« Hadjira, la ferme Ameziane et au-delà » de Claire Mauss-Copeaux aux éditions Média-Plus : L’enfer à vingt ans Spécial
Écrit par Hamid Bellagha
Parution / « Hadjira, la ferme Ameziane et au-delà » de Claire Mauss-Copeaux aux éditions Média-Plus : L’enfer à vingt ans
Peut-on revenir de la ferme Ameziane ? Peut-on repartir de l’horreur ? Peut-on avoir une réminiscence de ses démons, de ses angoisses ? Hadjira n’a pas pu, mais Hadjira a vaincu. Hadjira s’est assombrie, mais Hadjira a souri. Hadjira est morte, mais elle a survécu.
Toute son histoire, toutes ses frayeurs et tous ses silences, Claire Mauss-Copeaux a pu les traduire en un ouvrage portant sur la torture pendant la guerre de Libération, avec une mention particulière pour la sinistre ferme Ameziane, l’alter ego de la villa Susini à Alger.
La ferme Ameziane, c’est au bout de la ville, en bas de la ville, toute proche des cimetières arabe et français, si loin de l’humanité, toute proche de l’enfer, du maelstrom. Longtemps tues, les peurs de Hadjira étaient enfouies dans un coin de sa mémoire violentée. Longtemps, ses proches espéraient un récit de l’engagement de Hadjira pour la cause juste qu’était l’aspiration à l’indépendance d’un pays meurtri et martyrisé pendant plus de 130 années de sang et de larmes. Puis, tel un archange, Mauss-Copeaux s’est penché sur les refoulements de la mémoire de Hadjira, et a ressuscité ce qui était bien caché pendant près de soixante ans. Rompue au devoir de mémoire et aux « interrogatoires » des damnés de la terre qu’étaient les résistants à l’occupation, quand ils tombaient dans les filets de la police française ou de celle des militaires, l’auteure a adouci, peut-être les souffrances de Hadjira, lui proposant un exutoire, un soulagement, un devoir de mémoire.
Ces hommes, droits et beaux…
Et Hadjira a parlé. Elle ne l’a pas fait sous les instruments de ses tortionnaires, mais elle s’est confiée à son mari, à ses enfants, et ses nièces, à travers le livre de Claire Mauss-Copeaux. « Hadjira, la ferme Ameziane et au-delà… » est un témoignage sur l’horreur de la torture érigé en règle à partir de 1955 pendant la guerre d’Algérie. La ferme Ameziane en était la trame, Hadjira et « ces bels hommes droits, beaux, en quittant leurs cellules » y revenaient en loques, traînés par leurs tortionnaires. Il y a déjà eu des essais et des écrits sur la ferme Ameziane, notamment l’excellent ouvrage de Jean Luc Einaudi «La ferme Ameziane», mais celui de Mauss-Copeaux reste profondément humain, un livre-témoignage craintif, anxieux, timide et hésitant. C’est peut-être que pour ça que l’on ne rentre dans le vif du sujet, si Madames Hadjira et Mauss-Copeaux me permettent de m’exprimer ainsi, qu’à la page 94. Avant, c’était un prélude à l’horreur, c’était la belle Hadjira qui vivait au milieu des Français, Hadjira qui travaillait aux PTT, et puis, Hadjira, qui a vu la haine naissante de pieds-noirs promenant des cercueils vides avec des yeux remplis de haine. Un déclic, puis un second, nommé Fadila Saâdane, une autre belle fille gâtée par sa filiation, mais révoltée contre l’injustice. Et puis, presque naturellement, viendra la ferme Ameziane ; la « maison » naturelle de tous ceux qui ont osé remettre en cause un ordre établi. Un terminus pour les rétifs. La gégène, la baignoire, les pendaisons par les pieds et l’humiliation vont secouer l’existence de Hadjira. De plusieurs Hadjira.
Tout sera conté, raconté, rapporté, sans haine, «mais je voudrais bien que mes tortionnaires soient punis », soulignera l’héroïne malgré elle d’une existence meurtrie et d’un destin ravagé.
Mais un destin adouci par une vie meilleure depuis 1962, un mari attentionné, deux enfants merveilleux, et Hadjira qui est toujours là, souriante, « droite et fière » comme ses compagnons d’infortune. Claire Mauss-Copeaux, de son côté, a su nous faire « coller » aux pages de son livre, un livre qui nous raconte une histoire éprouvée, des histoires connues et ravivé une mémoire sélective. La ferme Ameziane, la ferme de l’horreur à vingt ans !
