Les abeilles exposées au glyphosate voient une partie des bactéries bénéfiques de leurs intestins disparaître, ce qui les rend plus vulnérables aux infections mortelles causées par des bactéries nocives, selon les travaux de biologistes américains.
Le glyphosate, le principal ingrédient actif du Roundup, l’herbicide le plus utilisé sur la planète, est commercialisé depuis 1974 par la multinationale Monsanto. L’entreprise est passée aux mains de la pharmaceutique Bayer en septembre 2016.
Le glyphosate pénètre dans les organes de la plante et se répand partout dans celle-ci par la sève, laquelle passe par tous les points de croissance, jusqu’aux feuilles et aux racines.
Comme le glyphosate interfère avec une enzyme importante présente dans les plantes et les microorganismes, mais pas chez les animaux, on a longtemps pensé qu'il n'est pas toxique pour ces derniers, y compris les humains et les abeilles.
En 2015, toutefois, des recherches menées par le Centre international de recherche sur le cancer ont montré que la substance comporte plusieurs risques pour la santé. Elle a d’ailleurs depuis a été classée comme génotoxique (dommageable pour l’ADN), cancérigène pour l’animal et « cancérigène probable » pour l’humain.
Des abeilles affaiblies
Des travaux réalisés récemment par une équipe de l’Université du Texas à Austin montrent ainsi que l'élément actif du Roundup affaiblit la flore bactérienne intestinale des abeilles.
Les biologistes Erick Motta, Kasie Raymann et Nancy Moran, de l’Université du Texas, pensent que leurs travaux apportent une preuve claire que le glyphosate contribue au déclin des colonies d’abeilles mellifères et des abeilles indigènes partout sur la planète.
C’est qu'en modifiant le microbiome intestinal de l'abeille (l'écosystème des bactéries vivant dans le tube digestif de l'abeille, y compris celles qui la protègent des bactéries nocives), le glyphosate compromet sa capacité à combattre les infections et à s'adapter aux changements de son environnement.
Une réalité qui contribuerait « à l'accroissement largement inexpliqué de la mortalité des colonies d'abeilles », selon les chercheurs.
Dans leur étude, les chercheurs ont exposé les abeilles aux concentrations de glyphosate présentes dans les champs, les cours d’eau et les bords de route.
Ils avaient marqué le dos des abeilles avec des points de couleur pour être en mesure de les suivre et de les recapturer.
Après trois jours seulement, les chercheurs ont établi que l'herbicide diminuait le microbiote intestinal en réduisant la présence de quatre des huit espèces dominantes de bactéries saines chez les abeilles exposées.
L'espèce bactérienne la plus durement atteinte, la Snodgrassella alvi, est un microbe essentiel qui aide les abeilles à transformer les aliments et à se défendre contre les agents pathogènes.
Autre constat : les abeilles dont les microbiomes intestinaux avaient été altérés étaient beaucoup plus susceptibles de mourir lorsqu'elles étaient exposées plus tard à un pathogène opportuniste, comme la bactérie Serratia marcescens, comparativement aux abeilles dont les intestins étaient sains.
La Serratia est un pathogène opportuniste répandu qui infecte les abeilles partout sur le globe.
Environ la moitié des abeilles dont le microbiome était sain étaient encore en vie huit jours après l'exposition à l'agent pathogène, alors qu'environ un dixième seulement des abeilles dont le microbiome avait été modifié par l'herbicide étaient encore en vie.
Il est établi depuis longtemps que, chez l’humain comme chez les animaux, un microbiome intestinal stable permet de mieux résister à l'infection par des envahisseurs opportunistes.
Un appel à la prudence
Ces résultats militent, selon les scientifiques, pour une très grande prudence dans l’utilisation du Roundup. Selon eux, les agriculteurs, les paysagistes et l’ensemble de la population devraient éviter de pulvériser des herbicides à base de glyphosate sur les plantes à fleurs que les abeilles sont susceptibles de visiter.
Le détail de ces travaux est publié dans les Proceedings of the National Academy of Sciences (en anglais).
En 2017, l’Agence canadienne d’inspection des aliments (ACIA) annonçait qu’elle avait découvert des traces de glyphosate dans le tiers d’un échantillonnage de 3200 produits alimentaires testés. L'ACIA précise toutefois que les taux détectés sont inférieurs aux normes prescrites pour la consommation humaine.
Un texte d'Alain Labelle
ici Radio-Canada
Le glyphosate, le principal ingrédient actif du Roundup, l’herbicide le plus utilisé sur la planète, est commercialisé depuis 1974 par la multinationale Monsanto. L’entreprise est passée aux mains de la pharmaceutique Bayer en septembre 2016.
Le glyphosate pénètre dans les organes de la plante et se répand partout dans celle-ci par la sève, laquelle passe par tous les points de croissance, jusqu’aux feuilles et aux racines.
Comme le glyphosate interfère avec une enzyme importante présente dans les plantes et les microorganismes, mais pas chez les animaux, on a longtemps pensé qu'il n'est pas toxique pour ces derniers, y compris les humains et les abeilles.
En 2015, toutefois, des recherches menées par le Centre international de recherche sur le cancer ont montré que la substance comporte plusieurs risques pour la santé. Elle a d’ailleurs depuis a été classée comme génotoxique (dommageable pour l’ADN), cancérigène pour l’animal et « cancérigène probable » pour l’humain.
