C’est de cette façon que la Kabylie accueille chaque annee Tafsut «le printemps»... Bonne annee a tous.
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A quelques heures du rendez-vous fixé pour "sortir à la rencontre du Printemps", l’ambiance festive est perceptible, notamment chez les enfants qui, vêtus de leurs plus beaux habits, sortent avec à la main des petites corbeilles en roseau, en osier ou tout simplement en plastique emplies de gâteries de formes et goûts variés.
Alors que d’habitude la saison hivernale spolie le printemps de ses premiers jours en privant les habitants de leur traditionnelle fête de "Amenzu n tefsut " (Premier jour du printemps), célébrée depuis la nuit des temps, le temps est au beau fixe en cette matinée de vendredi à Ighil Ali et sur l’ensemble de la vallée de la Soummam.
La belle saison, qui selon le calendrier grégorien débute le 26 février, est tant appréciée qu’on la personnifie dans l’expression idiomatique "Amaguer n tefsut " (la rencontre du Printemps). Cela va dans l’ordre naturel des choses sachant que la région est connue pour ses hivers rigoureux, même si ce n’est pas le cas cette année. Le retour des beaux jours et des douces températures ne peut être que source de dénouements et de liesses. Les préparatifs de l’événement ont débuté il y a plusieurs jours déjà et les commerces mettent à la disposition des clients une grande variété de bonbons et de friandises. Ces produits à base de sucre occupent une place prépondérante pendant cette fête. C’est une façon de souhaiter que les jours soient aussi délicieux que le sucre. Séculaire , la célébration d’ " Amenzou n Tefsut " a un tel ancrage social que de nombreuses familles habitant dans les villes sont revenues y prendre part. Sous un ciel bleu azuré, clairsemé de nuages, les paysages montagneux paraissent sereins, enivrants, rassurants et protecteurs. La nature verdoyante et les éblouissantes fleurs blanches des amandiers abondants offrent une image enchanteresse. A quelques heures du rendez-vous fixé pour "sortir à la rencontre du Printemps", l’ambiance festive est perceptible, notamment chez les enfants qui, vêtus de leurs plus beaux habits, sortent avec à la main leurs petites corbeilles en roseau, en osier ou tout simplement en plastique emplies de gâteries de formes et goûts variés.
Les femmes se lèvent tôt et préparent à l’avance le repas pour être libres pendant tout le reste de la journée. Ce repas traditionnel est constitué de couscous et de légumes cuits à la vapeur, le tout mélangé après cuisson. Ce plat dépuratif et revigorant s’appelle "tchiwtchiw" dans les At-Abbas et "Ameqful" ou encore "Aderyis" dans d’autres régions de Kabylie. En général, on préfère cueillir ces légumes dans la nature, donnant ainsi à ce mets une saveur propre à cette fête.
Ce repas est également agrémenté de viande séchée (Acedluh), d’œufs cuits à l’eau (timellalin tuftiyin), ainsi que de graines de fèves (ibawen), de maïs (akbal), de blé (irden) et d’autres céréales cuits également à l’eau. Ces derniers, notamment le blé, symbolise l’abondance.
Saint-Valentin
Aux environs de midi, plusieurs processions de femmes de tous âges sortent dans toute la région en compagnie des enfants et des jeunes gens. L’humeur joyeuse est perceptible sur tous les visages. La même ambiance règne à Tazaiart, Takorabt, Azrou, Ighil Ali et dans tous les villages de la daïra. Il faut souligner qu’Amenzu n’Tefsut représente une sorte de Saint-Valentin, notamment pour les jeunes célibataires. Ce jour-là, on ne lésine point sur les moyens pour séduire. Pour cause, la veille de cette fête les salons de coiffure pour dames sont pris d’assaut par les jeunes filles et les magasins de vêtements féminins enregistrent d’importante ventes comme à l’occasion de chaque fête. Autrefois, les jeunes femmes n’avaient pas la liberté de sortir de chez elles pendant toute l’année et cette fête était pour elles l’occasion propice pour se mettre en valeur et pourquoi pas trouver chaussure à leurs pieds.
Dans le passé, c’étaient seulement les femmes qui animaient cette fête (urar n lxalat) en chantant des chants traditionnels, en tapant sur le “bendir” (tambour) et en battant des mains (aceqqwer, aserfeq). Actuellement, même si la tradition est toujours de mise, on fait appel également aux troupes folkloriques des tambourins (idebbalen) qui signent ces dernières années un retour en force dans la région.
Les défilés de femmes et d’enfants serpentent à travers les sentiers sinueux traversant les champs verdoyants menant vers les lieux et les mausolées traditionnellement visités à l’occasion. De loin s’offre une vue fantastique. Le soleil darde ses rayons, réchauffant le bois humide, les fleurs chamarrées, les lauriers-roses, les pins, les ronces, les romarins et les lavandes, d’où un cocktail de capiteux parfums se libère et vient chatouiller les narines pour exciter l’évasion et la soif d’aimer et de se donner corps et âme à l’autre. Le chant des tambourins, les youyous des femmes et les cris de joie se mêlent au murmure des chants d’oiseaux et au gazouillement des eaux coulant dans la rivière.
Les villageois s’arrêtent dans les mausolées pour implorer les saints vénérés afin que toute l’année soit belle à l’instar du printemps. Les randonneurs du printemps n’oublient désormais plus de s’équiper de leurs camescopes et appareils-photos pour immortaliser l’événement.
Outre le recueillement devant les mausolées, d’autres lieux sont inéluctablement visités. On cite en exemple At Abla (vestige d’un ancien village détruit et dévasté depuis des millénaires et d’où sont originaires les habitants du village Tabouanant) et Taseffayt où fut construite, dit-on, la première maison du village Ighil Ali. Ce rituel, observé chaque année, s’explique sans doute par le besoin de se ressourcer sur la terre des ancêtres. Au cours de cette randonnée voluptueusement épuisantes et qui dure jusqu’à la fin de la journée, les familles se rassemblent pour savourer un repas en famille à même le sol : c’est un moment de plaisir inoubliable.
Signalons que même la Maison de jeunes Mouloud- Kacem du village, dans le cadre de ses journée culturelles et pédagogiques, a décidé d’y mettre du sien en organisant à cette occasion une sortie pour ses élèves au lieudit Tizi Guemden. Enfin, nombreux sont ceux qui souhaitent que l’on fasse de cette fête, à l’instar de Yennayer, des journées de réjouissances et de retrouvailles.
- La depeche de Kabylie
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