« Hadjira, la ferme Ameziane et au-delà » de Claire Mauss-Copeaux - Edition Média-Plus- 800 DA
REPORTERS.DZ
Écrit par Hamid Bellagha
Parution / « Hadjira, la ferme Ameziane et au-delà » de Claire Mauss-Copeaux aux éditions Média-Plus : L’enfer à vingt ans
Peut-on revenir de la ferme Ameziane ? Peut-on repartir de l’horreur ? Peut-on avoir une réminiscence de ses démons, de ses angoisses ? Hadjira n’a pas pu, mais Hadjira a vaincu. Hadjira s’est assombrie, mais Hadjira a souri. Hadjira est morte, mais elle a survécu.
Toute son histoire, toutes ses frayeurs et tous ses silences, Claire Mauss-Copeaux a pu les traduire en un ouvrage portant sur la torture pendant la guerre de Libération, avec une mention particulière pour la sinistre ferme Ameziane, l’alter ego de la villa Susini à Alger.
La ferme Ameziane, c’est au bout de la ville, en bas de la ville, toute proche des cimetières arabe et français, si loin de l’humanité, toute proche de l’enfer, du maelstrom. Longtemps tues, les peurs de Hadjira étaient enfouies dans un coin de sa mémoire violentée. Longtemps, ses proches espéraient un récit de l’engagement de Hadjira pour la cause juste qu’était l’aspiration à l’indépendance d’un pays meurtri et martyrisé pendant plus de 130 années de sang et de larmes. Puis, tel un archange, Mauss-Copeaux s’est penché sur les refoulements de la mémoire de Hadjira, et a ressuscité ce qui était bien caché pendant près de soixante ans. Rompue au devoir de mémoire et aux « interrogatoires » des damnés de la terre qu’étaient les résistants à l’occupation, quand ils tombaient dans les filets de la police française ou de celle des militaires, l’auteure a adouci, peut-être les souffrances de Hadjira, lui proposant un exutoire, un soulagement, un devoir de mémoire.
Ces hommes, droits et beaux…
Et Hadjira a parlé. Elle ne l’a pas fait sous les instruments de ses tortionnaires, mais elle s’est confiée à son mari, à ses enfants, et ses nièces, à travers le livre de Claire Mauss-Copeaux. « Hadjira, la ferme Ameziane et au-delà… » est un témoignage sur l’horreur de la torture érigé en règle à partir de 1955 pendant la guerre d’Algérie. La ferme Ameziane en était la trame, Hadjira et « ces bels hommes droits, beaux, en quittant leurs cellules » y revenaient en loques, traînés par leurs tortionnaires. Il y a déjà eu des essais et des écrits sur la ferme Ameziane, notamment l’excellent ouvrage de Jean Luc Einaudi «La ferme Ameziane», mais celui de Mauss-Copeaux reste profondément humain, un livre-témoignage craintif, anxieux, timide et hésitant. C’est peut-être que pour ça que l’on ne rentre dans le vif du sujet, si Madames Hadjira et Mauss-Copeaux me permettent de m’exprimer ainsi, qu’à la page 94. Avant, c’était un prélude à l’horreur, c’était la belle Hadjira qui vivait au milieu des Français, Hadjira qui travaillait aux PTT, et puis, Hadjira, qui a vu la haine naissante de pieds-noirs promenant des cercueils vides avec des yeux remplis de haine. Un déclic, puis un second, nommé Fadila Saâdane, une autre belle fille gâtée par sa filiation, mais révoltée contre l’injustice. Et puis, presque naturellement, viendra la ferme Ameziane ; la « maison » naturelle de tous ceux qui ont osé remettre en cause un ordre établi. Un terminus pour les rétifs. La gégène, la baignoire, les pendaisons par les pieds et l’humiliation vont secouer l’existence de Hadjira. De plusieurs Hadjira.
Tout sera conté, raconté, rapporté, sans haine, «mais je voudrais bien que mes tortionnaires soient punis », soulignera l’héroïne malgré elle d’une existence meurtrie et d’un destin ravagé.
Mais un destin adouci par une vie meilleure depuis 1962, un mari attentionné, deux enfants merveilleux, et Hadjira qui est toujours là, souriante, « droite et fière » comme ses compagnons d’infortune. Claire Mauss-Copeaux, de son côté, a su nous faire « coller » aux pages de son livre, un livre qui nous raconte une histoire éprouvée, des histoires connues et ravivé une mémoire sélective. La ferme Ameziane, la ferme de l’horreur à vingt ans !
« Hadjira, la ferme Ameziane et au-delà » de Claire Mauss-Copeaux - Edition Média-Plus- 800 DA
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