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La mort programmée des bibliothèques communales d’Alger

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  • La mort programmée des bibliothèques communales d’Alger

    Rayons clairsemés, étagères poussiéreuses, livres écornés, tables désertées, décoration désuète, ordinateurs inexistants, éclairage blafard, odeur de moisi… Les bibliothèques communales de la capitales nagent en pleine sinistrose.

    Elles flanquent le cafard et ne donnent nullement envie de s’y aventurer. Etat des lieux de quelques bibliothèques où nous nous sommes rendus.

    Fantomatique

    Bibliothèque Ferhat Boussaad. Cette structure est mitoyenne au marché du même nom. L’entrée est glauque. Des cartons de lessive trainent dans le hall. Le brouillamini du souk et les odeurs poissonnières flottent dans les deux salles aménagées dans cette petite bibliothèque communale.

    Les étagères sont à moitié vides. Quelques romans défraîchis : Camus, Baudelaire, Dib… Un mini rayon garni de livres estampillés ‘parascolaires’. Des ouvrages complètement dépassés. « Ils font partie de l’ancien programme scolaire de l’éducation nationale » reconnait la bibliothécaire. La salle de lecture est hyper bruyante à cause de la proximité du marché Meissonnier. Impossible de s’y concentrer une seconde. Les étagères prennent la poussière, l’éclairage est blafard et le parquet s’est fait la malle. A l’ère du numérique, aucune trace d’ordinateur. Une bibliothèque triste, fantomatique et oppressante que nous nous dépêchons de quitter.

    Encore en vacances !

    En 2012, une bibliothèque a été inaugurée dans le quartier de la Robertseau au Telemly. Baptisée du nom du célèbre écrivain Mouloud Feraoun, la structure se situe dans un endroit calme. La façade en verre laisse présager d’un espace culturel ludique et riche en ouvrages. En passant la grille d’entrée, nous traversons un petit jardin verdoyant.

    A notre grande surprise, la porte est fermée. Pourtant, c’est un jour de semaine et nous sommes en début d’après-midi. La bibliothèque Mouloud Feraoun semble plongée dans un profond coma. Par la façade vitrée, le gardien nous aperçoit. Il nous informe par la fenêtre du premier étage, que la bibliothèque est toujours en vacances et qu’il ne connaît pas la date de réouverture.

    Nous sommes pourtant le 17 septembre et la rentrée scolaire a eu lieu depuis deux semaines déjà. Le gardien consent à nous faire le tour du propriétaire. Il nous explique que des cours de musique, de danse, et de peinture sont prodigués aux enfants mais qu’il n’y a pas encore d’enseignants disponibles. A l’étage, nous découvrons la salle de lecture. Elle est assez spacieuse mais une odeur de renfermé et de moisi flotte dans l’air.

    Quelques romans de littérature française, une poignée de livre en arabe, un ersatz de contes pour enfants et c’est tout. Le gardien soutien que les livres n’ont pratiquement jamais été consultés par les enfants « Ce sont surtout les lycéens en classe de terminale qui viennent effectuer leurs révisions ici, à l’approche des examens ».

    Pour le moment, et à 15 jours de la rentrée, la bibliothèque Mouloud Feraoun prolonge ses vacances sous le regard de l’auteur du ‘Fils du pauvre’ dont le portrait trône dans le hall d’entrée.

    Mort programmée

    El Biar. Le Caid. Les anciens se souviennent de cette riche bibliothèque située sous la barre d’immeuble du quartier ‘le Caid’. Les étagères et les rayons étaient riches d’ouvrages en tous genres : littérature, poésie, nouvelles, ouvrages spécialisés, livres pour enfants (bibliothèque rose, verte…), un vrai sanctuaire pour les amoureux des livres. Une bibliothèque communale accueillante où on pouvait s’installer pour lire et travailler dans un silence religieux.

    Après avoir été transformé, dans les années 90, en cyber café puis en fast food, la bibliothèque du Caid a mis la clef sous le paillasson. Certes le fond documentaire où, ce qu’il en reste, a été déménagé dans l’ancienne église d’El Biar transformée en bibliothèque mais cet espace cher au cœur des El Biarois tombe en décrépitude depuis qu’il a fermé ses portes.

    A l’heure où les espaces culturels font cruellement défaut, un appel est lancé par les riverains pour la réhabilitation de cette ancienne bibliothèque.

    Bouffée d’oxygène

    Belle surprise en revanche du côté du Telemly. Une ruelle en pente (la rue des Fidayines) et là, soudain, une villa ombragée datant de l’époque coloniale. La bibliothèque ‘Les Palmiers’ (ex- CCU : Centre Culturel Universitaire) gérée anciennement par les sœurs blanches, accueille les enfants entre 6 et 12 ans pour faire leurs devoirs et profiter de cours de soutien en arabe, français et anglais. Il y a quatre salles en tout. Deux d’entre elles sont situées dans un jardin paisible.

    Viviane Freire (missionnaire religieuse âgée 31 ans) est brésilienne. Elle fait partie d’un groupe de missionnaires chrétiens et vit à Alger depuis 5 ans. « Je travaille dans cette bibliothèque depuis 3 ans. Avant, c’était les sœurs blanches qui vivaient ici. Elles sont parties à présent. La bibliothèque les Palmiers accueille une centaine d’enfants des quartiers limitrophes. Le prix de l’inscription est symbolique : 2500 da par trimestre. Nous disposons de deux salles de soutien scolaire où des enseignants bénévoles prodiguent des cours aux enfants ».

    La bibliothèque ‘Les Palmiers’ est ouverte deux fois par semaine. Mardi (13 h 30- 17h), Samedi (10h 30- midi). Les livres pour enfants proviennent essentiellement de dons de particuliers (bandes dessinées, contes, …). « Toute aide qui pourrait enrichir nos étagères serait la bienvenue » ajoute Viviane.

    Les bibliothèques communales de la capitale ont besoin de sang neuf. Nouveaux ouvrages, ordinateurs, espaces moins austères. Donner le goût de la lecture s’apprend dès le plus jeune âge. Créer des espaces de travail accueillants et agréables n’est pas sorcier. Il suffit juste de le vouloir.

    Par: Kenza Adil
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