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« Aquarius » : Espagne, notre lueur PAR CHRISTIANE TAUBIRA

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  • « Aquarius » : Espagne, notre lueur PAR CHRISTIANE TAUBIRA

    Janvier 1939.BARCELONE tombe aux mains des franquistes, auxquels fascistes et nazis ont
    prêté main-forte. Ils sont un million, en noir et blanc sur les photos d’alors, à traverser les
    Pyrénées. Des combattants républicains et surtout des femmes, des enfants, des hommes
    ordinaires, et Antonio Machado, qui repose à Collioure. Ni le choc esthétique du de
    Picasso, ni de Malraux, ni les écrits brûlants de Camus, ni
    de Bernanos, pas plus que les lettres de Simone Weil n’adouciront leur sort. Ils sont
    regroupés, isolés, mal nourris. L’inactivité, le désespoir, les conditions d’hygiène, l’hiver ont raison
    de nombre d’entre eux.
    JANVIER 1939. BARCELONE
    Guernica
    L’Espoir, Les Grands Cimetières sous la
    lune,
    Tandis que le gouvernement pérore, des associations organisent la solidarité. « Du lait pour les
    enfants d’Espagne », disent alors les affiches. La collecte va bon train. Des bénévoles s’activent,
    comme sur l’ aujourd’hui. Ces réfugiés espagnols seraient 600.000 à être restés dans leur
    patrie d’accueil. Qui alléguerait aujourd’hui qu’ils l’aiment moins que ceux qui y naquirent par
    hasard ?
    Aquarius
    Boat people. Deux mots secs. Pour dire l’effarement devant les images. De frêles embarcations,
    surchargées, photographiées de haut, comme perdues au mitan d’une mer sans rivage. En 1975,
    ils viennent de loin, du Vietnam et du Cambodge. Ils échappent aux représailles de fin de guerre
    ou fuient les Khmers rouges du « Kampuchéa démocratique ». Ils sont des dizaines de milliers.
    Cette fois, le gouvernement laisse la Croix-Rouge et le Haut Commissariat des Nations unies pour
    les réfugiés organiser leur accueil en France. D’autres associations viennent à la rescousse.
    Comme sur l’ aujourd’hui. Ces réfugiés vietnamiens et cambodgiens firent ici leur vie et
    leurs enfants. Qui alléguerait que… ?

    La guerre d’Algérie prend un tournant. Décisif. Ils reviennent, les mains nues et pour la plupart
    inconsolables. Ils sont français, certes, mais partis depuis longtemps ou nés là-bas. Ils sont piedsnoirs,
    harkis, d’abord quelques milliers. De Gaulle et Peyrefitte sont inquiets, persuadés que la
    tâche est insurmontable. Où trouver du travail, des logements, des écoles ? Ils seront un million en
    trois ans. Regroupés, maltraités, livrés au froid et à l’inaction. Les services sociaux sont débordés.
    Des bénévoles… comme sur l’ aujourd’hui. Ils ont refait leur vie. Leurs enfants ont grandi.
    Avec des souvenirs, un peu d’amertume, beaucoup de fierté et une grande combativité. Qui
    alléguerait que… ?
    Aquarius
    À l’orée de la décennie 1990, la guerre des Balkans jette sur les routes d’Europe des colonnes
    silencieuses et accablées, invariablement composées d’enfants au regard étonné, de femmes qui
    s’obstinent à rester propres et dignes, d’hommes qui tentent de brider l’humiliation de n’être qu’un
    parmi d’autres dans une foule. Ils sont nombreux à être repartis, dès l’ombre de la paix revenue.
    Il n’est pas question de dire ici qu’il est simple d’accueillir. Il ne s’agit ni d’enjoliver, ni de banaliser,
    ni même de dédramatiser. Ce n’est pas un conte. La population augmenta par pics et il en résulta
    sans doute des pressions sur les services publics, il fallut partager, il y eut des tensions. Mais le
    fait est : la société ne s’est ni effondrée ni même affaiblie. Elle absorba une part du monde et s’en
    épanouit, dans sa langue, sa gastronomie, ses arts, ses artisanats, sa littérature…
    Non, il ne s’agit pas de banaliser. Les époques ne sont pas comparables, les personnes ne sont
    pas interchangeables, les histoires ne sont pas semblables. Il ne s’agit pas de dédramatiser. Oui,
    ce sont des drames qui se déroulent sous nos yeux. Drames de la guerre et des bombardements
    auxquels parfois nous prenons part. Drame des dictatures. Drame de la misère et de la pauvreté.
    Drame des bouleversements climatiques que notre consumérisme accélère. Drame de l’inefficacité
    de nos gouvernements martiaux contre les criminels de la traite des personnes.
    L’Europe avait une occasion d’exister, de retrouver son magistère éthique sur une scène
    internationale pleine de fracas, où prospèrent la crânerie, la fourberie, l’ivresse de l’impunité, le
    désarroi. Elle avait l’opportunité et la capacité de prouver que ses chartes et conventions ne sont
    pas que chiffons de papier. Ce faisant, elle acquérait l’autorité morale pour impulser cette
    urgente et indispensable, dont, avec d’autres,
    Mireille Delmas-Marty a exposé le bien-fondé.
    «
    gouvernance mondiale des mobilités humaines »,
    Au lieu de cela, la panique gagne. La chancelière recule, l’Italie bascule, et chez nous, la parole
    officielle fait des gammes sur la misère du monde après des trémolos sur les personnes sans abri
    et les personnes réfugiées qui, en quelques mois, étaient censées ne plus se trouver à la rue.
    Chez nous encore, des porteparole font dans le marketing de l’oxymore avec la « fermetéhumanité
    ». Chez nous toujours, des ministres font dans l’anglicisme de l’indécence sur le
    shopping et le benchmarking. Quand ce n’est pas carrément le silence… Pendant ce temps, dans

    toute l’Europe, cette impuissance fait la courte échelle aux extrémistes irresponsables et fanfarons.
    Espagne, notre lueur…
    « Jamais dans l’histoire, lorsqu’il fallut accueillir une part du monde, la société ne s’est
    effondrée ni même affaiblie »
    Le Journal du Dimanche - dimanche 17 juin 2018
    The truth is incontrovertible, malice may attack it, ignorance may deride it, but in the end; there it is.” Winston Churchill

  • #2
    Ce bateau a accosté en Espagne. C'est tant mieux.

    Quant au nouveau gouvernement fasciste italien, il a une mémoire courte et oublie que les citoyens italiens reprennent l'exil!:22:

    - Le grand retour des Italiens

    Immigration: En pleine crise politique et migratoire, les Transalpins quittent leur pays, au même niveau que dans les années 60.

    Commençons par les chiffres. Premier constat. Il y a eu, en 2016, près de 20'000 nouveaux arrivants en Suisse contre 9000 départs. Le plus haut score d’immigration nette en provenance de l’Union européenne. Et, encore, ce ne sont là que des années officielles, l’arrivée d’Italiens non déclarée étant, selon les experts, en pleine explosion-.

    24heures.ch

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