trimétadione, streptomycine, isoniazide phénothiazines, chlorpromazine, lévopromazine, prométhazienelane, bétabloquants, hydralazine, alpha-méthyl-dopa, pénicilline, tétracycline…) sont susceptibles d’induire parfois, chez des sujets surtout âgés, un «lupus médicamenteux », réversible à l’arrêt du traitement. Ces médicaments donnés chez un lupique sont, par contre, en général sans risque.
4/ L’éducation thérapeutique, un élément fondamental du bon suivi par le patient
Elle porte en particulier sur le respect du calendrier vaccinal (les vaccins « vivants » doivent être évités en raison du risque infectieux qu’ils présentent chez ces patients), la contraception (les pilules oestroprogestatives sont déconseillées au profit des progestatifs), les précautions d’un traitement anticoagulant assez fréquent par antivitamine K concernant les risques d’interaction avec d’autres molécules, la nocivité du tabac, les risques de l’exposition au soleil, la nécessité d’un régime pauvre en sel et limité en glucides en cas de corticothérapie et, enfin, une évaluation régulière, trimestriellement au moins, pour un patient même en phase inactive.
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