Le saviez-vous?
La disparition des abeilles est une réalité mondiale.
Des pertes sont recensées depuis près de 20 ans.
L’Amérique du Nord est particulièrement touchée, et au Canada, les apiculteurs ont perdu en moyenne 25 % de leurs abeilles.
L’Ontario est la province la plus touchée : en 2014, les pertes s’élevaient à 58 %.
Le Québec n’est pas épargné; la mortalité est deux à trois fois plus élevée qu’auparavant.
La disparition des abeilles est une réalité mondiale.
Des pertes sont recensées depuis près de 20 ans.
L’Amérique du Nord est particulièrement touchée, et au Canada, les apiculteurs ont perdu en moyenne 25 % de leurs abeilles.
L’Ontario est la province la plus touchée : en 2014, les pertes s’élevaient à 58 %.
Le Québec n’est pas épargné; la mortalité est deux à trois fois plus élevée qu’auparavant.
Des travaux réalisés récemment par une équipe de l’Université du Texas à Austin montrent ainsi que l'élément actif du Roundup affaiblit la flore bactérienne intestinale des abeilles.
Les biologistes Erick Motta, Kasie Raymann et Nancy Moran, de l’Université du Texas, pensent que leurs travaux apportent une preuve claire que le glyphosate contribue au déclin des colonies d’abeilles mellifères et des abeilles indigènes partout sur la planète.
C’est qu'en modifiant le microbiome intestinal de l'abeille (l'écosystème des bactéries vivant dans le tube digestif de l'abeille, y compris celles qui la protègent des bactéries nocives), le glyphosate compromet sa capacité à combattre les infections et à s'adapter aux changements de son environnement.
Une réalité qui contribuerait « à l'accroissement largement inexpliqué de la mortalité des colonies d'abeilles », selon les chercheurs.
"Nous avons besoin de meilleures lignes directrices pour l'utilisation du glyphosate, surtout en ce qui concerne l'exposition des abeilles, parce qu'à l'heure actuelle, les lignes existantes laissent croire que les abeilles ne sont pas menacées par l'herbicide."
Erick Motta, auteur principal
Erick Motta, auteur principal
Le saviez-vous?
Les néonicotinoïdes, des insecticides dont les effets sur le système nerveux central de certains insectes sont documentés, étaient à ce jour les seuls associés au syndrome d'effondrement des colonies d’abeilles. Ils sont d’ailleurs interdits dans plusieurs pays, notamment en Europe. Le Canada prend des mesures pour éliminer progressivement leur utilisation à partir de 2021.
Les néonicotinoïdes, des insecticides dont les effets sur le système nerveux central de certains insectes sont documentés, étaient à ce jour les seuls associés au syndrome d'effondrement des colonies d’abeilles. Ils sont d’ailleurs interdits dans plusieurs pays, notamment en Europe. Le Canada prend des mesures pour éliminer progressivement leur utilisation à partir de 2021.
Ils avaient marqué le dos des abeilles avec des points de couleur pour être en mesure de les suivre et de les recapturer.
Après trois jours seulement, les chercheurs ont établi que l'herbicide diminuait le microbiote intestinal en réduisant la présence de quatre des huit espèces dominantes de bactéries saines chez les abeilles exposées.
L'espèce bactérienne la plus durement atteinte, la Snodgrassella alvi, est un microbe essentiel qui aide les abeilles à transformer les aliments et à se défendre contre les agents pathogènes.
Autre constat : les abeilles dont les microbiomes intestinaux avaient été altérés étaient beaucoup plus susceptibles de mourir lorsqu'elles étaient exposées plus tard à un pathogène opportuniste, comme la bactérie Serratia marcescens, comparativement aux abeilles dont les intestins étaient sains.
La Serratia est un pathogène opportuniste répandu qui infecte les abeilles partout sur le globe.
Environ la moitié des abeilles dont le microbiome était sain étaient encore en vie huit jours après l'exposition à l'agent pathogène, alors qu'environ un dixième seulement des abeilles dont le microbiome avait été modifié par l'herbicide étaient encore en vie.
Il est établi depuis longtemps que, chez l’humain comme chez les animaux, un microbiome intestinal stable permet de mieux résister à l'infection par des envahisseurs opportunistes.
"Si vous perturbez une communauté bactérienne stable, vous êtes plus vulnérable à cette invasion d'agents pathogènes."
Nancy Moran
Nancy Moran
Ces résultats militent, selon les scientifiques, pour une très grande prudence dans l’utilisation du Roundup. Selon eux, les agriculteurs, les paysagistes et l’ensemble de la population devraient éviter de pulvériser des herbicides à base de glyphosate sur les plantes à fleurs que les abeilles sont susceptibles de visiter.
Le détail de ces travaux est publié dans les Proceedings of the National Academy of Sciences (en anglais).
En 2017, l’Agence canadienne d’inspection des aliments (ACIA) annonçait qu’elle avait découvert des traces de glyphosate dans le tiers d’un échantillonnage de 3200 produits alimentaires testés. L'ACIA précise toutefois que les taux détectés sont inférieurs aux normes prescrites pour la consommation humaine.
Un texte d'Alain Labelle
ici Radio-Canada
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