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Le rire en islam

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  • Le rire en islam

    Tout comme celle du Prophète, la représentation du Prince à l’époque classique dévoile une autre attitude à l’égard du rire. Le rapport à l’humour du calife infléchit en effet l’image mythique et quasi mystique que l’on se fait aujourd’hui de cette autorité politique. Si les théologiens insistent sur l’austérité et le rejet de toute forme de divertissement chez le calife, ce dernier n’apparaît pas si sobre dans les textes des lettrés. Certains discours religieux à caractère radical , voulant « réincarner » l’Islam des origines, ne cessent d’esquisser un portrait idéalisé du calife au point de le déformer, ainsi qu’en témoigne tragiquement depuis l’établissement de « l’État islamique » le prétendu calife al-Baġdādī. Pièce maîtresse de cette entreprise, le calife est présenté comme un homme profondément pieux, sérieux à tout instant et abhorrant toute forme de plaisanterie. Sa vie n’est que prière et guerre sainte pour défendre l’orthodoxie et conquérir de nouveaux territoires.


    Mais en réalité, rares sont les califes qui ont refusé la légèreté et l’amusement. Quelle que soit l’époque (débuts de l’Islam, période omeyyade ou abbasside), l’humour est une constante de la vie califale et du quotidien princier. Les dirigeants étaient conscients de la nécessité d’un équilibre entre les affaires de la cité et les nécessités de l’âme. D’où la quête d’un juste milieu entre sérieux et légèreté. Pour les Princes, cette dualité était un principe vital. Le calife ‘Alī b. abī Ṭālib, oncle et gendre du Prophète, disait : « Il n’y a pas de mal à s’adonner à la plaisanterie car elle libère l’homme de l’austérité »


    Les califes omeyyades sont les premiers à mettre véritablement en pratique cette approche de l’existence. Ils plaisantaient, s’entouraient d’esclaves-chanteuses (qayna) et de poètes pour écouter des anecdotes, des historiettes et des odes. Même le gouverneur le plus puissant de l’époque omeyyade, pourtant connu pour son humeur maussade et sa sévérité, ne pouvait s’empêcher de rire :
    On rapporte que Ḥağğāğ était sorti, un jour, en promenade. Ayant fini de se promener, et ses compagnons s’étant trouvés éloignés de lui, il se retrouva seul tout d’un coup face à un cheikh des Banū ‘Iğl. « Eh ! Cheikh ! Que penses-tu de Ḥağğāğ ? – L’Irak n’a jamais eu pire gouverneur que lui, que Dieu le Très-Haut l’enlaidisse lui et celui qui l’a nommé ! – Tu sais qui je suis misérable ? Je suis Ḥağğāğ ! » Alors le cheikh de répliquer : « Et moi, tu sais qui je suis ? – Non. – Je suis un fou des Banū ‘Iğl. Je suis en crise deux fois par jour. » Ḥağğāğ éclata de rire et lui fit donner un présent. (Le Livre de l’humour arabe, op. cit., p. 43, trad. de ’Aḥlā l-nawādir wa l-ṭarā’if)


    Avant d’être un calife, le vicaire de Dieu sur terre est d’abord, comme tout mortel, un homme qui rit et qui pleure, s’amuse et se morfond, se réjouit et se lamente. Instaurée par les premiers califes, qui ont côtoyé le Prophète, une tradition du calife bon vivant, d’humeur joviale et enclin à la plaisanterie et à l’humour, a été perpétuée jusqu’à l’abolition du califat au début du XXe siècle. Le rire est constitutif de l’identité même de la fonction califale. À l’époque médiévale, rire est d’abord le propre du calife.

    Source: laviedesidees.fr
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